Circulaires 381

Basilio Rueda

1973-11-01

A) - CERNER LE PROBLEME
I - Le problème. a) - le fait. b) - quelle question il pose ...... .
II - Trois réalités. a) - la prière existe. b) - la prière est une vérité présente à toutes les religions. c) - le christianisme a dit quelque chose sur la prière .
III - Et des questions.
IV - Comment répondre. a) - du dehors. b) - du dedans. c) - discussion autour d'une méthode
V - Essai de réponse à partir de définitions. a) - prière et transcendance. b) - nécessité psycho-théologique. 1) besoin de dire ce que l'on sent. 2) besoin de la vie baptismale
c) - Dieu fait homme se met à prier. d) - expression du cœur de 3 personnes:
1) moi individuel
2) moi, membre de l'Eglise
3) moi, membre d'une communauté
...au cœur de divers dynamismes
1) charnel .
2) naturel .
3) projetant un monde meilleur . . . .
4) vivant l'histoire du salut
VI - Conclusion des définitions.
B) — CHERCHER DES SOLUTIONS.
I - Pourquoi y a-t-il désaffection?
a) - à cause d'un formalisme antérieur
b) - par concession régressive.
II - Deux remarques.
a) - accent sur la prière personnelle
b) - redimensionner la sécularisation
III - Renouveau de la prière.
a) - constatations d'un renouveau: 1, 2, 3, 4, 5 . .
b) - principes d'orientation pour renouveau
1) base des principes: 1, 2, 3 . . . .
2) prière en l'Esprit
3) prière cohérente
4) qui donne la mentalité de Dieu
5) ecclésiale
c) - les rythmes
d) - tâches et étapes
1) Initiation
2) personnalisation
3) sobriété
4) les néophytes
5) structures
e) - problèmes de la prière communautaire . .
1) prière en commun et prière communautaire .
2) prière avec les Constitutions
f) - étapes de la prière communautaire:
1) livres
2) structures
lieu
temps
types de prière:
fervente
animée
créative
d'engagement ..... . . .
g) - lois de la prière créative: ..... . .
1) pas trop de changements . . . . . . .
2) proportions
3) convenances et précautions.
C) — CONCLUSION.
        Appendice
n° 6: PRIERE (appendice)
I. Idées de base
II. Le rôle ou les rôles de la prière spontanée
III. Principes conducteurs
IV. Conclusion générale

381

V.J.M .J .

                                                                                          Rome, 1iernovembre 1973.

Entretien sur la Prière 

               Mes Chers Frères,

PROLOGUE

 Le travail écrasant des retraites ne me permet pas de trouver le temps pour écrire la circulaire que je pensais écrire sur la prière.

Mais je crois avoir dit l'essentiel de ce que je voulais dire là-dessus dans une série de conférences qui ont été enregistrées, mises par écrit avec quelques retouches et dont j'ai accepté le texte tel que Vous l'avez maintenant, et qui est plus souvent du style parlé que du style écrit.

Plusieurs d'entre vous ont en effet exprimé le regret que j'aie passé deux ans sans écrire de circulaire. Soyez sûrs que ce n'est pas par négligence ; mais la connaissance directe de l'Institut par les retraites d'animation représente un travail considérable et qui est, lui aussi, très nécessaire. Je voudrais donc que vous trouviez tous dans ces quelques pages le témoignage de mon affection, car le sujet de notre entretien est le plus important qui soit pour nous maintenir unis dans cette vocation que le Christ a choisie pour nous.

Je me suis aussi posé le problème des auditeurs. Comment s'adresser réellement à tous en un nombre de pages restreint ? Ou bien on fait une exhortation qui satisfait ceux qui ont seulement besoin d'un encouragement ou bien on va au fond des choses pour répondre aux questions qu'on ne peut plus éluder, mais c'est beaucoup plus long.

J'ai cru devoir m'adresser non pas tant à ceux qui sont déjà convaincus, qu'à ceux qui sont perplexes et qui sont soumis à deux forces dangereuses :

– la remise en question théorique de la prière

– la dégringolade déjà réelle en eux sur ce point.

Pour ces destinataires-là j'ai cru devoir faire au début des considérations théologiques ou méthodologiques un peu ardues. Elles n'étaient pas nécessaires pour les autres. Cependant même chez ceux-ci, si le bon sens et l'aide de Dieu les maintiennent dans la fidélité, il se produit un bombardement agaçant, sinon nocif, d'objections contestataires dont ils devinent le vide et la fausseté, sans pour autant savoir y répondre. Les pages qui suivent les aideront peut-être dans cette défense des valeurs à laquelle ils voudraient participer.

Je penserai d'ailleurs à eux plus explicitement dans un autre texte que je rédigerai au début 1974, et où j'envisagerai ce qui manque au présent entretien, c'est-à-dire l'étude de difficultés moins fondamentales, dues plutôt aux circonstances, et la recherche d'une solution dans le dépassement personnel et le cheminement communautaire.

 A — CERNER LE PROBLEME

 I – LE PROBLEME 

               a) – Un fait : la contestation de la prière.

J'entre maintenant dans le vif du sujet, à partir d'une réalité qui est grave : il y a des endroits où des Frères abandonnent la prière. Les responsables de communauté et les Provinciaux s'efforcent alors de réagir, mais souvent provoquent l'irritation des fautifs. Tel Frère s'entendrait bien avec son supérieur si celui-ci n'était pas l'homme qui le réveille le matin et qui exige de lui la présence à la prière. D'où supplément de difficultés pour la vie communautaire.

Et puis, la prière est mise en discussion par des clercs, voire des théologiens. Dès lors les meilleurs religieux se demandent s'ils sont encore dans le vrai en étant fidèles. Il y a donc nécessité d'essayer une bonne fois d'aller au fond du problème.

               b) – Quelle question pose ce fait.

Sommes-nous en train de nous casser la tête pour une bagatelle ? Est-ce une nouvelle histoire du rabat ? On s'est battu en vain pour le rabat, ou ailleurs pour le latin ou pour le plain-chant. Et alors quelques-uns sont peut-être déjà en train de penser : à quoi bon compliquer la vie communautaire pour une chose que l'évolution historique de la religion fera apparaître, d'ici quelques années, dépourvue d'importance ?

Des bibliothèques, par exemple, ont été écrites pour défendre le droit divin des Etats de l'Eglise et aujourd'hui tout le monde pense que Garibaldi a libéré l'Eglise d'un boulet en lui enlevant ses Etats.

Vraiment la bataille de la prière va-t-elle faire partie de la liste des batailles perdues ? Il est permis, d'ailleurs, de constater que déjà certains aspects de la prière ont évolué. En liturgie, que de rubriques ont été thèmes à disputes, et qui aujourd'hui font sourire !

Alors, je me pose la question : Quand nous nous préoccupons de la prière, est-ce que nous faisons quelque chose qui Vaut la peine, oui ou non ? Est-ce que nous discutons de quelque chose qui est à la superficie du christianisme ou qui est son âme ? Est-ce quelque chose qui fut valable un temps ou qui l'est définitivement ?

Je vais donc d'abord chercher à donner une réponse au fond, car il y a toute une littérature qui répond à des pourquoi particuliers : Faut-il dire l'office marial ou l'office divin, ou en demi-heure ou en un quart d'heure, ou le matin, ou le soir, ou tous ensemble ou pas tous ensemble ? Je parlerai aussi de cela, mais je crois que ce n'est pas par là qu'il faut commencer. Il faut commencer par la prière elle-même. Ce n'est qu'ainsi que nous pourrons arriver où il faut arriver, et ceux qui disent : « Je ne peux pas » ou « Je ne veux pas », sauront s'ils disent non à une chose vitale ou à une bagatelle ; à une certitude ou à une erreur.

Mais la question n'est pas une question intellectuelle. Formulons-la brutalement en alternative : Par mes omissions, est-ce que je produis un désastre spirituel en moi et en ma communauté ? ou au contraire : Par ma fidélité, est-ce que je suis nuisible à ma communauté en l'encourageant à tourner la meule d'un moulin où il n'y a point de blé ? Suivant la réponse, je dois orienter ma vie de façon totalement différente.

Voici en tout cas le fond du problème. Je l'intitulerai si vous voulez : Prière, monde et vie

II – TROIS REALITES

 Nous allons nous poser une série d'interrogations autour de trois réalités.

               a) – La prière est une réalité vécue.

Ce dont nous parlons n'est pas un concept. Quant à savoir si cette réalité a raison d'exister, c'est une autre affaire que nous verrons plus loin. Mais elle existe.

               b) – La prière est présente dans toutes les religions.

Et là je vous avoue que je suis très impressionné par la prière de l'Orient, si peu que je la connaisse. Quand on va dans un temple bouddhiste ou hindouiste, on se rend compte de la place que tient la prière. En Thaïlande, 300.000 moines vivent, ou sans travailler, parce qu'ils ont une conception platonicienne de la vie, ou en faisant seulement un travail intellectuel, ce qui est à la fois platonicien et bouddhiste. Aristote, lui aussi, pensait que pour créer des œuvres d'art ou de pensée, il fallait le loisir, des gens libérés du travail, parce que ceux qui travaillent n'ont le temps ni de penser, ni de créer des œuvres d'art.

Et Vous savez que les iconographes du inonde byzantin se préparaient pendant des mois à peindre leur icône en faisant jeûner leurs yeux et tous leurs sens. L'Occident actuel pense parfois bien différemment, mais les impasses de notre civilisation nous font aussi douter qu'il ait raison.

Chez les moines bouddhistes, la Vie consiste essentiellement en un apprentissage de la contemplation. Et la virginité qu'ils pratiquent est orientée dans ce sens. J'ai demandé à un moine de Ceylan — le supérieur — si réellement leur projet de virginité était perpétuel. «Oui», m'a-t-il répondu. «Et il n'y a pas de chutes » ?, ai-je ajouté. — Si. — « Et s'il y a chute, le fautif est-il expulsé ou perd-il son caractère de moine ? » — « Non, nous sommes très tolérants ».

Effectivement, les bouddhistes de Ceylan ne sont pas comme ceux de Thaïlande qui croient en Dieu. Eux, ils professent plutôt une philosophie de la vie ; cependant même dans ce cas, la tolérance qui les caractérise, leur est inspirée par une contemplation, une oraison tournée vers la nature.

               c) – Mais nous sommes chrétiens et le christianisme a une révélation sur la prière.

A vrai dire, j'ai eu un jour à chercher avec un groupe de réflexion, à Rome, ce que disait St. Thomas de la prière et j'ai trouvé qu'il la réduisait pratiquement à la demande. Or vous savez combien la prière de demande est aujourd'hui en discussion. Qu'est-ce qui avait amené St Thomas à cette conception impétratoire de la prière ? C'était un raisonnement scolastique partant de l'idée que dans l'Evangile la prière se présente comme une demande. C'est vrai. Jésus parle de la prière sous forme à la fois dogmatique et impétratoire. Il expose ce qu'il croit sur la prière et il le fait dans une demande. Par exemple, dans la prière sacerdotale : Maintenant, Père, glorifie-moi auprès de toi de cette gloire que j'avais auprès de toi avant que le monde fût » (Jean 17, 5). C'est une prière de demande : Je prie pour eux. Je ne te demande pas de les ôter du monde, mais de les garder du mauvais » (Jean 17, 9 et 15). Encore une demande. Jésus donc demande et en même temps réfléchit et révèle le mystère ; demande et révélation : En vérité, en vérité, je vous le dis, si deux ou plus de deux se mettent ensemble pour prier en mon nom, je serai au milieu d'eux et mon Père leur accordera ce qu'ils demandent… Si vous qui êtes mauvais, savez donner ce qui est bon, à plus forte raison votre Père… etc. … ».

Le message biblique, surtout néotestamentaire, sur la prière, a donc longtemps porté les chrétiens à mettre tout l'accent sur la puissance impétratoire de la prière, jusqu'à la réduire à cela. C'est l'Esprit-Saint qui s'est chargé de lui donner un second souffle et de faire comprendre que la prière, comme j'expliquerai plus loin, est aussi autre chose.

Mais en attendant qu'est-ce qui s'est passé surtout dans les périodes de décadence ? On a tout simplement oublié que le chrétien est fondamentalement un homme mort aux désirs de la terre : l'argent, la chair, l'orgueil de la vie ; que le chrétien est un homme de l'Esprit ; que le chrétien est un homme qui doit vivre au rythme de l'au-delà et donc que sa prière doit être une interprétation de la théologie chrétienne. Oubliant tout cela, on en est resté au geste de tendre la main pour demander les choses auxquelles le chrétien devrait être mort. Et le capitaliste a demandé que ses affaires aillent bien ; que la récolte de l'Equateur soit aussi basse que possible pour que la Colombie puisse vendre plus, etc. … Et Voilà comment on a vidé la prière de contenu chrétien pour la remplir d'un autre contenu, alors que le moine bouddhiste, bien avant St François, était, lui, capable de renoncement total. Et pourtant il existe un message révélé sur la prière, la vraie prière. Et ce sont ces sources, peut-être cachées, qu'il faut redécouvrir. 

III – ET DES QUESTIONS

 Mais avant de procéder à cette redécouverte, je veux me poser quelques questions :

– Quel est le sens de ces trois réalités ?

– En quoi la prière sert-elle à l'homme ?

– En quoi sert-elle à Dieu ?

– A-t-elle un présent ?

– A-t-elle un avenir ?

Le monde d'aujourd'hui a tendance à se croire différent du passé. Il y a eu un seuil. Et l'on peut entendre des affirmations du genre suivant : La prière est une forme surannée de religiosité qui avait cours à une époque révolue », – plus précisément jusqu'au moment où l'homme s'est rendu compte qu'il était le créateur de son destin. Comme dit Sartre : Tant que l'homme espère, il n'est pas libéré. Ce n'est que lorsqu'il devient désespéré et qu'il sait que personne ne le libère, s'il ne se libère tout seul, et qu'il ne met plus au-delà du firmament ses espérances de libération, mais qu'il sait que cette libération est le fruit de ses mains, c'est seulement alors que son désespoir devient actif, que son désespoir devient efficace et qu'il commence à être efficacement sauveur ». De telles phrases sont terribles, mais elles ont l'avantage aussi de poser le problème de la relation entre prière, vie et libération. 

IV – COMMENT REPONDRE ?

                a) – Du dehors.

Est-ce possible d'aborder la prière dans une conception non chrétienne de la vie ? A-t-elle un but ? A-t-elle un effet ?

Ce genre de questions semble oiseux. Cependant le dialogue avec les non-croyants est de plus en plus important, même sur ce point, et le communiste français Garaudy a pu écrire en collaboration quelques pages d'un livre qui s'intitule : « Un risque appelé prière », où il avoue que ses contacts avec bien des chrétiens, ces dernières années, ne lui permettent plus de dire que la religion est l'opium du peuple : « il n'est plus possible de dire que le chrétien est révolutionnaire bien que croyant, mais, précisément parce que croyant ». C'est dire qu'il découvre une influence de la prière sur l'authenticité de la Vie, cc qu'il appelle « la pression du futur sur le présent, ou en termes chrétiens : la présence de Dieu ».

               b) – Du dedans.

Quant à moi je parlerai à partir de la foi et surtout de la théologie. Et je voudrais d'abord éclairer un peu le dilemme irritant : qu'est-ce que la théologie ? Est-ce réfléchir à partir d'une situation ? ou à partir de la révélation de Dieu, mais selon des principes scientifiques adéquats qui ensuite peuvent s'appliquer à des situations et donner une pastorale ? Suivant le choix, nous avons une biologie ou une théologie. Cela ne veut pas dire que je tienne à un système de pensée. Je veux simplement réfléchir, avec une méthode correcte, à partir du donné de la révélation.

               e) – Discussion autour d'une méthode.

Bien sûr, je pourrais réfléchir à partir de ma foi subjective, mais Vous savez que les formes de subjectivité sont diverses à l'infini ; et elles produisent une infinie diversité dans la présentation du message de Jésus et dans la manière de le faire passer dans la vie.

Je fais ici une digression qui aidera à comprendre. Un religieux catholique parlait à un groupe œcuménique qui faisait une retraite. Des pasteurs protestants lui demandent s'il accepterait de concélébrer avec eux. « Non, répond-il, car nous n'avons pas la même foi, le même Credo. Vous ne croyez pas en l'eucharistie ». Un des pasteurs lui dit alors :

Père, faites bien attention à ce que vous dites, parce que vous connaissez votre foi, mais vous ne connaissez pas la nôtre, et nous, nous savons en quoi nous croyons. Avant de dire que nous ne croyons pas en l'eucharistie, posez-nous quelques questions et nos réponses vous permettront de voir si nous coïncidons ». Après analyse, le religieux devait reconnaître qu'ils croyaient en l'eucharistie. Ce en quoi ils ne croyaient pas c'était en l'hylémorphisme, doctrine sur l'interaction de la matière et de la forme, ce qui est bien différent. Ces pasteurs croyaient en l'eucharistie comme contenant Jésus vivant et Vivifiant. La divergence était dans toutes les querelles autour » : si le pain s'est transformé en ceci ou cela, s'il s'est évaporé, atomisé, dirions-nous, en neutrons et protons. Et ceci est autre chose.

