Grands Exercices Ă Bahia
05/Sep/2010
Pour la province d'Aubenas, comme pour les autres, l'année 1903, qui vit tant de chutes, fut aussi pleine d'exemples d'abnégation et parfois d'héroïsme. Toute une belle jeunesse, à la suite de quelques vénérables anciens, préféra l'exil à la sécularisation, et vint s'établir dans le Nord du Brésil et y former la province septentrionale. A partir de 1904, toutes les années, chacune des maisons érigée en centre de retraite voyait quelques-uns de ces jeunes Frères se consacrer irrévocablement au Seigneur par l'émission des vœux perpétuels et donner une preuve de plus de leur attachement à notre cher Institut. Vu les distances énormes qui séparent les différents centres et le petit nombre de profès pour chaque année, il avait été impossible jusqu'à présent de réunir ces jeunes Frères pour les Grands Exercices de St. Ignace. Ce ne fut qu'au commencement de 1910 que le C. F. Provincial communiqua son intention de tout faire pour réunir les Frères qui avaient fait profession au Brésil ou devraient la faire dans le courant de cette année-ci, pour leur procurer le précieux bienfait de la Grande Retraite. Et Dieu sait au prix de quels efforts cela devait se réaliser.
Dans le courant de septembre le C. F. Provincial envoyait une circulaire dans les postes, où il annonçait en même temps que la mort du bon frère Romualdus, que la retraite se ferait à Ponte d'Uchôa (Pernambuco).
Tout était prêt dans cette maison ; les FF. du Pará et de Maranhão étaient déjà en route, quand, le C. F. Provincial venu à Bahia pour consulter le R. P. Rossi, prédicateur, celui-ci lui conseilla pour divers motifs de fixer la retraite à Bahia, du 6 au 28 décembre, ce qui fut fait.
Le 4 décembre, après douze jours de traversée, les Frères du Pará et quelques-uns du Maranhão, de Pernambuco, et de Maceió arrivaient à Bahia ; le lendemain, les autres débarquaient également ; et le 6 au soir, tous ces bons Frères, qui ne s'étaient jamais revus pour la plupart depuis huit ans de Brésil, entraient en retraite avec un entrain et une ferveur admirables.
Le R. P. Rossi, S. J., venu de São Paulo où il avait connu nos Frères du Centre du Brésil, a su captiver l'attention générale et donner de précieuses règles de direction spirituelle, si nécessaires dans ces contrées.
Le C. F. Provincial, dans les nombreuses conférences, a commenté, avec sa chaleur toute pleine de persuasion, la Règle et le Guide des écoles. Le C. F. Mixent, de son côté, a pleinement intéressé les retraitants par ses conférences pédagogiques, fruit de sa longue expérience.
Pendant le cours de la retraite, les Frères ont été admirables sous tous les rapports, montrant ainsi qu'ils savaient apprécier les sacrifices faits pour eux.
Le 28, au matin, se terminaient les Grands Exercices. A 5 h. 30 min. le R. P. Rossi dit la 1ière Messe à laquelle tous firent la sainte Communion. De pieux cantiques d'occasion furent chantés, entre autres "Mes Armes’’. La sainte Messe fut suivie du café et les langues se délièrent. Après la récitation des petites heures, on s'apprêta à recevoir Sa Grandeur Mgr Jeronymo Thomé da Silva, archevêque de Bahia et primat du Brésil. Ce vénérable Prélat avait manifesté le désir de célébrer la sainte Messe au milieu de ses bons Frères et de recevoir leurs vœux comme preuve de sa paternelle bonté. A 8 h. 30 min. sa voiture étant arrivée, il fut reçu au chant de l'Ecce Sacerdos, et à 9 h. commença la Messe, célébrée par Monseigneur, acolyte par les RR. PP. Rossi et José Celestino Lopez, S. J. A la fin de la Messe, Sa Grandeur daigna nous dire quelques mots, et, se servant des paroles des bergers : ‘’Allons jusqu'à Bethléem’’ il nous conduisit en esprit aux pieds de l'Enfant Jésus pour l'adorer et pour lui offrir nos prières et nos présents, qui devaient être les mêmes que ceux des Rois Mages : la myrrhe de la mortification de la volonté, de la chair et de l'ambition par les vœux d'obéissance, de chasteté et de pauvreté ; l'encens de nos prières et l'or de la charité fraternelle. Sa Grandeur, profitant de la présence du R. P. José Celestino Lopez, S. J., expulsé de Portugal et arrivé ô Bahia depuis quatre ou cinq jours, nous exhorta à ne pas craindre la persécution. « L'Eglise, nous dit-il, est comme un navire solide constamment battu par la tempête et qui, néanmoins, poursuit toujours sa marche triomphante ; elle est comme un rocher, sur lequel la vague furieuse se brise et se retire écumante après l'avoir nettoyé des mousses qui le rendaient hideux ». Il nous excita encore á persévérer dans les bons sentiments de la Retraite en s'inspirant des deux exemples de Judas et de St. Paul. En souvenir de sa visite parmi nous, il nous laissa comme moyen de persévérance la dévotion à la Sainte Vierge et au Sacré-Cœur de Jésus « les deux ailes de notre âme, disait-il, pour nous élever à la perfection ».
Après ces quelques paroles, eut lieu l'émission des vœux perpétuels de 6 Frères et la rénovation de 20 autres, et le reste se termina comme à l'ordinaire. Après la cérémonie, Sa Grandeur demeura quelques instants pour prendre un léger déjeuner et partit aussitôt après, en nous donnant encore une fois sa bénédiction.
La lecture des placements fut suivie du dîner où régna une douce gaîté. Dans la soirée, chacun s'occupa des préparatifs de voyage, et, à 3 h. huit Frères partaient pour le Pará, Maranhão, Pernambuco et Maceió. Le lendemain, les autres les suivirent. Ainsi se termina cette Retraite qui sans nul doute aura imprimé dans l'âme des bons Frères un renouveau de piété, de zèle pour leur sanctification et celle de leurs enfants. Au nom de tous, merci au C. F. Provincial qui leur a procuré une si grande faveur.