Nos défunts

17/Feb/2010

† Frère VENANCE, profès des Vœux perpétuels. – Frère Venance (Doyon Ferdinand Auguste) vint au monde au Bourg de Péage (Drôme), le 29 mars 1842, au sein d'une famille très chrétienne, qui donna deux de ses enfants à l'Institut.

A 17 ans il quitta le monde, pour entrer au noviciat de Saint Paul-Trois-Châteaux. Là, il se fit remarquer par son caractère doux, aimable, gai, serviable, qui le fit estimer de tous. Mais il se distingua surtout par sa piété fervente, qui s'alimentait clans la prière et l'union à Dieu ; par son obéissance, qui, dès ce moment, le mit entièrement et sans retour entre les mains de Dieu, pour ne faire que sa sainte volonté, manifestée par celle des Supérieurs.

Plus tard, il suffira de le voir prier, de l'entendre répondre aux prières, pour être soi-même porté à bien prier. Quant à son obéissance, perfectionnée par l'esprit de foi et la pratique, elle deviendra un modèle d'obéissance religieuse. ‘’Il jugeait juste et bon tout ce qui lui était commandé’’, selon l'expression de saint Jean Climaque, et il s'appliquait à le bien accomplir.

Pour ce bon religieux l'ordre donné était l'expression de la volonté de Dieu ; aussi ne se serait-il jamais permis ni critique ni blâme. Un désir manifesté était même pour lui un ordre formel, qu'il se mettait en devoir d'exécuter, disant parfois : "Quand il s'agit de la volonté de Dieu, on ne fait jamais trop, ni trop bien’’.

N'étant pas d'une constitution très forte, Frère Venance a cependant mené une vie fort active, faisant tour à tour les emplois qui étaient le mieux en rapport avec ses forces : tantôt comme professeur, tantôt au temporel, tantôt chargé de la porte ; mais sachant porter en tout le saint contentement du saint religieux. Doué d'une voix douce, très mélodieuse, il l'employait aux louanges de Dieu dans les chants sacrés ou à quelques pieux cantiques, quand le bon ordre le lui permettait.

Les dernières années de sa vie, il partageait avec ses confrères hospitalisés à Ruoms les emplois de la maison ; la charge de la basse-cour lui échut. Il y déploya les derniers restes de son dévouement à l'œuvre commune. Si, parfois, trop fatigué on l'invitait à se ménager un peu, levant le doigt et montrant le ciel, il répondait tout joyeux : « Là-haut, nous nous reposerons ».

Cependant la faiblesse faisait des progrès ; il s'y joignit par intervalles des crises nerveuses, qui le firent souffrir lui-même autant que les autres, et il s'endormit en paix dans le Seigneur, après avoir pieusement reçu les derniers sacrements, le 13 septembre 1912 ; après 53 ans de vie religieuse. – R. I. P.

 

† Frère BAUDÉLIUS, stable. – Ce bon vieillard que la mort, pendant la nuit de Noël, a ravi à l'affection de la communauté de Grugliasco, dont il était le doyen, était presque compatriote du Vénérable Fondateur. Né Jean-Baptiste Chapelon, à Saint-Victor Malescours (Haute-Loire), non loin de Marlhes, de parents foncièrement chrétiens, il vint à l'âge de 13 ans, en 1844, demander une place au noviciat de l'Hermitage. Il y fut reçu ; mais, comme il était encore bien jeune pour prendre l'habit religieux, il fut envoyé pendant deux ans au pensionnat de la Grange Payre, dont il suivit les cours avec plusieurs postulants qui se trouvaient clans les mêmes conditions que lui. C'était un premier essai de ce qu'on devait appeler plus tard les juvénats. En 1846 il revint à. l'Hermitage, où il prit avec le saint habit le nom de Frère Baudélius.

Dès cette époque, on voyait poindre en lui le caractère franc comme l'or, mais bouillant, impétueux, tout en dehors, qu'on lui a connu depuis. Une de ses sœurs, qui était religieuse et qui s'était beaucoup intéressée à sa vocation en concevait de vives inquiétudes. Elle mourut saintement, dans un âge peu avancé, et l'opinion générale, dans son couvent, fut qu'elle avait offert à Dieu le sacrifice de sa vie pour la persévérance de son frère. Le Frère Baudélius en était lui-même très persuadé, et il a dit bien des fois, dans l'intimité, que ce souvenir lui avait été d'un puissant secours, en des moments difficiles, pour réprimer les saillies de son humeur trop prompte et demeurer, malgré tout, dans le droit chemin1.