Si en effet nous ne distinguons pas l'essentiel de l'interprétable, nous pouvons nous attarder à des conclusions qui relèvent de la chimie plus que de la foi : à la limite on calculerait la puissance des sucs gastriques de chacun pour fixer le temps de son action de grâces, car le temps de la présence réelle du Christ varierait de l'un à l'autre. Des choses de ce genre ont été écrites. Allez faire un dialogue œcuménique avec de telles idées.

Si j'ai pris ce long exemple, c'est pour faire comprendre qu'il peut y avoir, au sein d'une même foi, bien des manières de faire passer dans la vie le message de Jésus, et c'est pourquoi j'ai besoin de me situer face au donné révélé plutôt qu'à mon expérience personnelle.

Donc, après avoir souligné l'importance de la méthode, je propose de prendre la méthode phénoménologique : on part du donné tel qu'il est, avec les limites qu'il a ; on ne néglige pas les acquisitions de la recherche biblique, à condition d'être bien d'accord que ce qui compte, ce n'est pas ce que croient X… ou Y…, c'est le donné lui-même…

Après bien des recherches, des exégètes arrivent à la conclusion : « Une chose est sûre : Il y a eu une communauté primitive qui a cru en Jésus ressuscité et a annoncé sa résurrection. Maintenant, qu'il soit ressuscité ou non, cela nous ne le savons pas ; que cela ait été un fait historique ou pneumatique, cela nous ne le savons pas, etc. … ».

Où Va cette attitude ? Vers un nouveau fidéisme issu d'un progrès scientifique qui oblige à la critique des sources. Il s'agit d'un fidéisme virulent qui nous accule à la constatation : « Tout le donné historique s'évapore : il ne nous reste plus rien ! ». Et c'est pour se protéger qu'on se réfugie dans la foi des gens de la primitive Eglise, cette foi qui les a amenés à organiser les premières communautés de la Pentecôte. Mais le danger c'est que cela ne durera que jusqu'à une période encore plus critique où l'on dira : « La foi des communautés de la Pentecôte a-t-elle vécu d'illusion ou correspond-elle à un donné objectif qui a trouvé son expression pastorale ?

J'ai donc une certaine crainte, que les séries d'impasses où l'on s'engage révèlent un manque de courage à affronter le réel. Or, il s'agirait seulement de bien comprendre la Sainte Ecriture. La Sainte Ecriture ne s'est pas faite avec des cassettes qui enregistraient ce que disait Jésus-Christ, ou grâce à des gens qui avaient une mémoire prodigieuse. Nous ne pouvons pas non plus retenir les explications que l'on donnait encore il y a 25 ans pour justifier les manques de cohérence d'un récit à l'autre de la résurrection ou d'un autre événement, etc. …

Que dire alors ? Eh bien je répète que je veux, pour la prière, essayer de faire une théologie à partir du donné révélé. Ce donné révélé nous en ferons une relecture, en tenant compte des méthodes scientifiques, mais toujours avec un but de conversion et non pour nous mettre à la remorque de X ou Y. Ce n'est pas leur foi que je dois chercher à comprendre, mais la mienne que je dois chercher à bien établir sur la parole du Seigneur. 

V – ESSAIS DE REPONSES

 Je vais donc essayer de voir ce qu'est la prière, si elle a un vrai rapport avec la vie chrétienne et s'il vaut la peine de s'en occuper.

Je partirai de définitions qui chacune, peut-être, Vous paraîtra abstraite mais que j'essaierai d'éclairer par la Révélation biblique.

a) – 1Ière Définition : La prière est le commencement, l'essence et l'anticipation de la transcendance.

Vous voyez tout de suite qu'il s'agit là de la prière au sens non utilitaire, au sens gratuit. Cela n'empêche pas qu'elle soit utile. Cela n'empêche pas non plus que l'on se fasse parfois une fausse idée de la gratuité. Il est aussi insuffisant de se demander : « A quoi tee la prière pour l'action » que de se réfugier dans la prière pour s'évader de l'action. La prière n'est pas un « Je suis pour telle chose » ; elle est un « Je suis », mais un « je suis » avec toutes les exigences de son être.

Même dans la demande, je ne puis me limiter à la demande. « Seigneur, donne du pain à ceux qui n'en ont pas », doit m'obliger à la cohérence : Qu'est-ce que je fais pour donner du pain à ceux qui n'en ont pas ?

Notre cœur chrétien ne fonctionne bien que s'il a systole et diastole. Sans le double mouvement : prière et vie, notre prière est évasion. Dans l'ordre individuel, nous l'avons toujours reconnu. Je sais très bien que si je dis : « Seigneur, rends-moi pur », en ne faisant rien pour être pur, je mens. Mais ce qui Va de soi sur le terrain individuel n'allait pas de soi sur le terrain social, ou politique ou institutionnel. Bizarre, n'est-ce pas !

Donc, avant de parler de l'utilité de la prière, il faut parler de sa nature transcendante ou eschatologique qui est sa première dimension. A la fin des temps la prière changera de forme : il n'y aura plus de demande et pourtant l'eschatologie sera prière.

Un exemple. Lors d'une retraite à Avila, quelques Frères pleins de zèle, après la retraite, allèrent voir un brave homme, un incurable, Juan, dans sa maison. Et entre autres choses ils lui demandèrent « Que sera pour toi la vie éternelle ? ».

Sa réponse fut la suivante : Continuer à faire ce que je fais : contempler ».

Vous voyez ; cela change tout, et il faut bien reconnaître que cette Vision pure, profonde, parfaite de la prière n'a pas très souvent été comprise. Et pourtant fondamentalement le futur commence dans le présent par l'expérience intérieure, sous les formes de la foi, dans la mesure où le cœur s'ouvre pour embrasser l'humanité et souder tous les cœurs en un seul.

Quelqu'un me parlait récemment d'un grand ami de Teilhard de Chardin. Lorsque ce dernier était vivant, ils n'avaient tous deux presque pas de difficulté pour entrer tout de suite en un dialogue contemplatif parce que Teilhard était un homme qui vivait presque toujours en contemplation.

J'insiste sur cette idée : La prière est en soi le commencement, le balbutiement d'un dialogue qui ensuite va trouver toute sa splendeur. Elle est l'essence et l'anticipation de la transcendance. Donc au lieu de perdre notre temps à nous demander si elle est utile ou inutile, si le culte doit consister ou ne pas consister en une prière, etc. … je crois que l'on peut d'abord retenir la définition ci-dessus, et qu'elle vaut même pour des chrétiens non consacrés par la vie religieuse ou le sacerdoce. Il n'y a pas si longtemps que l'on s'est vraiment préoccupé d'évangéliser les divers aspects de la vie : vie conjugale, dimension sociale, etc. … La prière et le culte, eux, on s'en était occupé depuis longtemps. Mais la montée des autres valeurs chrétiennes : amour, travail, engagement politique et social, etc. … allait produire un choc dialectique et la grande question allait Venir : Comment la prière a-t-elle une valeur, un sens, une utilité pour une action dans le temps et dans le monde ? Après bien des balbutiements sur son utilité, on arriverait au point central : elle Vaut par elle-même.

 Je vous renvoie à l'épître aux Hébreux : elle a des phrases qui pourraient former un traité de prière liturgique, dans le sacerdoce unique du Christ. Et l'on comprend là bien des choses, et l'on y trouve bien des réponses contre des arguments que l'on échafaude aujourd'hui autour de la non-utilité de la prière.

2Ième Définition : La prière est pour le chrétien une nécessité psycho-théologique vitale.

Pour comprendre, il faut d'abord se demander ce que c'est qu'un chrétien. Non pas celui qui «pratique », mais celui en qui la vie de Jésus se déverse, qui est vécu par Jésus, par l'Esprit de Jésus. Or, s'il vit avec l'Esprit de Jésus, c'est dans la mesure où le baptême monte en lui comme une écume qui envahit son cœur, sa tête, les critères de son jugement, sa conscience. Je viens de nommer ici les divers éléments subjectifs de la vie, de l'agir, des engagements. Mais en se limitant à la sphère purement psychologique, on peut dire que là où monte le baptême, la nécessité de l'oraison SE FAIT SENTIR. Et si l'on ne sent pas le besoin de l'oraison, il faut se demander pourquoi, car il n'est pas normal que dans un chrétien qui a atteint un certain niveau, la prière ne soit pas devenue une nécessité.

Je m'explique. Il y a deux formes du besoin de prière, ou si vous aimez mieux, du besoin de Dieu : l'une est purement psychologique, l'autre psycho-théologique. Déjà la première peut être un embryon de prière chrétienne : elle n'est pas cependant la prière chrétienne. La seconde, elle, est la prière chrétienne. Prenez par exemple l'étrange prière d'Unamuno : Toi qui n'existes pas, aie pitié de moi, parce qu'on m'arrache l'être. Toi qui n'existes pas, dans ton néant, souviens-toi de moi et aie pitié de moi ». Nous vivons là le drame extraordinaire d'un homme qui a besoin de ce je ne sais quoi qu'il n'a pas pu créer et qui est ce qu'il désire créer. Il ne prie pas un Dieu qui existe ; il a besoin de faire en sorte que Dieu existe. Tout un aspect chrétien est ici à respecter. Même si cette forme du besoin religieux est pour nous insuffisante, elle peut nous aider à comprendre des objections aujourd'hui courantes.

Prenons l'objection suivante : Vous avez contemplé. Vous avez eu une extase. C'est tout simplement une autre forme de l'ivresse. Tout ce que vous avez fait ç'a été de dialoguer avec la création subjective de votre désir que vous avez projeté hors de vous-même ». Si c'était vrai, il faudrait, bien sûr, ne plus perdre notre temps, car nous serions en pleine aliénation, ou tout au plus, il faudrait laisser ce moyen aux personnes qui ne peuvent trouver dans une vraie action le remède à leurs besoins psychologiques. Mais telle n'est pas la vraie prière, surtout la vraie prière chrétienne. La prière chrétienne, non seulement n'est pas aliénée, non seulement a conscience de ce qu'elle fait, mais elle perfectionne et humanise ce que l'homme fait.

« Se rendre compte » : voilà ce qui rend humain bien des choses qui autrement seraient inhumaines. La plante ne se rend pas compte. L'animal, lui, se rend compte, mais avec une conscience qui ne détient pas le sens, qui ne comprend pas le pourquoi de l'acte. L'homme, au contraire, a le pouvoir de se rendre compte en profondeur.

La vie chrétienne nous a été donnée au baptême. Mais le pouvoir de nous rendre compte que Jésus vit en nous sera en proportion de notre pouvoir de mettre en œuvre notre baptême. La prise de conscience de notre baptême, peu à peu mise en œuvre, c'est la foi. Cette même prise de conscience en désir, c'est l'espérance. Cette même prise de conscience qui se propose l'union et réalise l'union, c'est l'amour. La vie baptismale, la vie chrétienne, a donc une conscience, et la conscience, fondamentalement, a des moments privilégiés où elle se concentre, se privatise, laisse de côté l'action pour vivre et respirer ce qu'elle est.

Prenez le cas de deux amoureux qui se parlent depuis une heure. Je leur dis qu'ils pourraient aussi bien pendant qu'ils sont là, nous aider à mettre en fiches IBM quelques enquêtes et qu'ainsi, tout en continuant à parler, ils gagneraient un peu d'argent en vue de leur mariage. Ils risquent de répondre non, parce qu'ils ont besoin de la privatisation dans leur conversation ; ils ont besoin que pendant ce moment, la conscience qu'ils ont l'un de l'autre ne soit entravée par rien, parce que, s'il y a des moments où l'on n'a guère besoin d'être conscient, il y en a d'autres où il faut être parfaitement conscient.

Fondamentalement, la prière est l'exercice de la foi ; mais la foi est dialogue ; elle ne consiste pas à ruminer ce qu'on croit ; elle consiste à parler « avec », « au sujet de » ou « à partir de ». Elle demande ce qu'elle aime et qui pourtant n'est pas dans la foi. Elle exprime l'amour qui déjà palpite dans le cœur. Oui, fondamentalement, c'est cela la prière.

Et attention : logiquement toute critique des formes de la prière doit partir de ce noyau existentiel. Le danger, plus d'une fois, c'est de faire une théologie de la prière à un certain niveau, puis de passer à l'étude des formes de la prière en oubliant ce niveau.

C'est ici la solution à la demande souvent posée : Quel sens a la prière, surtout la prière de demande, pour nous introduire au dialogue avec Dieu, avec un Dieu qui sait d'avance nos besoins, qui est assez bon pour nous donner ce qu'il nous faut et qui était bon avant que commence notre besoin ?

La prière ne peut pas consister à faire comme les païens : multiplier les paroles pour être plus sûrs d'être exaucés. Non, vraiment la prière chrétienne ne se limite pas à la demande. Elle est un dialogue de foi et d'espérance. Une foi qui est en contact avec le monde et une espérance qui est engagée dans la bataille du monde.

La prière chrétienne est un dialogue dans la foi, un dialogue dans l'espérance. Elle est accordée à cette belle image de l'Eglise : la chaste prostituée. Chaste prostituée, en effet, cette Eglise qui mène l'homme du péché à la sainteté ; qui conserve le projet élaboré dans l'Evangile, en se heurtant sans cesse à la réalité quotidienne ; qui sent les décalages et veut, quand même, dans les douleurs de l'enfantement, la rédemption où elle est sur le point d'arriver, mais où elle n'est pourtant pas arrivée. Elle devient espérance et c'est de là qu'elle tire la prière de demande. Celle-ci n'est autre que le cri d'appel à la rédemption, mais elle est en même temps cri d'action de grâces, parce que la rédemption est déjà là. En effet, d'une part, elle a été réalisée en Jésus ; et, d'autre part, les tendresses et les bontés de Dieu qui se sont déversées sur l'Eglise au long de l'histoire sont une solide raison d'attendre la suite.

Un chrétien ne prie pas parce que Dieu a besoin de prière. Dieu n'a pas besoin de prière. C'est la vie baptismale, semée en l'homme, qui a besoin de la prière et pour deux raisons :

1°. L'homme a besoin de dire ce qu'il sent et tout homme qui a des expériences profondes et ne peut les communiquer souffre d'une vraie mutilation, parce qu'il se voit obligé de vivre en solitude et d'ensevelir les choses les plus denses et les plus belles de sa Vie,

2°. La vie baptismale a besoin aussi de la prière, parce que la prière est le moyen le plus puissant d'évangéliser le cœur humain non encore évangélisé : à force de dire les choses avec le cœur, on finit par les sentir avec le cœur et à vivre avec le cœur ce qu'on a appris.

Il faut donc faire attention à l'immense pouvoir d'évangélisation de la prière. Faute de cette attention, bien des religieux aujourd'hui se vident de l'Evangile et se remplissent d'une anthropologie non évangélique. Mais cependant tout cela aussi se met en place, d'une manière plus profonde qu'on ne croit, chez bien des chrétiens.

Revenons maintenant à la question : Qu'est-ce que la prière ?

La réponse doit nous permettre de voir ce que vaut la prière.

Peut-on être chrétien sans prière, ou au contraire, la prière est-elle un élément si essentiel de la Vie chrétienne que, si elle tombe au-dessous d'un certain seuil, la vie chrétienne est en péril.

Eh bien oui, il faut dire que la prière est une nécessité vitale de la vie chrétienne ; quiconque a la vie chrétienne, tôt ou tard, et à mesure que sa vie est plus chrétienne, doit se découvrir le besoin de prier. Sentir le besoin de prier ne veut pas dire pour autant savoir prier, mais c'est au moins un point de départ. Dans une retraite du Conseil Général, un Frère Conseiller Général apportait l'exemple suivant : Un Frère ne se lève pas et ne va pas à la prière, systématiquement, donnant pour raison qu'il est malade et ne peut se lever à l'heure ; et qu'ensuite il a sa classe et n'a plus le temps de prier. Le prédicateur présent demande alors : Ce Frère souffre-t-il de ne pouvoir prier et de passer sa vie sans prière ? Réponse : non. Et le prédicateur d'enchaîner : Ce Frère doit quitter la vie religieuse. Là où on ne peut prier, il n'y a pas de vie religieuse, et s'il n'y a pas de vie religieuse, quel sens peuvent avoir les vœux ? ». 

