La confrérie des sacres cœurs de jésus et Marie à La Valla (1822-1858)

Histoire mariste

Un lien étonnant entre la communauté des Frères et la vie paroissiale
F. André Lanfrey

Les Origines Maristes signalent (OM1 p. 103) qu’aux archives paroissiales de La Valla figure le registre intitulé « Confrérie du Sacré-Cœur de Jésus et de Marie[1] érigée le 14 juin 1822 ». Mais les auteurs des OM n’ont pas perçu qu’un grand nombre de confrères de 1822-23 étaient en même temps disciples de Champagnat. Plus tard, le F. André Bardyn, resté longtemps à La Valla, a photocopié ce document en précisant : «L’original se trouvait à la cure de La Valla quand il y avait un prêtre résident »[2]. Ce document mérite un certain intérêt car il date des premières années de l’institut, et nous éclaire sur les liens entre la communauté des Frères et la paroisse. Il pose aussi la question des relations entre la spiritualité mariste originelle et la dévotion, à la fois populaire et savante, aux Cœurs de Jésus et de Marie.

 

Plus qu’une dévotion : une mystique

Celle-ci[3] consiste en une recherche de l’amour du Christ par le culte du Sacré-Cœur fortement lié à la dévotion au Saint Sacrement. Même si Jean Eudes joue un rôle pionnier en ce domaine, ce sont les visions de Marguerite-Marie Alacoque à Paray-le-Monial qui donnent à la dévotion au Sacré-Cœur une dimension universelle. Dès 1691 la Dévotion au Sacré-Cœur du P. Croiset s.j. connaît un grand succès et sera constamment réédité. Pour lui, le Sacré-Cœur de Jésus et le Saint-Cœur de Marie sont étroitement liés : on ne peut « avoir l’entrée de l’un sans avoir l’entrée de l’autre ». Dans son ouvrage de 1733 : Excellence de la dévotion au Cœur adorable de Jésus, le P. Gallifet, cite les innombrables confréries érigées en son honneur.

Lyon a été une ville pionnière dans le développement de cette dévotion : dès 1693 le P. Croiset y instaure au collège de la Trinité une confrérie en l’honneur du Sacré-Cœur. En 1716 le P. de Gallifet devient provincial de Lyon et le P. Croiset recteur du grand collège. Et l’archevêque de Lyon, F.P. de Neuville de Villeroy institue pour son diocèse la fête du Sacré-Cœur le 3 décembre 1718[4]. Finalement, en 1765, le pape autorisera un office spécifique en l’honneur du Sacré-Cœur, officialisant une dévotion qui n’a pas manqué de détracteurs, notamment jansénistes.

Cette reconnaissance favorise la multiplication des confréries et des ouvrages sur le Sacré Cœur. Sous la Révolution, l’image du Sacré-Cœur est l’emblème de la résistance catholique à la persécution révolutionnaire. En 1801, l’abbé Bonnardel, curé de Semur-en-Brionnais, non loin de Paray-le-Monial, fait imprimer par Rusand à Lyon le livre Exercices de la dévotion au Sacré-Cœur de Jésus qui rencontre un tel succès qu’il est vendu «hors du cercle des confrères et est réédité tout au long du siècle »[5]. Ainsi, « le culte du Sacré-Cœur […] permet une réflexion profonde mais simple et efficace sur l’âme intérieure, thème cher aux spirituels du XVII° siècle. {…] En une seule dévotion il permet l’union intime de Jésus et de Marie auxquels on associe parfois Joseph ou d’autres pieux personnages[6] ». Aussi, bien des confréries vont porter des titres alliant plusieurs patronages : du Sacré-Cœur et du Saint Sacrement…mais surtout des Sacrés-Cœurs de Jésus et Marie.

 

Confrérie et ultramontanisme

La plupart des confréries du Sacré-Cœur sont affiliées à l’archiconfrérie du S.C. établie à Rome à Santa Maria in Capella en 1803, avec le titre de Primaria. Elle compte des milliers de confréries associées dans le monde entier, et donc dans le diocèse de Lyon. Un livre des Instructions, exercices de piété, règlement de la confrérie fondée à Lyon dans l’église St Nizier, principale paroisse de Lyon[7] rappelle qu’elle a reçu son diplôme d’affiliation (p. 94) le 26 octobre 1817 et qu’elle a été autorisée par le vicaire général Courbon le 12 décembre 1817. La confrérie de La Valla sera aussi établie avec l’autorisation de M. Courbon. Nous ne savons pas si elle est affiliée à la Primaria romaine, mais ce n’est pas impossible. Quoi qu’il en soit, les confréries du Sacré-Cœur sont des lieux privilégiés de ce que l’on appelle parfois la piété ultramontaine.

