08/Dec/2013 MAISON GéNéRALE

André Lanfrey

Dans plusieurs publications récentes1 , le F. Agustín Carazo, ancien Postulateur général, a travaillé sur les statues mariales de l’Institut et tout spécialement sur celle de « la Bonne Mère », statuette en plâtre moulé de Vierge à l’enfant, haute de 75 cm environ, soigneusement restaurée2 et aujourd’hui conservée à Rome. Dans ces textes il nous rappelle que cette statue figurait probablement à l’Hermitage dès 1824 dans « la chapelle des bois » et même avant, à La Valla, dans la chambre du P. Champagnat. Remplacée ensuite par des statues plus grandes et sans doute davantage en lien avec le goût de l’époque, elle semble avoir été quelque peu oubliée, même si le F. François mentionne sa présence à St Genis-Laval dans la chambre qu’occupait3 le F. Jean-Baptiste4 .  Elle figure encore en 1882 sur un portrait de Champagnat écrivant à sa table de travail, peint par le F. Wulmer, un frère belge5 . La statue a ensuite fait partie des déménagements de la maison-mère : en 1903 à Grugliasco, en 1939 à Saint Genis-Laval et enfin à Rome en 1961. C’est là, dans le local des archives, que le F. Agustín Carazo, cherchant des documents, la découvre par hasard dans un sac en février 1982. Il relate ensuite l’histoire de la « résurrection » de cette statue qui reçoit le nom de « Bonne Mère » et que les reproductions photographiques rendent populaire parmi les Frères Maristes. Un frère brésilien, Francisco das Chagas Costa Ribeiro, auteur d’une thèse de mariologie à Rome en 1988, signale que le modèle de cette statue de plâtre se trouve dans la cathédrale de Rouen, sous le nom de Vierge du Vœu 6.

Une seconde statue de « la Bonne Mère », grossièrement peinte, se trouvant toujours à l’Hermitage, un frère de la Province de Castille (Esteban Martín) élabore un moule à partir d’elle et ainsi se multiplient les statues de plâtre, mais aussi de bois, de terre cuite ou d’autres matériaux, de diverses tailles, tout spécialement en Amérique latine. Néanmoins, cette représentation ne semble guère avoir débordé du monde des Frères Maristes.

DEUX STATUES ORIGINELLES DE « LA BONNE MÈRE » ?

Le F. Carazo a donc su nous donner un historique très solide de l’histoire de la statue de « La Bonne Mère » chez les Frères Maristes qui a permis en quelque sorte une résurrection de cette pièce importante de notre patrimoine spirituel primitif. Je pense néanmoins qu’il sous-estime l’importance de la statue toujours présente à l’Hermitage qui, à son avis, est nettement plus petite que celle de Rome et serait d’époque plus tardive. Il émet donc l’hypothèse qu’elle aurait été acquise après 1860 par le F. François revenu à l’Hermitage.

A mon avis, cette statue serait à peu près contemporaine de celle de Rome. Mais l’essentiel de mon propos étant de compléter le travail historique du F. Agustín Carazo, je présenterai la discussion sur ce point particulier à la fin de mon article.

LA VIERGE DE LECOMTE (1777)

La Vierge du vœu de Rouen est une statue de marbre de taille normale (environ 1 m 60) placée aujourd’hui dans la chapelle Sainte Marguerite, l’une des nombreuses chapelles latérales de la nef de la cathédrale de Rouen en Normandie. Elle repose sur un cube de pierre placé sur un autel à la place du tabernacle, sur lequel est gravée la formule : « Nostra clemens, accipe vota » (Notre clémence, reçois nos vœux)7 . Cette inscription confirme le nom traditionnel donné à cette statue : « la Vierge du vœu ».

Sculptée par Félix Lecomte, elle a été offerte à la cathédrale de Rouen vers 1775 par le cardinal-archevêque Mgr. de la Rochefoucauld. Elle se caractérise par un trait original : l’enfant Jésus suce son index. Mais il faut insister sur le fait que cette statue n’est pas isolée : le devant de l’autel porte un bas relief du même sculpteur présentant Jésus mort pleuré par Marie et les saintes femmes.

D’après le Dictionnaire des artistes de l’École française au XIXe siècle Félix Lecomte est né à Paris en 1737 et mort en 1817. En 1764 il remporte le grand prix de sculpture, et en 1771 il est reçu membre de l’ancienne Académie de peinture et de sculpture. Il a été en outre professeur à l’Académie de sculpture et membre de l’Académie des Beaux-Arts. Sa statue de la Vierge et le bas relief de Rouen comptent parmi ses œuvres majeures.

LE JUBÉ MEDIEVAL ET LA PREMIÈRE VIERGE DU VŒU

Cet autel de la Vierge du vœu n’est pas le premier érigé sous ce vocable et il n’est pas à son emplacement primitif. En effet, il existait à Rouen, comme dans la plupart des cathédrales médiévales, un jubé isolant le chœur de la nef. Sur celui-ci, certainement de style gothique, Jean-François Pommeraye8 donne, à la fin du  XVIIe siècle les détails suivants :

« Le jubé qui fait la clôture du chœur a été enrichi de deux magnifiques autels d’une très riche sculpture, du crucifix et d’autres ornements de menuiserie tous battus en or […]. L’autel du vœu a été fait des deniers de la fabrique. J’apprens [sic], des mémoires d’un particulier qui a écrit ce qu’il avait veu, que cet autel de la Vierge fut achevé à la fin du mois de mars 1639 […] que le 26 avril […] cet autel fut consacré par M. François de Harlay l’ancien qui y mit des reliques de S. Paul apôtre et de St Nicaise. Il a été appelé le vœu à cause d’une grande peste qui affligeoit depuis longtemps la ville de Rouen ; ce qui obligea d’avoir recours à la miséricorde de Dieu. »

L’auteur ajoute que : « Le principal ornement de cet autel du vœu est l’image de Notre Dame faite d’albâtre qui fut donnée environ l’an 1357 par un chanoine nommé François Le Tourneur. » […] « L’autel de Sainte Cécile qui est à côté de celui du vœu est célèbre à cause de la confrairie ou puy de cette sainte où les musiciens s’assemblent tous les ans pour solenniser sa fête ». […] « J’apprens de quelques mémoires que le 23 avril 1642 cet autel fut achevé & les deux images posées »9 . Pour commémorer l’événement, une procession a lieu le 20 septembre et une lampe brûle devant l’autel de la Vierge.