3ième Définition : La prière est une épiphanie anthropomorphique de Dieu, une manifestation miséricordieuse par laquelle Dieu assume une humanité et se met à prier.

 L'homme tend à devenir le Christ en prière. Et, même si cela est rare et peut paraître exagéré, c'est quand même réel.

Je pourrais ici reprendre la comparaison très belle de la vigne et des sarments, mais j'ose en prendre une autre qui sera peut-être trop réaliste, mais qui peut aider à bien comprendre. C'est celle de l'enfant dans le sein de sa mère.

Il ne respire pas ; c'est sa mère qui respire pour lui ; c'est elle qui lui oxygène le sang par sa respiration. Le cœur du petit ne fait pas d'effort pour battre, car il n'a pas de physiologie circulatoire ; sa circulation se fait grâce à celle de sa mère. Il arrive que, quand la mère est trop faible, son cœur n'arrive pas à alimenter la circulation de deux personnes ; il y a danger pour elle d'une crise cardiaque. Le fœtus vit en effet de la circulation de sa mère. De même il ne s'alimente pas ; c'est la mère qui mange, qui digère, assimile pour lui et lui envoie l'alimentation par le sang. De même pour la désassimilation. C'est réellement un être humain qui vit, mais d'une Vie qui fonctionne par suppléance biologique, d'une Vie assurée non organiquement, mais cellulairement, histologiquement, parce que les organes sont là, en train de se former sans fonctionner encore, et qu'ils sont suppléés par les organes de la mère.

Mais un jour l'enfant vient à la lumière et alors fini le temps des fonctions de suppléance. Les deux vies deviennent indépendantes, et l'enfant va assumer ses propres fonctions physiologiques. Il faut que son cœur et ses poumons se mettent au travail. S'il n'y réussit pas, il meurt ; s'il y arrive, il commence toute une série d'actions physiologiques, tout un processus vital. Il est né ; il doit assurer sa propre vie ; sa mère peut mourir, il continuera à vivre, parce que sa Vie est devenue indépendante.

 Dans la vie chrétienne, au contraire, il n'y a jamais cette séparation, car nous partageons la communion avec Dieu que Jésus possède par union originelle et permanente. La comparaison de la vigne et des sarments, ou des lampes branchées sur un même courant, peut nous faire comprendre que toute communication entre Dieu et nous vient du Christ, et se fait dans le Christ, et avec le Christ.

Il n'est donc pas question par exemple que le Christ nous fasse Vivre une vie qui pourrait être unie à lui tout un temps et puis émigrer pour se mettre à son compte, tout homme trouvant son petit bout de vie à cultiver en comptabilisant plus ou moins bien ses bonnes et ses mauvaises actions. Non, cette image serait fausse. Si l'on veut une autre image juste, on peut prendre celle du conférencier et de son auditoire. Surviennent 10 personnes de plus. Ma parole atteint-elle moins les premiers ? Non. Le nombre ne fait rien à l'affaire. Seule compte la capacité de réception de chacun. Il peut y avoir le problème des limites de la voix, mais si l'auditoire augmente de 100 personnes on mettra des haut-parleurs. Comme dit Teilhard, dans les questions psychiques, ce qui est le plus haut, le plus profond dans l'évolution de l'homme, n'est pas diminué par l'augmentation du nombre.

Dans les questions mystériques, il est bien évident que cette communication qui laisse couler la vie divine n'est pas diminuée non plus par le nombre, ni n'a le moindre besoin d'être interrompue. Je suis la vigne ; vous, les sarments ; le sarment qui est uni à moi porte beaucoup de fruit, etc. … ».

Alors, qu'est-ce qui se passe ? Quelque chose de très important. Quand un chrétien prie vraiment, prie selon la religion de Jésus, c'est-à-dire selon une religion de l'Esprit de Vérité (pensez à la Samaritaine) ; quand un homme prie et que sa vie est vraiment chrétienne, c'est le Christ, premier-né du sein de Marie qui prie en lui ; sa prière n'est rien d'autre que la vie du Christ qui s'exprime en paroles. Personne ne peut dire : Jésus, sinon dans l'Esprit », nous affirme St Paul. C'est l'Esprit qui conduit Jésus au désert pour y faire pénitence. Si nous cherchons quelles sont les relations entre Jésus et l'Esprit, nous nous rendons compte comment l'homme Jésus est mû par l'Esprit, et le même Esprit qui a animé Jésus est encore celui qui fait vivre Jésus en nous, et fait de lui notre vie. Et quand nous prions, nous prions en un double mouvement : Notre parole atteint le Verbe, qui se fait Parole pour le Père dans une chair humaine.

En Jésus, Dieu s'est humanisé pour de bon, pas pour rire : l'Incarnation a des conséquences considérables. Si le Verbe s'est incarné, il ne s'agit pas de le désincarner. Paul dira qu'il nous a été semblable en tout, sauf le péché. Et cela veut dire qu'il a su ce qu'était la douleur. Dans la lettre aux Hébreux, on lit qu'« il a appris l'obéissance dans un grand cri et des larmes » (5, 7), c'est-à-dire dans la douleur. Tout cela nous révèle la dimension existentielle de Jésus, non d'un Jésus préfabriqué, mais d'un Jésus qui passe par un processus d'évolution — au meilleur sens du mot. Dieu se fait homme, assume le langage des hommes et s'exprime comme homme et doit parler au Père comme homme ; en définitive, c'est Dieu qui parle à Dieu, à partir de l'homme, et c'est pour cela que la prière c'est l'humanisation priante de Dieu.

Cela donne à la prière chrétienne une dimension éminente et un pouvoir impressionnant, et c'est là que l'on peut fonder théologiquement la demande au Père au nom de Jésus. Mais il faut bien voir ce que signifie demander au nom de Jésus, car bibliquement le nom est un programme. Est-ce que je peux demander une injustice au nom de Jésus ? Qu'est-ce qui peut entrer dans la prière chrétienne dès lors que cette prière est la christification priante de l'homme ? Un homme qui s'exerce à parler à Dieu (ou mieux à laisser l'Esprit parler avec lui à Dieu) se christifie en priant. Lentement, cette surimpression (l'image du Christ qui se superpose à la nôtre) se produit, non seulement avec l'action, mais aussi par l'action.

Fondamentalement la vie chrétienne est un mystère d'amour, et l'amour a deux expressions, nécessaires toutes deux : dire et faire ; exprimer ce que l'on sent et faire ce que l'on sent, car il y a la dimension de l'agir et la dimension du vivre. Et donc, toute polarisation par laquelle on se réfugie, soit dans l'action pour se dispenser de la prière, soit dans la prière pour se dispenser de l'action et de l'engagement, est une mauvaise traduction du christianisme et est une preuve très claire que l'Esprit et la vie de Jésus ne « prennent » guère en nous. Jean nous dit : « Celui qui prétend aimer Dieu qu'il ne voit pas et qui n'aime pas ses frères qu'il voit, est un menteur et la vie de Dieu n'est pas en lui ». Que signifie cette réflexion ? Qu'il ne peut pas y avoir le moindre mot chrétien sans une action chrétienne. Ce sont deux exigences profondes du même amour. Au fur et à mesure qu'elle avance, la vie dans l'homme devient psychologique et c'est pour cela que je vous parlais plus haut de la nécessité psycho théologique ou psycho mystérique. Le mystère chrétien de l'homme ne se vit pas d'une façon végétative comme les premières années de l'enfant, il ne relève pas de l'inconscient en ce sens qu'il faudrait une psychanalyse pour découvrir ce que la personne humaine ne peut découvrir. Non, la nature humaine, comme toutes les formes de vie supérieure, implique conscience et liberté. Quand il entre dans le champ de la conscience, le mystère chrétien entre comme foi, comme amour, comme espérance, et tout cela Vécu dans le Christ. Il y a là une autre dimension de la prière et nous en arrivons donc à la question : Sans la prière, la Vie chrétienne peut-elle exister ?

Réponse : non. Absence de prière = absence de Vie chrétienne, et faiblesse de prière = faiblesse de Vie chrétienne. 

4ième Définition : La prière est une expression du cœur de trois personnes au carrefour de dynamismes variés et de sphères existentielles variées.

 Si c'est trop abstrait pensez à plusieurs ruisseaux qui se réunissent et forment une large rivière. Je m'expliquerai mieux plus loin.

Et d'abord la prière est expression. Le christianisme n'est pas une mentalité, un système de pensée ; il n'est en premier lieu ni une morale ni un culte ; il est une vie interpersonnelle en unité. Interpersonnelle d'abord, dans le sens individuel : Jésus et moi et le Père. Moi et Jésus nous sommes deux, mais nous sommes un aussi, car Jésus et moi nous sommes l'Eglise. Le christianisme est avant tout une vie et une compagnie, une vie de personnes avec des personnes et donc une vie où l'on parle, non une Vie de solitude et de silence.

Analysons maintenant la prière comme expression du cœur de trois personnes. Il y a en effet trois « moi », indistinctement communiqués, et insuffisamment distincts pour ainsi dire. Je vais m'expliquer.

                            1) – Moi individuel.

Il y a le « moi » que je suis, moi X…, distinct de Y… et de Z… Ce « moi » strictement individuel est une personne, est distinct des autres et a besoin de parler au Père de ses affaires à lui.

Ce « moi » individuel a des besoins d'expression qui ne sont pas ceux de Y et Z et pas non plus ceux de tous les autres. Alors si nous créons un schéma de prière dans lequel nous voulons parler comme collectivité, cela ne laisse pas un moment à moi, X, pour me sentir face à Dieu ; et nous étranglons la personne sur l'autel où trône le mythe de la collectivité.

Dans la zone la plus profonde, dit Claudel, il y a des secrets qui ne se disent qu'à Dieu et qui ne se diraient ni à une épouse, ni à un confesseur ou directeur spirituel, parce que la nature même de ces choses ne permet de les dire qu'à Dieu ; et de plus, il y a des choses qui sont incommunicables parce qu'il arrive un moment où le langage s'immobilise et la parole se bloque ; on peut seulement présenter la chose à Dieu en lui disant : « Seigneur, tu comprends ».

                            2) – Moi, membre de l'Eglise.

Il y a donc l'expression d'un moi qui est le fondement premier et dernier de la prière personnelle. Cependant, ce moi est aussi Eglise, selon ce que je viens de dire, à savoir : la Vie chrétienne est dans sa racine une Vie de la Vie, parce que nous sommes fils dans le Fils, parce que le Fils, premier-né de Dieu est aussi le Fils unique de Dieu. Dieu n'a de Fils que Jésus ; ou nous sommes fils en Lui, ou nous ne sommes fils en personne et cela explique l'attaque des Juifs à l'égard de Jésus qui appelait Dieu son Père, parce qu'ils ne comprenaient pas le mystère formidable du plérôme.

Donc nous sommes Eglise et nous devons parler à Dieu comme Eglise ; nous sommes aussi des personnes ; donc il y a besoin de moments de prière personnelle où Y parle de telle chose et Z de telle autre. Et cette conversation avec Dieu, ce dialogue avec Dieu a ses règles de jeu, ses règles psycho-mystériques. La façon de se présenter à Dieu requiert, en effet, des conditions particulières. Autre est la manière de se présenter à Dieu comme Eglise, autre la manière de se présenter comme individu. Les règles du jeu ne sont pas les mêmes. Si nous employons la psychologie de la prière personnelle pour faire la prière ecclésiale nous échouerons.

Chacun des deux genres de prière demande une éducation distincte : ce sont deux modes d'expression. Dans chacun des deux cas, le moi doit savoir qui il est. Je ne peux me comporter de la même façon suivant que je me présente comme F. Basilio Rueda ou comme Supérieur Général. Si je représente la Congrégation, je dois faire attention à ce que signifie cette représentation dans le lieu où je suis reçu. Si j'ai une mission de la Congrégation, j'annonce : Je ne parle pas en tant que F. Basilio Rueda ; j'ai mission de dire telle chose de la part de la Congrégation ». Si j'incarne l'Eglise et vibre avec elle, le sujet qui parle au Père c'est l'Eglise et mon effort doit être d'être Eglise et de me sentir Eglise pour rendre l'Eglise plus dense et plus expressive. Incarnée dans les Eglises locales et les communautés locales, l'Eglise prend sa totalité, nuancée par les circonstances et le temps. Un groupe humain parle au Père en Eglise, dans le Christ, avec toute la force de l'Eglise, et c'est la prière liturgique. 

                            3) – Moi, membre d'une communauté.

Mais un groupe humain a aussi ses problèmes de groupe, spécialement s'il veut être uni, s'il veut être un groupe chrétien où chacun se sait fils du même Père. Il doit trouver son identité de groupe, non seulement quand il mange, joue ou travaille, ou met l'argent en commun, ou étudie un projet, mais aussi quand il parle à Dieu. Tenez ! un exemple bien simple. Je suppose que mon lecteur appartient successivement à trois groupes. Il va se rendre compte, suivant qu'il prie avec l'un ou avec l'autre, qu'il parle à Dieu d'une façon différente – je suppose évidemment qu'il y a dans les trois cas une vraie prière communautaire. Et pourquoi ? Parce que la prière communautaire consiste justement à créer une âme collective, une communion de mentalité, d'affectivité, de goûts et de projets, etc. … et cette vie en commun donne une âme collective, et cette âme collective a la tâche d'exprimer, avec la nuance des circonstances et de l'histoire, son développement historique face au Père. C'est cela le langage de la communauté et c'est le danger d'une certaine prière liturgique de tenir trop peu compte des pays, de laisser trop peu de place à la communauté locale, en obligeant ou bien à un langage ecclésiastique universel, ou bien à une prière purement personnelle, ce qui bloque l'expression du groupe.

Si le soir, par exemple, on s'est bagarré dans le groupe, on ne peut exprimer cela dans une prière déjà composée : la place n'en est pas prévue. Par contre, si le groupe va devant le Seigneur et dit : Seigneur, tu sais que nous nous aimons et que hier nous nous sommes bagarrés. Nous luttons sans arriver à conjuguer nos efforts et les créatures que tu as faites pour nous servir n'ont fait que nous éloigner. Seigneur, nous venons devant Toi sans savoir qui est coupable, qui a la vérité ou qui ne l'a pas ; mais en tout cas nous venons ensemble te dire ces choses et mettre nos cœurs entre tes mains. Fais de nous une vraie communauté ». Eh bien, cela, mes Chers Frères, c'est la prière d'une vraie communauté. A travers ce qu'elle est – elle n'est pas la même chose que la communauté ecclésiale – elle parle au Père en prière communautaire. Cette prière communautaire a deux formes : Un moment d'expression commune de ses membres et puis un moment où quelqu'un est capable de dire, non sa parole, mais la parole qu'il sent être la palpitation du groupe.

Vous voyez donc qu'une communauté a besoin de ses respirations de prière où elle puisse exprimer à Dieu sa propre vie, bien à elle, ses joies, ses peines, ses désirs, ses projets, la vie de ses membres. C'est cela la prière communautaire, bien différente de la prière commune, et elle demande tout un apprentissage.

Alors maintenant je peux revenir à la définition : la prière est une expression du cœur. Elle parle non avec la tête, mais avec le cœur (au sens biblique, non au sens aristotélicien). Elle est une expression du cœur à Dieu, de trois personnes. Quelles personnes ? Moi, la communauté et l'Eglise. Tan. tôt l'une, tantôt l'autre. Elle parle à Dieu au carrefour de divers dynamismes. Quels sont ces dynamismes et ces sphères existentielles qui sont les affluents de la rivière-prière ?

Essayons d'en noter quelques-uns, car toute prière est très variée et porte des contenus distincts :

1) – Avant tout, il y a le dynamisme charnel, toujours réédité, celui qui faisait soupirer St Paul : « Qui me délivrera de ce corps de mort ? ». Ce dynamisme est le pénible essai de donner corps à une Vie chrétienne où s'entrecroisent le moi de l'égoïsme, le moi de la superficialité, le moi de l'orgueil, le moi d'un homme qui rêve d'être un géant et qui est un nain. Tous ces contrastes sont l'humus de la prière. Cette suite d'incohérences que nous sommes et essayons d'exprimer n'est pas une farce. Quand quelqu'un prie en esprit et en vérité, en disant ce qu'il veut être, même si hélas ! il ne l'est pas, c'est de la prière vraiment chrétienne et c'est une prière rédemptrice bien différente de celle du pharisien : Merci, Seigneur, de n'être pas comme les autres, ni comme ce publicain ». Je cherche à être vrai ; si je n'arrive pas à croire, je ne dis pas que je crois ; je dis : « Seigneur, aide mon incrédulité ».