 

Confrérie et esprit ultra royaliste

Dans le contexte de la Restauration cette piété révèle fréquemment un côté royaliste, voir ultra-royaliste. Ce n’est guère le cas pour l’ouvrage de Bonnardel, écrit bien avant la Restauration, mais l’ouvrage du curé de St Nizier, Jacques François Besson, est d’un tout autre ton. Louis XVI y est même évoqué comme roi martyr. Le discours préliminaire (p. 1-70) développe le thème de la conjuration des impies (protestants, philosophes, révolutionnaires) contre le christianisme. Et il estime que : « Elle (la Providence) avait réservé aux derniers âges la solennité de la dévotion au Sacré-Cœur ». La tâche des confrères est donc essentiellement réparatrice, voire eschatologique.

Certes, M. Besson, personnalité ultra-royaliste très opposée au gouvernement des vicaires généraux du cardinal Fesch, paraît un cas un peu extrême. Il n’en demeure pas moins que cette dévotion conserve une image politico-religieuse assez nette, même si, dans la France de la Restauration, après un régime despotique qui s’est beaucoup méfié des associations religieuses, elle est un signe de liberté retrouvée. Et les confréries du Sacré-Coeur, sont auréolées du prestige des martyrs de la Révolution qui favorise leur multiplication. Les Origines Maristes (T. 1 p. 101-103) en signalent d’ailleurs plusieurs dans les lieux maristes :

-A Cerdon : un registre intitulé « Confréries du Sacré-Cœur de Jésus et du Saint Sacrement réunies ensemble […] établies à Cerdon le 17 février 1817 ». Il contient en une liste unique les noms des membres des deux confréries de 1817 à 1854. Il y a aussi un registre de la confrérie du rosaire établie en 1825.

– Coutouvre, paroisse de Jeanne-Marie Chavoin, non loin de Paray-le-Monial, possède un registre de la confrérie du Sacré-Cœur, du 15 juin 1806 ; et un autre de la confrérie du rosaire daté de la même année. J.M. Chavoin et Marie Jotillon font partie de ces deux confréries. Il semble néanmoins que l’Association de l’Amour divin de Coutouvre à laquelle fait allusion une lettre de Marie Jotillon en 1820 (OM1/64) soit assez différente de ces confréries à moins qu’elle ne groupe l’élite de ces deux confréries.

– A Belley, une confrérie du Sacré-Cœur est établie chez les religieuses Bernardines (OM4 p. 371) le 11 juillet 1836. M. Etienne Déclas, Père Mariste s’y inscrit.

Loin d’être exceptionnelle, la création de la confrérie de La Valla est donc inscrite dans un puissant courant de reconstruction religieuse qui tend à amalgamer diverses confréries. C’est ce que manifeste le registre de La Valla où, de 1841 jusqu’en 1858, un scribe utilise la partie droite des pages 3 et suivantes du registre pour dresser des listes d’hommes pour l’adoration des 40 heures, les fête du rosaire, du St Sacrement et du Sacré-Coeur. Il prévoit que de 6 h. du matin à 6 h. du soir deux hommes assurent une heure d’adoration. Aucune liste de femme n’est prévue pour ce temps, peut-être parce que celles-ci ont leur propre organisation. Mais en 1841-1858 il y a longtemps que plus aucun frère mariste n’est membre de la confrérie.

 

LE DOCUMENT

« 1822

Confrérie des Sacrés Cœurs de Jésus & de Marie

Erigée dans la paroisse de la Valla le 14 juin 1822

D’après l’autorisation de M. Courbon Vicaire général

 

 

Recteurs de la confrérie

Jean Claude Dard 1822 (rajouté : « mort »)

Jean-Pierre Despinasse id. « mort »

Antoine Chapard 1825 (« mort »

Jn Bte fara 1828

Jn. François Dard 1831

Jn. Antoine Jaboulay 1831

Pierre Pacalet de Chomiol 1835

Jean Louis Bonner de Chomiol 1849 (écriture différente)

 

Page 2

 

1822[8]

 

Anne Berger, sœur Ange « morte en 1844[9]

Magdeleine Rivat, – sœur Félicité, id

Marie Souhait, sœur Marie Rosalie « morte 1844 »

Françoise Villelonge, sœur Françoise, id.« morte 1827 »

Catherine Fourneyron, sœur Angèle « absente 1843 »

Jeanne Linossier, sœur Magdeleine « morte 1836 »

Françoise Rivat, sœur Marie Catherine « morte 1836 »

Antoinette Rivat, sœur Marie Françoise Régis id.