Donc, une Vierge médiévale, probablement déjà présente dans la cathédrale, est établie en 1643 comme « Vierge du vœu » sur le jubé médiéval, en compagnie de Ste Cécile qui y figurait certainement déjà.

UN SECOND JUBÉ ET UNE SECONDE VIERGE DU VŒU

Sans doute parce que ce jubé et sa statuaire paraissent trop « gothiques » ils sont remplacés par un jubé de style classique édifié entre 1773 et 1778 sur les plans de l’architecte rouennais Mathieu Lecarpentier, composé d’un portique ionique portant un Christ entre la Vierge et saint Jean, couronné de balustres en bronze et cassolettes (vases décoratifs). Il abrite alors deux autels latéraux dédiés à la Vierge (statue et devant d’autel de Lecomte) et à Sainte Cécile. Cette modernisation du jubé n’est donc que relative : Sainte Cécile et la Vierge du vœu en sont toujours des pièces majeures.

Le jubé du XVIIIe siècle est à son tour démoli en 1884 mais ses statues sont préservées : celle de Ste Cécile, avec son autel et le bas-relief qui l’orne, œuvres de Clodion, sont aujourd’hui relégués dans la chapelle St Nicolas10 tandis que la Vierge, son autel et le bas-relief, œuvres de Félix Lecomte, sont placés dans la chapelle Ste Marguerite. Deux des six colonnes du jubé sont encore présentes dans la cathédrale : elles encadrent une des portes latérales11 . Il semble néanmoins qu’au XIXe siècle le sens de la dévotion à la Vierge du vœu se soit modifié : une tradition non vérifiée mais très plausible prétend que c’est devant cette statue que les nouveaux prêtres du diocèse se seraient consacrés à Marie avant de rejoindre leurs paroisses.

Il y a donc eu à Rouen deux Vierges du vœu et deux jubés. Rien ne semble resté de la première statue et du premier jubé mais il nous reste des représentations iconographiques du second jubé ; et l’autel de la seconde Vierge du vœu a été soigneusement restauré dans un emplacement nouveau.

UNE STATUE INSCRITE DANS UNE TRADITION NORMANDE ?

Même si nous ignorons la facture de la statue médiévale établie en 1642 comme Vierge du vœu, nous pouvons supposer que Lecomte a dû inscrire son œuvre dans une tradition vénérable et en aurait donc gardé des traits caractéristiques majeurs parmi lesquels l’enfant Jésus, placé entre les bras de sa mère et suçant son doigt.

L’hypothèse n’est pas tout à fait gratuite car il existe un antécédent iconologique dans la même zone culturelle : la Vierge de Valmont, statuette d’ivoire de 41 cm de haut, de la fin du XV° siècle, conservée dans l’abbaye de Valmont, en Normandie, jusqu’à la Révolution. L’original est déposé actuellement au musée des Antiquités de Seine-Maritime (Rouen)12 . Le commentaire qui accompagne cette statue13 est extrêmement intéressant :

« La Vierge est debout, le visage penché vers son fils qu’elle tient allongé dans ses deux bras. Elle est vêtue d’une longue robe ajustée au décolleté arrondi. »14 […] « L’enfant potelé, les cheveux bouclés, est enveloppé dans un lange d’où émerge son torse nu. L’expression triste de la Vierge, qui jette un regard mélancolique sur son fils car elle sait quel sera son destin, est le reflet de la sensibilité du XVe siècle, plus apte à saisir l’aspect douloureux de la vie du Christ et à en restituer l’image. » […] « Le geste rare de l’enfant qui met deux doigts dans sa bouche correspond au besoin de rapprocher le monde des hommes de celui de Dieu, de rendre plus familier le monde divin. »

Habit mis à part, cette description correspond parfaitement à la Vierge de Lecomte. Il suffit d’ailleurs de comparer la statue du XVe siècle et celle de Lecomte pour se demander si celui-ci n’a pas simplement modernisé un modèle iconographique antérieur, dont la Vierge de Valmont serait un des échantillons.

Cette « modernisation » est manifeste dans le vêtement de la Vierge : celle de Valmont, selon la tradition médiévale, présente d’amples plis cachant largement le corps, tandis que celle de Lecomte suit la tradition antique, le vêtement largement plaqué révélant le corps plus qu’il ne le cache. Le voile sur la tête modère partiellement cette impression de statue antique en la rattachant à une représentation classique de la Vierge. Quant à l’Enfant Jésus, encore quelque peu homme en miniature et partiellement vêtu dans la statue de Valmont, il apparaît comme un beau bébé à peu près nu chez Lecomte.

PERMANENCE DU MESSAGE THÉOLOGIQUE ?