Il faut être attentif à mettre dans la prière ce qui est la vérité de la vie ou la vérité du désir. De cette façon la prière n'agit plus comme un coup de pouce accidentel, elle a la force et la constance d'un moteur.

Il y a une homélie d'Anselme de Rotterdam qui s'appelle l'homélie des mensonges sacrés et qui concerne le Notre Père. Voici à peu près le texte : "Quels menteurs nous sommes de dire : «Père». Nous ne le considérons pas comme Père, mais comme tyran. Nous mentons en priant. Nous disons « Notre » Père, mais où est dans notre cœur la fraternité ? « Qui es aux cieux », et nous ne croyons pas à sa transcendance ; nous sommes collés à nos propriétés terrestres. « Que ton nom soit sanctifié » et nous profanons son nom par toute une vie de contre-témoignage, etc. … Nous disons des mensonges sacrés, nous sacralisons et cultualisons le mensonge ».

2) – Il y a aussi un dynamisme naturel, un processus de réalisation. Ce n'est pas seulement la christification rédemptrice en nous qui doit s'accomplir en purifiant cette densité du péché qui cristallise en nous et en l'humanité. Il y a une création entière qui est en train de se faire. Ici c'est tout Gaudium et Spes qui entre en jeu avec tout l'ensemble de l'évolution, toutes les inquiétudes des hommes ; toutes les initiatives de la paix, ide la justice, du droit, de la technique, de l'art, de l'industrie, de la conquête de la lune, pourvu que tout cela soit humanisé. Et il faut vibrer avec tout le processus historique de l'univers (même en dehors de la grâce) et cela doit entrer comme contenu de la prière chrétienne. Oui il faut le mettre un peu, ce contenu, et parfois cela nous manque, à moi au moins. Je pense fréquemment à la dimension surnaturelle des choses et pas assez à la dimension naturelle qui a aussi sa valeur. Toute cette dimension naturelle est matière Valable pour la prière. C'est ainsi que le monde passera par le cœur du chrétien dans sa prière. Si le monde impressionne notre rétine de façon évangélique, il trouvera sa place juste. Sinon on aura des prières de dissociation.

3) – Autre dynamisme : le projet d'un monde à faire passer de l'inhumain à l'humain : un monde meilleur.

4) – Et puis il y a l'histoire du salut qui doit . hanter le cœur d'un apôtre et son combat pour le monde. C'est tout le problème de notre catéchèse et de notre annonce de Jésus-Christ. Les opinions là-dessus sont très polarisées et divergentes. L'un dit : Il n'y a rien à faire ; la jeunesse ne veut plus l'Evangile ; la classe de religion ne sert de rien ; il faut s'occuper du social ; il faut revoir toute la morale ; il faut commencer à ré évangéliser. D'autres, au contraire, soutiennent qu'il faut maintenir à tout prix ce qu'on a, etc. …

Je peux très bien comprendre qu'il y ait des Frères non recyclés pour la catéchèse et qui disent : matériellement je ne peux pas ». Mais je ne comprendrai jamais ceux qui jugent sans importance que le monde soit ou non évangélisé, et qui ne souffrent pas que la jeunesse reçoive Jésus-Christ ou ne le reçoive pas. C'est un grand scandale.

Dans le cœur de tout apôtre, il doit y avoir l'angoisse de l'Histoire du Salut. Un peu comme dans le cœur d'une mère il y a l'angoisse du fils qui est à l'hôpital. Le cœur maternel vit minute par minute l'évolution de la maladie du fils et ressent très vivement ses souffrances. Ainsi l'apôtre vit-il dans sa prière son combat pour le Christ. 

VI. – CONCLUSIONS DES QUATRE DEFINITIONS

 J'ai donc essayé d'éclairer, à partir de quatre angles, ce qu'est la prière, quelle est sa valeur et .quelle est sa relation avec l'être chrétien.

Ceux qui disent que la prière n'a pas de sens, que c'est une perte de temps, parlent en théorie : ils n'ont pas fait l'expérience. C'est vite dit que l'action est prière, mais cela révèle une méconnaissance pratique de la prière. Moi non plus je ne veux pas perdre mon temps à discuter un argument aussi léger. A qui me le propose, je réponds : «Vous n'avez pas fait l'expérience d'une vraie prière. Si vous saviez ce que c'est, vous ne la confondriez pas avec l'action, même si toutes deux sont des émanations de l'amour »[1].

On vous lance en effet de ces phrases qui ont l'air brillantes et en réalité ne correspondent qu'à du vide, à un déséquilibre intégral. Celui qui les dit n'a pas mis en place les divers éléments de sa vie chrétienne ; il a rompu, par exemple, l'harmonie entre la dimension d'action et la dimension de vie, et comme, si souvent dans le passé, c'est la dimension morale qui surclasse la dimension spirituelle et voilà de nouveau la vie chrétienne conçue comme un code de défenses et d'ordres. Ceux-ci seront de nature différente, plus axés sur le social que sur le sexuel. mais au fond ce sera toujours le même déséquilibre.

B. — CHERCHER DES SOLUTIONS 

I – POURQUOI Y A-T-IL DÉSAFFECTION ?

 Revenons maintenant vers ceux qui en sont à l'abandon pratique de la prière.

Comment expliquer le phénomène ? Je vois deux explications.

a) – On a vécu d'un formalisme antérieur (Volontaire ou involontaire) et il est maintenant suivi d'une réaction d'authenticité. C'est le cas par exemple de qui a confondu prière et exercices de piété. Un beau jour il découvre qu'il s'est trompé en récitant des formules auxquelles son cœur n'adhérait pas et qu'il était seulement un bon «exécutant». Et alors, après examen sérieux, quand il découvre ce qu'est vraiment la prière il éprouve du dégoût pour ce qu'il a fait et se retire. C'est une manière de réagir déplorable mais authentique. C'est une histoire fréquente dans le mariage. L'époux embrasse sa femme, lui dit qu'il l'aime à la folie, et un beau jour il se rend compte qu'elle ne l'intéresse plus, et il se dit : « Je ne l'aime pas. C'est mal de ne pas l'aimer, mais encore plus mal de continuer à ne pas l'aimer, en lui disant le contraire. ''Redis-moi tes mensonges'' va bien pour une chanson, mais je vais cesser de les dire car je sens que ce n'est pas une solution d'authenticité ». On trouve donc aussi des religieux qui se retirent de la prière pour faire un geste d'authenticité, parce qu'ils ne veulent plus vivre de formalisme.

Le malheur est qu'ils passent d'une solution fausse à une solution négative. Si le choix était entre leur réaction et la décision de persévérer dans une prière mensongère, je préférerais leur réaction, mais le choix n'est pas là.

b) – Il peut s'agir aussi d'une concession régressive », dont il faut chercher les causes. Expliquons d'abord les mots. Concession : on se concède à soi-même et sans motivation suffisante ce qu'on ne devait pas, c'est-à-dire l'abandon pratique de la prière. Et par là on se prive de quelque chose qui est indispensable à la vie du chrétien.

Si la prière ne dit rien à celui qui l'a abandonnée, il doit se demander tout de suite avec calme : pourquoi ne me dit-elle plus rien ?

Quand on a d'abord pris au sérieux la prière chrétienne et ensuite on s'en est écarté, c'est qu'il a dû se passer le phénomène suivant :

Il y avait exigence d'action ou exigence de vie dans cette oraison qui était en train de croître en qualité. La prière est en effet une vie d'amour. Elle va progressant, et sous un double aspect : d'un côté, elle exige des efforts croissants, de l'autre, elle procure des joies plus hautes. Et les deux vont ensemble ; comme pour les perles : plus c'est beau, plus c'est cher.

Voici donc quel a pu être le fonctionnement qui a abouti à la « régression ». L'amour vécu dans la prière étant de plus en plus haut demandait une réponse de vie de plus en plus haute pour fermer la route à tous les mensonges sacrés ; et alors, au lieu de mettre sa vie en accord avec ce qu'inspirait l'Esprit dans la prière, on a pris peur et on a reculé. Ou bien le problème est d'ordre inverse. En prenant de la hauteur, la prière a rencontré 'beaucoup de difficultés, parce qu'elle passait par l'obscurité, par la sécheresse, pour se qualifier dans l'Esprit-Saint. Et alors cela aussi a pu effrayer et provoquer le repli. 

II – DEUX REMARQUES PRATIQUES

 a) – Si l'on réduit les rencontres de prière communautaire, il faut créer de toute urgence les conditions pour une prière personnelle.

Nous vivons en un temps où tombent bien des structures. Si donc vous vous trouvez dans une Province où la prière est déconsidérée, où l'on ne prie que très peu en commun ; en somme si vous vous trouvez abandonnés à vous-même parce que vous ne recevez plus de la communauté l'élan de prière qu'elle devrait vous donner, … alors il faut vraiment appuyer sur l'accélérateur de la prière personnelle.

Et si les deux formes de prière – personnelle et communautaire – tombent à la fois, alors tenez pour certaine la ruine de la Province où vous êtes, si elle ne réagit pas rapidement.

b) – Il faut tenir compte intelligemment du phénomène de sécularisation et en bénir le ciel, mais en profiter pour redimensionner la purification qu'elle impose à la prière.

La sécularisation est ambivalente, mais elle rend service à la prière, si elle l'oblige à trouver son authenticité face aux critiques. Avant on pouvait vous faire manger du chat pour du lapin. Maintenant non.

En bien des cas, cependant, la critique a exagéré et créé, dans la vie chrétienne, de nouvelles attitudes carrément fausses et par conséquent désastreuses.

Donc il faut redimensionner la sécularisation de la prière, en profitant du service qu'elle rend, mais sans tomber dans l'excès de la critique destructrice, et surtout en se persuadant bien que le détergent sécularisation ne décapera rien d'une prière inexistante ; il ne pourra agir que sur un matériau réel. Or, il y en a qui mettent le détergent des réflexions sécularisantes dans leur machine à laver, mais ils oublient de mettre aussi quelque chose à laver. Ils parlent de prière, mais ne font plus de prière.

Si au contraire, je suis sérieux, si je continue et intensifie ma prière, en la purifiant de ce qui n'est pas elle, j'arriverai au problème central : pour qui travaille le chrétien ? Quel rôle joue la prière, face à l'efficacité et au progrès de ce travail ? 

III – RENOUVEAU DE LA PRIÈRE 

               a) – Constatations :

Je crois que, dans les années antérieures au Concile, une crise de la prière était latente, mais elle n'avait pas encore trouvé son expression, car il y avait encore les structures.

Et puis, suite au Concile et aux Chapitres généraux spéciaux, est arrivée une crise bien caractérisée (variable suivant les Provinces, en gravité et en rapidité). Elle a pu mener à l'abandon de la prière et causer l'écroulement de religieux, de communautés et même de Provinces entières. Heureusement une réaction s'est manifestée en divers lieux. J'en cite quelques-unes, parmi beaucoup d'autres.

1°.) En quelques communautés des USA les Frères vont passer par groupes une semaine dans une maison de prière. Quelques animateurs maintiennent ensuite le bénéfice de cette expérience pendant l'année.

2°.) Carlo Carreto. Ce religieux italien passe, avec sa communauté, une saison en prière au Sahara et il écrit quelque livre sur les expériences faites. Puis, au printemps ils reviennent en Italie et distribuent ainsi leur temps : 8 heures de prière et de vie communautaire, 8 heures de travail manuel en aidant gratuitement des paysans de la région, et 8 heures de repos.

3°.) Taizé. Tout le monde a maintenant entendu parler de ce centre œcuménique où des milliers de jeunes se succèdent continuellement pour prier et réfléchir.

4°.) L'Ecole de Prière de Paris, du Père Caffarel, où l'on enseigne à prier avec le corps et avec l'esprit.

5°.) La prière pentecôtiste qui s'est étendue bien au-delà des USA où elle est née, et dont vient de parler en termes très élogieux le Cardinal Suenens.

Toutes ces expériences, et beaucoup d'autres que je pourrais citer, arrivent bien à point pour nous ouvrir le chemin de la rénovation conciliaire et capitulaire. Si la rénovation ne commence pas par la prière, elle ne sera qu'un feu de paille.

Dans la vie physique et psychique, il faut des temps de désintoxication. Dans le domaine spirituel, pas de meilleure désintoxication qu'une prière faite avec calme.

Dans la vie conjugale, si, après le travail et l'énervement du jour, il n'y a pas un temps pour l'intimité conjugale et la vie de famille pour éliminer l'accumulation des toxines, pauvre mariage !

Il ne faut quand même pas oublier que la vie de l'homme est faite pour aimer. Et aimer est un verbe transitif, même et surtout pour celui qui vit en régime de virginité.

L'homme marié oriente cette vie d'amour à travers son épouse et ses enfants. Le religieux n'a pas ce moyen, mais il en a (ou du moins doit en avoir) un qui est supérieur : l'expérience d'un Dieu d'amour, d'un Dieu qui demande et qui donne.

La communication avec ce Dieu d'amour devient consciente essentiellement aux moments de la prière, soit personnelle, soit communautaire. Et ces moments doivent être de paix intérieure et d'épanouissement de l'esprit.

Les deux formes de prière, personnelle et communautaire, sont nécessaires. Il y a déjà pas mal de secteurs de l'Institut qui commencent à en prendre conscience. Mais il ne suffit pas d'en prendre conscience.

               b) – Principes pour une orientation solide du renouveau de la prière.

La prière est à la fois don, exercice et fruit. En tant qu'elle est don, il n'y a pas à croire qu'on va remplacer Dieu. Donc il y a un abîme entre yoga et prière chrétienne. La prière chrétienne, c'est aimer ; le yoga, lui, peut bien favoriser la concentration et l'équilibre intérieur (éléments très utiles pour la prière) mais il ne peut assurer ni l'amour, ni la conversion. Or ce don de Dieu qu'est la prière, c'est la conversion qui en est l'entrée et c'est l'amour qui en est le développement. Ce don vient de l'Esprit-Saint et aucun exercice humain ne peut le communiquer. Oui, il ne faut jamais oublier que la religion chrétienne n'est pas un produit fabriqué par l'homme, c'est Dieu qui se communique à l'homme. L'homme n'est pas un Prométhée qui dérobe le feu du ciel ; c'est une créature qui reçoit en Jésus-Christ le baiser d'amour du Père et la rédemption par amour. Et la prière, sorte de souffle vital de la rédemption, est essentiellement un don dans le sens le plus fort du mot ; il faut le demander à Dieu.

Par ailleurs, la prière est aussi un exercice, parce que Dieu, dans la création du monde matériel et bien plus encore du monde surnaturel, n'a pas voulu faire de l'homme un objet, mais un collaborateur. Il lui a confié une création inachevée pour qu'il la porte à son achèvement. De même, dans l'histoire de la Rédemption, le Christ a mis en terre la semence, puis a confié aux hommes la mission de travailler ensemble pour la faire grandir, mûrir et porter à tous les fruits de la rédemption. C'est ainsi qu'ils deviennent son Eglise.

Il y a donc bien une part d'exercice dans la prière. Comme dit Voillaume : « Personne ne naît sachant déjà prier. Ce n'est pas en fuyant la prière que l'on va apprendre à prier. C'est vraiment insensé de dire : moi, je prie quand j'ai envie de prier, parce que je veux être authentique ». Et on vit de telle façon qu'on a de moins en moins envie de prier.

L'exercice de la prière, dans l'homme qui s'efforce d'ouvrir les bras à Dieu et lui parle même en silence, a deux aspects. Il y a la prière de semailles et la prière de récolte. Combien de fois avez-vous prié sans que, apparemment, vous ayez trouvé l'interlocuteur ; et par contre d'autres fois, avant que vous ayez ouvert la bouche, l'interlocuteur était là. Comment comprendre ? C'est l'histoire de la double nature de la prière : don et exercice. Dieu est pédagogue, soyez-en sûr.              

               1 – Base des principes.

De tout cela on peut tirer quelques lois de la prière, appuyées sur trois piliers :

* la nature des interlocuteurs

** les relations humaines

*** la situation de la personne.

* Nature des interlocuteurs :

Le premier est Dieu : d'où série de principes théologiques.

Le second est l'homme : d'où série de principes anthropologiques.

** Relations humaines :

Entre les deux interlocuteurs s'établissent une série de relations d'amour et de vérité et naissent les lois qui vont régler ces relations.

*** Situation de la personne.

L'homme qui va dialoguer se trouve dans une situation donnée. Dieu, lui, n'est pas dans une situation donnée ; l'homme, si. Donc la prière en pleine ville ne sera pas la même qu'une prière dans les bois ; une prière après une chute, qu'une prière en pleine fidélité. Et ce sont ces circonstances qui conditionnent notre prière.

