Progrès du Catholicisme au Basutoland

12/Sep/2010

Il y a bientôt trois ans, en racontant la fondation de l'École Saint-Joseph à Roma du Basutoland, nous avons rappelé brièvement les origines et les progrès de la foi catholique dans ce pays, confié, sous la houlette vénérée de Mgr Cénez, au zèle des RR. PP. Oblats de Marie Immaculée, qui ont appelé nos Frères à les seconder pour une petite part dans leur œuvre.

Nos lecteurs seront heureux d'apprendre que ces progrès, grâce à Dieu, se poursuivent et s'accentuent d'une façon très consolante. En 1906, la mission, peuplée d'environ 450.000 habitants, ne comptait encore, après 44ans d'apostolat, que 4.220 fidèles, répartis entre 13 stations desservies par un nombre égal de missionnaires. Or les dernières statistiques donnent les résultats suivants

Nombre de fidèles 15.412

Nombre de missions 18

Nombre d'écoles 19

Nombre d'enfants fréquentant ces écoles 2.135

                                          } protestants 104

Nombre de catéchumènes } 1.893

                                          } païens 1.789

 

                                             } d'adultes 106

Nombre de baptêmes (1913)} 1075

                                             } d'enfants 969

Nombre de mariages (1913) 140

Nombre de confirmations (1913) 162

 

C'est sans doute encore bien peu, en comparaison de ce qui reste à faire. Quinze mille catholiques, sur une population de près d'un demi-million d'habitants ! C'est encore le petit troupeau, le grain de sénevé, la petite mesure de levain dont il est parlé dans l’Évangile ; mais ce petit troupeau est en train de devenir multitude, ce grain de sénevé tend â prendre les proportions d'un grand arbre, cette mesure de levain étend son Action de proche en proche et est en voie de transformer progressivement toute la pâte. N'y a-t-il pas là de quoi soutenir le courage des vaillants missionnaires, à qui est dû après Dieu un résultat si plein d'espérances, et réjouir tous ceux qui s'intéressent au succès de leurs méritoires travaux ?

Une des plus consolantes conquêtes de notre sainte religion dans ce pays, au cours des dernières années, est celle de Moreno Griffith le Paramount Chief ou chef suprême des Basutos, sur la conversion duquel on nous permettra de donner ici quelques détails1. Pour qui connait l'étendue des sacrifices qu'elle exigeait, dans ce peuple où la polygamie est en vigueur parmi les chefs, elle présente un caractère vraiment héroïque et ne peut guère être regardée que comme un prodige de la grâce divine, d'autant qu'elle n'a pas été amenée, du moins directement, par l'influence des missionnaires.

C'est dans un rêve, comme il a lui-même raconté, qu'il entrevit, pour ainsi dire, le chemin qui devait le mener au sein de la seule véritable Eglise. Une nuit, pendant son sommeil, il vit un de ses ancêtres, qui, jetant sur lui un regard d'affectueuse bienveillance, lui montrait deux sentiers : l'un étroit et escarpé, l'autre large et facile, et qui lui disait en lui indiquant le premier : "Voilà, mon fils, le chemin qu'il vous faut prendre pour vous sauver : vous le trouverez dans l'Eglise Catholique’’

Peu de jours après, Griffith se rendait à la mission de Béthel pour demander à être instruit dans cette Religion qui devait être pour lui la voie du salut. Son désir ayant été exaucé, il fut inscrit au nombre des catéchumènes ; et, ponctuellement, tous les dimanches, il revint à la mission pour assister à la sainte messe et étudier son catéchisme comme le plus humble des Basutos. Après deux ans de cette préparation, il fut admis au saint Baptême, en octobre 1912, avec 106 de ses compatriotes. Depuis lors Griffith se conduit en chrétien sans reproches et fait l'édification de tous les autres fidèles.

Son élévation à la dignité de Paramount Chief, qui eut lieu trois mois a peine après son baptême, par la mort de Letsie II, son frère, dont il était le légitime héritier, ne le fit dévier en rien de ses convictions de vrai catholique. Un chef ayant eu l'audace de lui dire qu'il était de convenance qu'un Paramount Chief appartient à la religion païenne, et que par conséquent devait renoncer à la religion catholique, Griffith lui fit cette réponse, digne d'un chrétien de la primitive Église : "Mon titre de Paramount Chief, je vous le céderai sans regret, mais je ne permettrai à personne de me ravir le trésor de ma foi’’.