On serait tenté de considérer que, dans les deux statues, le message religieux, qui repose sur le contraste entre la mélancolie du visage de la mère et le charme de l’enfant, est largement implicite et donc que la Vierge de Valmont témoignerait d’un certain affadissement religieux de la fin du gothique, celle de Lecomte, de son côté, paraissant assez typique de la sensibilité du XVIIIe siècle qui a redécouvert la femme et l’enfant mais n’exprime guère de sentiment religieux profond.

Néanmoins, pour la Vierge de Lecomte le message théologique est transparent si l’on tient compte du bas-relief du devant d’autel représentant la vénération du Christ mort par les saintes femmes, qui paraît d’ailleurs s’inspirer du thème iconographique de la pietà . Ainsi, statue et bas-relief résument l’histoire du salut : Incarnation et Rédemption.

L’enfant, qui suce son index et non son pouce, pourrait même être interprété théologiquement puisque l’index est le doigt qui, posé sur les lèvres, signifie la volonté de faire silence. Serait donc évoqué ici le silence du Verbe incarné. Auquel cas, la figure du Christ-enfant rejoindrait le texte de Philippiens 2,6-11 : « Lui, de condition divine… s’anéantit lui-même… devenant semblable aux hommes »… Mais il faudrait des sources explicites pour étayer une telle interprétation.

En résumé : la Vierge de Lecomte s’inscrirait dans une tradition iconographique normande illustrée par une statue du XVe siècle et une autre du XVIIIe, la statue de 1357, réemployée vers 1637 servant de modèle hypothétique pour les deux œuvres.

DES ARTISTES INSPIRÉS PAR LA VIERGE DU VŒU

Si la tradition dans laquelle s’inscrit la Vierge de Lecomte est largement hypothétique, sa postérité esthétique et dévotionnelle semble assez importante comme nous allons essayer de le montrer ci-dessous en exploitant essentiellement les ressources du site internet de l’Inventaire des monuments historiques15 .

Nous pouvons d’abord distinguer une postérité artistique, plus soucieuse de s’inspirer de Lecomte que de le copier servilement et travaillant sur des matériaux nobles. Ainsi, le site des musées de Haute-Normandie présente une « Vierge du vœu » en ivoire de 13,2 cm de haut, conservée au château musée de Dieppe, évidemment copiée de la Vierge de Lecomte. Le même musée de Dieppe a récemment fait l’acquisition d’une autre copie, signée Brunel, en ivoire, haute de 34 cm, datée de 1857. Une troisième statue en ivoire inspirée de Lecomte, de 13,2 cm de haut, sans auteur mais probablement de l’atelier de Brunel, figure aussi dans les collections de Dieppe. Nous pouvons donc supposer que, de la fin du XVIIIe siècle à 1860 environ, il s’est trouvé une production de statues d’ivoire copiant la Vierge de Lecomte dont témoignent les trois échantillons ci-dessus. Si elles ont pu servir à un usage dévotionnel, vu leur taille celui-ci devait être privé et réservé à une certaine élite. En Normandie encore, l’Inventaire des monuments historiques signale à Préaux, près de Rouen, une statue grandeur nature (160 cm) en terre cuite et précise même que c’est dès le 30 juillet 1780 que les trésoriers et habitants décident de faire exécuter cette copie.

Nous trouvons aussi un certain nombre de statues d’église, de facture plus ou moins grossière, apparemment œuvres d’artistes locaux ou régionaux. Le service régional de l’inventaire du Limousin présente une Vierge à l’enfant, dite Vierge de Lecomte, à Nigremont : haute de 104 cm, en bois peint (polychrome) et datée de la 1ière moitié du XIXe siècle. Si l’attitude de la Vierge et son vêtement sont très inspirés de Lecomte, l’enfant Jésus, sculpté assez maladroitement, comme l’ensemble de la statue, est assis et écarte les bras en un geste d’accueil. Dans la même région, à Felletin (Creuse) une « Notre-Dame du Bon Secours » en bois taillé polychrome, haute de 81 cm, datant du XIXe siècle, est une copie fidèle de celle de Lecomte. Une troisième statue est signalée à Lit et Mixe, dans les Landes (sud de Bordeaux) en bois doré, d’environ 1 m de haut. Elle est datée du milieu du XIXe siècle. Enfin, existe dans l’Abbaye de Tamié, en Haute-Savoie, une statue de 140 cm, copie en bois de celle de Lecomte, offerte par la paroisse d’Ugine, proche de l’abbaye, en 1930. Elle était alors polychrome. Un moine de l’abbaye a décapé la peinture et replacé le bras gauche qui avait été cassé16 . Rien n’est dit sur l’origine de cette statue mais elle date certainement du XIXe siècle.

L’artiste a probablement pris comme modèle la statue conservée dans l’église paroissiale de Verrens, sur la route du col de Tamié, à une dizaine de km de l’abbaye. Elle est en plâtre, d’environ 97 cm de haut et on peut la dater du milieu du XIXe siècle. Le voile, la robe de Marie et le pagne de l’enfant Jésus sont dorés et leurs visages sont peints de couleur chair. La statue n’a pas de dos : une simple toile recouvre un très large orifice ovale allant des épaules jusqu’au socle17 .

LES COPIES EN PLÂTRE DE LA VIERGE DU VŒU

Il semble que les entreprises d’art saint-sulpicien aient été intéressées par la Vierge de Lecomte si l’on en croit le nombre relativement élevé de copies en plâtre de 96-99 cm18 recensé par l’Inventaire des monuments historiques.