« Personne, dit Voillaume, n'apprend à prier s'il ne se met à prier, comme personne n'apprend à nager, s'il ne se jette à l'eau ». Si nous oublions la trilogie de la prière : don, exercice et fruit, si nous ne tenons pas à ces trois éléments, nous ne pourrons pas faire une prière (chrétienne, bien sûr). 

               2 – Prière en l'Esprit.

Autre chose qu'il faut dire de la prière chrétienne : c'est une prière en l'Esprit. Qu'est-ce à dire ? que, contrairement à l'idée du pharisien, rigoureux observateur de la loi, il n'y a de prière que celle que le Christ nous inspire : la prière qui naît réellement de l'Esprit. Et cela implique deux choses :

* Ce que disent les lèvres doit être dit aussi par l'esprit. Dire avec la bouche ce que l'esprit ne dit pas, ce n'est pas prier.

** L'esprit dont il est question n'est pas un esprit quelconque, mais le Saint-Esprit, qui est unique. 

               3 – Prière cohérente.

La prière en esprit doit être vraie et en même temps cohérente. Je m'explique. Quand on prie, il faut dire la vérité. Si dans la prière partagée, la vérité manque, on a du théâtre, une farce, une offense à Dieu. Les mensonges sacrés sont une chose mauvaise quand on parle à Dieu de façon fausse ; mais c'est encore pire si on dit le mensonge sacré en groupe. Qu'est-ce que cela signifie de faire devant Dieu et les Frères réunis au nom de Dieu un boniment auquel on ne croit pas ? Dieu est quand même celui qui lit au fond du cœur. Lui mentir est au moins un manque de goût, pour ne pas dire une scélératesse.

Prier est chose très sérieuse. Il ne s'agit pas de se réunir pour faire un discours brillant ou lancer la dernière nouveauté de quelque revue théologique. Une prière participée du genre forum dégoûterait à tout jamais ceux qui ont le sens de Dieu. Soyons-y bien attentifs. Sans doute beaucoup de ceux qui refusent leur participation sont des gens qui ont peur de sortir de leur routine et de se mouiller », mais parfois aussi les autres leur fournissent de bonnes excuses. Si nous ne cherchons pas à nous faire Valoir, mais simplement à être vrai, nous pourrons dire : « Tu sais, Seigneur, que je pense ce que je dis, qu'il n'y a pas en moi de fausseté, que ce qui sort de mes lèvres vient de mon cœur ».

« J'ai dit de la prière en esprit de vérité qu'elle doit être une prière cohérente » : il ne doit pas y avoir décalage entre prière et vie. Bien sûr, le Seigneur tient compte de notre faiblesse et sait que, malgré nos efforts, notre prière ne sera jamais parfaitement ajustée à notre vie, et que, parfois, un décalage plus que moyen va durer assez longtemps. Nous sommes des hommes. Ce qui nous est demandé catégoriquement c'est de commencer par être sincères.

Je disais que la prière chrétienne est tout autre chose que le yoga. Celui-ci ne dépasse pas le niveau d'un exercice mental. Celle-ci exige que l'on se mette face à la lumière de Dieu, pour voir, dans le jugement amoureux de Dieu, mon moi et le moi du monde, ensemble avec toute ma conduite. Et c'est ce qui explique que la prière pèse tant à beaucoup d'hommes. Ce n'est pas un exercice si simple. Il ne s'agit pas de jouer au toréador, il s'agit d'être toréador. Il s'agit de vivre la vérité de Dieu dans sa propre vie. Donc prière chrétienne équivaut à prière filiale, attitude d'enfant qui se repose dans les bras de son père. En dehors de cette vérité de Dieu on a bien quelque geste religieux, mais pas une prière chrétienne.              

               4 – Qui donne la mentalité de Dieu.

La prière chrétienne doit remplir le cœur des sentiments de Dieu envers les hommes. Compréhension pour la sottise humaine, pardon pour des chutes répétées, bienveillance même pour les ennemis, attitude la meilleure envers tous. C'est tout cela qui doit remplir le cœur qui prie et qui éduque dès lors non seulement ses relations envers Dieu mais ses relations envers les hommes. 

               5 – Ecclésiale.

Par ailleurs il faut donner à la prière chrétienne la dimension ecclésiale ; en d'autres termes, vibrer avec l'Eglise. C'est la solution par exemple au problème de l'office. Je crois qu'il n'y aura plus problème quand nous saurons faire cette prière de façon dynamique, active, sans être esclaves du schéma. Bien souvent aussi il serait utile de connaître une bonne ecclésiologie, comme par exemple les « Méditations sur l'Eglise » du Père de Lubac.

Prier avec l'Eglise suppose une éducation biblique. La prière des Juifs était une prière de tout le Peuple de Dieu, du Peuple qui montait à Jérusalem, qui vibrait de la joie d'être dans son Temple, etc. … Et cela a été la prière de Marie, fille du peuple…

Que cette prière ecclésiale soit enfin une prière cosmique qui nous fasse vibrer avec le monde entier. Et ici c'est la lecture de Teilhard de Chardin qui est particulièrement suggestive. 

               c) – Les rythmes

Maintenant pour aborder le problème des rythmes de prière, je rappelle les trois besoins que nous avons :

– prière personnelle ; personne n'a le droit de nous en priver,

–    prière liturgique,

–    prière communautaire.

Sans elle, la communauté n'arrive pas à trouver vraiment son identité. Elle peut se découvrir comme une communauté abstraite dans le vaste ensemble de l'Eglise, mais ce n'est pas là découvrir son identité. On peut se réunir, chanter avec l'Eglise, et tout ignorer de son Voisin. Dans un groupe d'apostolat, un de mes compagnons reçoit un jour une lettre et se met à pleurer. Je lui demande pourquoi. Il me passe la lettre. Son père venait de mourir. Si je n'avais pas posé la question, qui, sauf lui, aurait su la douloureuse nouvelle ? Une communauté est faite de pierres vivantes, mais toutes différentes.

Notre prière demande une spiritualité adéquate. Sinon, nous courrons le risque suivant : ce qui aide l'un à prier dans sa vie de communauté (apostolat, travail, etc. …) est pour l'autre un obstacle. C'est du moins ce que révèlent les enquêtes des retraites.

Notre prière demande aussi un équilibre de ses fonctions et une progression. Un fruit ne pousse pas du soir au matin. Il y a tout un processus de la semaille à la récolte.

C'est une erreur du passé d'avoir fait d'un petit juvéniste de 11-12 ans un petit Frère, moins la soutane. Evidemment on peut dire que cela a donné beaucoup de bons religieux, mais ce qui explique ce bon résultat ce n'est pas tout le style de vie religieuse imposé trop tôt, ce sont certains éléments :

    – des familles moralement très saines

 – au juvénat même, la récitation du chapelet, prière qui n'était pas trop difficile à   pratiquer et qui habituait à méditer,

  – des visites au St-Sacrement libres et assez fréquentes, etc. …

Mais tout cela n'empêche pas que la prière soit un processus qui suppose apprentissage. Il faut prendre l'apprenti par la main et l'accompagner aux diverses étapes qui consistent surtout à passer du niveau où l'on n'a pas le sentiment de Dieu au niveau où l'on a ce sentiment.

On peut parler de trois seuils :

– de ne pas savoir prier à savoir prier

– de ne pas vouloir ou pouvoir Vivre ce qu'on dit dans la prière à Vouloir et pouvoir le Vivre

– de ne pas pouvoir pratiquer la charité fraternelle à pouvoir la pratiquer.

Compte tenu de ces seuils, on peut chercher à établir les rythmes de la prière : rythmes de la personne, de la communauté et de la vocation.

La vie chrétienne en effet se vit à l'intérieur d'une vocation. La croissance de la vie baptismale va normalement de pair avec la croissance dans la vocation. S'il y a un blocage dans la vocation, presque toujours il retentit sur la vie baptismale. Donc il faut être très attentif à aider celui qui a une vraie vocation pour lui éviter de la gaspiller.

La prière, comme la vie chrétienne, doit trouver à des contradictions apparentes la position d'équilibre qui convient.

–    Faut-il suivre la nature ou la foi ?

–    La prière est-elle don ou exercice ?

–    Faut-il prier quand et comme on veut, ou s'assujettir à des structures ?

–    La prière est-elle appel ou réponse ?

–    La prière donne-t-elle soif ou étanche-t-elle la soif ?

La réponse équilibrée à cette dernière question est qu'un jour elle donne soif, un autre jour elle étanche la soif  ; un autre jour elle produit les deux effets. Dieu sait ce qui nous convient suivant les circonstances. Et une réponse semblable pourrait être donnée aux autres alternatives. 

               d) – Tâches et étapes à réaliser dans la prière.

 1) – Initiation. Qui n'a pas été initié à la prière doit l'être au moins une fois en sa vie, sinon, il court le risque de se mettre dans une ambiance de prière, dans des structures de prière, sans jamais avoir prié ni fait l'expérience de Dieu en sa vie.

2) – Personnalisation. Il faut former à la prière personnelle. D'où l'importance de ne pas créer des exercices de piété en commun qui dépersonnalisent la prière.     

3) – Sobriété. St-Jean de la Croix, maître d'oraison, enlève progressivement à la prière tous ses instruments, jusqu'à arriver à ce qu'il appelle : rencontre nue de deux substances entre elles : la substance pure de l'homme et la substance pure de Dieu.

4) – Problème. Une communauté, même si elle sait prier, doit tenir compte des « néophytes », c'est-à-dire des commençants : leur donner le temps du décollage, puis de la transition, de la consolidation, enfin de l'état adulte, etc. …

5) – Structures. Il faut tenir compte du sens et de l'importance du rôle qu'elles jouent. Si elles servent, il faut s'en servir. Dire qu'il faut les garder parce qu'elles existent, n'est pas un motif valide. Il faut être réaliste. Si elles ne servent pas, qu'on les jette. Il ne faut ni leur enlever systématiquement leur importance, ni leur donner plus d'importance qu'elles n'en ont…

Ce que le Christ a institué doit être respecté : c'est d'institution divine. En dehors de cela il faut adapter les structures au temps et à l'espace… Les deux pôles autour desquels tournent les structures sont  :

–    le pôle de la prière communautaire proprement dite.

–    le pôle de la prière personnelle.

Dans l'un et l'autre, il faut signaler deux moments importants :

– le matin : il faut projeter la spiritualité du jour selon l'Evangile,

– le soir : il faut consacrer un moment à la révision, avec reconnaissance et repentir qui          sont les formes de l'amour. C'est l'amour qui est important.

Attention aux hétéro-structures et aux contre-structures.

L'hétéro structure consiste à faire chevaucher une structure non adéquate sur une certaine forme de prière : mettre des harnais de chameau à un cheval.

La contre-structure c'est tout ce qui bloque ou entrave la prière. 

               e) – Problèmes de la prière communautaire.

1) – Prière en commun et prière communautaire.

Des exemples concrets permettront de mieux comprendre les distinctions ci-dessus indiquées. Si nous examinons les niveaux, il faut distinguer :

– prière en commun

– et prière communautaire proprement dite.     

L'idéal est qu'une communauté, fermement appuyée sur la prière en commun, puisse trouver son rythme et son dynamisme pour passer à la prière communautaire.

Je m'explique : On se souvient du rapport que j'ai signalé entre méthode et spontanéité dans la prière personnelle. Une méthode, c'est comme des rails. Quand vous sentez venir la spontanéité d'une prière personnelle, jetez la méthode et laissez venir la prière spontanée. Mais quand vous ne savez pas comment prier, suivez la méthode… Il faut en dire autant de la prière communautaire ; par rapport à elle, la prière en commun serait une méthode. La prière en commun est déjà préparée ; la communauté s'en sert mais presque sans créativité ; elle n'est pas, à proprement parler expression de la communauté. La prière communautaire est au contraire celle que la communauté crée, produit : elle est le fruit de l'inspiration et du dynamisme de la communauté. Elle est le moment où la communauté peut acquérir sa propre respiration. Elle est la prière idéale parce qu'elle est celle qui contribue le plus à construire la communauté et celle qui peut édifier les Frères.

Seulement une vraie prière communautaire, ça ne se tire pas d'une poche comme un mouchoir ; pas plus d'ailleurs qu'on ne va faire surgir comme par enchantement une bonne oraison personnelle. Il y faut toujours travail, effort et méthode. Je vous parle de la prière en commun comme étant une marche vers la prière communautaire, mais, bien entendu, on doit constamment passer de l'une à l'autre. Quand une communauté ne fait pas une prière communautaire, elle doit faire la prière en commun. Mais quand elle fait une prière communautaire, elle n'a pas besoin de se sentir enchaînée du tout à la prière en commun ; elle doit se sentir libre pour la spontanéité.

Un exemple. Nous avons fait récemment une retraite avec le Père Häring. Il nous a fait vivre pleinement la liturgie et la parole de Dieu et il a été bien impressionné par la manière dont a réagi le Conseil Général. « Vous avez déjà, m'a-t-il dit, une expérience de prière parce que Vous vous ouvrez mutuellement avec naturel et spontanéité ». Et pourtant, qu'avions-nous fait ? Nous avions mis dans la grande chapelle un pupitre avec la Bible, des bancs tout autour pour former le cercle. Et là on commençait la liturgie de la Parole autour du livre de la Parole. Une fois faites les lectures, on se recueillait 5 ou 10 minutes, parce qu'il n'y a rien de pire qu'un dialogue qui ne naît pas de l'intériorité et s'épuise en futilités. Après le silence donc, chacun disait, sans se presser, bien calmement, ce que la Parole de Dieu lui avait suggéré. Entre une intervention et une autre, il y avait aussi un silence, car il faut du respect pour ce qu'a dit un confrère et il faut assimiler ce qu'il a voulu nous dire. La messe prenait une heure, une heure et quart, sans tenir compte de la préparation que chacun avait pu faire avant, et si cela ne durait pas plus, c'est que l'horaire général de la maison de retraite devait être respecté. Les Vêpres, dites aussi avec tout le calme voulu, ne prenaient pas moins de demi-heure.

Vous le voyez, le rythme communautaire de prière (dans le sens de temps imparti à la prière) peut déborder largement le rythme suivi par les communautés où l'office est dit à la mitraillette. Et je pense à tous les formalismes d'antan ou d'aujourd'hui : « on n'a pas récité l'offrande de la journée » ; « on n'a pas récité Laudes ». Je répondrais : « On a récité un psaume de Laudes, avec méditation, fait une lecture de la Parole, et on a employé demi-heure. N'est-ce pas mieux que d'avoir expédié cinq psaumes de l'office ?»

Et au moins, quand vous faites cette sorte de prière, cela vous indique un peu le temps que vous devriez prendre pour une récitation normale. 

               2) – Prière avec les Constitutions. 

Je voudrais être très pratique et souligner encore un point important. Dans un dialogue avec  quelques Provinciaux nous sommes arrivés à cette conclusion : il devient indispensable que, dans la ferveur qui devrait préparer un Chapitre Général, on invite les Frères à intérioriser de plus en plus les Constitutions. Et nous avons été bien d'accord que le temps le mieux adapté serait celui qui suit la communion. Dans la paix que donne à l'âme la réception de l'eucharistie, il serait très utile de lire un paragraphe des Constitutions avec toute la dignité voulue. Et sous le regard de Jésus, agissant en nous, nous vivifierions en nous le charisme de l'Institut. Les Constitutions en effet ne se discutent pas ; elles se méditent. Si quelqu'un ne sent rien, qu'il ne dise rien ; si quelqu'un n'est pas d'accord, ce ne sera pas le moment de le dire. Ceux par contre qui trouvent que l'Esprit de Dieu s'est introduit en eux par la lecture méditée des Constitutions peuvent en faire participer les autres ou parler au Seigneur de ce qu'ils ont Vécu pendant ces moments. Et chaque jour la petite lampe que nous sommes chacun éclairerait pour les autres un mot, une ligne, de ce livre que nous découvririons ensemble.

J'insiste encore une fois qu'il ne s'agit pas de commenter pour commenter, mais de mettre en commun une expérience de vie. Et le Frère qui entend, commence aussi à écouter, et, peu à peu, il va intérioriser ces idées et les appliquer à la vie quotidienne.

  Certains pensent peut-être que je déraille parce que, de la prière, je passe aux Constitutions. Et je réponds : non, mes amis, car la prière communautaire n'est pas autre chose, en fin de compte, qu'une communauté qui s'exprime elle-même en parlant à Dieu ; une communauté qui crée et exprime en son propre langage ce qu'elle sent, ce qu'elle veut, ce qu'elle espère, ce qu'elle aime, en commun. Et s'il n'y a pas communauté, il n'y a pas prière communautaire.

