La Mission Educative Mariste – 1998

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Seconde Ă©dition 2023

C’est avec beaucoup de joie que je remets entre les mains des frères et des Ă©ducateurs et Ă©ducatrices maristes, ce document : “ La Mission Educative Mariste, un projet pour aujourd’hui â€ť.

Il s’agit d’un texte officiel du Conseil général ayant pour but d’orienter la mission éducative de l’Institut en réponse à une demande de notre XIX° Chapitre général de 1993. Il dépendra du prochain Chapitre général de l’inclure dans son ordre du jour pour voir si des améliorations ou des adaptations sont nécessaires et de décider s’il doit être considéré comme document officiel de l’Institut.

Remerciements :

Le premier sentiment qui jaillit en moi en écrivant ces lignes, c’est la reconnaissance envers tous les éducateurs maristes qui, par leur amour pour les enfants et les jeunes, et par leur dévouement à la mission d’éducateur, ont, non seulement continué à donner vie à l’esprit hérité de Marcellin Champagnat, mais aussi l’ont enrichi tout au long des 181 ans de l’histoire mariste.

Je pense, de façon très particulière, aux frères qui ont dĂ» faire face aux changements socioculturels et Ă©ducatifs et qui ont fait preuve de crĂ©ativitĂ© pour donner des rĂ©ponses concrètes aux nouvelles situations. Ma reconnaissance, de manière spĂ©ciale, va vers ceux qui tout au long de notre histoire, ont gardĂ© bien vivant le projet de Champagnat : procurer l’éducation Ă  ceux qui en sont privĂ©s ou qui sont marginalisĂ©s par la sociĂ©tĂ©.

Je tiens à remercier les frères animés d’un profond esprit apostolique, qui lorsque leur âge et leur santé les ont obligés à réduire le rythme de travail, ont su trouver de nouvelles présences et activités de pastorale éducative, à l’intérieur ou hors du système scolaire.

Je ne puis oublier les laïcs, hommes et femmes qui, dans les dernières décennies, se sont engagés dans le domaine de l’éducation à partir d’un projet mariste. Je vous remercie pour votre dévouement et pour votre amour de l’œuvre éducative de Marcellin Champagnat.

La confiance rĂ©ciproque entre frères et laĂŻcs maristes a permis de rĂ©vĂ©ler les dons de chacun et de travailler ensemble Ă  partir de la complĂ©mentaritĂ© des vocations. Les expĂ©riences de “ mission partagĂ©e â€ť que nous vivons aujourd’hui, frères et laĂŻcs, inspirent et orientent la rĂ©daction de ce document.

La Commission internationale :

Le Conseil général a confié l’élaboration de ce texte à une Commission formée de frères et de laïcs. Je puis vous assurer qu’ils y ont consacré beaucoup de temps, réalisant des consultations au niveau de l’Institut, expérimentant des moments de recherche et de frustration du fait de la complexité du thème et de la grande variété de situations que connaît l’Institut dans le domaine de la mission éducative.

Je remercie et félicite les membres de cette commission pour le service qu’ils nous ont rendu et pour la conviction qu’ils ont apportée à la réalisation de la mission qui leur a été confiée.

En voici la composition:

Frères : Jeffrey Crowe (Conseiller gĂ©nĂ©ral), Henri Vignau (Conseiller gĂ©nĂ©ral), Carlos MartĂ­nez Lavin (Mexico), Dominik Pujia (USA), JosĂ© Manuel Alves (BrĂ©sil), HonorĂ© Rakatonorivo (Madagascar), Manuel de LeĂłn (Philippines), Mark Farrelly ( Australie), Maurice Bergeret ( France), Miquel Cubeles (Espagne) ; Mr Alberto Libera (Bolivie) et Mme Emma Casis (Philippines).

Le Chemin parcouru :

A partir des années qui ont suivi le Concile, l’Institut a affronté des situations nouvelles qui l’ont affecté à plusieurs niveaux.