Ainsi, à Saulgé (Vienne) le prieuré Saint Divitien possède une copie en plâtre de 99 cm de haut, datant du milieu du XIXe siècle. A La Potherie-Mathieu (Eure) l’église paroissiale Saint Pierre a une statue en plâtre moulé de 97 cm de haut. La Direction du patrimoine d’Aquitaine présente une autre Vierge dite de Lecomte, à Tournon-d’Agenais, en plâtre moulé et peint, de 98 cm de haut et datant du milieu du XIXe siècle. L’attitude de la Vierge et son vêtement sont, là aussi, identiques à la statue originale mais l’enfant est assis entre les bras de sa mère et bénit de sa main droite, le bras gauche étant cassé. Dans la paroisse de Saint Louis de Monferrand, près de Bordeaux, l’autel de la Vierge présente une copie fidèle de celle de Lecomte, qui semble de la même taille : environ 100 cm. Une autre statue, assez abîmée, m’est signalée dans la même région à St Jérôme d’Escalans et une autre encore à Grésillac (Gironde)19 . Chez les Sœurs Maristes, à Belley, figure une statue peinte en blanc de 96 cm de haut 20 et un modèle semblable se trouve dans l’église de Coutouvre, paroisse natale de Jeanne-Marie Chavoin, fondatrice des Sœurs Maristes. Il en existe une autre en Nouvelle Zélande, certainement apportée par un missionnaire mariste après 183621 .

J’ai repéré encore une autre statue de 96 cm dans l’église de Saint Christophe-la-Grotte (Savoie). Elle a été peinte en blanc assez récemment et le bras gauche de l’enfant Jésus est cassé. D’après la tradition orale elle aurait été donnée par le monastère de la Grande Chartreuse, ce couvent étant proche de la paroisse. Au couvent lui-même existe une statue semblable, mais de 75 cm de haut22 .

Grâce à M. Jacques Delen, laïc mariste, j’ai connaissance d’une autre de ces statues dans un monastère de Trappistines, à Chimay en Belgique23 , dont l’itinéraire peut être ainsi décrit : des religieuses de l’abbaye cistercienne de Gomerfontaine (1207-1792) dans la commune de Trie-la-ville (Oise), appartenant alors au diocèse de Rouen, sont dispersées par la Révolution. Elles se reconstituent à Nesle, au diocèse d’Amiens, en 1804-1816, puis s’installent à Saint Paul-aux Bois en Picardie, au diocèse de Soissons où elles restent jusqu’à leur exil de France en 1904, suite aux décrets anti-congréganistes. A cette date, la statue, acquise à une époque indéterminée, est confiée à une famille qui la restituera en 2007. Elle est peinte en bleu et blanc. On peut supposer qu’elle a été acquise vers le milieu du XIXe siècle.

Un ami de M. Delen a encore photographié une de ces statues au château de Clermont, en Haute Savoie, qui semble de la même taille24 . Enfin, l’église d’Ars, celle de Jean-Marie Vianney, près de Lyon, conserve une statue de 99 cm, récemment restaurée, le voile de la Vierge étant doré et la robe rouge.

Ces statues, de légèrement moins d’un mètre, semblent correspondre à trois types plus ou moins fidèles au modèle original. Nous avons déjà vu que certaines statues représentent l’enfant Jésus assis et bénissant, mais les autres révèlent une différence plus subtile dans le traitement du vêtement que porte l’enfant Jésus. Chez Lecomte, c’est une simple bande d’étoffe couvrant la cuisse droite de l’enfant et descendant entre ses jambes, laissant la cuisse gauche à découvert, de sorte qu’il paraît à peu près nu. Les statues d’Ars et celle de Clermont semblent suivre ce modèle mais les autres présentent un enfant Jésus vêtu d’une sorte de pagne couvrant le bas ventre et les deux cuisses de l’enfant, traité de manière variable selon les statues : voile ténu à Belley et à St Christophe la Grotte, il devient une étoffe très importante avec la statue de Chimay25 .

A notre avis, les statues présentant un enfant-Jésus pratiquement nu pourraient être antérieures à celles qui le couvrent d’une sorte de pagne. Sur ce point nous avons un indice car Catherine Lassagne, témoin de la vie du curé d’Ars déclare: « M. Vianney avait, au commencement, acheté une statue de la sainte Vierge tenant l’Enfant Jésus » et ajoute que cette statue « est maintenant dans une niche à côté de la chapelle de la Sainte Vierge. »26 Le curé d’Ars étant arrivé en 1818 on peut supposer que la statue actuelle, qui occupe toujours la même niche, a pu être acquise dans les années 1820-25. Les statues à l’enfant Jésus davantage habillé dateraient plutôt du milieu du XIXe siècle et viendraient d’un atelier d’art saint sulpicien.

LES PETITES STATUES EN PLÂTRE

Quant aux copies de la Vierge de Lecomte de même taille que celles des Frères Maristes, en plâtre assez grossièrement moulé, hautes d’environ 75 cm, l’Inventaire général semble n’en signaler aucune. Plusieurs raisons peuvent expliquer ce fait : leur faible valeur artistique, l’inachèvement de l’Inventaire, le fait que les enquêteurs ne repèrent pas le lien avec le modèle. Une autre raison me paraît déterminante : ces statues sont dès l’origine particulièrement adaptées à un culte privé ou conventuel et donc d’accès difficile. Toujours est-il qu’à l’heure actuelle j’ai connaissance de quatre de ces statues : deux chez les Frères Maristes, une dans le monastère de la Grande-Chartreuse et une dans le couvent des Saints Anges de Mâcon. Ayant pu observer trois de ces quatre statues, je constate que pour chacune d’elles l’enfant Jésus porte une sorte de pagne recouvrant le bas du corps et les deux cuisses.