Françoise Audrac, sœur Véronique, id « morte 1839 »

Etiennette Pacalet

1835

Claudine Fourneyron, sœur Colomban « morte 1838 »

Souhait, sœur Marie Joseph

Marie Oriol, sœur Marie Pélagie… 1843 (écriture différente)

1838

Catherine Réjany de Luzernod

Lyonnet, sœur Marie Philomène, 1844, morte 1853 (Ce nom et les deux suivants d’une autre écriture)

Ronchard, sœur saint Louis, morte 1845

Antoinette Donnet, Sœur Pacifique… 1855

 

Page 3[10]

 

1822

Gabriel Rivat (« mort » rajouté à gauche »)

Françoise Rossillol

Sur la partie droite de la page, « 1841 40 heures »

« mardi le St Rosaire »

Antoine Tardy

Claudine Briday

« à 6 h. Jn. Bte. Séon, Laval, Vincent Lynossier, village [11]»

Jean Chovet

Jeanne Marie Gachet

Claude Fayol

Antoinette Julien

« à 7 h. J. Marie Clerjon, Moulin du Bost ; Claude Oriol, Luzernod »

Antoine Monier

Anne Lacher

« à 8 h. Jn. Marie Malaure, Pialousin ; Jn. Marie Thibaud, Rossilol »

Jn. Claude Bonnefoy

Fleurie Chapeyron (« morte » rajouté à gauche)

Jn. Marie Oriol

Catherine Tissot

 

Jn. Bte. Fara

J(eann)e Marie Tissot

 

Jn. Marie Bonnefoy

M(ari)e Anne Poyeton

 

Etienne Fourneyron

Marie Jamet

 

 

Marie Julien

 

 

Françoise Despinasse

 

 

Page 4

1822

Louis Seytre

Antoinette Audras

Partie droite de la page : « 40 heures, 1848, 1852. Dimanche du St. Sacrement

 

Marie Mayery

« à 6 h. Jean-Marie Matricon, village »…

 

J(eann)e Marie Rejany (« morte »)

 

Claudine Noir

 

 

Antoinette Murat

 

 

J(eann)e Marie Cognet

 

 

Claudine Sel « morte »

 

 

Catherine Françon

« 40 h. 1848. Lundi Sacré-Cœur 1852

 

J(eann)e Marie Oriol

« A 6 h. Pierre Pacalet, Chomiol »…

 

J(eann)e Marie Boiron

 

Antoinette Rivat

 

 

Elisabeth Rebod « absente »

 

 

J(eann)e Marie Tardy

 

 

J(eann)e Marie Teillard

 

 

Gabrielle Boiron

 

 

Louise Clerjon

 

 

Marie Tardy

 

 

Antoinette Matricon

 

 

M(ari)e Anne Chapard

 

 

J(eann)e Marie Patouillard

 

 

J(eann)e Marie Ginot

 

 

M(ari)e Anne Thibaud

 

 

Page 5

1822

 

Etiennette Paccalet

 

Magdeleine Tissot

 

M(ari)e Anne Poyeton

 

Elisabeth Boiron

 

M(ari)e Catherine Tissot

 

Catherine Peyre

 

Nantas ° (rajouté en écriture différente)

 

1823

Jn. Bte. Furet

J(eann)e Matricon

« 40 h. 1848. 1852

« mardi St Rosaire »

George Pousset

J(eann)e Marie Poyeton

« à 6 h. Jn. Bte. Séon de Laval ; Vincent Linossier, village »…

Jean D’antogne (à droite de ce nom et des trois suivants : « frères de M. Champagnat » »

Claudine Thibaud

Michel Marconnet

Cécile Lacher

 

Jean Fleury

Marie Vallat

 

Barthélemy Lachal

Marie Clavet

 

 

Marie Berlier

 

 

Catherine Oriol

 

 

J(eann)e Marie Teillard

 

 

Claudine Berne

 

 

Page 6

 

1823

Joseph Girard

Anne Berne

« 40 h. de 1855-58 »

Le dimanche confrérie du St Sacrement »

Jn. Bte. Audrac

Anne Fourneyron

« à 6 h. Jn. Marie Matricon, du village ; J. François Noir du Chassin, recteurs »

Jn. Claude Aubert

Etiennette Tissot

Antoine Gratalon

Claudine Arnaud

 

Jn. Claude Audrac

Gabrielle Matrat

 

Claude Marie Ferreol

Antoinette Cognet

 

Pierre Oriol

Marguerite Pascal

 

Jn. Bte. Rebod (abst.)

