Les Premières Noces dOr au Chili
09/Oct/2010
La psychologie nous affirme bien que l'habitude rend l'action de plus en plus parfaite. Mais les psychologues, comme les philosophes, dont ils sont une tribu, n'en sont pas à une sottise près.
Dans la vie pratique, leurs théories s'ajustent comme elles peuvent et il est certain que l'on s'efforce de réussir surtout ce qu'on fait pour la première fois. A preuve, les premières Noces d'or que nous venons de célébrer au Chili. Il faut bien dire que la splendeur de la célébration tient en grande partie à la sympathique personnalité du Jubilaire : le bon et pieux F. Job, aussi connu dans un vaste secteur de l'Institut, que son patient homonyme dans l'Ancien Testament.
L'histoire du bon F. Job n'est pas très variée puisqu'elle s'est déroulée dans les maisons de formation.
Mais quelle fécondité, à défaut de variété!
Plus de la moitié des sujets de la grande province d'Espagne et un bon nombre de ceux qui travaillent dans les pays de langue espagnole ont reçu de lui leur formation religieuse, aux noviciats de San Andrés, des Avellanas et enfin de Santiago du Chili. Le nom du F. Job et celui de Maître des novices sont inséparables et presque synonymes pour plus d'un millier de Frères.
Ajoutons à cette importante fonction la manière admirable dont il l'a remplie pendant de nombreuses années et l'on comprendra aisément le zèle mis à fêter un héros si méritant.
Les préparatifs commencèrent dans toutes les maisons du district dès que le C. F. Visiteur annonça l'heureux événement par une petite circulaire. La préparation fut particulièrement intense, cela va sans dire, à la maison de district. Le manque de moyens et d'éléments ne rebuta point les organisateurs.
Il n'y a pas de théâtre pour la séance récréative. Hé bien ! on a vite décidé de transformer, au jour de la fête, le dortoir des juvénistes en salle de spectacles provisoire; menuisiers et peintres improvisés créent une scène avec tous ses accessoires; le répertoire musical et dramatique est pauvre, hé bien ! des artistes surgissent et en si grand nombre qu'un programme á quatorze numéros, presque tous originaux, fut prêt huit jours avant la date fixée.
Cette date fut le 2 février. La journée s'ouvrit par le chant du Salve Regina du Centenaire, que toute la communauté chanta, pendant que le jubilaire s'avançait, entre le C. F. Visiteur et un F. Conseiller, vers une estrade installée près de l'autel. La Communion fut solennisée par des chants harmonieux. A neuf heures eut lieu la grand-messe. Un chœur, renforcé par la collaboration de plusieurs Frères des collèges voisins, interpréta la Messe Pontificale de Perosi. Après l'évangile, le célébrant surprit les assistants par une allocution où les belles pensées s'alliaient merveilleusement aux sentiments délicats que lui inspira sa vénération envers l'illustre jubilaire.
A midi sonnant on se rend à un réfectoire que les juvénistes avaient installé à l'ombre d'une belle avenue de figuiers. Pendant le repas un gracieux conteur, considérant peut-être que l'art culinaire est plus utile que beau, régala l'imagination d'amusants récits qu'on célébra par des rires spontanés et des applaudissements bien mérités.
Peu après, l'illustre jubilaire fait son entrée au théâtre provisoire au milieu des vivats retentissants des Frères, novices, postulants et juvénistes. A la suite d'un chœur de circonstance, un Frère, disciple du héros, traduisit dans une forme magnifique les sentiments et les vœux de plus d'un millier de Frères, répartis un peu partout.
Alors vint un bouquet spirituel offert par tous les Frères du District.
Puis la séance se déroula avec un drame tiré de la vie édifiante du Fr. Job. En cinq actes fut retracé l'épisode le plus douloureux de la vie du cher jubilaire : la fuite de Barcelone, lors de la révolution de 1909. La représentation fit grandement plaisir aux spectateurs dont quelques-uns avaient pris part pour de bon aux péripéties mises en scène. Des numéros variés de musique et de déclamation achevèrent de remplir les trois heures que dura la séance. Tous furent exécutés avec art ; mais deux surtout méritent une mention toute spéciale : une belle romance interprétée par le C. F. Guillaume, ancien visiteur, et un dialogue chanté, dans lequel un juvéniste, récemment arrivé de notre collège du Callao, interrogeait avec beaucoup de grâce un jeune Frère à propos de la fête que l'on célébrait.
La journée s'acheva par un salut solennel, au cours duquel on chanta avec beaucoup de ferveur le Te Deum de la reconnaissance. — Ad multos annos!