PETITE ENQUÊTE SUR LES STATUES DES FRÈRES MARISTES

Le F. Carazo attribue à la statue de Rome une hauteur de 75 cm  et seulement 68 cm  à celle de l’Hermitage, ce qui suggère que les deux statues ne viennent pas du même atelier. Sur ma demande les Frères Antonio Martínez Estaún et Juan Moral ont mesuré la statue de Rome et voici les résultats de leurs mesures :
« Le piédestal de la statue mesure 3,6 cm. Nous avons effectué cette mesure sur la partie frontale, devant les pieds de la statue. A vrai dire le piédestal n’a pas de largeur uniforme et précise dans toute sa structure à cause de la peinture, mais on peut estimer que cette mesure est valable pour toutes les faces du parallélépipède servant de base à la statue.
Sans compter les 3,6 cm du piédestal, la statue mesure 70 cm. La hauteur totale de l’œuvre est donc de 73,6 cm.
Quant à l’observation de l’intérieur de la statue, je dois dire qu’il n’est pas possible de l’estimer à vue d’œil. A la base de la statue on observe un trou conique mesurant 2 cm environ dans la partie extérieure, et un peu moins dans la partie intérieure. A travers le trou on ne peut apprécier ce qu’il y a à l’intérieur sans introduire dans la cavité quelque instrument muni d’une source lumineuse qui nous aide à photographier ou à observer directement la structure de la composition en-dedans. Il semblerait que la base du socle ait été couverte d’une grosse couche de plâtre pour fermer une cavité existante. La couche de plâtre ajoutée est visible sur les rebords grossiers qui sont restés après l’application de la pâte. Sur le matériau utilisé pour la couverture on a employé une couche de peinture similaire à celle des parties visibles du socle. L’ouverture pratiquée au centre de la base permet de voir aisément l’épaisseur de la couche de plâtre appliquée. Et l’on peut apprécier parfaitement la couleur blanche de ce matériau.

Une opération semblable a été faite à l’Hermitage à la même date (fin janvier 2011) et le tableau suivant donne les résultats obtenus.

 

Hermitage.
Statue de l’oratoire
(ancienne)

Hermitage.
Statue de la salle de conférence
(copie récente)

Statue romaine

Hauteur du piédestal

3,5 cm

4 cm

3, 6 cm

Statue + piedestal

71,5 cm

72,5cm

73.6 cm

Profondeur du creux à l’intérieur de la statue

71 cm

64,5 cm

Caché par une plaque de plâtre

Qualité du plâtre

Très rugueux !

Assez lisse à l’intérieur, plus rugueux en bordure

Non visible

Inscription à l’intérieur

 

 

Inscription au crayon partiellement effacée :
« (s)tatue du Bx (fo)ndat (eur) 27 »

« Notre Bonne Mère
Copia del original
de l’ Hermitage
Enero 1989
H. Esteban Martín »

Pas d’inscription  signalée28

La différence de hauteur entre les statues anciennes est donc faible : 2 cm environ. Elle peut provenir d’ailleurs du caractère artisanal du moulage qui fait qu’aucune statue n’est absolument identique à l’autre et aussi d’une certaine approximation dans les mesures, difficilement évitable. A priori les deux statues anciennes pourraient venir du même atelier et être à peu près contemporaines même si elles n’ont pas bénéficié de la même finition. Par exemple, pour l’une l’intérieur est caché par une plaque de plâtre alors que pour l’autre le matériau demeure à l’état brut, comme au sortir du moule.

Le F. A. Carazo, que j’ai rencontré à l’Hermitage en juillet 2011, m’a cependant rapporté que lorsqu’il a vu la statue de l’Hermitage avant qu’il n’en soit fait un moule, celle-ci n’était pas dans le même état qu’aujourd’hui, d’où la différence dans les mesures qu’il avait alors constatée.

UN ATELIER A L’HERMITAGE

Mais ce problème semble somme toute annexe car un passage de la Vie du F. Bonaventure (1804-1865)29 donne à réfléchir. Entré dans l’Institut en 1830, il devient maître des novices vers 183330 Or, « un jour le Père Champagnat le trouvant occupé à aider un ouvrier qui faisait en plâtre des statues de la saint Vierge lui dit : Frère Bonaventure, n’est-il pas vrai que tel est le moule, telle est la statue ? Eh bien ! Rappelez-vous que vous êtes le moule des Frères, le moule de toute la congrégation »…

Entre 1833 et 1840 on a donc fabriqué à l’Hermitage des statues de la Sainte Vierge en plâtre. Le cahier des comptes des recettes de l’Hermitage, commencé en 1835, apporte même les précisions suivantes quant à la vente de certaines d’entre elles :

  • le 27 mars 1838 : « reçu pour 3 statues : 9 F. »
  • le 7 mai 1838 : « reçu (le prix) des statues : 4.75 F. »
  • le 25 juin 1838 : « reçu pour une statue : 0.60 F. du F. Bonaventure : 1.15 F. »
  • le 8 août 1838 : « pour une statue : 3 F. »

Une dernière vente est signalée le 11 mai 1842 : « pour ventes de statues : 5 F. »

Ce serait donc au cours de l’année 1837 et au début de 1838 qu’il faudrait situer la leçon donnée par le P. Champagnat au F. Bonaventure et la constitution d’un stock de statues qui sont très probablement celles de la Bonne Mère.