Claudine Viallon

 

Jacques Couturier, « absent à St Romain »

J(eann)e Marie Matricon

« 1855-58. Le lundi, confrérie du Sacré-Cœur »

 

Antoinette Rivat

« à 6 h. Pierre Paccalet ; Jn. Pierre Crapanne de Choméol, recteurs »…

 

Je(ann)e Marie Vallat

 

Françoise Vallat

 

 

Françoise Fara

 

 

J(eann)e Marie Bazin (« à St Just »

 

 

J(eann)e Marie Ginot

 

 

Page 7

1823

Jean Claude Germat

Marie Matricon

 

Jean Bacher

M(ari)e Anne Poyeton

 

Pierre Porte

Jeanne Bartholon

 

Pierre Gachet

Annemond Riva

 

Jn. Marie Crapanne

J(eann)e Marie Rossillol

 

Benoît Baron

Françoise Colomb

« 1855 mardi confrérie du St rosaire

Claude Aubert

Elisabeth Dard « morte »

« à 6 h. Vincent Linossier du village : Jn. ( ?) de Laval, recteurs ».

Claude Poinard

Elisabeth Catet

Antoine Couturier

Veuve Paccalet de Choméol

 

 

Magdeleine Poyeton

 

 

Françoise Fara

 

 

J(eann)e Marie Vallot

 

 

Page 8

1824

 

Marie Chapard

« à dévotion seulement sans cierge »[12]

 

Catherine Blachon

« La confrérie n’assiste pas à leur enterrement et ne fait point dire d’office [13]».

 

Catherine Chovet

 

 

Me. Claudine Cognet

 

 

Me. Anne Cognet

 

 

Marguerite Loy

 

 

1825

Pierre Paccalet de Choméol

Louise Audrac (« village »

 

J(ean)ne Marie Matricon (« du Sardier »

 

1827

 

Marie Claudine Matricon de Pialussin

 

1828

 

Marie Joséphine Matricon des Sagnes (à gauche du nom : « morte »)

 

Louise Poyeton, veuve Mayery, village (à gauche : « morte »

 

Jne Marie Tardy de Rossillol (à gauche : « morte »)

 

Antoinette Tissot de la Perraulière

 

 

1831

 

Françoise Tissot de la Perraulière

 

1834

 

Claudine Dard du village

 

1838

 

Catherine Rejany de Luzernod

 

Elisabeth Rejany de Luzernod

 

1839

 

Etiennette Bedoin « morte 1839 ».

 

Commentaire

En 1822 Pâques a été le 7 avril, la Pentecôte le 26 mai et la Fête-Dieu le 6 juin. Dans le diocèse de Lyon, l’archevêque a établi en 1718 que la fête du Sacré-Cœur serait célébrée le dimanche suivant la Fête-Dieu[14], soit le 13 juin 1822. C’est donc au lendemain de cette fête qu’est établie la confrérie.[15] Nous ne connaissons pas d’événement particulier ayant inspiré l’érection de la confrérie cette année-là. Cependant, nous sommes à une époque où la spiritualité pénitentielle et réparatrice est particulièrement développée. En outre, la restauration monarchique et catholique est en butte à toutes sortes d’attaques des républicains, des Libéraux, des sociétés secrètes. Le Sacré-Cœur demeure un marqueur de la résistance catholique à l’attaque de l’impiété.

