31/Oct/2020 ESPAGNE

Communauté Fratelli de Melilla : un projet conjoint des Maristes et des Lasallistes pour aider les immigrants

Les frères Maristes de la Province Mediterránea et les frères Lasallistes du District ARLEP ont réussi à concrétiser le projet commun « Communauté Fratelli de Melilla » dont l’objectif est d’orienter, d’éduquer et d’aider des immigrants et des réfugiés présents à Melilla, une ville espagnole située au nord de l’Afrique qui, au cours des trois dernières années, a vu augmenter son flot migratoire.

Font partie de la communauté 4 frères Lasallistes (Jesús Bejarano Busto, Juan Antonio Esteban Milla, Eulalio Sánchez Huertos, Crescendio Terrazas Olalla) et un frère Mariste (José Luis Elías Becerra).

Les frères José Luis Elías (Mariste) et Jesús Bejarano (Lasalliste) nous parlent ci-après de la Communauté Fratelli de Melilla.

Quand et comment l’initiative de former la Communauté Fratelli de Melilla est-elle née?

L’initiative part des Conseils provinciaux des Frères de La Salle et Maristes, tout au long de l’année 2019, dans la ligne de l’expérience prévue d’une communauté intercongrégationelle à Bonanza. On a décidé de commencer à Melilla la nouvelle communauté en profitant de l’infrastructure et de la communauté existante des FF. de La Salle qui y dirige un collège depuis 1912. Il faut dire que depuis 12 ans fonctionne, dans ce collège, une association – Projet Alfa – dédiée à l’alphabétisation des femmes musulmanes, groupe très vulnérable dans la ville.

En quoi consiste le projet de travail de la communauté?

La première année en fut une de contact avec la réalité, en travaillant au collège et en prenant contact avec les possibilités de travail avec le immigrants et les réfugiés qui existantes à Melilla. L’idée, malgré le ralentissement imposé par la pandémie, est d’initier des activités spécifiques autour de trois axes de travail :

  1. Une école de deuxième chance (en vue d’une insertion sociale et de travail) : l’expérience nous démontre que les possibilités d’insertion dans la société pour des personnes immigrantes dépendent d’un accompagnement personnalisé et d’une habileté professionnelle. Pour cela, on propose l’implantation d’une E2O dans la ville autonome de Melilla, ce qui implique les activités suivantes pour améliorer l’embauche des bénéficiaires : accompagnement individuel, orientation académique et professionnelle, développement des compétences personnelles, éducation des adultes, actions de formation professionnelle et expériences préparatoires.
  2. Foyer d’émancipation (volet résidentiel) : les démarches migratoires de plus en plus difficiles pour les jeunes, certaines alternatives offertes par la ville de Melilla, et le grand nombre de jeunes en situation d’itinérance justifient la mise sur pied d’un Foyer d’Émancipation. La proposition initiale serait l’accueil de six jeunes, de façon temporaire, et comme ressource de transition vers d’autres foyers similaires dans la péninsule, dans le but d’un accompagnement personnel et de groupe à différents niveaux : développement personnel, vie autonome, vie en société, gérance personnelle, santé, formation professionnelle, socioculturelle, entre autres.
  3. Loisirs et temps libres sains (domaine socio-éducatif) : l’importance de l’accompagnement éducatif dans les loisirs et le temps libre que les deux congrégations incluent dans leur mission justifie la proposition d’inclure un Plan d’Activités portant sur les loisirs et le temps libre.

Tout ceci comprendrait la mise sur pied d’activités hebdomadaires telles que sessions éducatives, ateliers, activités sportives ou sorties culturelles et organisation d’une École d’Été pour garçons et filles de 11 à 16 ans, en donnant la priorité à ceux et celles qui se trouvent dans des Centres Résidentiels pour mineurs ou le Centre d’Accueil Temporaires pour Immigrants (CETI).

À qui s’adresse l’aide de la communauté?

À part son travail au collège, la communauté est, depuis plusieurs années, impliquée dans l’alphabétisation des femmes musulmanes (Projet Alfa). Nous commençons maintenant le travail d’appui et d’alphabétisation avec des jeunes qui ont franchi la frontière, des mineurs non accompagnés, et notre intention est aussi de travailler avec ces jeunes au moment-clé de leur émancipation, à leur majorité, à leur sortie des structures d’assistance que la ville autonome leur offre.