LA QUESTION DU MAÎTRE D’ŒUVRE ET DU MOULE

Le registre des dépenses signale le nom d’Antoine Robert, plâtrier à Saint Chamond31 dans la phase qui précède et accompagne la vente de ces statues. Qu’on en juge :

  • 23 mai 1837 : « (donné) au F. Stanislas pour payer Robert, plâtrier, 40 F. »
  • 4 juillet 1837 : « Donné à Robert pour solde 27,75 F. »
  • 5 août 1837 : « Donné à Robert pour plâtre et pour solde : 18 F. »
  • 23 août 1837 : « Donné à Robert pour 4 sacs de plâtre à 3 F; le sac : 12 F.”.
  • 16 janvier 1838 : “Donné à Robert pour 4 sacs de plâtre gris que nous avons : 12 F.32  » en même temps qu’on signale un achat de 7 sacs de plâtre gris pour 6 F.
  • 19 avril 1838 : « donné pour acheter du plâtre : 6 F. »

On remarquera que jusqu’au 5 août Robert est payé pour un ouvrage mais qu’ensuite il se contente de livraisons entre le 5 août 1837 et le 19 avril 1838 qui s’expliqueraient donc par le moulage de statues. Et l’acteur principal de cette entreprise semble être le F. Bonaventure réalisant ou faisant réaliser un moule à partir de la statue du P. Champagnat et en tirant un nombre important de copies.

Nous sommes d’ailleurs à une époque où l’Institut a besoin de statues non seulement pour la maison-mère mais encore pour les écoles, et il est pensable que la procure de l’Hermitage ait tenu à la disposition des communautés ce genre de statues peu coûteuses et de taille bien adaptée aux oratoires et aux classes. Dans cette hypothèse la statue de l’Hermitage serait une copie de la statue du P. Champagnat et une relique d’un modèle assez répandu chez nous puis supplanté progressivement par de nouveaux types plus à la mode. En somme, la multiplication actuelle de statues de « la Bonne Mère » ne ferait que reprendre une tradition primitive. Le F. A. Carazo suggérait d’ailleurs une hypothèse dans ce sens.

Si l’on suppose un sac de plâtre par statue, ce qui semble un maximum, cela ferait une collection d’au moins une quinzaine de statues. D’ailleurs, les comptes des recettes évoquent la vente de 11 statues à un prix compris entre 2,5 et 3 F. pièce. Un prix si bas suggère que les statues réalisées devaient être de qualité très médiocre et non peintes.

LA STATUE DE MÂCON

Le F. Claudino Falchetto m’a indiqué la présence d’une statue de « la Bonne Mère » dans la ville de Mâcon33 à la maison-mère des Sœurs des Saints Anges fondée en 1844 mais ne comprenant plus guère aujourd’hui que des sœurs brésiliennes. Entré en contact avec sœur Maria Theresinha Falchetto, sœur du F. Claudino, j’ai pu voir la statue en question placée dans une grotte artificielle du jardin des sœurs. Peinte en blanc, elle mesure 74 cm avec son piédestal qui n’est pas carré mais rond et assez haut : 7 cm environ. La comparaison avec les autres statues montre que les pieds de la Vierge et le bas de la robe ont été noyés dans ce socle et une feuille d’arbre a été moulée au bas de la robe, sur le socle lui-même. Enfin, le dessous du piédestal, complètement fermé, porte un nom gravé à main levée qui est probablement celui du réalisateur ou du réparateur de la statue : G. Hocpuet. Mais il n’y a aucune date et ce patronyme semble très rare.
Une remarquable biographie de la fondatrice34 , Barbe-Élise Poux (1797-1855), à peu près contemporaine de Marcellin Champagnat nous donne cependant des indices. Jurassienne, B. E. Poux fonde en 1822 une école à Poligny pour les fillettes de la classe moyenne. Etant tombée malade, ses élèves entreprennent « une neuvaine devant une statue de la Sainte Vierge et elles obtinrent sa prompte guérison. La statue, du coup, fut déclarée miraculeuse et sœur Franco (la chroniqueuse) nous dit qu’elle est précieusement conservée à la maison-mère » (p. 65). Mais cette statue, qui figure toujours dans la salle de communauté des sœurs, est en pierre, de plus petite taille que la « Bonne Mère », et lEnfant Jésus a une colombe dans les mains.
Pour expliquer la présence de cette réplique de la « bonne Mère » à Mâcon, une autre piste semble possible : la pratique du mois de Marie. En effet, installée en 1831 à Lons-le-Saulnier, ville située au pied du Jura, B. E. Poux continue son œuvre éducative avec l’aide d’une communauté des femmes aspirant à la vie religieuse et introduit dans son pensionnat la pratique du mois de Marie jusque là inconnue à Lons, dont les exercices s’effectuent dans l’oratoire autour d’une statue de la Sainte Vierge décorée de branches et d’étoiles (p. 75). En 1832 la cérémonie se déroule à la paroisse : « dans l’avant chœur de l’église une statue de la sainte Vierge avait été placée sur un piédestal » (p. 83).

Sa fondation ayant échoué à Lons, B. E. Poux recommence une fondation à Morez, au cœur du Jura, et y instaure aussi le mois de Marie. Sa communauté s’étant affermie, elle installe à Mâcon en 1844 une seconde maison. Dès 1845 elle instaure au pensionnat le mois de Marie : « Au milieu de draperies et de fleurs, on installa une belle statue de la Vierge » (p. 212).

Il me paraît donc raisonnable de supposer que cette statue mâconnaise de la « Bonne Mère » était employée pour la célébration des mois de Marie, peut-être dès l’époque de Lons-le-Saulnier. On peut même penser que les déplacements fréquents de la statue auraient causé des dommages nécessitant une restauration de sa base. Toujours est-il qu’à l’heure actuelle existe à Mâcon une statue semblable à la Bonne Mère du P. Champagnat et dont le modèle semble dater des années 183035 .

DES CERTITUDES ET DES HYPOTHÈSES

Il convient maintenant de faire le point afin de distinguer certitudes et hypothèses. Pour les certitudes : les travaux du F. A. Carazo montrent que la « Bonne Mère » de Rome doit être datée des années 1820 environ. D’autres statues en plâtre de la Sainte Vierge sont réalisées à l’Hermitage dans les années 1837-38.

