Nos défunts
11/Sep/2010
† Frère MARlE-OTHMAR, stable. – Encore une belle figure religieuse qui disparaît avec cet excellent Frère!
Fr. Marie-Othmar (Montredon Auguste) vint au monde à Chazeaux (Ardèche), le 16 mai 1841, au sein d'une de ces familles patriarcales, où la foi et la piété ont poussé de profondes racines, et dont lui-même garda toujours l'ineffaçable empreinte.
Dans ce milieu si bien fait pour élever les âmes, il apprit de bonne heure, des leçons et surtout des exemples de sa pieuse mère, ses premiers devoirs envers Dieu avec une tendre dévotion à la Sainte Vierge. Vers cette divine Mère il se sentait de plus en plus attiré â mesure qu'il avançait en âge : la récompense de sa piété filiale fut la vocation religieuse.
En effet, le 1ier octobre 1855 il entrait au noviciat de la Bégude. Là, sous la ferme mais paternelle direction du saint Frère Malachie, il se montra le modèle des bons novices, comme dans la suite il devait être le modèle des enfants du Vénérable Père Champagnat.
Placé par l'obéissance en divers lieux, avec des responsabilités différentes, partout il fut le confrère aimable, pieux, régulier : partout il se fit admirer des élèves et des parents comme maître habile et éducateur émérite.
Ayant en mains l'autorité, il se rendait compte de tout, conduisant paternellement, mais sans faiblesse, ses Frères et ses élèves, ayant à cœur la bonne formation des uns et des autres: "Pendant près de six ans, dit l'un de ses confrères, j'ai eu le bonheur de vivre avec lui: ses exemples et ses conseils, fruit d'une longue expérience, ont largement contribué à ma formation professionnelle. Il m'a toujours édifié par sa foi vive, sa piété intelligente et éclairée : son dévouement à l'Institut, son esprit de régularité, et son tact, qui excellait à corriger sans blesser.
Ennemi des louanges, il savait adroitement détourner les éloges qui lui étaient adressés, et les rapporter à la communauté.
Sous un extérieur toujours digne et grave, il cachait un excellent cœur et une volonté forte qui savait gouverner un caractère vif et enjoué, auquel se joignait un regard pénétrant, bien compris des élèves.
Par son dévouement à préparer les enfants à la première communion: par son zèle à les instruire avant tout de la religion, à les exercer aux chants et aux cérémonies de l'Eglise, il était un précieux auxiliaire pour le clergé paroissial. S'agissait-il d'œuvres de ce genre, il s'y prêtait très volontiers si ses devoirs d'état le lui permettaient, et employait tous les efforts de son zèle à les faire réussir.
Ses connaissances en agriculture et en apiculture lui attiraient l'admiration des paysans, qui parfois l'invitaient à visiter leurs champs et leurs plantations. Assez souvent il acceptait, les jours de promenade. Il donnait son avis sur les divers genres de culture, ayant soin de ne pas se retirer sans glisser une pensée religieuse, généralement bien accueillie par ces braves gens.
Conformément aux pieuses prescriptions de nos Règles, il réunissait les enfants en classe les dimanches, pour leur expliquer les cérémonies et les offices de l'Eglise, ou leur faire un catéchisme supplémentaire sur un ton un peu plus familier, qui mettait tout ce petit monde à l'aise.
Or, un jour le sujet l'amène à parler de la maison de Nazareth transportée par les anges. A peine a-t-il prononcé ces mots, qu'un élève venu depuis peu des écoles où la religion ne compte pas, se dresse, et ouvrant la fenêtre, il s'oublie jusqu'à s'écrier: "Oh, celle-là est trop forte! laissez-la passer!’’. Hilarité générale à cette incartade un peu audacieuse : mais, d'un regard scrutateur accompagné d'un hum! significatif, le catéchiste ramène le calme: il continue sans paraître autrement ému. La correction vint plus tard et fut comprise.
Il y avait quarante-huit ans que le bon Frère se dévouait â la tâche méritoire d'Instituteur chrétien de la jeunesse, lorsqu'arrivèrent les mesures persécutrices de 1903 contre les religieux. Comme à tant d'autres, on vint lui signifier d'avoir à fermer son école. Mais devait-il, pouvait-il même abandonner les enfants que Dieu lui avait confiés ? Il ne le crut pas. Tout en se conformant à la loi dans la limite on le lui permettait sa conscience, il revendiqua le droit de poursuivre sa mission auprès d'eux: et pendant trois ans encore, au milieu de tracasseries de tous genres, il put continuer à les instruire. A la fin cependant il dut céder à la force, et l'école fut fermée.