Quelle est la situation légale, sociale et sanitaire des immigrants aidés par la communauté?

Les femmes qui fréquentent le Projet Alfa sont généralement des femmes sans papiers, d’où leur incapacité de pouvoir participer aux cours d’alphabétisation qu’offre la Ville Autonome.

Les jeunes avec qui nous travaillons n’ont pas encore réglé leur documentation et il est difficile pour des mineurs de quitter le service de protection sans avoir compléter leur dossier. Il est difficile pour ces enfants d’avoir accès à la Péninsule, et beaucoup d’entre eux, ou ils y passent de façon illégale ou ils sont obligés d’y rester en espérant compléter leur documentation.

Dans le cadre du soutien aux jeunes du Centre Temporaire pour Immigrés (CETI), nous rencontrons souvent des jeunes réfugiés qui n’ont pas encore obtenu leur permis de séjour.

Jusqu’à maintenant, combien de personnes ont été aidées par la communauté?

Dans le Projet Alfa, nous arrivons à aider environ 100 femmes par cours. Les jeunes avec qui nous avons travaillé tant dans les colonies de vacances que dans les cours d’alphabétisation tournent aussi autour de la centaine.

Pouvez-vous décrire un peu le contexte social de ce milieu?

Melilla est un territoire marqué par sa géographie, son histoire, son importance géopolitique, sa facilité pour les échanges commerciaux et pour son métissage. Il a environ 12 kilomètres carrés de superficie et environs 90.000 habitants. C’est l’une des Plateformes espagnoles au nord de l’Afrique, où la Méditerranée forme sa frontière maritime à l’est, et possède environ 12 kilomètres de frontière terrestre avec le Maroc à l’Ouest, frontière délimité par une tristement célèbre clôture et surveillée par quatre postes frontières officiels.

Melilla, comme d’autres points de la “frontière sud de l’Europe” situés dans la péninsule, a vu son flux migratoire irrégulier augmenter au cours des trois dernières années, principalement en raison des difficultés supplémentaires qui sont apparues en Méditerranée Centrale (Italie) et Orientale (Grèce).

Au cours de 2018, on calcule qu’environ 6000 personnes sont entrées de façon irrégulière, dont 4.621 par voie terrestre et 918 par voie maritime. Contrairement à ce que l’on pense, la majeure partie des personnes qui sont passées par la voie terrestre sont entrées par les postes frontières officiels, en utilisant de la documentation étrangère ou falsifiée, et en profitant de la similitude des traits ethniques; il s’agit donc d’algériens, de tunisiens et de syriens qui se confondent facilement avec la population qui circule chaque jour à travers la frontière pour fins commerciales. C’est une minorité de migrants qui « sautent la clôture », la plupart arrivent à entrer cachés dans des véhicules et sont d’origine subsaharienne (Mali, Guinée Conakri, Côte d’Ivoire) ou autres origines ethniques. Les entrées par mer se font dans des embarcations de mauvaise qualité, ou même à la nage.

Les mineurs étrangers non accompagnés (MENA) ont connu une augmentation au cours des dernières années. Selon le Ministère de l’Intérieur, 1090 mineurs sont arrivé au cours de 2018. Les fillettes ne comptent pas pour 20% et sont dirigées dans des Centres de la Sainte Enfance et dans des Gouttes de Lait; les jeunes garçons vont au Centre des Mineurs Fuerte de la Purisima, où ils vivent dans des conditions difficiles, car le Centre a presque triplé sa capacité originale (en 2020, ce Centre comptait environ 900 internes).

Durant la pandémie, un groupe de près de 200 de ces mineurs ont été transférés dans d’autres installations (Fuerte de Rostrogordo, en partie dans des baraques en bois), pour alléger quelque peu la situation de surpeuplement.

Au cours des derniers mois, le nombre de résidents a diminué, car ceux qui arrivent à 18 ans quittent les centres d’assistance. Entre temps, il y a moins d’enfants admis dans les centres car la frontière est fermée depuis le mois de mars. Ces jeunes qui quittent la ressource des Mineurs partent normalement sans papiers et restent dans la Ville sans papiers et sans aucune possibilité de passer dans la Péninsule ou même de retourner dans leur pays d’origine puisque du fait de la pandémie les frontières restent fermées.

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