Quant il y a un groupe d'hommes qui coexistent sans s'aimer, ou qui, tout en s'aimant, n'ont pas mis en commun leur vie, ni tissé ensemble les fils de leurs peines et de leurs joies, ou qui n'ont pas un idéal commun, on ne peut parler de vie communautaire. Tout au plus il s'agit de vie en commun. De même pour la prière. La prière communautaire exige vie en commun, communauté et, à son tour, cette prière communautaire étant l'expression de la communauté existante, devient le moyen d'en créer une meilleure. Elle peut réellement faire la communauté. C'est comme entre prière personnelle et Evangile : quand nous nous exprimons dans la prière personnelle, nous exprimons l'Evangile qui est déjà en nous, et à son tour ce que nous avons exprimé nous évangélise à nouveau. En d'autres termes, il y a à la fois émission et réception. De même pour la vie communautaire. Si je mets l'accent sur les Constitutions, c'est parce que la communauté qui parle n'est pas une communauté quelconque ; c'est une communauté mariste. L'Eglise, par exemple, est la communauté qui se forme autour du Seigneur Jésus ; ce n'est pas un groupe d'hommes, solidaires par des fonctions ou des biens, mais un groupe d'hommes solidaires par la grâce du Père, la vie de Jésus et le souffle de l'Esprit, et c'est cela qui unit vraiment.

De même la communauté mariste commence à découvrir que, si elle vit une forme de vie aussi singulière que le célibat consacré, elle le doit au Seigneur Jésus et à son Règne. Qui nous a réunis ? Le Seigneur Jésus (congregavit nos in unum Christi amor).

C'est fou d'avoir oublié que la prière est le premier motif de notre vie en commun, d'avoir oublié que la vraie source de notre solidarité est celle que nous trouvons actuellement la plus amère, parce que nous ne savons pas prier.

Ce qui nous maintient en commun comme chrétiens, c'est le Seigneur Jésus ; comme maristes, c'est de communier à l'âme collective de la Congrégation, de l'inviscérer au plus profond de notre être. Or cette âme collective a trouvé historiquement son expression la plus parfaite dans nos Constitutions actuelles. Il y a un abîme entre les Constitutions d'aujourd'hui et celles d'autrefois ; les actuelles sont un reflet bien plus fidèle du Père Champagnat que celles du passé. Le malheur, c'est qu'elles ne sont encore imprimées que sur papier ; quand nous nous serons mis à prier à partir d'elles et à échanger sur leur contenu, elles pourront alors devenir imprimées en notre âme.

Il serait très néfaste d'arriver au prochain Chapitre Général pour faire une critique de nos Constitutions sans les avoir intériorisées dans la prière.

Voici donc comment est tissée une âme collective. Quand cette âme collective sera bien chevillée en chacun de nous, c'est alors que nous serons pleinement conscients de ce qui nous unit. Nous n'allons pas rénover la vie religieuse en promenant notre esprit sur le terrain de la théologie de la vie religieuse. La rénovation deviendra réalité si nous nous référons à deux sources : l'Evangile et les origines de l'Institut.

Il ne s'agit pas de nous échauffer la tête en méditant ce que nous avons de commun avec tel ou tel Institut religieux, ou même avec les autres chrétiens. Que ce soit là un travail spéculatif valable, j'en suis d'accord ; mais, du point de vue de ma vocation, j'ai été appelé à telle forme de vie, dans telle institution, que je ne considère pas comme un groupe respectable ou même Vénérable, mais comme l'incarnation d'un charisme. Ce charisme a eu son origine et son développement historique, mais il était et est encore un don de l'Esprit à l'Eglise, une forme efficace de service à l'Eglise.

Il ne s'agit pas de vouloir tout changer sans tenir compte du réel de la communauté où l'on est. Accepter pour communier ; communier pour transmettre ; transmettre pour féconder.

Il s'agit donc d'abord d'accepter la formation qu'on a reçue, comme point de départ en soi et dans les autres.

En soi : ce sera un aspect de cette acceptation de soi-même que Guardini appelle «un des meilleurs dons de Dieu » – une acceptation joyeuse, savoureuse. Se sentir bien dans sa peau peut être une preuve non négligeable de santé spirituelle.

Dans les autres : ce sera tout le problème d'accepter sa communauté avec dynamisme, comme un matériau de construction, et la respecter en même temps. On n'a pas le droit de demander d'être accepté si on n'accepte pas les autres comme ils sont.

Et accepter la communauté que je trouve, avec ses structures, ne signifie pas immobilisme. C'est précisément quand on l'a Vraiment acceptée et qu'on a réussi à vivre en harmonie avec elle, que l'on peut être plus sûr de soi pour exercer une critique saine et constructive. 

               f) – Etapes de la prière communautaire.

1 – Livres. Utiliser un livre pour la prière communautaire, parce qu'on ne peut improviser tous les jours. Après tout le travail et toutes les frictions de la journée, on n'a pas toujours l'esprit dispos. Donc il faut un livre ou des livres.

Le Conseil Général a insisté pour qu'on adopte un livre d'office, à titre d'expérience, jusqu'au prochain Chapitre Général. De la sorte, les Capitulants de 1976 pourront exposer leurs opinions sur les livres adoptés çà ou là. Il ne s'agirait pas en effet de venir au Chapitre Général discuter de ce qu'on n'a pas expérimenté. Je regrette qu'il y ait des Provinces qui gardent l'office marial d'En-Calcat. Il est dépassé. On ne récite plus les matines, par exemple, qui sont devenues l'office des lectures, les Petites Heures sont changées, etc. … Et les moines d'En-Calcat ne le rééditeront pas.

Donc il faut adopter «ad experimentum » un autre livre de valeur. «Prière du Temps Présent » est très bon en français. En espagnol, l'office des Frères des Ecoles Chrétiennes d'Argentine me paraît excellent. Dernièrement nous avons commencé à publier en offset, en français, un supplément marial (Secrétariat Général) qui est tout à fait bon. Il serait assez facile de l'adapter à d'autres langues.

Les sources de notre prière liturgique doivent être la Bible dont nous devrions être familiers, et ensuite les documents capitulaires et ceux du Concile. Ces textes doivent donc toujours être à la disposition des Frères, car ils doivent leur devenir tout à fait familiers.

2 – Structures. Il faut aussi un règlement de base, je Veux dire quelques structures fondamentales. Nous nous mouvons dans la dimension espace-temps, et ce ne sont pas tous les lieux et tous les temps qui conviennent à telle ou telle action. Parfois, dans le passé, nous avons joué comme des enfants pour casser les structures. Il fallait seulement les libéraliser, parce que nous avions converti en fin ce qui n'était que moyen. Mais maintenant rendons-leur leur vrai rôle d'instruments.

   * – Le lieu.

Vous serez d'accord avec moi que la prière exige un lieu adéquat. Celui qui y vient, y vient parce qu'il Veut vraiment prier. Si la communauté est capable de faire les choses avec tout le sérieux voulu, on peut penser à une préparation de l'ambiance : une grande croix nue, la lumière convenable, l'attitude du corps, un peu à la manière orientale, etc. … Pensez au yoga  : on conditionne le corps, en vue d'une meilleure résonance de l'esprit. Ce sont des moyens qui restent seulement des moyens, mais pas si négligeables que cela. Disons en passant que nos chapelles n'invitent pas toujours à la prière. Il s'y trouve, à l'occasion, des images qui demandent vraiment de la foi pour inspirer la dévotion. Là comme ailleurs il y a une éducation à faire. En tout cas pour les jeunes d'aujourd'hui, il ne faut penser les aider spirituellement avec une imagerie saint-sulpicienne. Les Frères plus âgés, accoutumés à ce type de spiritualité, peuvent parfois aimer cela et par contre ne pas apprécier du tout la croix nue. Cultures différentes sur lesquelles la discussion est possible. Mais enfin il est signifiant qu'un Saint Jean de la Croix, par exemple, nous dise, que pour arriver à l'oraison substantielle et robuste, il faut le plus possible détacher l'être humain de tout soutien extérieur. C'est dire qu'un art facile » n'est pas la meilleure solution.

** – Le temps.

La prière requiert une périodicité et une durée : ces deux éléments combinés constituent le rythme de la prière. L'homme a surtout besoin d'un rythme quotidien et d'un rythme hebdomadaire. Mais de plus en plus, il a besoin aussi d'un rythme de récupération qu'il faut prendre très au sérieux. Je m'explique. Si vous constatez dans vos communautés ou vos Provinces que le rythme de travail vous écrase, faites appel aux droits de Dieu et aux droits de la personne en relation avec Dieu : ils sont inaliénables.

Avant le Chapitre j'ai eu à insister sur l'importance capitale de l'étude religieuse, mais si je souhaitais qu'elle pût être faite dans des conditions mieux adaptées à chacun, je réalisais bien les difficultés de ce projet. Et Dieu sait que l'expérience a été décevante. Nous sommes actuellement en train de constater, dans certaines Provinces, que, mis à part peut-être ceux qui suivent des cours ou des sessions, la culture religieuse et le dynamisme apostolique sont en notable baisse. Et évidemment cela retentit sur la vie de prière personnelle où l'on croyait être parvenu et qui retourne à la phase Végétative.

L'étude religieuse est indispensable à la respiration spirituelle. Mais voilà. Non défendue par les barbelés d'un règlement, elle devient victime en particulier de l'immédiatisme.

Pour elle, comme pour toute la vie communautaire, il y a le péril d'un travail mal réfléchi. Dans tel pays, par exemple, on considère comme antisocial de ne pas utiliser à plein les locaux scolaires. D'où trois tours d'élèves qui les occupent 16 heures sur 24. C'est bien, mais alors, quand se réunit-on en communauté ? Où est la joie de vivre ensemble ? On perd des vocations, et on les perd parfois pour avoir poussé à l'extrême limite la résistance de certains Frères. Je sais bien aussi que d'autres accroissent de leur propre chef le travail qu'ils ont à faire, et il faut leur rappeler que l'excès de perfection dans la tâche professionnelle devient un déséquilibre lorsqu'on ne trouve plus un temps raisonnable pour prier.

A quoi bon parler de prière créative en communauté si on n'assure pas la présence de la communauté à cette prière ? C'est plus facile à trois Frères de faire une prière communautaire dans une communauté de trois Frères qu'à trois Frères de faire cette prière dans une communauté de dix. Où sont les sept autres ? Essayez de vous mettre à la place des trois. Ils sont dans un vrai malaise. Ils sentent physiquement le vide qui ne devrait pas exister, qui n'est pas justifié. L'effet d'une telle absence est désastreux. Non seulement on est privé de la prière de l'absent, mais l'engrenage communautaire se bloque, cet engrenage qui lançait la communauté à la recherche de son âme.

Dans notre époque d'anticolonialisme on parle beaucoup de peuples à la recherche de leur âme », de volonté de trouver son âme et d'exprimer son identité ». Nos communautés aussi doivent réaliser « un effort d'identité communautaire, un effort pour découvrir et exprimer leur âme ».

Alors voyez. On commence à manquer à la rencontre communautaire de prière parce que c'est plus facile de rester dans sa chambre, parce qu'on est allé se coucher trop tard pour voir un match à la télé et que le matin on tombe de sommeil, etc. … Mais alors, il n'y a plus de rencontre communautaire, les personnes ne se réunissent plus ni dans le temps ni dans l'espace. Plus rien ne se fait communautairement. On est au niveau du marié égoïste qui, après une brève lune de miel, réorganise sa vie comme un célibataire endurci, veut retrouver ses besoins, ses habitudes, ses fantaisies, sans souci de celle à laquelle il a dit : je t'aime, parce que provisoirement ça l'arrangeait de dire ces mots. Le jour où il a fallu vraiment aimer, il s'est refusé. Bien des Frères sont de mauvais maris de leur communauté. Peu leur importe qu'elle Vive, peu leur importe la qualité de sa Vie.

Il faudra donc quelqu'un pour secouer ces apathies, mais il doit avoir devant les yeux les diverses possibilités auxquelles il peut conduire la communauté. 

*** – Types de prière.

La prière fervente. Disons simplement que c'est la prière bien faite. J'ai assisté, au cours d'une réunion de directeurs, à une récitation de l'office vraiment belle et qui m'a impressionné. On sentait le respect pour la Parole de Dieu. Sans avoir un livre, on pouvait suivre et s'unir parfaitement à la communauté tant la récitation était impeccable.

J'ai fait par contre, quand j'étais directeur du Second Noviciat, l'expérience d'enregistrer sans le dire une récitation de l'office et de la faire entendre ensuite. C'est un bon remède contre la récitation bâclée.

On peut comprendre que les Frères âgés n'aient pas envie de changer d'office parce qu'ils savent l'autre plus ou moins par cœur. Et c'est effectivement une bonne chose de savoir par cœur des textes que l'on peut dire en fermant les yeux. C'est même pour cela que, dans la Prière du Temps Présent, certains hymnes reviennent souvent. Mais cela ne doit pas empêcher l'évolution de la prière d'une communauté, et d'ailleurs les exemples ne manquent pas de Frères âgés qui se sont mieux prêtés à la créativité que des plus jeunes.

Ici le rôle du Supérieur consistera à doser les efforts demandés, mais à condition de faire sortir de l'immobilisme. Que l'on sache profiter des circonstances pour qu'une première expérience se fasse dans les meilleures conditions ; puis une autre, puis une autre, et que les plus réticents soient obligés de constater que c'est bon.

Après le premier pas d'une récitation bien faite, on peut passer au second qui consistera à choisir la prière. Par exemple, un jour on peut dire à la communauté : Aujourd'hui nous ne réciterons qu'un psaume au lieu de trois ; nous allons bien le choisir. Puisque hier la communauté a eu une grande joie (la rappeler) nous réciterons le psaume… qui se trouve à telle page. Et avec Israël, vraiment, nous chanterons le Seigneur. Nous lirons ensuite tel passage où S. Paul met en évidence l'amour de Dieu pour les hommes.

Motiver ainsi la prière, c'est ce qu'on peut appeler prière sélective, créative.

On ne fait pas cela pour raccourcir le temps de récitation de la prière. Avec une communauté sérieuse, cette prière matériellement raccourcie prend pratiquement toujours plus de temps que n'aurait pris la récitation normale. 

La prière animée.

 Le rôle de l'animateur est de contribuer à l'éducation biblique et ecclésiale de la communauté, et d'introduire dans cette lumière de foi, dans cette lumière de l'Ecriture, telle circonstance que la communauté est en train de Vivre. L'idéal est que chacun à son tour assure le rôle d'animateur. Que ce soit au moins le plus grand nombre. Si tous acceptent de jouer ce rôle, il n'y a plus ni de ces sourires, ni de ces réflexions qui empêchent la spontanéité. Une chose spontanée ne doit pas être parfaite, mais il faut que tout le monde comprenne, par sa propre expérience vraie, qu'on s'exprime devant Dieu simplement, en bredouillant, en cherchant ses mots, en faisant des lapsus, etc. … sinon on en est toujours à l'expression académique avec tout ce qu'elle peut avoir d'un peu faux, un peu arrangé, un peu prudent, un peu non compromettant.

La prière créative. Cela peut se faire selon deux modes : schéma ou spontanéité pure.

a) – Schéma conducteur. Quelqu'un crée un schéma de prière qui n'est pas dans les livres. Ce quelqu'un a réfléchi à ce qui convient le mieux à la communauté ; il connaît bien les membres de cette communauté et il sait le rythme respiratoire de la spiritualité de chacun.

(Du point de vue pratique il est bon que chacun ait un exemplaire du schéma).

b) – Spontanéité pure. La communauté se met en esprit de prière. Un minimum, très sobre, de prière objective sert d'introduction : par exemple, une brève oraison faite à voix haute, par quelqu'un qui sache parler à Dieu et sente Dieu. Suit une lecture de la Parole et … en route.