Il alla alors demander un asile à la maison de Pontós (Espagne) où, après six ans de tranquillité et de prières, il est mort saintement, le 15 juin 1913, en laissant à tous l'exemple d'une vie bien employée au service de Dieu et des âmes. – R. I. P.
† Frère MARIE-ACHILLÉ profès des vœux perpétuels. — Frère Marie-Achille (Jean Joseph Albert Lagarrigue), né à Colombiès (Aveyron) le 10 août 1877, entra au noviciat de Notre-Dame de Lacabane à l’âge de 15 ans, et il se fit dès lors remarquer par sa piété, sa docilité, son amour du travail et son heureux caractère.
Après une première année d'épreuve comme chargé du temporel à Ambarès, il revint comme scolastique à Notre-Dame de Lacabane. Intelligent et laborieux, il y fit de solides études, couronnées, le 4 octobre 1897, par le brevet de capacité. Il avait 20 ans.
Exempt du service militaire à cause d'un accident qui lui était survenu dans sa jeunesse à un de ses yeux, il put commencer dès lors sa vie de professorat : et, comme champ de son zèle, l'obéissance lui assigna l'école libre de Monsempron, où, pendant cinq années, il se fit grandement apprécier de ses élèves et de leurs parents par son habilité pédagogique, en même temps qu'il édifiait ses confrères par son bon esprit, son dévouement, et sa conduite franchement religieuse.
Ses supérieurs, qui voyaient en lui l'étoffe d'un excellent Maitre, l'appelèrent, pour compléter ses études, à l'Ecole Supérieure de Saint-Genis-Laval au mois d'octobre de 1902. Le temps, hélas! à ce moment-là, n'était guère favorable aux études. La tempête qui devait éclater quelques mois pins tard s'annonçait déjà menaçante, et il fallait se préoccuper avant tout d'en atténuer les conséquences : de sorte que le travail des bras était devenu plus urgent que celui de l'esprit. A fin de ne pas abandonner à la cupidité des spoliateurs des produits qui représentaient une grande part des économies de la Congrégation, il y avait lieu de les évacuer au plus vite, et cela demanda six longs mois de travail continuel de jour et de nuit. De ce dernier, le Frère Marie-Achille et ses confrères de l'Ecole Supérieure eurent leur large part : et l'on conçoit que ce ne fut pas de nature à rendre les esprits plus dispos pour l'étude du lendemain, sans compter que le seul spectacle de cette fièvre de déménagement exerçait une action déprimante sur tous les courages. Le programme, néanmoins, put être assez sérieusement creusé pour qu'un bon nombre ries Frères qui avaient suivi le cours sortissent victorieux, au mois de juillet, des épreuves du Brevet Supérieur et parmi eux se trouvait, à un des premiers rangs, le Frère Marie-Achille.
Les débris dispersés de la communauté de N–D. de Lacabane avaient trouvé un refuge â Oñate, oh l'on ouvrit une école et un petite pensionnat. Frère Marie-Achille y fut appelé comme Professeur : et, bien que ses connaissances en espagnol fussent encore assez sommaires, il fit si bien, par son dévouement et son industrie, qu'aux examens de fin de cours, il reçut les félicitations du Clergé, du Comité de l'Instruction publique et des Pères de famille.
Son séjour seulement n'y fut pas de longue durée: l'année suivante fut fondé le collège Durango, et, au grand regret des habitants d'Oñate, le Frère Marie-Achille y fut envoyé. C'est là que, pendant huit ans, il a été, pour ainsi dire, la cheville ouvrière de l'Établissement, fournissant à lui seul une tâche qui aurait pu suffire à occuper trois ou quatre personnes : obtenant, avec des éléments relativement faibles, des succès à faire envie à des collèges incomparablement mieux organisés au point de vue matériel, et se montrant avec cela le modèle, le boute-en-train et le porte-joie de la Communauté.
Âgé de 36 ans à peine, il promettait de rendre encore à la Province, à la Congrégation et à l'Enseignement chrétien de longs et précieux services, lorsqu'un malheureux accident vint le ravir tout à coup à l'affection de tous. Etant à prendre un bain à Pedernales, le 31 juillet dernier, avec un certain nombre de ses confrères, il fut pris subitement par un remous et enseveli sous les eaux, sans qu'il fût possible à aucun de ses compagnons de lui porter secours. Ce ne fut que deux heures après que son corps put être retrouvé. Hélas ! qu'il faut être prudent avec l'eau! et que de malheurs plus ou moins analogues nous avons déjà eus à déplorer!