Le titre de la confrérie  – « des Sacrés Cœurs de Jésus et Marie » – pose un léger problème même s’il est fréquent. En effet, seul le cœur de Jésus peut être considéré comme sacré, celui de Marie, simple créature, ne peut avoir droit qu’au titre de « saint ». Il serait un peu étonnant que M. Courbon, le vicaire général, ait autorisé officiellement une confrérie des Sacrés-Cœurs de Jésus et Marie. Il faut plutôt songer à une confrérie du Sacré-Cœur qui, comme il est de tradition, inclut le cœur de Marie dans ses dévotions, comme nous le propose le règlement des associés du curé Bonnardel (édition 1817 p. 15)  :

« On donnera son nom pour être inscrit au livre de l’Association […] avec le jour et l’heure qu’on choisira pour l’adoration en toute l’année »… On communiera le jour de l’entrée de l’association et, si possible, « le jour auquel on aura fixé l’heure d’adoration ». On célébrera tout particulièrement la fête du Sacré-Cœur ; le premier vendredi de chaque mois « on se ranimera dans cette dévotion » […] On aura une dévotion particulière au Cœur de Marie « qui a été si conforme au Cœur adorable de son Fils »… « On s’appliquera à devenir intérieur, plein de ferveur, d’amour, de pureté, d’humilité et de charité »…

 

La confrérie et la communauté des sœurs de La Valla

Comme je l’ai déjà dit, ce serait un document d’intérêt limité si nous ne trouvions pas, parmi les membres de la confrérie, dans les années 1822-23, une vingtaine de frères ou aspirants maristes. Je reviendrai plus loin pour analyser ce fait un peu étrange. Autre étrangeté : Nous n’y trouvons aucune mention du curé (Rebod) ni du vicaire (Champagnat) bien que la confrérie ait un caractère officiel puisqu’elle invoque l’autorité du vicaire général Courbon.

C’est qu’elle est en fait patronnée par les Sœurs de St Joseph de la communauté de La Valla comme l’indique la liste des membres qui commence par celle des neuf sœurs, complétée en 1835 et 1838 par les noms de quatre nouvelles. Nous connaissons la liste de ses recteurs jusqu’en 1849 mais il semble que de 1822 à 1831 il y ait eu le même secrétaire. Cette confrérie donne donc l’impression d’être, comme il est dit à la dernière page « à dévotion seulement » : comme un prolongement de la communauté des sœurs de St Joseph.

Gérard Clergon dans La Valla-en-Gier. Histoire d’un village, (2012 p. 196), nous parle des «confréries religieuses laïques » de la paroisse. Il signale d’abord une confrérie du T.S. Sacrement érigée en 1723 qui durera jusqu’au XX° siècle. Il estime que la confrérie des Sacrés-Cœurs de Jésus et Marie a été fondée en 1822 par les Petits Frères de Marie et il donne une liste de 19 noms des « postulants et frères » qu’il y a trouvés. Mais les frères mentionnés dans la liste ne sont pas, comme les sœurs, constitués en un groupe et leur nom religieux, quand ils en ont déjà un, n’y figure pas. Leur engagement est laïc et individuel[16].

Dans le chapitre V de son mémoire sur Lavalla[17], le F. André Bardyn évoque lui aussi les confréries en parlant de l’église et mentionne l’existence d’une chapelle du rosaire, voûtée, côté épître, dès le XVII° siècle. Mais il ajoute :

« Tout au long des siècles, des modifications furent apportées au vieil édifice. Un espace et un banc furent réservés à la confrérie des Agonisants qui s’était mise sous la protection de St Joseph (bref de 1759). Cette confrérie semble avoir disparu à la Révolution, remplacée peut-être par la confrérie des Sacrés Coeurs de Jésus et de Marie. » Mais il s’agit sans doute moins d’une disparition que de la modernisation du titre d’une confrérie existante[18]. Les Annales des frères de Lavalla précisent d’ailleurs :

« Une Congrégation portant le nom de Sœurs St-Joseph a été fondée à La Valla en 1533, comme l’attestent de vieux papiers qui se trouvent chez les Sœurs actuelles de St-Joseph à La Valla. Elles se sont affiliées aux sœurs St-Joseph de Lyon en 1803. Ces dernières prenaient l’habit et faisaient profession à La Valla. Le Père Champagnat étant vicaire a présidé plusieurs de ces cérémonies : on y voyait sa signature. »

Peut-être établies anciennement comme confrérie sous le vocable de la bonne mort, les sœurs de La Valla, qui n’étaient pas des religieuses mais de pieuses filles (des béates) vivant en communauté, seraient devenues en 1759 confrérie de St Joseph, patron de la bonne mort[19]. Leur affiliation à la congrégation de St Joseph de Lyon a fait d’elles un couvent porté à patronner une confrérie des Sacrés-Cœurs. D’ailleurs les fabriciens de La Valla reconnaissent leur privilège ancien de confrérie-mère par un texte de 1826 [20] :

