La Province du Brésil méridional
07/Oct/2010
Le Bulletin ayant demandé aux C. F. Marie-Odulphe, A. G., quelques impressions de sa visite au Brésil Méridional en a reçu les pages suivantes que tout le monde lira avec plaisir, car elles donnent une idée d'ensemble de cette belle Province.
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Le Voyage. — Parti de Gênes le 11 Septembre 1932, je suis rentré le 8 Mars 1933, après un excellent voyage, grâce à Dieu.
A l'aller, j'eus comme compagnons quatre jeunes Frères, dont deux pour le Brésil Central et deux pour le Brésil Méridional, et en plus 9 prêtres de diverses congrégations. Chaque jour nous eûmes l'avantage de servir plusieurs messes et de faire la sainte communion.
Au retour, hélas: il n'en fut pas de même pour trois Novices Barnabites et pour moi. Si pour le religieux un jour sans messe et sans communion est comme un jour sans soleil, que penser d'une traversée de quinze longs jours, sans prêtre à bord !
D'autre part à l'aller comme au retour nous eûmes la consolation d'être reçus avec une amabilité charmante par les supérieurs, directeurs et confrères de Gênes et de Barcelone, puis du Brésil Central, à Rio de Janeiro, à Mendès, à Sao Paolo, à Santos. Tous se sont ingéniés à nous faire passer, en famille, quelques heures agréables. A tous, ma vive et fraternelle gratitude !
Du Brésil Méridional, de la visite extrêmement consolante, que j'y ai faite, je dirai d'autant moins qu'il y a plus à dire, paradoxe qui s'explique ainsi : ce serait vraiment trop peu de me borner à quelques mots, si élogieux fussent-ils, sur chaque Etablissement, plusieurs ayant réalisé des progrès très notables depuis quatre ans, époque de nia dernière visite.
C'est pourquoi il m'a paru préférable de me borner à quelques mots relatant, en partie du moins, l'aspect surnaturel du travail que font les Frères, chaque Directeur pouvant envoyer au Bulletin un rapport détaillé sur sou Collège.
Nos Établissements. — La Province du Brésil Méridional compte 19 établissements, et un total d'environ 6.000 élèves. On y compte 6 Gymnases ou Collèges d'enseignement secondaire. Le principal, le Gymnase national du Rosaire, à Porto Alegre, qui est la capitale du Rio Grande do Sul, compte 1.200 élèves.
Toutes nos Ecoles jouissent d'une excellente réputation, et nos Frères sont de plus en plus estimés des autorités religieuses et civiles. Voici un petit fait bien significatif. Lorsque nous rendîmes visite au Général Flores da Cunha, président de l'Etat, c'était quelques jours après la mort accidentelle du F. Louis-René. Il nous embrassa en pleurant et nous dit : « L'Etat vient de perdre un éducateur qui était au premier rang parmi les plus distingués. A lui et aux Frères Maristes qui ont élevé mes quatre fils, et qui rendent au Brésil des services inappréciables je ne saurai jamais assez témoigner ma reconnaissance ».
S. E. l'Archevêque de Porto Alegre et les évêques d'Uruguayana, de Santa Maria et de Pelotas, qui ont de nos collèges dans leur diocèse, MM. les curés et les religieux de diverses congrégations ont été unanimes dans leurs témoignages d'estime pour l'œuvre accomplie par nos Frères.
Puissent les ennemis de Dieu et des âmes, ne jamais prévaloir dans ce beau et grand pays, car leur haine se porterait aussitôt sur les éducateurs religieux qui contribuent pour une si large part à la formation chrétienne de cette admirable et généreuse nation brésilienne.
Retraites annuelles. — Il y en eut trois, outre les grands exercices de St Ignace, préparatoires à la profession perpétuelle. J'ai assisté dans ma vie à bien des retraites. Dans aucune, nulle part, je n'ai pu admirer plus de silence, de recueillement et de ferveur; plus d'empressement à faire sa coulpe, soit pour les moindres manquements durant la retraite, soit pour les fautes un peu notables de l'année; plus de générosité pour les pénitences publiques; plus de soin pour la bonne récitation des prières ; plus de dévouement aux petits emplois. Et ce qui m'a surtout édifié c'est que tous m'ont assuré que ce n'est pas extraordinaire, mais qu'il en est ainsi chaque année. Une province où les retraites annuelles sont si ferventes ne peut qu'être bénie du Bon Dieu.