Le 15 février 1913, tandis que tous les prêtres de la mission se trouvaient réunis à Roma, autour de Mgr Cénez, Vicaire Apostolique, pour la retraite annuelle, Griffith, qui se trouvait dans les environs, s'y rendit dans l'intention d'assister à la sainte messe le lendemain, qui était un dimanche ; et ce ne fut pas un vulgaire spectacle de le voir faire son entrée dans les dépendances de la Mission, entourée de 50 de ses cavaliers. Naturellement, il y reçut le cordial accueil que lui méritaient à la fois son titre de Grand Chef et sa conduite de chrétien exemplaire, et Monseigneur lui fit présent d'un bœuf pour régaler les gens de sa suite. Le lendemain, après avoir assisté à la messe, il fit la visite de la Mission, lia connaissance avec les missionnaires assemblés, et le lundi il repartit en exprimant le désir de se trouver de nouveau à Roma pour célébrer la fête de Pâques.

Le Mardi Saint, en effet, il était de retour, avec 15 cavaliers, pour prendre part à la retraite des hommes, qui commençait ce jour là, et se préparer ainsi à sa Première Communion. Il en suivit fidèlement tous les exercices, et le Jeudi Saint, à la Grand’messe pontificale, il s'approchait pour la première fois de la Sainte Table, à la grande édification de tous les assistants. Il voulut aussi être présent aux cérémonies du Vendredi Saint, et à la procession, il accompagna le Saint Sacrement un cierge à la main. Sur son âme, singulièrement capable de sentir et de goûter tout ce qui est grand, noble et beau, tous ces touchants offices de la Semaine Sainte, de même que la grand'messe Pontificale du saint jour de Pâques firent une vive et profonde impression. Quelle jouissance, pour lui qui n'avait encore assisté à la messe que dans la pauvre chapelle de sa mission, de voir ainsi le culte catholique dans tout l'éclat de sa majestueuse beauté ! Aussi, quand un des Pères lui demandait s'il ne s'était pas ennuyé aux longues cérémonies des saints jours, il répondit naïvement : ‘’Oh non ! mon Père, j'étais émerveillé, au contraire, de la grandeur sublime des cérémonies de notre Eglise Catholique !’’.

Pour être la plus illustre, cette heureuse conversion de Griffith, n'est pas la seule où se soit manifestée pour ainsi dire visiblement la puissance merveilleuse de la grâce, et l'on pourrait en citer beaucoup d'autres exemples. Un réel mouvement vers le catholicisme se manifeste dans tout le pays ; partout on il y a un représentant de l'Église, le peuple va à lui, et nombreux sont les chefs qui ont demandé qu'une mission fût établie dans leur juridiction. Malheureusement, que peuvent faire les pauvres missionnaires avec un personnel apostolique si peu nombreux et des moyens d'action si réduits !

Et pourtant, bien qu'ils soient seulement 18, avec une poignée de catéchistes et de maîtres indigènes, ils enregistrent annuellement autant de conversions et de baptêmes que les protestants, qui, non contents d'être venus trente ans avant eux, disposent de ressources pécuniaires considérables et d'une admirable organisation, avec 250 écoles et plusieurs centaines de catéchistes et de maîtres indigènes. Que ne feraient ils pas avec des avantages égaux !

C'est principalement, on le sait, en vue de former de ces maitres chrétiens indigènes dont le besoin se fait si vivement sentir que nos Frères de Roma, à l'appel et avec le concours des RR. PP. Oblats, ont fondé leur école Saint-Joseph, dont le C. Frère Zephiriny, qui vient de la visiter en qualité de délégué du R. Frère Supérieur, nous apporte de bonnes nouvelles. Le désastre produit par l'ouragan du 22 décembre 1912 est en grande partie réparé, et depuis longtemps déjà tout y a repris son train ordinaire. Il y a eu en moyenne, pendant ces cinq ans, 52 pensionnaires et 34 externes. Avec le bâtiment qui est en cours de construction, il sera possible de loger 75 pensionnaires et 50 externes. Il y a lieu d'espérer que ce sera là une bonne pépinière d'auxiliaires précieux pour les missionnaires, dans l'instruction chrétienne des enfants indigènes.

Daigne le Seigneur bénir leurs efforts et ceux de leurs Maitres afin que ces espérances deviennent le plus tôt possible une heureuse réalité !

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1 Nous les empruntons, ainsi que toute la substance de cet article, au South African Magazine, Organe catholique de grand mérite.

 

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