« MM. les fabriciens consentent à ce que les confréries du St-Sacrement, du Sacré-Coeur et du St-Rosaire aient dans leur chapelle respective un banc gratis tel qu’il existe aujourd’hui ; à la charge pour les dites confréries d’entretenir leur chapelle et de compter (payer) aux Soeurs de St-Joseph chaque année au jour de l’an : la confrérie du St-Sacrement la somme de vingt francs et les deux autres confréries la somme de quinze francs.”[…]

 

Confrérie mixte ou confrérie féminine ?

Bien que la liste des membres de la confrérie des Sacrés-Cœurs mêle indistinctement les noms des hommes et des femmes, ceux-là y sont beaucoup moins nombreux comme l’indique clairement le tableau ci-dessous :

 

Année

Hommes

Femmes

1822

11

49 (dont 9 sœurs)

1823

24

37

1824

0

6

1825

1

2

1827

0

1

1828

0

4

1831

0

1

1834

0

1

1838

0

2

1839

0

1

total

36

104

 

C’est donc dès l’origine une confrérie à dominante féminine. Et, sans les disciples de Champagnat, le total des hommes de la confrérie ne comprendrait qu’une vingtaine d’habitants de La Valla. Cette féminisation de la dévotion est une tendance lourde du catholicisme français depuis le XVIII° siècle. La ferveur masculine à La Valla n’y paraît ni plus ni moins élevée qu’ailleurs.

 

Les disciples de Champagnat dans la confrérie

Il est moins facile qu’il n’y paraît de déterminer, parmi les hommes, ceux qui sont disciples de Champagnat car, contrairement aux sœurs, ils ne figurent pas dans le registre en tant que frères. Peuvent se posent aussi des problèmes de graphie variable des noms ou d’homonymie. Ainsi Gabriel Rivat n’est pas le F. François mais sans doute un journalier de Luzernod, cité dans le recensement de 1815, marié et père d’un garçon et d’une fille. Dans l’examen de la liste des hommes ci-dessous, je tâcherai donc d’établir la liste de ceux qui sont, à n’en pas douter, des disciples de Champagnat, qu’ils soient frères ou seulement aspirants.

 

Gabriel Rivat :

Ce n’est pas le F. François qui ne mentionne jamais son appartenance à cette confrérie et qui d’ailleurs ne meurt qu’en 1881. Cependant, dans son carnet 302 il écrit, à la date de 1826 un Acte de consécration et d’union parfaite, copié de l’ouvrage de Bonnardel.

Antoine Tardy :

Dans le recensement 1815, deux Antoine Tardy résident au bourg. L’un est journalier, père d’un garçon et d’une fille ; l’autre est cultivateur, père d’un garçon et deux filles. Une Jeanne-Marie Tardy et une Marie Tardy figurent aussi dans la liste de 1822. S’agit-il de leurs épouses ?

Jean Chovet :

D’après le recensement de 1815, un Jean Chovet, journalier, et sa femme vivent au hameau des Roberts.

 

 

1/ Claude Fayol :

C’est le F. Stanislas. D’après OFM 686.1.2, il est entré en février 1822 et il prend l’habit en octobre 1822.

2/ Antoine Monier :

d’après le registre des inscriptions (OFM 142).il est un des postulants de la Haute-Loire, originaire de Boisset, entré en mars 1822. Il prend l’habit en oct.1822 sous le nom de F.Eucher, (Annales de l’institut). En 1825 (OFM 652) il est déclaré sorti.

3/ Jean. Claude Bonnefoy :

Le document OFM 102.1 indique qu’il est « De St Genest Malifaux ». Il a 12 ans. Il a été seulement pensionnaire ou est resté peu de temps en formation.

Jean-Marie Oriol :

Il ne figure pas dans les registres des inscriptions. Le recensement de 1815  signale à Maisonnettes un Jean Oriol, laboureur, et sa femme, deux filles et trois garçons

Jn. Bte. Fara :

Un Jean-Baptiste Fara est recteur de la confrérie en 1828. Ce n’est certainement pas Jean Fara, frère Placide, mort en 1826 à 14 ans.

Jn. Marie Bonnefoy :

Un Jean Bonnefois, laboureur aux Saignes, et sa femme. Six enfants). (recensement 1815) 

Louis Seytre.