Je me souviens d'un groupe de jeunes Colombiens, à l'époque où il était normal d'aller à la chapelle. Ils se demandaient combien de temps hebdomadaire ils allaient passer en adoration devant le Saint-Sacrement. Une heure n'était rien du tout pour eux. La proposition d'une nuit entière les fit vibrer d'enthousiasme. C'étaient des « tout-ou-rienistes » : pas de petite dose, comme si nous étions des vieux ! Je les entends encore. Un des garçons commençait à dire au Seigneur, à voix haute, ce qui lui venait du cœur, et puis il y avait 5, 10 minutes de silence. Un autre parlait ; encore quelques minutes de silence, et ainsi de suite. La participation était massive à cette sorte d'homélie participée. Je dis sorte d'homélie participée parce que je veux éviter toute équivoque. On a pu en effet faire beaucoup de bruit autour du slogan : « Non aux homélies participées ». Je suis bien d'accord si l'on s'entend sur le sens d'homélie. L'homélie vraie est un exercice de pastorale prophétique à l'égard de la communauté chrétienne par quelqu'un qui a mission et consécration, qui préside l'assemblée et fait une explication qualifiée de la parole de Dieu. Dans ce sens ce n'est pas tout le peuple de Dieu qui reçoit cette fonction. Mais ce serait une grave erreur de croire que les mises au point de l'autorité ecclésiastique sur l'homélie participée visent toute forme de dialogue entre chrétiens réunis en assemblée. Voudrait-on faire de l'eucharistie un éteignoir des relations humaines ? Comment alors expliquerait-on tant de textes des Actes des Apôtres qui vont en sens inverse ? Comment s'accomplirait l'oracle du prophète : « Un temps viendra où vos fils et vos filles prophétiseront, s'édifiant mutuellement » ? Parlons donc de dialogue pour transmettre à nos Frères nos sentiments spirituels en présence du Seigneur, présent dans l'eucharistie. 

La prière d'engagement.

 C'est la plus exigeante. Je prends le cas des Focolarini. Ils se réunissent parfois le matin pour la lecture de l'Evangile. Ils prennent une phrase du genre suivant : « Que Votre lumière brille devant les hommes pour qu'ils glorifient votre Père qui est dans les cieux ». Toute la communauté prend l'engagement de vivre cette phrase tout le long du jour. Réunis de nouveau le soir, ils examinent comment ils ont accompli personnellement la consigne du matin. Si plusieurs disent : « J'ai oublié ; vraiment je n'ai pas été aujourd'hui pour les autres une lumière qui brille », cela fait supposer que l'on n'a pas vécu collectivement l'idéal proposé, et le jour suivant on reprend le même thème, et même encore un troisième jour, s'il faut. Ainsi toute la communauté réussit à vivre la Parole comme témoignage de toute la communauté.

Tous les tentacules du poulpe se mettent au travail pour réaliser la même action.

L'objectif atteint — je reste dans l'histoire des Focolarini —, on passe à un autre texte évangélique. Et de nouveau, on s'engage à le vivre, à l'incarner en soi. De cette façon, sans faire beaucoup de bruit, on témoigne de l'Evangile devant les hommes. Ce qui importe, c'est d'être alerté et ensuite de se donner à plein pour que les hommes louent Dieu du témoignage donné. C'est encore cela, la créativité.

Je ne puis autoriser les Frères ou les communautés à faire des choses qui s'opposent au Directoire. Directoire et Coutumier sont la plateforme de base ; mais un principe-clef, c'est que tout ce qui a été écrit là-dedans a été écrit pour notre bien. Si donc un jour quelqu'un de vous découvre que telle façon de prier lui fait plus de bien, tant mieux s'il est capable de la mettre en pratique. Cependant ne touchez pas à l'Eucharistie, car là, c'est le pouvoir actif de Jésus qui est en jeu. De même ne supprimez pas la méditation personnelle plus d'une fois par semaine, pour en faire une méditation partagée. En faisant le contraire, vous aliéneriez les personnes. C'est nécessaire à tout prix d'assurer le rythme de la prière personnelle.

Vous pouvez donc faire en communauté une prière participée pourvu que vous ne raccourcissiez pas le temps dévolu à la méditation. Par exemple intervertissez Laudes et Rosaire en consacrant demi-heure à un seul au lieu de consacrer un quart d'heure aux deux. Vous ferez l'inverse le lendemain. Ce n'est pas mal si cela veut dire que vous êtes en train de devenir plus dynamiques et plus créatifs, même si ce doit être souvent.

Quand vous voyez que la communauté marche et veut devenir créative, allez de l'avant tant que vous pouvez, mais, je le répète, ne raccourcissez pas le temps normal d'oraison, ni avec créativité ni sans créativité.

S'il y a, malgré vos efforts, des absences fréquentes, établissez des temps de récupération. Ce sera le meilleur indice que vous prenez la communauté au sérieux.

Je peux citer une communauté qui passait tout le matin du dimanche en prière, réunie à la maison provinciale. Les Frères avaient pris conscience que la Vie communautaire bien vécue, vaut tous les spectacles et les satisfactions qu'on peut trouver dans une capitale et que sans ce contact communautaire avec le Seigneur et les confrères, leur apostolat serait vide. Et pourtant c'était un groupe de Frères pour qui construire la communauté était loin de signifier s'enfermer entre quatre murs.

               g) – Lois de la prière créative

La prière créative a ses lois auxquelles il faut s'adapter :

1) – D'abord ne pas changer trop souvent. Les expériences, pour être fructueuses, demandent, en général, du temps. Souvent il arrive qu'on introduise une nouveauté seulement pour sa nouveauté, et la plus grande partie des gens ne réussissent pas à prier s'il y a trop de changements. La nouveauté demande quelques jours pour être assimilée, pour être évaluée et pour faciliter la prière. Le changement n'est fécond que s'il est assimilé. S'il ne passe pas dans l'organisme communautaire mais devient une routine superficielle, il faut changer de nouveau. La capacité d'assimilation varie beaucoup d'une maison à l'autre. Il y a des communautés à qui un changement est efficace pour une longue durée et d'autres qui ont besoin de changer de rythme plus souvent.

2) – Une seconde loi est celle des proportions. N'oubliez jamais la double dimension communautaire et personnelle, à laquelle il faut ajouter aussi la dimension ecclésiale. Conjuguez les trois avec intelligence et prudence. Par exemple, si un jour vous donnez plus de temps à la prière communautaire, donnez-en plus le jour suivant à la prière personnelle pour rétablir l'équilibre.

Il faut tenir compte aussi du niveau. En général, s'en tenir à un niveau moyen. Si vous partez au pas le plus lent, vous fixez la communauté dans la médiocrité. Si au contraire, vous lui imposez un rythme de champions olympiques, vous la trouverez au fossé à bref délai. Non, si une équipe de Frères se réunit pour se dépasser, qu'elle prenne au départ un rythme moyen, et qu'elle accélère ensuite peu à peu.

Lorsqu'il s'agit d'exigence, vouloir s'en référer à ce qu'on appelle le consensus » peut être bien dangereux. Vous connaissez la chanson. On discute du niveau qui peut être accepté par tous, et si quelqu'un vise un peu haut, un autre répond : «Pas d'accord. Se lever de bonne heure tous les jours, dire Laudes tous les jours en communauté, assister à la messe et au chapelet ! non, je ne vois pas pourquoi imposer cela au groupe ». Alors on baisse le niveau. Il n'est pas question de commencer le saut en hauteur à 2 mètres, ni même à 1 mètre. On commence au ras de terre. Même les paralytiques auront leur chance !

3) – Loi de convenances et de précautions. Il faut que l'animateur de la communauté connaisse assez sa communauté. Il faut qu'il soit pour elle le bon cuisinier qui sait varier le menu selon les goûts et les besoins de ses hôtes. Le menu spirituel est aussi une réalité. On ne peut contenter tout le monde, mais enfin, de temps en temps au moins, il faut tenir compte des goûts. Supposons qu'un Frère aime bien le latin comme langue liturgique ; il est bon latiniste, a beaucoup étudié le plain-chant, il est vrai artiste, c'est un homme de goût, etc. … Pourquoi ne pas lui permettre de prier de temps en temps avec autre chose que des textes ou des rythmes modernes ? Seuls l'amour et la compréhension peuvent apprendre à chacun à sacrifier de bon cœur ses goûts pour faire plaisir aux autres. Il importe que l'animateur n'impose pas exagérément ses propres goûts, mais s'adapte aux goûts des autres autant que possible. Les hommes qui savent mesurer avec sagesse les possibilités des personnes peuvent faire un bien incalculable comme animateurs de communautés.

Venons-en au concret. Vous en avez qui vous disent : Moi, les psaumes, ça ne me dit rien, et d'ailleurs la prière en commun, ça ne me dit rien ». Il faut lui répondre : Mon cher, ici comme dans n'importe quel groupe de convives, on sert deux types de repas : type restaurant et type banquet. Tu peux aller au restaurant et demander ce qui te plaît, si tu as de l'argent. Sinon pourquoi viens-tu manger avec nous ? ». Tout le monde sait que dans un ban guet, le menu est unique et unifie les personnes ; on ne vient d'ailleurs pas essentiellement pour manger mais pour con-vivre (convivium) comme dirait Cicéron qui trouvait si beau ce mot latin qu'il l'opposait au terme grec : con-boire (symposion). Etre assis à la même table, mangeant les mêmes plats, mais pour participer à une fête, cette fête qui est un des maîtres-mots de ces toutes dernières années.

Charité et table unique, voilà ni plus ni moins la prière communautaire. Introduire là-dedans des règles de goût individuel n'a pas de sens et signifie méconnaissance totale de la prière communautaire. La grande règle, c'est donc de savoir s'adapter au genre de prière qui convient à la communauté. Il ne s'agit pas de commencer avec : Je n'aime pas ceci ; je n'aime pas cela ». Vous brisez l'unité ; à cause de vous la prière cesse d'être un instrument de communion.

Loin de moi de chercher à centrer la rénovation sur la seule prière. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai parlé d'abord de Communauté. Communauté de foi, communauté intégrale. J'entends par communauté intégrale celle où tous travaillent ensemble, se réjouissent ensemble, s'assoient à la même table, mettent les biens en commun, prient ensemble le Père. C'est une communauté de foi, d'espérance, d'amour, d'amitié, de travail et de biens.

Si au contraire la communauté ne va pas au-delà de la solidarité, alors je doute bien qu'on puisse jamais commencer une Vraie rénovation. Je dirai plus. Employer le mot vie communautaire est abusif s'il n'y a pas comme élément constitutionnel le dynamisme que confère la prière.

Au cours de réunions de Supérieurs Généraux de congrégations laïcales, j'ai pu entendre quelques réflexions à ce sujet. On commence ça et là à être désabusé de certaines manies communautaires. On se rend compte que la théologie de la vie religieuse devient un sujet un peu lassant, lorsqu'il s'agit de théoriser sur la communauté, la recherche d'identité, d'analyser la substance de la vie religieuse, de déterminer avec exactitude la place qu'elle occupe dans l'Eglise, etc. … Ce perpétuel repli sur soi, même communautaire, ne mène à rien. Il y a ainsi des thèmes qui ont été des thèmes à succès de la crise postconciliaire et qui aujourd'hui n'intéressent plus.

Déjà moins virulent aussi l'émiettement en fraternités, en petites communautés, etc. …. En général, les expériences de cette sorte n'ont pas été très concluantes. Il semble que maintenant ce que l'on cherche, c'est – dans une communauté, grande ou petite – de laisser de côté les théories et de se mettre à vivre l'Evangile de façon loyale et sereine et de s'occuper en commun d'une œuvre apostolique valable. A travers le fourré des recherches on est arrivé à découvrir que la vie communautaire n'est pas suffisante toute seule, ni la prière toute seule, mais que l'homme est un-dynamisme qui ne fonctionne qu'avec ces deux éléments ensemble. 

CONCLUSION

 Si ma prière est Vraie, elle ne me laissera pas en repos et je ne laisserai pas ma communauté en repos. Et si mes confrères prient vraiment, ils devront réagir avec leurs lumières et à leur tour me provoquer à une nouvelle exigence envers moi-même et envers eux-mêmes. Divine dialectique qui est capable de faire sauter comme des cabris — dirait le psalmiste — les plus sclérosés d'entre nous.

Que chacun commence et il verra l'impulsion que la vraie prière peut donner à un homme et à un groupe d'hommes.

                      F. BASILIO RUEDA


 

ELECTIONS DE PROVINCIAUX 

1) GRANDE BRETAGNE: Fr. Artur Kelm. Séance du 6-7-1972 – 2' triennat.

2) CAXIAS DO SUL: Fr. Avelino Madalozzo. Séance du 15-7-1972 – 1ier

3) ITALIE: Fr. Pierdamiano Anfosso. Séance du 22-7-1972 – 1" triennat.

4) PEROU: Fr. José Tico. Séance du 28-8-1972 – 1" triennat.

5) LEON: Fr. José Gonzàlez Ordaz. Séance du 11-10-1972 – 1ier

6) IRLANDE: Fr. Declan Duffy. Séance du 5-12-1972 – 1iertriennat.

7) SANTA MARIA: Fr. Pedro Weschenfelder. Séance du 2-2-1973 – 1ier triennat.

8) ALLEMAGNE: Fr. R. M. Maierbeck. Séance du 30-5-1973 – Sème triennat.

9) IBERVILLE: Fr. Urbain Beauvais. Séance du 30-5-1073 – 1ier triennat.

10) PORTUGAL: Fr. Diamantino José. Séance du 19-6-1973 – 2ième triennat.

11) SRI-LANKA: Fr. Gregory Apuhamy. Séance du 19-6-1973 – 1iertriennat.

12) BELGIQUE-HOLLANDE: Fr. Eugène Blondeel. Séance du 25-8-1973 – 1iertriennat.


 

LISTE des Frères

dont l'annonce du décès est arrivée en retard

 

Date du Nom et âges des Défunts                          Lieu du décès                             Date du décès.

 

Fr. Simard Edmour (Adolphe Justin)            80 P    Baie de St-Paul (Canada)                  28 janv. 1972

Fr.  Pedro Santos (Pedro Paulo)                46 P    Apipucos (Brésil)                                 9 fév. 1972

 

 

LISTE des Frères défunts depuis le 1ier avril 1972

 

Nom et âges des Défunts                           Lieu du décès                                Date du décès.

 

Fr. Charles De Coninck

(Louis Isidore)                            57 S    Mont St. Guibert (Belgique)                5 avril 1972

Fr. Michel Pujade

(Mery)                                          91 S    Guatemala (Guatemala)                      7

Fr. Ronald McKay

(Jordan)                                      69 S    Wanganui (N. Zélande)                       14 »     »

Fr. Felipe Puras

(Anastasio José)                        58 S    Palencia (Espagne)                            21 »     »

Fr. Joseph Stegemann

(Josef Ludgerus)                        85 S    Furth (Allemagne)                                4 mai

Fr. Antoine Bruyère

(Marie Casimir)                           66 S    N-D de l'Hermitage (France)             18 »     »

Fr. Kevin G. McAloon

(Paulinus Basil)                         51 S    Auckland (N. Zélande)                         21 »     »

Fr. John Martin Gerber

(Lucianus)                                   55 S    Bendigo (Australie)                             22 »     »

Fr. John Patrick Quin

(Leon Desmond)                        67 P    Wellington (N. Zélande)                       31 »     »

Fr. Ignacio Duque

(Ignacio Maria)                           64 S    Palmira (Colombie)                             1 juin »

Fr. George Harnois

(George Xavier)                         67 S    Desbiens (Canada)                            6 »       »

Fr. Edmond Scheyder

(Edmond Val)                             57 P    St-Genis-Laval (France)                      11 »

Fr. Virgil Philpott

(Richard James)                        66 S    Wellington (N. Zélande)                       19 »     »

Fr. Wolfgang Schoberl

(Gilbert)                                       89 P    Santa Maria (Brésil)                            19 »     »

Fr. Vincent Lamble

(Eugène Vincent)                       67 P    Durban (Afrique du Sud)                     26 »     »

Fr. Jules Frison

(Elie Ferdinand)                         86 S    Ginasio (Brésil)                                    2 juill. 1972

Fr. Alfred Flouret

(Marie Eustache)                       85 S    Beaucamps (France)                         3 »       »

Fr. Mario Cellone

(Zenon Mario)                            53 S    Darregueira (Argentina)                      5          »

Fr. Francisco Izaguirre

(Francisco de Asis)                   64 P    Anzuola (Espagne)                              6 »       »

Fr. Noël Marcou du Trémoul

(Louis Maixent)                         87 S    St-Genis-Laval (France)                      8 »

Fr. Victorin Brun

(Léon Casimir)                           66 P    St-Paul-3-Châteaux (France)                          8 »       »

Fr. F. Casanoves Carrobe

(Crisostomo)                              80 S    La Cisterna (Chili)                               9 »       »

Fr. Aloys Schmitt

(Aloys Schmitt)                           79 S    Furth (Allemagne)                                19 »     »

Fr. Joseph Borne

(Siméon)                                     94 S    Alta Gracia (Argentina)                       25 »     »

Fr. Nicolàs Echeverria

(Miguel Enrique)                         79 S    Avellanas (Espagne)                           1 août »

Fr. Octavio Velasco

(Fidel Joaquin)                           55 5     Ibagué (Colombie)                              6 »       »

Fr. Reginald O'Hearn

(Lignon Thomas)                        84 S    Sydney (Australie)                               7 »       »

Fr. Gustave Chastanier

(Dauphin)                                    86 S    Guadalajara (Mexique)                        12 »     »

Fr. Adélard Lirette

(Peter Anthony)                         81 S    Tyngsboro (Etats-Unis)                       12 »     »

Fr. Barbosa Rosell

(Vito)                                            81 S    Tlalpan (Mexique)                                15 »     »

Fr. Bartolomé F. Soms

(Guiberto José)                         78 P    Curico (Chili)                                        17 »     »

Fr. Nicolâo Alcido

(Ubaldo)                                        50 P    Viamâo (Brésil)                                   17 »     »

Fr. Emile Becker

(Adventeur)                                 60 S    Aulnois-s-Seille (France)                    22 »

 Fr. Euclide Leclerc

(Joseph Robert)                         85 S    Tyngsboro (Etats-Unis)                       26 »

Fr. Edward Clarke

(Patrick)                                      71 P    Inanda (Afrique du Sud)                      26 »     »

Fr. Alfredo Manù

(Maria Lorenzo)                            50 S    Carlin (Venezuela)                               27 »     »

Fr. Michael Donnelly

(Flavius)                                       55 P    N. Balwyn (Australie)                           27 »     »

Fr. Fidel Fernàndez

(Fidel)                                          28 P    Sierra de Gredos (Espagne)             30 »     »

Fr. Agostino Borfiga

(Guglielmo)                                 79 S    Carmagnola (Italie)                              31 »     »

Fr. Domina Choquette

(Louis Felicité)                           74 P    Alma (Canada)                                    4 sept. »

Fr. Maurice Teisseire

(Guy Maurice)                            58 S    Roma (Italie)                                         5 sept. 1972

Fr. Maurcio Pagés

(Pablo Vicente)                         75 S    Gerona (Espagne)                              7 »       »

Fr. Paul Romain

(Désiré Paul)                              87 S    Beaucamps (France)                         8 »

 Fr. Alfred Legros

(Paul Zacharie)                         62 S    Kutama (Rhodésie)                             16 »     »

Fr. Leo Guilherme Rech

(Paulo Salvio)                            57 P    Caçador (Brésil)                                  4 oct.

