Liban – Syrie: Les événements et nos écoles
Maurice Karam
24/Oct/2010
Le Moyen et Proche-Orient étant à l'ordre du jour de la politique internationale, les lecteurs du Bulletin seront heureux d'apprendre que nos œuvres fonctionnent normalement au Liban et en Syrie, ce dont a pu témoigner le CF. Joannès-Eugène, A.G., après une récente Visite de Délégation dans ce secteur de la Province de Varennes-Orient.
Au Liban, nos collèges de Saïda, antique Sidon (330 élèves), de Jounieh (850 élèves au collège du Sacré-Cœur et 410 élèves à l'Annexe gratuite Saint-Joseph), de Gebaïl, ancienne Byblos (410 élèves) continuent d'être très appréciés de la population et des autorités tant religieuses que civiles. A noter que S. E. M. Camille Chamoun, Président de la République libanaise, Sa Béatitude Mgr P. Méouchi, Patriarche maronite et le Général Commandant en Chef de l'Armée, sont anciens élèves de nos écoles. Le Bulletin signale par ailleurs, l'Œuvre très apostolique des Catéchistes volontaires du Collège Saint-Louis de Saïda. Le Juvénat d'Amchit est un grand espoir pour ce secteur qui a tellement besoin de vocations libanaises et syriennes.
Malgré les vicissitudes politiques actuelles, le CF. Assistant a pu bénéficier du visa nécessaire et difficilement obtenu pour un court séjour en Syrie. Les collèges d'Alep (1.300 élèves) et de Damas (350 élèves) fonctionnent normalement malgré l'ambiance politique moins favorable qu'au Liban. Chacun sait que les relations diplomatiques sont pour le moment rompues, à la suite des événements de Suez entre ce pays arabe qui lie sa cause à celle de l'Egypte, et la France et l'Angleterre. Comme la presse l'a mentionné, fin octobre 1956, les écoles « françaises » d'Alep ont été l'objet de malveillance de la part d'un mouvement de rue dont il a été difficile d'établir l'origine. La Mission laïque a été assaillie et brûlée. Les écoles des Sœurs de Saint-Joseph de l'Apparition et des Franciscaines Missionnaires de Marie ont été pareillement très endommagées. Notre propre Collège Champagnat a été heureusement épargné grâce à un bataillon de soldats qui a fini par s'interposer à temps entre les assaillants et l'établissement.
Depuis, le calme est complètement revenu. Le Gouvernement syrien a même indemnisé les Sœurs en manifestant le vif désir de les voir continuer leur œuvre éducatrice, les relations culturelles étant maintenues. Des circulaires tracassières de l'Instruction Publique suscitent néanmoins des difficultés : un Directeur officiel civil a été placé dans chaque école étrangère, ce qui peut, par la suite, avoir dos conséquences regrettables. La population chrétienne surtout, reste très attachée à ces écoles qui jouent un rôle important dans ce pays à majorité musulmane. Puisse l'arc-en-ciel de la paix luire de nouveau sur ce Moyen et Proche-Orient, berceau du christianisme et plaque tournante de premier ordre entre trois continents.
L'œuvre des Catéchistes de Saïda. — Dans son numéro d'avril 1954, le Bulletin de l'Institut évoquait le beau travail accompli par les Catéchistes volontaires de Saïda, Liban. Depuis, cette œuvre a continué son apostolat et l'a même amplifié comme en témoigne cette lettre de son responsable au CF. Assistant et aux bienfaiteurs.C'est avec un réel plaisir et le cœur débordant d'une sainte allégresse que je me permets de vous mettre au courant de la marche de notre Œuvre Catéchistique qui est bien plus la vôtre car c'est grâce à votre aide généreuse qu'elle subsiste et qu'elle fait du bien dans ce cher Liban-Sud.
Les encouragements de la Sacrée Congrégation, interprète des volontés de notre" Saint-Père le Pape, Vicaire du Christ, ont attiré sur elle les bénédictions du ciel.
L'aide efficace et indispensable que nous prêtent les Révérends Pères Rédemptoristes, le R.P. Jean Hélou, curé de la paroisse maronite de Saïda, qui accompagne tous les dimanches nos Catéchistes pour prêcher et confesser, ainsi que le R.P. Pierre Cachan, moine Baladito, aumônier au Collège, qui confesse dans les villages où nous faisons célébrer le Saint Sacrifice de la Messe, nous ont permis d'organiser pour le moins une fois par mois une messe du soir dans chacun des villages où nous faisons le catéchisme. Ces messes sont de véritables succès apostoliques à en juger par le nombre considérable des assistants. Eglises toujours remplies de personnes de tout âge, des confessions et des communions nombreuses. A Mié-Mié, comme à Krayé et à Darb el Sim, le nombre des confessions et des communions a dépassé cent cinquante, dont un très grand nombre de personnes âgées. A la sortie de l'église, les gens nous supplient chaque fois de leur fournir souvent des confesseurs extraordinaires et de leur faire célébrer le Saint Sacrifice de la Messe le soir pour leur faciliter l'accomplissement du précepte do l'Eglise et la réception des Sacrements.