?

4/ Jn. Bte. Furet

F. Jean-Baptiste. Admis le 28 mars 1822. Prend l’habit en octobre 1822.

5/ George Pousset

Certainement Georges Poncet, F. Joseph.

6/ Jean D’antogne (Dantony)

« de Boisset, âgé de 20 ans » (OFM 102.3 105.3). Entré au noviciat le 28 mars 1822. Déclaré décédé en 1825(OFM 652.3)

7/ Michel Marconnet :

« de Boisset » (Haute-Loire) (OFM 105.4 142.1.) Il prend l’habit en octobre 1822 sous le nom de F. Michel. Déclaré sorti en 1825 (OFM 652.2)

8/ Jean Fleury :

De Tiranges (Haute-Loire). Admis le 28 mars 1822. N’a pas pris l’habit (OFM.652.3)

9/ Barthélemy Lachal.

Admis au noviciat en 1821. Déclaré décédé en 1825. (OFM.652.3)

1823

 

10/ Joseph Girard :

Né à Solignac (Haute-Loire) en 1806, admis au noviciat le 28 avril 1822. Il prend l’habit en octobre 1822 sous le nom de F. Hilarion (-Lettres II, p. 275). Il aurait été cuisinier à Bourg-Argental de novembre 1822 à mars 1823, puis à La Valla jusqu’en octobre de la même année. Son inscription en tête de liste des inscrits de 1823 confirme ce que dit sa notice biographique.

11/ Jn. Bte. Audrac (Audras)

F. Louis. Né en 1802, il est entré le 2 janvier 1817. De la fin de 1818 à 1821 il est à Marlhes. En 1821-22 il est maître des novices à La Valla, puis remplace le F. Jean-Marie Granjon à Bourg-Argental. La notice biographique de ce frère (Lettres II, p. 339) suppose qu’il a été remplacé à ce poste en octobre 1823 pour retourner à La Valla. Son inscription dans la confrérie en 1823 corrobore cette hypothèse.

12/ Jn. Claude Aubert ou Jean Aubert,

F. Jean-Louis. Admis le 15 sept. 1822. (OFM 105.2) sorti en 1829.

13/ Antoine Gratalon :

F. Bernard, (OFM 102.4/142.1/153.22). Natif d’Izieux, près de St Chamond. Admis le 11 octobre 1821 ou 1822. Déclaré décédé en 1825 (OFM 652.2)

14/ Jn. Claude Audrac (Audras)

F. Laurent. Né à La Valla en 1793, il est admis au noviciat en décembre 1817. Il catéchise au Bessat en 1819-20 puis remplace son frère (F.Louis) à Marlhes en 1821-22. A partir de novembre 1822 il exerce à Tarentaise. En décembre 1823 il est à Vanosc (Ardèche) (Lettres II p. 316). Son inscription à la confrérie de La Valla en 1823 suggère qu’il est demeuré quelque temps à La Valla après avoir quitté Tarentaise et avant de se rendre à Vanosc.

Pierre Oriol

?

Jn. Bte. Rebod (abst.)

?

14 / Jacques Couturier,

« absent à St Romain ». C’est L’acheteur de la maison Bonner. Il a été pensionnaire à Lavalla (OFM : 102.3).

Jean Claude Germat.

Recensement 1815 : A Saleyre Jean. Claude. Germat, cultivateur, et sa femme. 4 enfants.

Jean Bacher

OFM 106.14 ; 120.5 : Jean Claude Baché (cordonnier à La Valla) ; (Recensement 1815 : à La Fara, Jean Baché, cordonnier, et sa femme, un garçon, une fille et trois domestiques. )

Pierre Porte : 

?

Pierre Gachet 

?

Jn. Marie Crapanne

(Recensement 1815 : Aux Saignes, Jean-Marie Crapanne, laboureur, et sa femme. 1 garçon et une fille.

Benoît Baron

(Recensement 1815 : à Vasseras, B. Baron, laboureur, et sa femme, deux garçons et une fille).

15/ Claude Aubert.