Passons maintenant aux hypothèses. Le P. Champagnat a dû se procurer sa statue auprès d’un marchand d’articles religieux, tandis que la statue actuelle de la Bonne Mère de l’Hermitage aurait été réalisée en 1837-38 par les soins du F. Bonaventure grâce à un moule confectionné à partir de la statue du P. Champagnat. Cette différence d’origine expliquerait la présence d’une plaque de plâtre sous le piédestal de la statue romaine et son absence pour la seconde.
Il est possible que dès cette époque la statue existe aussi en version plus grande, plus adaptée aux paroisses et certainement plus chère, comme en témoignerait l’achat fait par Jean-Marie Vianney dans les années 1820-30.

Reste le problème de la peinture des deux statues. Il est clair que celle de la statue de Rome révèle la patte d’un artiste tandis que celle de l’Hermitage est beaucoup plus grossière. Mais de quand date cette peinture ? Il est en effet possible que la statue du P. Champagnat ait été blanche à l’origine, donc peu coûteuse à une époque où il n’était pas riche36 . D’ailleurs l’original en marbre de Lecomte est blanc tandis que les couleurs choisies pour la statue (manteau bleu bordé de motifs dorés et robe blanche) évoquent un goût pour la tradition médiévale encore absent vers 1820 mais très présent dans les années 1840.

Un travail de restauration de la statue primitive aurait pu avoir lieu vers 1837-38, après qu’elle ait servi à mouler de nouvelles statues, et le peintre pourrait être Ravery. A cette époque celui-ci travaille à la décoration de la nouvelle chapelle de l’Hermitage construite en 1836, et le registre des dépenses mentionne les sommes à lui versées pour cet important chantier:

  • 16 juillet 1837 : « Donné à M. Ravery : 300 »
  • 25 septembre 1837 : « Donné à M. Ravery à compte : 300 »
  • 12 septembre 1838 : « A Ravery pour acompte : 300 »
  • 7 avril 1839 : « A Ravery pour acompte de la peinture : 100 »
  • 13 juin 1839 : « A Ravery pour solde de la peinture etc. : 400 »

La peinture de la statue de la Bonne Mère aurait pu être comprise dans ces sommes à un moment où l’Institut, après vingt d’existence, dispose de davantage de moyens et se soucie de manifester artistiquement sa tradition.

CONCLUSION

Comme il arrive toujours, une recherche résout un certain nombre de questions et en pose de nouvelles. En ce qui concerne l’Institut, nous devons considérer qu’il possède deux statues anciennes de « la Bonne Mère » mais d’origine différente. L’authenticité et l’ancienneté de celle de Rome ne font aucun doute. Quant à celle de l’Hermitage, quoiqu’imparfaitement documentée, elle semble mériter d’être considérée comme une pièce rare datant du temps du P. Champagnat et témoignant de la dévotion mariale des frères, peut-être liée à la pratique du mois de Marie.

Dans un contexte plus général, il semble qu’assez tôt après la Révolution ait fonctionné un atelier de moulage de statues en réduction du modèle de Lecomte fournissant les magasins d’art religieux. D’ailleurs les circonstances s’y prêtaient : après une phase iconoclaste qui avait détruit ou dispersé le mobilier des paroisses et des couvents, ce matériel permettait d’en rétablir une pièce importante rapidement et à bon marché, tout en s’inscrivant en continuité avec la sensibilité esthétique du XVIIIe siècle encore tout proche.

Néanmoins, la petite taille de ces statues et la faiblesse du message théologique évoqué, ainsi que la montée de la sensibilité gothique, de la dévotion à la médaille miraculeuse37 et d’autre part l’émergence d’une industrie saint sulpicienne de la statuaire, ont dû progressivement marginaliser ce type. Nous avons vu néanmoins qu’un modèle de cette statue a paru digne d’intérêt pour une entreprise de statuaire saint sulpicienne à partir du milieu du XIXe siècle.

Demeure la question d’une tradition iconographique de Vierge à l’enfant courant du XVe au XIXe siècle, axée sur le Christ à l’état de bébé et dont le message théologique est peu évident. J’ai présenté plus haut une interprétation et le F. Carazo propose le psaume 130 : « … Je tiens mon âme en paix et silence comme un enfant contre sa mère. » Mais, pour être intéressante, cette interprétation ne paraît pas plus que la mienne fondée sur des sources sûres.

C’est peut-être d’ailleurs parce qu’elle permet une grande diversité d’interprétations, de la plus théologique à la plus sentimentale, que cette tradition de Vierge à l’enfant suçant son doigt garde un attrait à travers des époques très diverses et en dépit de copies dont la valeur artistique est très inégale.

1 Dans Tras las huellas de Marcelino Champagnat, Provincia Marista de Chile, 1999, p. 208-233, et dans un fascicule de 63 p. intitulé Nuestra Buena Madre, édité par la Provincia Marista Mediterránea en 2007, sans compter divers articles.

2 Par le F. Claudio Santambrogio, entre le 27/11/1998 et le 21/02/1999.

3 L’emploi de l’imparfait signifie que l’auteur écrit après la mort du F. Jean-Baptiste en 1872.

4 Voir dans le cahier Annales de l’Hermitage en forme de compte-rendu de certains événements (AFM 213/16) qui dresse l’inventaire des objets possédés par le P. Champagnat et rédigé par le F. François,  p. 23-24 : « Effets qui ont servi au P. Champagnat qui sont à la maison-mère à St Genis-Laval » […] « A la chambre qu’occupait le C.F. Jean-Baptiste 1° Le crucifix devant lequel le bon père Champagnat priait ; 2° la statue de la Ste Vierge qu’il avait dans sa chambre à Lavalla ; (rajouté par le même auteur en lettres plus petites) l’enfant Jésus est couché dans les bras de sa mère, l’index à la bouche »…

5 Le F. Agustín Carazo attribue une grande importance à la présence de cette statue qui semble témoigner de la tradition portée par des frères des origines encore vivants à cette époque.