Œuvres scolaires ou postscolaires. — Au Gymnase Santa Maria fonctionnent plusieurs œuvres. J'ai assisté notamment à une réunion de la Congrégation mariale. L'office de l'Immaculée-Conception, la lecture spirituelle, le pieux commentaire qui l'a suivie, la tenue des jeunes gens, tout m'a profondément édifié et les renseignements recueillis sur le fonctionnement et les résultats de cette œuvre n'ont fait que confirmer cette première impression si avantageuse.
Au Gymnase du Rosaire, à Porto Alegre, l'organisation des œuvres, l'Association des Anciens élèves, par exemple, peut servir de modèle. Ces derniers reçoivent chaque mois une invitation à la communion en groupe dans la chapelle du Gymnase et il est bien consolant de voir l'empressement d'un très grand nombre à y répondre.
Parmi les membres de cette Association, une élite s'est constituée en Conférence St Vincent de Paul. Assistant à une de leurs réunions, ce fut pour moi un étonnement et une grande joie d'y retrouver la piété, la simplicité, la bonne confraternité, la charité surnaturelle et l'ardeur apostolique que j'avais connues jadis à Paris, au centre même de cette œuvre admirable des Conférences de St Vincent de Paul. Chacun sait qu'elles sont aujourd'hui répandues dans le monde entier, et beaucoup ont lu les éloges remarquables que N. S. Père le Pape leur a décernées récemment; à l'occasion du centenaire de leur fondation.
A Sao Leopoldo, tous les élèves sont de l'Apostolat de la prière. Tous ont le saint Scapulaire ; et ils assistent tous les jours à la sainte messe.
A Porto Alegre, Collège. Sao Pedro, petit externat, on a organisé une Ligue de l'Enfant Jésus, qui fait merveille. Quel bonheur pour ce quartier ouvrier de la capitale, de posséder une Ecole où l'on cultive avec tant de succès l'esprit surnaturel !
A Villa Garibaldi fonctionnent, débordantes de vie, plusieurs œuvres dont les principales sont la Croisade eucharistique et les congrégations de N.-D. et des Saints Anges. Résultat pour la seule année 1932: 16 vocations dont 12 pour nous et 4 pour le séminaire.
D'autres œuvres dans la province vont se développant partout. Les encouragements et les directives du Chapitre Général en feront naître de nouvelles. Mais ce qui importe beaucoup plus que leur nombre c'est leur organisation et leur direction essentiellement chrétiennes, c'est leur but : promouvoir parmi leurs membres, la communion fréquente et fervente, l'esprit de sacrifice et le zèle pour l'apostolat; c'est leur résultat ambitionné: faire naître et se développer de nombreuses élites potin le inonde et de bonnes vocations pour le séminaire et nos maisons de formation. Voilà le thermomètre pour juger de leur valeur. Et, au fond, voilà ce qui attire surtout l'estime et l'affection pour ces œuvres. Tous nos Frères semblent l'avoir bien compris partout.
Vocations. — Les colonies allemandes et italiennes du Rio Grande sont des milieux très favorables à l'éclosion des vocations. C'est la principalement que s'alimentent nos trois Juvénats, contenant 162 enfants. Une famille de la colonie allemande de Santa Cruz a donné à l'Institut six de ses enfants, tous fidèles jusqu'ici à leur belle vocation. Le dernier vient de recevoir le saint habit des mains de son oncle, Jésuite; à notre retraite de la maison provinciale, le 6 Janvier dernier. Honneur à cette belle et chrétienne famille!
D'ailleurs, je me fais un plaisir de rendre à nos collèges ce témoignage que la plupart travaillent activement et avec succès à la culture des vocations. Rares sont ceux qui ne fournissent pas annuellement au moins une ou deux vocations sacerdotales ou religieuses. Pour ne parler que de la seule année 1932 nos collèges de Bom Principio, Guaporé et Santa Cruz en ont donné chacun quatre; celui d'Antonio Prado 7, et celui de Villa Garibaldi 16. Félicitations à ces cinq établissements pour leurs 35 vocations en un an.
Lorsque dans un Etablissement on compte à la fin de l'année scolaire de nombreux bacheliers ou diplômés, c'est pour cet Etablissement un titre de gloire dont, à bon droit, maîtres et élèves peuvent se montrer fiers.
Mais le plus magnifique Tableau d'honneur d'une Ecole sera toujours celui des vocations religieuses et sacerdotales qu'elle aura fournies. Aux yeux de Dieu et de l'Église, ce sont les plus beaux joyaux de sa couronne. Puissent-ils être partout les plus ambitionnés et les plus estimés!