Fr. Félix Vila

(Ramiro)                                     89 S    Castilleja (Espagne)                           7 »       »

Fr. John Hawthorne

(Justin Bernard)                          38 P    Sydney (Australie)                               12 »     »

Fr. William Kelly

(Mary Dorotheus)                       53 S    Glasgow (G. Bretagne)                       16 »     »

Fr. Mansuetto Buzzi

(Mansueto)                                 48 P    Ilholta (Brésil)                                        18 »     »

Fr. Edward Glaser

(Michel Edward)                         77 S    Campinas (Brésil)                               18 »     »

Fr. Moisés Mediavilla

(Maximiliano)                              60 S    Guatemala (Guatemala)                      23 »     »

Fr. Lorenzo Olmo

(Arterio)                                      75 S    Lujân (Argentine)                                 27 »     »

Fr. John Desmond

(Kevin Crispin)                           61 S    Wellington (N. Zélande)                       30 »     »

Fr. Philippe Harvey

(Leon Philippe)                         79 P    Château-Richer (Canada)                  2 nov. »

Fr. François Cox

(Berlin)                                         60 P    Malmedy (Belgique)                            5 »       »

Fr. Henry Joseph Minne

(Edward Cyrille)                         84 P    Santa Maria (Brésil)                            7 »       »

Fr. Feliciano Adria

(Gil Armengol)                            62 S    Avellanas (Espagne)                           8 »       »

Fr. José Rachor

(Efrén Abel)                                53 S    Bom Principio (Brésil)                                     9 »       »

Fr. Jean Laurent

(Jean)                                          78 P    N. D. Hermitage (France)                   10 »     »

Fr. Paul Allemand

(Théophilus)                               85 S    Loma Bonita (Mexique)                       18 »     »

Fr. Emeric Racz

(Itsvan)                                         62 S    Honolulu (Hawaii)                                20 »     »

Fr. Jacques Maenen

(Léon Pascual)                         84 S    Mont St-Guibert (Belgique)                 24 »     »

Fr. Alexis Alosserie

(Désiré)                                       65 P    St-Martin-B. (France)                         4 déc. »

 Fr. Joseph A. Lyons

(Celsus)                                      63 S    Hawthorn (Australie)                            5 »       »

Fr. François Varoqui

(Conde)                                      61 P    Péruwelz (Belgique)                            5 »       »

Fr. Martin Redondo

(Conrado)                                   81 S    Buenos Aires (Argentine)                   8 déc. 1972

Fr. Pedro Peña Diez

(Emeterio Ignacio)                     69 S    Caracas (Venezuela)                         10 »     »

Fr. Buenaventura Tresserras

(Heriberto)                                  85 S    S. Salvador (El Salvador)                   14 »     »

Fr. Alois Vandevelde

(Basilien)                                    75 S    Mont St-Guibert (Belgique)                 15 »     »

Fr. Jeannotte Alcidas

(Joseph Azarias)                        85 S    Iberville (Canada)                                15 »     »

Fr. M. Auguste Rochette

(Astérie)                                       98 S    L'Hermitage (France)                         24 »

 Fr. Antonio Segura

(Ildefonso Maria)                        67 S    Lujàn (Argentine)                                 26 »     »

Fr. Jean Chevron

(Louis Pothin)                             85 S    St-Genis-L. (France)                           28 »     »

Fr. Modesto Làzaro

(Ernesto Maria)                         69 S    Avellanas (Espagne)                           30 »     »

Fr. Joseph Ernest Laliberté

(Alphée)                                      73 P    Desbiens (Canada)                            11 janv. 1973

Fr. Luis Miguel Angel

(Luis Miguel)                              24 T     Ibagué (Colombie)                              17 »     »

Fr. Edward James

(James Ryan)                             89 S    Sligo (Irlande)                                      17 »     »

Fr. Ernest Thyeissen

(Marie Ernest)                            75 S    Jbeil (Liban)                                          21 »     »

Fr. Remi Bomey

(Marie Gelase)                           91 P    Beaucamps (France)                         29 »     »

Fr. Vincent Hall

(Vincent Dominic)                      74 P    Miami (Etats-Unis)                              31 »

 Fr. Charles Desset

(Charles Fernand)                      36 P    Byimana (Rwanda)                              1 fév. »

Fr. Noé Gonzaga Silva

(forge Noé)                                 69 S    Uberaba (Brésil)                                  3 »       »

Fr. Jean Joseph Bouvier

(Albonus)                                    87 S    Guadalajara (Mexique)                        3 »       »

Fr. Paul Harold Wiegard

(Cyril Mathias)                            78 P    Fitzroy (Australie)                                7 »       »

Fr. Michael Cronin

(Michael William)                       32 P    Tuakau (N. Zéalande)                          8 »       »

Fr. Henri Sartre

(André Marcellin)                        74 P    St-Paul-3-Châteaux (France)                          14 »    « 

Fr. David Doncel Gonzàlez

(Inocencio Luis)                           62 S    Viamâo (Brésil)                                   17        »

Fr. Andrew Paul Coughlin

(Prosper)                                    71 S    Melbourne (Australie)                         25 »     »

Fr. Benjamin Themans

(Sigisbert)                                  65 S    Korbeel-Lo (Belgique)                         3 mars »

Fr. James Carroll

(Pablo Gerardo)                         60 S    New-York (Etats-Unis)                         6 »       »

Fr. Gustave Lyonnais

(Gustave Adolphe)                     75 S    Laval (Canada)                                    9 mars 1973

Fr. Hilaire Pelletier

(Louis Hilaire)                            62 S    Montréal (Canada)                              13 »

 Fr. Michael Lang

(Paul Canisius)                         64 P    Parramatta (Australie)                         15 »     »

Fr. Antoine Papillon

(Marie Damien)                          95 S    Varennes (France)                              16 »     »

Fr. Galdino Ziliotto

(Policarpo)                                 60 S    Ribeirâo (Brésil)                                  27 »     »

Fr. Antoine J. Guyonnet

(Bernard Antoine)                      71 S    N.D. L'Hermitage (France)                 30 »     »

Fr. André Louis Voile

(Michel André)                           74 S    N.D. L'Hermitage (France)                 6 avril »

Fr. François Feuvrier

(François Dosithée)                   61 S    Bizot (France)                                      12 »     »

Fr. Ludwig Zucker

(Lorenz)                                      52 S    Furth (Allemagne)                                15 »     »

Fr. Faustino Martinez

(Serafin)                                         88 S    Castilleja (Espagne)                           19        »

Fr. John Mernin

(Hugh)                                          48 P    Cairns (Australie)                                19 »     »

Fr. Anastasio Pablos

(Pablo Crisostomo)                   74 P    Leon (Espagne)                                   20 »     »

Fr. Antoine Bellemin

(Jubin)                                         66 P    St-Genis-L. (France)                            23 »     »

Fr. Oswald Roblain

(Kilien)                                         77 P    Mont St-Guibert (Belgique)                 23 »     »

Fr. Victorino Garcia

(José Octavio)                           68 P    Avellanas (Espagne)                           26 »     »

Fr. Pedro Ruiz Valdivielso

(Bruno)                                        93 S    Avellanas (Espagne)                           2 mai »

 Fr. Jean Germain Grimaud

(Eusebius)                                  94 S    Villa Marista (Colombie)                     3 »       »

Fr. Quirico Sebastian

(Fernando Sebastiàn)               59 S    Vila-Velha (Brésil)                               4 »       »

Fr. Marcelino Garcia

(Moisés Andriàn)                       52 P    Catacocha (Equateur)                         11 »     »

Fr. Louis Bonnet

(Louis François)                         83 P    Iberville (Canada)                                22 »     »

Fr. Ferdinand Bastide

(Liébard)                                     77 P    Blancotte (France)                               26 »     »

Fr. Sylvain Terretaz

( Marie Cécilien)                        70 S    N.D. L'Hermitage (France)                 9 juin »

Fr. Jean Schafer

(Ernest Jean)                             66 S    Korbeek-Lo (Belgique)                       12 »     »

Fr. Alphonse Baillargeon

(Edmond Alphonse)                   84 S    Tyngsboro (Etats-Unis)                       28 »     »

 

               soit 7.657 depuis le début de l'Institut
 

 

STATISTIQUE GENERALE DE L'INSTITUT

au 1 janvier 1973

 

Provinces                   Juvé-    Posta- Novi-      Profès  Perp     StablesTotal     Elèves    Décès      Mai-

et Viceprov                 nistes   lants     ces       temp                               Prof.                en 1972  sons.

.                                  .                       

 

Adm. générale . .                                                                    15        15                                              5

Af. du Sud . . .          2          –          –          6          35        23        64        3.527                2          11

Allemagne . . .          61        –           2          8          56        57        121      2.171                4          6

Amér. Centr. . .        211      21        13        55        121      88        264      15.895                          3          29

Beaucamps . . .       –           –          –           13        63        41        117      6.300                5          19

Belg. Holl. . . .           –           1          –           11        116      81        208      7.599                3          23

Bética                       236      6          3          33        152      64        249      12.287                          1          23

Brésil Sept. . .          20        19        –           7          57        47        111      16.431                          2          18

Castilla         . . .        252      8          6          28        132      40        200      7.221                2          12

Cataluña .    .            180      13        10        69        148      61        278      11.529                         3          21

Caxias do Sul .        35        –           –           4          41        18        63        5.570                2          13

Chili                           132      6          4          37        72        43        152      7.000                3          13

Chine                        18        1          5          10        58        40        108      16.442                          1          12

Colombie . . .           33        1          –           9          54        85        148      12.531                          2          18

Cordoba . . .             71        5          4          14        92        41        147      5.315                2          10

Desbiens . . .            23        5          –           7          59        38        104      3.764                2          10

Esopus . . . .             –           30        –           38        106      84        228      10.810             –           24

G. Bret.-Irl. Nig.        101      5          2          38        92        44        174      7.500                1          22

Iberville • . .               319      9          8          28        188      116      332      10.951                          4          31

Italie                                       128      4          –           15        59        66        140      3.292                2          10

Leon                          260      16        5          28        149      38        215      8.005                3          12

Levante . . .               174      4          8          23        75        67        165      9.995                –           13

Lévis                         130      1          1          9          93        58        160      6.696                2          22

Lujàn                         81        4          4          20        73        59        152      7.458                3          11

Madrid . . .                266      19        15        43        79        40        162      8.587               –           15

Melbourne . .            9          –           14        51        108      52        211      10.597                          3          30

Mex. Central .           43        42        6          65        82        48        195      16.414                          3          23

Mex. Occ. . .             100      10        11        61        141      66        268      20.464                          2          31

Norte                         148      3          –          28        148      52        228      9.531                1          17

Hermitage. S-0.       –           –           –           13        123      75        211      7.523                5          30

N. Zélande . . .          66        9          2          77        132      82        291      10.852                          5          33

Pérou                        84        10        4          36        42        46        124      9.211               –           15

Porto Alegre . .        14        –           1          16        97        49        162      19.419                          2          16

Poughkeepsie . .     –           8          –           30        108      86        224      10.300                          3          17

Portugal . . . .            189      4          5          14        41        34        89        4.258                –           14

Rio                             61        –           5          6          45        69        120      16.150             –           17

St. Genis-Laval .      2          1          –           19        163      79        261      9.111                3          36

Sta. Catarina . .       103      8          4          19        53        19        91        5.062                1          13

Sta. Maria . . .          65        2          2          18        85        24        127      8.351                2          14

Sâo Paulo . . .          65        –           1          10        59        60        129      15.171                          2          14

Sud-Est        . . . .      40        1          1          2          52        32        86        3.220                3          9

Sydney                      22        23        34        65        253      107      425      17.885                          4          40

Varennes . . . .          46        2          –           14        46        54        114      5.564                1          12

Zaïre-Rwanda . .      20        19        19        52        44        26        122      12.123                          2          13

Vice-provinces        .

Ceylan                      19        3          –           21        16        14        51        5.357               –           7

Irlande . . .                 75        –           –           11        35        15        61        2.730                1          10

Liban-Syrie . .          13        2          2          4          17        19        40        4.928                1          4

Madagascar . .        70        –           1          17        20        11        48        5.216               –           8

Philippines . .           12        21        9          30        21        17        68        11.205                         –          10

Suisse-M. . .             5          –           –           1          15        17        33        691                  –           5

Uruguay .  .               40        –           –           9          29        23        61        2.948               –          8

Venezuela . .            161      –           1          12        35        17        64        4.243                2          9

Totaux (1-1-72) .      4205   346      212      1254    4180 2532      7966    455.460           98        858

 


 

Frères Maristes selon leur pays d'origine

1ier Janvier 1973

 

1. – Afrique du Sud        31        32. – Irlande                  75

2. – Allemagne                204      33. – Italie                     244

3. – Angleterre                43        34. – Japon                   1

,  4. – Argentine               112      35. – Liban                    3

5. – Arménie                   1          36. – Luxembourg       1

6. – Australie                   611      37. – Madagascar       39

7. – Autriche                    1          38. – Malawi                 5

8. – Belgique                   256      39. – Mexique               431

9. – Bolivie                      4          40. – Monaco               1

10. – Brésil                      696      41. – Nigéria                 76

11. – Cameroun             5          42. – N. Calédonie      2

12. – Canada                  593      43. – N. Zélande          252

13. – Ceylan                    42        44. – Pérou                   15

14. – Chili                        21        45. – Philippines          40

15. – Chine                      91        46. – Pologne               2

16. – Colombie               131      47. – Portugal               90

17. – Cuba                      18        48. – Rhodésie            6

18. – Danemark             1          49. – Russie                 1

19. – Ecosse                   62        50. – Rwanda               43

20. – Egypte                    2          51. – Salomon             6

21. – El Salvador           13        52. – Samoa                 8

22. – Equateur                2          53. – Suisse                 34

23. – Espagne                2.313   54. – Syrie                    6

24. – Etats-Unis             441      55. – Tchécoslovaquie 8

25. – Fidji                        10        56. – Tonga                  1

26. – France                    805      57. – Turquie                3

27. – Grèce                     23        58. – Uruguay               5

28. – Guatemala            9          59. – Venezuela           1

29. – Hollande                 14        60. – Yougoslavie        6

30. – Hongrie                  8          61. – Zaïre                     26

31. – Inde                         2          62. – Zambie                1

 


[1]J'avais écrit cela lorsqu'un reportage sur la visite du Dr Ramsey à Taizé, en octobre 1973, m'a permis de lire ce mot d'une jeune Indienne s'adressant au chef de l'Eglise anglicane : « On ne peut parler de la contemplation que si on en a fait l'expérience. Et nous qui sommes avides de changement, nous savons que là est la source des énergies dont nous avons besoin ».

 

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