6 Un condensé de la thèse a paru au Brésil en 1999 sous le titre A « superiora » dos Maristas. Une traduction en français a été éditée la même année sous le titre La supérieure des Maristes. Mais, à ma connaissance, il ne s’y trouve pas de précision sur cette statue de Rouen.

7 Un document indique que l’autel a été édifié en 1954. Cela paraît d’autant plus vraisemblable que la cathédrale, ayant subi de graves dégâts durant la guerre de 1939-1945, on y a procédé ensuite à d’importantes transformations. Une photo de 1921 (Vierge de Lecomte, site Inventaire des monuments historiques. Base Palissy) montre qu’alors la statue était à la croisée du transept.

8 Histoire de l’Eglise cathédrale de Rouen métropolitaine et primatiale de Normandie, Rouen 1685, p. 20-25.

9 D’après Maurice Vloberg, auteur de  La Vierge et l’Enfant Jésus dans l’Art français, l’autel de cette Vierge du vœu était adossé au pilier droit, à l’entrée du chœur, « emplacement de la chapelle dite du vœu, érigée dans l’ancien jubé à la suite d’un vœu pendant la peste de 1637 ». Cité sur le site de l’abbaye de Tamié.

10 Lors de ma visite en 2010 cette chapelle semble servir de dépôt de mobilier superflu.

11 L’ouvrage consulté ne dit rien du groupe central : le Christ entre la Vierge et saint Jean.

12 Sa valeur historique est telle que l’atelier de moulage du Louvre en propose des copies en résine à un prix relativement abordable (244 €).

13 Voir document informatique sur internet : « Vierge de Valmont ».

14 Son vêtement semble inspiré de la mode féminine du XV° siècle : « Elle porte sur les épaules une cape retenue par deux cordonnets terminés par des glands qu’elle ramène sous le bras gauche et qui se casse doucement en lourds plis volumineux. Ses cheveux longs ondulent de part et d’autre de la figure et descendent dans le dos ».

15 On peut aller sur le site « Inventaire des monuments historiques. Base Palissy » ou bien, plus simplement, « Vierge de Lecomte ».

16 Site internet de l’abbaye de Tamié.

17 Lors de ma visite, le 12 août 2011, cette statue, placée normalement sur l’autel de la Vierge, avait été déposée à la sacristie pour être transportée à Lyon en vue de sa restauration.

18 Ces différences de hauteur sont dues apparemment à la difficulté de donner une mesure exacte avec des moyens rudimentaires.

19 Ces trois statues m’ont été obligeamment signalées par M. Rambert Christophe, du Service Régional de l’Inventaire d’Aquitaine. Apparemment, l’Inventaire Général ne les a pas répertoriées comme étant des Vierges inspirées de Lecomte. Nous n’en connaissons donc pas les dimensions exactes ni ne savons de quel matériau elles sont faites.

20 Le bras gauche de l’enfant Jésus, cassé, a été maladroitement reconstitué.

21 Nous ignorons sa taille exacte.

22 Lettre du frère archiviste.

23 Aux dernières nouvelles cette statue a été transférée chez les Trappistines de Arnhem aux Pay-Bas.

24 Un frère m’a signalé la présence d’une autre de ces copies à N. D. du Laus, sanctuaire des Alpes du sud, mais je n’ai pas procédé à une vérification.

25 Mais la polychromie accentue peut-être cette impression.

26 Cité dans Mgr. René Fourrey, Le curé d’Ars authentique, Éditions L’Échelle de Jacob, 1989, p. 126, note 440.

27 Ces mots ont d’ailleurs fort bien pu être inscrits à l’époque où la statue a servi de modèle à la réalisation d’une copie. Ils ont pu servir à différencier les deux statues.

28 Mais sur le devant du piédestal est collé un papier semblant du XIXe siècle : « C’est devant cette statue que la question des bas de drap a été tranchée à la chapelle de l’Hermitage en 1829. »

29 Biographies de quelques frères, 1868, p. 110.

30 Voir Répertoire des Lettres p. 99.

31 Ce Robert est très présent dans le compte des dépenses dès le début : le 22 avril 1826 le registre déclare verser 100 F. à Antoine Robert, plâtrier à St Chamond et, au début mai, 600 F. Ces sommes sont certainement dues pour les travaux d’aménagement de l’Hermitage. On retrouve Robert 2 fois en 1830 (95 F.) et une fois en 1833 (26,50 F.).

32 Il se peut que la même dépense ait été signalée deux fois.

33 A 80 km au nord de Lyon.

34 Abbé Jean Ladame, Educatrice et fondatrice au XIXe siècle. Mère Marie Saint-Michel Poux, 356 p.

35 Il est utile de remarquer que lors de la révolte des bas de drap en 1829, le P. Champagnat fait dresser dans la chapelle un autel marial vivement éclairé, comme dans les pratiques du mois de Marie.

36 Vie de Champagnat 1ière partie, ch. 7, p. 342 : « Il lui éleva dans sa propre chambre un petit autel sur lequel il mit sa statue » et il instaure le mois de Marie (p. 343).

37 Apparition à Catherine Labouré en 1830 et diffusion massive de la médaille à partir de 1834.


Cahier Mariste 30 – Février 2012

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