Dans une première étape, nous les frères, en attitude d’écoute du monde et de l’Eglise, avons dû relire les origines de l’Institut et l’intuition de Marcellin Champagnat afin d’évaluer notre trajectoire historique et de reformuler notre identité et notre mission d’évangélisation actualisée en cohérence avec l’inspiration initiale. Cette démarche se trouve exprimée de façon remarquable dans les Constitutions de l’Institut, document fondamental pour les frères et qui fut approuvé par le Vatican en 1986.

Je citerai quatre passages qui peuvent vous aider à mieux situer la mission de l’Institut ainsi que le présent document.

  • “ Dans cet esprit, Marcellin a fondĂ© notre Institut pour l’éducation chrĂ©tienne des jeunes, particulièrement des plus dĂ©laissĂ©s â€ť (Art.2)
  • “ SuscitĂ© par l’Esprit-Saint, notre Institut est envoyĂ© par l’Eglise. A la suite du Père Champagnat, il Ă©vangĂ©lise surtout en Ă©duquant les jeunes, particulièrement les plus dĂ©laissĂ©s â€ť (Art. 80)
  • “ EngagĂ©s dans des institutions scolaires ou dans d’autres structures d’éducation, nous nous dĂ©pensons pour le Royaume, au service de la personne humaine â€ť (Art. 85)
  • “ Nous partageons notre spiritualitĂ© et notre pĂ©dagogie avec les parents, les professeurs laĂŻques et les autres membres de la communautĂ© Ă©ducative â€ť (Art. 88)

Par la suite, les Chapitres gĂ©nĂ©raux ont dynamisĂ© cette rĂ©novation de l’Institut, prenant en compte les Ă©volutions importantes survenues dans nos sociĂ©tĂ©s et les divers contextes dans lesquels se vit notre mission Ă©ducative. En voici quelques exemples :

  • Le changement de mentalitĂ© et de structures que suppose le passage de “ l’école des Frères â€ť Ă  “ l’école mariste â€ť (frères et laĂŻcs) et par la suite Ă  une Ă©cole fondĂ©e sur “ la mission partagĂ©e â€ť oĂą indistinctement frères et laĂŻcs sont appelĂ©s Ă  prendre des responsabilitĂ©s d’animation et de direction.
  • Les incidences, dans le domaine de l’éducation, des changements culturels de notre monde qui affectent l’être humain dans toutes ses dimensions, l’accentuation d’une culture propre aux jeunes, ainsi que les changements sociopolitiques des pays oĂą nous sommes implantĂ©s.
  • Dans le passĂ©, les enfants et les jeunes Ă©taient d’une certaine façon, des sujets passifs de l’éducation. Ils venaient recevoir dans les Ă©coles des orientations, des valeurs, une formation religieuse et des connaissances qui les prĂ©paraient pour la vie ; cela a influencĂ© certains aspects de l’organisation scolaire ainsi que le comportement des Ă©ducateurs. Aujourd’hui, de nouveaux concepts Ă©ducatifs ainsi que les relations interpersonnelles exigent des Ă©ducateurs et des Ă©ducatrices, un talent particulier pour entrer dans le monde des jeunes et cheminer Ă  leur cĂ´tĂ© comme des amis, les motiver, les accompagner dans leur recherche.
  • J’ajoute un quatrième aspect, celui de la pluralitĂ© Ă©ducative dans notre Institut. Le fait d’être prĂ©sent dans 75 pays implique une diversitĂ© de systèmes Ă©ducatifs, de mentalitĂ©s spĂ©cifiques, d’expĂ©riences Ĺ“cumĂ©niques avec d’autres religions ou parfois d’exclusion ou d’intolĂ©rance sur le plan religieux, de libertĂ© sur le plan des programmes acadĂ©miques ou du financement de l’éducation. Il arrive Ă©galement que les Frères animent ou dirigent des Ă©coles diocĂ©saines qui ont leur propre projet.