Nous avons tout lieu d'espérer néanmoins que, pour être aussi subite, sa mort n'aura pas été imprévue, et qu'il aura trouvé un accueil miséricordieux auprès du Seigneur qu'il s'est tant appliqué à servir et à faire connaitre, et auprès de Marie dont il portait la pieuse livrée. – R. I P.
† Frère FINAN, profès des vœux perpétuels. — Frère Finan (Cornelius Mac Barron), naquit à Clonturkle, en Irlande, en 1845 et, tout jeune encore, il émigra en Nouvelle-Zélande avec ses parents. Plus tard, il s'était attaché au service de Mgr Grine, évêque de Christchurch. C'est là qu'il se trouvait, en 1888, lorsque fut fondé l'établissement que nos Frères dirigent dans cette ville. A peine les eut-il vus quelque temps à l’œuvre, qu'il reconnut dans leur genre de vie la vocation où depuis longtemps il se sentait incliné par une inspiration secrète, mais qu'il n'avait pas encore trouvée réalisée autour de lui. Malgré son âge déjà avancé (il avait 43 ans), il n'hésita pas à solliciter son admission dans l'institut, acceptant d'avance toutes les épreuves par lesquelles il aurait à passer dans ce but.
Après son noviciat, qu'il alla faire à Sydney et pendant lequel il se montra animé de dispositions excellentes, il revint en Nouvelle-Zélande, où, pendant une dizaine d'années, il resta chargé d'un emploi manuel, Il s'en acquitta avec dévouement et esprit de foi, donnant à ses confrères l'édifiant exemple d'une piété solide, d'une parfaite régularité et d'un grand attachement à sa vocation. Ce même exemple il ne cessa jamais de le donner plus tard au collège St Joseph de Hunter's Hill, et au noviciat de Mittagong, où il fut ensuite successivement placé.
Mais, avec l'âge, étaient venues les infirmités. Depuis plusieurs année il se voyait réduit à ne plus marcher que péniblement, à l'aide d'un bâton. Ne pouvant plus alors donner l'exemple de l'activité, il donna admirablement celui de la résignation, de la patience et de la conformité à la volonté de Dieu. Le Frère Provincial, qui le vit peu de temps avant sa mort, en fut vivement touché.
Notre bon Frère Final, écrivait-il, souffre beaucoup : depuis plusieurs semaines il n'a pu quitter le lit, et il semble près de sa fin : mais il s'en va comme un saint. Il est vraiment édifiant de l'entendre bénir Dieu, selon le bon vieil usage irlandais, dans presque toutes les expressions dont il se sert.
Mon cher Provincial — me disait-il dernièrement dans un entretien que j'eus avec lui — combien j'ai à bénir le bon Dieu! Je suis vraiment gâté pour le corps et pour l'âme. Le Prêtre m'apporte la Sainte Communion plusieurs fois par semaine. Les Frères (daignent le Seigneur et notre très sainte Mère les en récompenser!) font le possible et l'impossible pour rendre mes derniers jours confortables. Et lorsqu'ils sont au travail et que je suis seul, je m'entretiens de mes petites dévotions. Là, dans ce tableau que vous voyez, j'ai le bon Saint Joseph, et dans ses bras le divin Enfant. Ici, dans cet autre, c'est Notre-Dame de Lourdes qui me sourit : là-bas, plus loin, c'est notre même Mère affligée, la Mère des Douleurs, et je sens qu'elle m'aide à supporter tees petites peines qui, après tout, sont si peu de chose à côté des siennes.
Telle est, ajoutait le Frère Provincial, le fond inépuisable de la conversation de notre bon vieillard quand on va le voie : et nul doute que sa dernière ne soit sainte et précieuse aux yeux de Dieu.
C'est, en effet, dans de si enviables dispositions que le bon Frère, réconforté par tous les secours que notre sainte Mère l'Église offre à ses enfants à cette heure suprême, a passé de cette vie de douleurs à celle de la bienheureuse éternité le 19 avril 1913. – R. I. P.
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N.-B. — Nous avons également appris la mort des CC. FF. Joannès, Joseph-Paul, Louis-Raphaëlis, Pacomio, Armengol, Elie-François, Gabriel-José, et du postulant Gaston Coulembier.
Nous les recommandons aux pieux suffrages des lecteurs du Bulletin.