Au sortir du noviciat, en 1847, il fut envoyé à Marsac pour faire la petite classe, qui était fort nombreuse. Avec son tempérament vif et nerveux, il n'eut pas de peine à maîtriser ses élèves et il les fit progresser rapidement. La première fois que l'Inspecteur vint visiter sa classe, il fut, paraît-il, assez mal impressionné de sa frêle apparence et son air enfantin ; mais les années suivantes, en présence des résultats obtenus, il modifia complètement son opinion, et prodigua ses félicitations au jeune professeur. Il aura à les renouveler plus tard lorsqu'il retrouvera l'"enfant de Marsac’’, mûri par les années et aguerri par l'expérience, è la tête de l'établissement de Saint-Pourçain (1856), que le Frère Baudélius dirigea pendant six ans.

De là, il passa successivement avec le même titre de Directeur à Romanèche, à Ampuis et à la Côte-Saint-André, s'efforçant partout de maintenir la régularité dans toute sa vigueur, sans souci d'une popularité qu'il eût fallu acheter au prix de transactions avec le relâchement ou de concessions à l'esprit du monde. "Quand on a été Directeur, disait-il plus tard, on sent la nécessité d'être non seulement régulier, mais ponctuel’’ et l'on peut dire que, sous ce rapport, il a été, toute sa vie, un véritable modèle.

En 1884 il fut déplacé de la Côte et envoyé comme Econome au pensionnat Saint-Joseph, à Saint-Genis-Laval. Ce changement lui fut très pénible ; mais il ne s'en mit pas moins tout entier à ses nouvelles fonctions, qu'il remplit avec conscience, dévouement et succès pendant plus de vingt ans, soit dans cette maison, soit à Neuville et à Lyon où il fut Irais ensuite tour à tour pendant cinq années.

Enfin, en 1906, il vint à Grugliasco, où, durant six ans, il a usé le dernier reste de ses forces à entretenir le parc de la maison mère avec un soin et un goût qui faisaient l'admiration de tous ceux que le voyaient à l'œuvre. C'était pour lui un travail relativement pénible ; mais il s'y livrait avec plaisir, parce qu'il avait conscience d'être ainsi agréable à Dieu et utile à la Congrégation, qu'il aimait d'un amour tout filial. Malgré l'affaiblissement de sa vue, il faisait ses délices, dans ses moments de répit, de lire dans les Circulaires du R. Frère Supérieur ou dans le Bulletin de l'Institut le développement et la prospérité de nos œuvres ; et ici à Grugliasco, une de ses plus douces joies était de voir l'esprit du Vénérable Fondateur régner d'une façon si édifiante parmi les Grands Novices et les enfants du juvénat. — "Quel effet visible de la bénédiction de Dieu !’’, aimait-il à répéter.

C'est qu'en dépit de certaines brusqueries de paroles et de quelques accès d'impatience auxquels l'exposaient son caractère bouillant et son austère franchise, il avait vraiment un cœur d'or, comme ne tardaient pas à s'en apercevoir ceux qui avaient le bon esprit de ne point s'arrêter à ces dehors un peu rudes, qu'il était d'ailleurs le premier à reconnaître et à regretter.

Et sa piété était à l'image de son caractère. Elle était vraie, solide, de bon aloi, fermement établie sur une foi vive et une admirable droiture d'âme ; mais elle ne pouvait s'accommoder ni des effusions sentimentales dans les pratiques de dévotion, ni des langoureuses lenteurs dans la récitation des prières. Ce qu'il lui fallait, avec Dieu comme avec les hommes, c'était une rondeur en quelque sorte militaire qui, sans s'attarder aux accidents du chemin, allât droit au but.

Depuis de longues années, il était sujet à des fatigues d'estomac dont il se plaignait rarement, mais qui le firent beaucoup souffrir. Dans les derniers mois de 1912, en se combinant avec les progrès d'un emphysème pulmonaire, elles avaient presque anéanti ses forces, et ce n'est que grâce aux extraordinaires efforts de son énergie immorale qu'il pouvait se livrer encore à quelque petit travail.

Vers le milieu de décembre il dut s'aliter définitivement, et le 24 il s'éteignit sans efforts, muni de tous les secours de la sainte Eglise, pour aller célébrer au ciel — nous l'espérons la belle fête de Noël, dont quelques heures le séparaient à peine. Le Seigneur, à n'en pas douter, l'aura mis en possession de la paix annoncée par les anges, car il fut éminemment sur la terre un homme de bonne volonté. – R. I. P.

 

N.-B. — Nous avons également appris la mort des CC. FF. Segundo, Célien, Nahum, Wenceslao-Maria, Joseph-Régis, Euphrase, Halvarus, Jean-de-Rietti, Phlange, Vénérand, Louis-Honoré Marie-Ermin, Maximien, Severin, Marie-Rufinien, Symilien, et du postulant Henri Bös. Nous les recommandons aux pieux suffrages des lecteurs du Bulletin.

1 Une autre de ses sœurs, mariée à un Neyret, de Jonzieux, donna quatre de ses enfants à la religion. Deux sont membres de l'Institut : une de leurs sœurs prit le voile, et un de leurs frères, pour lequel Frère Baudélius fit beaucoup, est curé archiprêtre dans une importante paroisse dit diocèse de Lyon.

 

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