Apostolat par le catéchisme
F. J.-V.
19/Oct/2010
La Circulaire du 24 mai 1949 a rappelé aux Frères deux statuts capitulaires de 1946 sur « l'apostolat en faveur des enfants pauvres ». Les quelques lignes qui suivent voudraient souligner un aspect intéressant de cet apostolat : l'œuvre des catéchismes de faubourg ou de banlieue, menée sous la direction de nos Frères par les grands élèves et les anciens élèves de nos collèges.
Cette œuvre est bien dans l'esprit du V. P. Champagnat. Lorsqu'en 1818, aux tout premiers jours de l'Institut, les Frères, après un court apprentissage, crurent pouvoir se charger de la direction de l'école de La Valla, le Vénérable Fondateur leur dit : « Puisque vous désirez vous livrer à l'instruction des enfants, qui est le but de votre vocation, je désire que vous consacriez les premiers effets de votre zèle aux enfants les plus ignorants et les plus abandonnés. Ainsi, je vous propose d'aller faire le catéchisme dans les hameaux de la paroisse. » Cette proposition fut accueillie, non seulement avec respect et soumission, mais avec joie. Et les prémices de l'apostolat des Frères furent les catéchismes dans les hameaux de Luzernaud, Chomiol, Rossillol et autres de la vaste paroisse de La Valla. (Vie du V. M. Champagnat, 1931, p. 101.)
A cette même époque, le Frère Laurent catéchisait le hameau (aujourd'hui paroisse) du Bessat. Comme autrefois saint François de Sales dans le Chablais et saint Jean-François Régis dans le Vivarais, il parcourait le village deux fois le jour, agitant une clochette pour appeler les enfants au catéchisme. Nommé plus tard Directeur de Tarentaise, il ne manquait pas, les dimanches et les jeudis, de continuer son apostolat catéchistique au Bessat, et il réalisa par là un bien incalculable. (Vie du V. M. Champagnat, p. 109.)
La même ardeur apostolique animait les Frères des établissements de Marlhes, Saint-Sauveur, Ampuis, etc. … Tous les soirs, pendant l'hiver, ils enseignaient le catéchisme aux jeunes gens et aux enfants du village qui ne fréquentaient pas leur école. Cette leçon durait parfois plus d'une heure. Ils allaient aussi trouver les hommes qui ne s'approchaient pas des sacrements et les engageaient à remplir ce devoir important. Un grand nombre furent ramenés aux pratiques religieuses par les pieuses industries des Frères. (Vie du V. M. Champagnat, p. 141.)
Aujourd'hui, comme aux débuts de la Congrégation, les Frères de nos diverses Provinces tiennent à honneur de venir en aide aux enfants dépourvus d'instruction religieuse, notamment dans les faubourgs et banlieues des grandes villes. Les élèves des classes supérieures et même les anciens élèves sont initiés à cet apostolat auquel ils consacrent, avec un beau dévouement leurs heures libres du samedi soir et des dimanches et fêtes.
La revue Stella Maris, de la Province de Bética (février 1949), fournit d'intéressants détails sur ces catéchismes de faubourg dans une dizaine de ses collèges, où quelque 200 catéchistes volontaires s'occupent de plus de 2.000 enfants. Outre l'instruction ordinaire du jeudi soir, l'action apostolique auprès de ces enfants comporte un règlement spécial pour les dimanches et fêtes : messe expliquée ou dialoguée, chants religieux, distribution de bons points et de récompenses, jeux et amusements et, à diverses époques, surtout à l'occasion de la Noël et de la fête des Rois (6 janvier), séance récréative avec répartition de chaussures, habillements, argent, livres, revues, etc., et de rations alimentaires et friandises que les élèves du collège, même les plus petits, ont prélevées sur leur nourriture pour en faire bénéficier leurs protégés. Il faudrait voir la satisfaction avec laquelle ces enfants emportent les volumineux paquets que leurs petits bras ne parviennent pas à étreindre et qu'ils remettent à leurs parents émus de ce beau geste d'entraide chrétienne !
A Malaga, cette répartition des étrennes de Noël fut présidée par l'évêque de la ville, Mgr Angel Herrera. Le prélat s'intéresse grandement à cette œuvre des catéchismes de banlieue et lui-même préside, tous les mois, la récollection que les catéchistes volontaires font avec beaucoup de ferveur à l'évêché.