Tous ces aspects ont une incidence sur la mission Ă©ducative mariste et nous avons parfois manquĂ© de crĂ©ativitĂ© pour lancer des initiatives qui nous permettent d’être avec les jeunes, dans les nouveaux “ espaces culturels â€ť oĂą ils vivent. Peut-ĂŞtre avons-nous Ă©tĂ© timides face Ă  la discrimination Ă©conomique avec laquelle certains gouvernements traitent les Ă©coles chrĂ©tiennes.

D’autre part, dans ces pays, peut-être n’avons-nous pas fait suffisamment preuve d’initiative pour développer, en lien avec la société, d’autres possibilités qui favorisent la création de nouvelles présences de pastorale éducative pour les jeunes sans ressources ou socialement marginalisés.

Un moment historique :

La diversité des pays, des cultures et des systèmes éducatifs dans lesquels nous nous trouvons a suscité une plus grande décentralisation au niveau de l’Institut, mais au-delà de ce pluralisme, il est possible d’identifier des éléments de base qui caractérisent notre style d’éducation. La Commission qui a élaboré ce document a réussi à les mettre en relief, offrant les éléments pour aider les frères et les laïcs à discerner notre mission en fidélité au charisme hérité de Marcellin Champagnat et à évaluer à partir de cette optique la fécondité humaine et évangélique de nos œuvres, à les transformer si nécessaire ou à les transférer.

Ce document nous invite à regarder l’avenir avec audace et espérance et nous suggère des orientations dans ce cheminement.

Il rĂ©affirme le rĂ´le important de l’école, mais nous invite Ă  lancer de nouveaux projets d’éducation Ă  l’intĂ©rieur ou hors du système scolaire, tenant toujours compte de notre prĂ©fĂ©rence pour les plus dĂ©favorisĂ©s, les dĂ©fis auxquels sont confrontĂ©s les jeunes ainsi que la proximitĂ© que nous devons avoir avec eux parce qu’aujourd’hui les Ă©ducateurs doivent “ Ă©couter, interroger, prier, regarder le monde Ă  travers les yeux des jeunes â€ť.

Je souligne l’invitation à nous ouvrir à la solidarité universelle en cherchant des formules de collaboration avec les instance ecclésiales, humanitaires, gouvernementales ou organismes qui plus directement, s’engagent dans la défense de la dignité et des droits de l’enfant.

Cheminer ensemble : frères et laĂŻcs

Dans mes visites aux provinces, j’ai l’occasion de rencontrer des laĂŻcs travaillant dans nos collèges. J’ai Ă©tĂ© très agrĂ©ablement surpris par la façon dont un groupe s’exprimait : â€ś Dans notre province, nous sommes en train de …, nous avons crĂ©Ă© un projet…Au cours des visites de notre Frère provincial… â€ť.

Quand les personnes parlent ainsi, il n’est pas nĂ©cessaire de leur demander si elles se sentent membres de la famille mariste et si Marcellin Champagnat est une personne importante dans leur engagement d’éducateurs chrĂ©tiens. Cette façon de s’exprimer me permet de les considĂ©rer comme frères et sĹ“urs maristes laĂŻques avec lesquels je peux partager ouvertement les joies, les limites et les espĂ©rances que nous vivons dans l’Institut.

J’espère que ce document nous aidera Ă  cheminer ensemble, frères et laĂŻcs. Très certainement, nous aurons besoin d’un peu de patience. Nous devons dĂ©passer les erreurs inĂ©vitables parce que nous devons tous apprendre Ă  vivre la “ mission partagĂ©e â€ť et surtout, nous pouvons nous aider Ă  grandir dans cet idĂ©al Ă©ducatif hĂ©ritĂ© de Marcellin. Sa canonisation nous offre l’occasion de lire et d’approfondir ensemble ce document.

Recevez l’expression de ma reconnaissance et mon cordial salut au nom des frères du Conseil général.

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Frère Benito ARBUES, Supérieur Général
15 août 1998