Le grand esprit de compréhension et de zèle tout apostolique1de Leurs Excellences Nosseigneurs Basilios Khouri et Antoine Khorsiche qui nous ont permis de faire célébrer des messes latines dans toutes les églises de leur diocèse et qui ont autorisé tout prêtre catholique disponible et voulant collaborer avec nous d'exercer son ministère dans le diocèse ont facilité énormément notre tâche. Cette collaboration inter-rituelle produit les plus heureux effets sur la population en faisant tomber cet esprit mesquin d'attachement immodéré à son rite et favorise l'esprit catholique de la Sainte Eglise.
En plus de Mié-Mié, que nous avons adopté au début de cette année, et qui groupe tous les dimanches près de deux cent cinquante personnes de tout âge, deux autres villages du diocèse de Tyr, Haggé et Adoussié, profiteront du dévouement des Révérends Pères, nos collaborateurs et des Catéchistes et cela à la demande de Son Excellence Mgr Doumit. Nous nous y rendons une fois par mois pour une messe du soir avec sermon, confession et communion. Les villages de Mamarié et de Iktanite que nous avions jadis abandonnés faute de ressources recevront nos jeunes et dynamiques missionnaires, dont le nombre dépasse la quarantaine, dès que la belle saison rendra les routes plus praticables.
La Révérende Mère Supérieure des Sœurs de Saint-Joseph de l'Apparition du pensionnat de Saïda a bien voulu permettre à deux religieuses de sa communauté de s'occuper d'une section féminine de Catéchistes volontaires. Ainsi quelques jeunes filles, sous la sage direction des religieuses, anciennes Catéchistes d'Alep, s'occupent des jeunes paysannes et de leurs mamans. Elles leur font le catéchisme, leur apprennent les prières et organisent des Congrégations Mariales. Cette aide providentielle nous permet d'atteindre un plus grand nombre de personnes car les jeunes filles qui, par timidité, n'assistaient pas à nos leçons de catéchisme se rendent volontiers chez les Sœurs et sont très heureuses de se sentir aimées, encouragées et conseillées. La section féminine fait partie intégrante de notre Société. Nous lui fournissons tout ce dont elle a besoin et lui assurons même les voitures pour le déplacement de ses membres. Ces nouvelles catéchistes se dévouent déjà dans les villages de Krayé, Aïn et Delb et Darb el Sim, mais nous espérons que dans un avenir très prochain elles nous dédoubleront dans tous les villages où nous exerçons notre activité.
Mlle Alexandra Antaki, directrice de l'Ecole Expérimentale « Rawdat el Fakir» a bien voulu, dès le premier dimanche de la fondation de Mié-Mié, se charger avec ses deux institutrices chrétiennes du catéchisme des filles dans ce village. Pour l'organisation elle dépend de notre Société, mais c'est la « Flamme », Société catéchistique au Liban, qui lui fournit ce dont elle a besoin.
Une autre preuve de la bénédiction du ciel est l'admission dans notre Société de six de nos anciens élèves qui résident à Saïda. Ils forment l'élément stable et mûr qui peut assurer la direction des catéchismes et constituent un noyau actif pour une formation d'Action Catholique que nous avons en perspective. De plus, cinq de nos grands et braves catéchisés de Darb el Sim qui ont toujours été fidèles à nos réunions depuis 1946, année de la fondation de l'Œuvre dans leur village, ont demandé leur admission comme membres actifs dans notre Société. Ils assurent actuellement, sous la direction de deux anciens, le catéchisme dans deux villages. Nous espérons que leur exemple sera suivi par les aînés de nos autres centres catéchistiques.
Le mérite de cette impulsion nouvelle donnée à notre Œuvre revient en premier lieu à Son Excellence Mgr Eustache Smith, vicaire apostolique, qui, lors d'une visite pastorale qu'il fit au Collège, s'intéressa vivement à nos missions, nous prodigua ses encouragements et attacha au service de notre Société deux Pères Rédemptoristes pour nous seconder et couronner notre action.
Peut-on passer sous silence le large esprit de compréhension que nous avons toujours trouvé auprès des Frères Maristes ? Le Cher Frère Directeur met à notre disposition trois vastes locaux pour nos réunions et notre matériel ; il reçoit très cordialement les Révérends Pères Rédemptoristes qui passent la journée du dimanche à Saïda. De plus, il accompagne un groupe de Catéchistes dans leur mission toutes les fois que ses nombreuses occupations le lui permettent et se fait un plaisir d'intéresser des personnes charitables à notre Œuvre.
Voilà, Cher Frère Assistant, quelques nouvelles qui pourront réjouir votre cœur d'apôtre et de Père et vous prouver que les Catéchistes Volontaires de Saïda font de leur mieux pour se montrer dignes de la confiance que vous avez bien voulu leur témoigner. Leur petite Société, grain de sénevé jadis, petit arbrisseau qui se ramifie actuellement grâce à la protection divine, ne pourra que prospérer puisqu'elle jouit de l'approbation de la Sacrée Congrégation pour l'Eglise Orientale et qu'elle suit très fidèlement les directives des représentants du Saint-Siège et de Leurs Excellences Nosseigneurs les Evêques dans les diocèses desquels elle travaille, lesquels lui prodiguent encouragements et aide tant spirituelle que matérielle selon leur possibilité.
Saïda, le 27 février 1957.
Le responsable : Maurice Karam.
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1 Cette photo a déjà paru dans un N° antérieur.