Mas, revue du Collège du Christ-Roi, à La Corogne, revient fréquemment sur le dévouement déployé par les collégiens qui catéchisent les enfants des quartiers de San Pedro de Visma, Bens et Peruleiro, les préparant à la première communion, secourant leurs besoins urgents et séchant les larmes des familles qui manquent parfois du nécessaire.
Dans nos collèges du Mexique, des étudiants consacrent une partie de leurs jours de congé à l'enseignement du catéchisme aux enfants pauvres. L'an dernier, plus de 6.000 enfants indigents furent instruits de la religion et firent leur première communion. Comme plusieurs de ces enfants ne pouvaient s'habiller convenablement pour ce grand jour, les élèves organisèrent des quêtes et une fête sportive afin de recueillir les fonds nécessaires et costumer ce petit monde.
A La Havane, dans le but de préparer les jeunes gens à leur mission, nos Frères ont organisé récemment une Ecole Normale pour catéchistes. Cette école a été inaugurée par S. E. le Cardinal Arteaga, archevêque de la capitale1.
Au Pérou, en 1909, Huanuco, le C. F. Modesto et ses deux adjoints s'en allaient, dans la soirée des jeudis et des dimanches, faire le catéchisme aux enfants des écoles publiques et les préparer à recevoir les Sacrements. La revue Cultura y Acción d'octobre 1948, après avoir donné un compte rendu de l'apostolat qu'exercent une trentaine d'élèves du Collège Champagnat par les catéchismes de Santa Cruz à Miraflores, faubourg populeux de Lima, félicite et encourage les jeunes apôtres : « Jeunes catéchistes, qui sacrifiez les prémices de votre congé hebdomadaire, Dieu vous récompensera de tout votre dévouement. Vous coopérez, avec le Christ, au salut des âmes. »
A Santiago (Chili), un bon groupe d'élèves des classes supérieures font partie des catéchistes volontaires qui, tous les dimanches, se rendent dans les paroisses des faubourgs pour y instruire les enfants ignorants des vérités de la foi.
Dans cette même Province du Chili, l'apostolat exercé par nos élèves enrôlés dans l'Action Catholique s'étend sur un champ encore plus vaste que celui des catéchismes de banlieue. Ainsi, à Quilota, les Jeunes d'Action Catholique de l'Institut Rafael Ariztia ont réalisé plusieurs visites à la prison de la ville pour offrir aux prisonniers des cadeaux matériels, les égayer par des séances récréatives et leur faire des conférences sur des sujets en rapport avec la condition spéciale de ces détenus, lesquels ont fait l'accueil le plus chaleureux à leurs jeunes bienfaiteurs. A San Fernando, les aspirants d'Action Catholique, désireux de réaliser un travail efficace, se sont lancés dans l'apostolat de la radio. Tous les dimanches, sacrifiant généreusement leurs loisirs, ils diffusent, de l'église Saint-Martin, la messe pour les malades et pour ceux qui ne peuvent assister au Saint Sacrifice. Les merveilleuses conditions acoustiques de l'église font que les prières, aussi bien que les chants accompagnés par l'orgue, donnent l'impression d'une messe célébrée dans une grande cathédrale. (Vida Marista, novembre-décembre 1948.)
Nous pourrions allonger cette énumération de centres divers où l'œuvre des catéchismes et la diffusion de la doctrine sociale catholique viennent compléter les programmes de l'enseignement religieux donné à l'école. Ces Frères si dévoués et ces jeunes gens à l'âme généreuse et apostolique font œuvre éminemment religieuse et sociale, et nous pouvons bien ajouter, avec le chroniqueur de Stella Maris : « Notre Vénérable Fondateur, du haut de son trône de gloire dans le ciel, en voyant cette sollicitude de ses fils et des disciples de ses fils pour les enfants pauvres qui avaient une si grande place dans son cœur, constatera avec bonheur que son esprit se maintient parmi eux et que s'accomplit l'affirmation de Jésus-Christ : L'Evangile est annoncé aux pauvres. Et le bon Frère Laurent et tous ces Frères chez qui avait jailli la flamme du zèle de la gloire de Dieu et du salut des âmes qui embrasait le cœur du Fondateur, se réjouiront de trouver, à plus de cent ans de distance et sur tous les points du globe, de dignes émules de leur action apostolique à La Valla et dans les premiers établissements fondés par l'Institut. »
F. J.-V.
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1 Cf. Bulletin, t. XVIII, p. 30.