 

Les sources semblent confondre deux Aubert. D’après le registre des inscriptions (OFM 142.1) un Claude Aubert de St Pal en Chalancon (Haute-Loire). est admis au noviciat le 28 août 1822. C’est certainement lui que le document OFM 652.2 nomme Jean-Claude Aubert devenu F. Jean, entré en 1822 et déclaré sorti en 1825. Ce même document 652.2 présente un Jean-Louis Aubert nommé F. Jean-Louis, entré en 1823 et déclaré sorti en 1825. Le registre des inscriptions (142.4) déclare qu’en juillet 1825 il a payé sa pension complète (400 F.) mais ne dit rien de sa date d’admission. C’est à mon avis le Claude Aubert qui figure dans les derniers inscrits de la confrérie en 1823 même s’il est difficile d’expliquer la confusion des prénoms[21]. En effet, il semble que l’entrée dans la confrérie coïncide avec celle de l’admission au noviciat. Qu’un Claude Aubert entré en 1822 s’inscrive si tardivement dans la confrérie paraîtrait assez étonnant.

16/ Claude Poinard

F. Etienne. Né en 1799 à Villevocance, près d’Annonay (Ardèche), âgé de 23 ans, admis le 11 novembre 1823. Il prend l’habit le 20 octobre 1824. (Lettres, II p. 214). C’est donc peu après son admission qu’il entre à la confrérie. Et de fait il est l’un des derniers de la liste des inscrits de 1823.

17/ Antoine Couturier

F. Antoine. Né à Lavalla en 1800, admis en 1818, il prend l’habit le 15 août 1818. A Marlhes de 1818 à 1822, il rentre alors à La Valla. Le fait qu’il s’engage dans la confrérie en 1823 montre qu’il y demeure un certain temps[22].

Annemond (Ennemond) Rivat : 

?

 

Les disciples de M. Champagnat vont donc constituer –mais pendant un temps très bref- presque la moitié de l’effectif masculin de la confrérie des Sacrés-Cœurs. Ils n’ont pu s’y faire inscrire qu’avec l’autorisation de Champagnat mais n’y figurent pas en tant que corps[23]. Ce sont en général des jeunes gens récemment arrivés. Quelques frères plus anciens y adhèrent lorsqu’ils se trouvent à La Valla. On a un peu l’impression qu’ils sont là pour faire nombre dans une confrérie qui n’attire guère les hommes ; ou bien que la confrérie est un moyen d’intégrer à la paroisse de jeunes étrangers. Autre impression : l’œuvre de Champagnat n’apparaît pas comme une communauté religieuse, mais comme une œuvre paroissiale dont les membres ne sont pas distingués du laïcat. Plutôt que novices ou membres d’une congrégation en formation, ils semblent considérés comme les élèves ou les cadres d’une école normale.

Et cette situation me paraît expliquer en partie le désir de M.Champagnat de construire L’Hermitage. Ce ne sont pas seulement l’étroitesse des locaux ni l’éloignement des grands centres qui le poussent à trouver un lieu retiré assez proche de St Chamond. Il est conscient que tant que la communauté des frères sera installée au cœur d’une paroisse et tant que lui-même y exercera des fonctions ecclésiastiques, son œuvre restera perçue comme une sorte de confrérie sans plus. Plus tard, la règle de 1852 (1° partie, ch. II article 10 p. 5 précisera : « Ils ne s’imposeront ostensiblement aucune prière ni aucune pratique de piété particulières sans la permission du Frère Supérieur ; ils ne s’agrégeront à aucune confrérie sans la même permission »…

 

Champagnat et la dévotion au Sacré-Cœur

Evidemment, la dévotion aux Sacrés-Cœurs de Jésus et Marie n’est pas étrangère à M. Champagnat. Dans le CM 35 j’ai longuement développé l’hypothèse que le « Tout à Jésus… » était inspiré par le livre de M. Aubriot de la Palme : Le saint dévouement ou les dévoués de Jésus et de Marie (Rusand , Lyon et Puthaud, Chambéry1808), véritable synthèse et modernisation des confréries du saint esclavage et des Sacrés Cœurs de Jésus et Marie. Les convergences entre dévotion au Sacré-Cœur et spiritualité mariste sont en outre manifestes. Par exemple, dans les Exercices de Bonnardel nous trouvons (p. 260-262) une « Consécration au saint Cœur de Marie » l’invoquant comme « Mère de miséricorde » et ajoutant : « vous serez la voie par où j’irai à mon sauveur, et ce sera par vous que je recevrai ses grâces et ses miséricordes »… Mais il s’agit d’une sensibilité commune plutôt qu’un jeu d’influence, car il semble que Champagnat ait été d’abord peu porté à s’arrêter à l’image des Cœurs.

 

Spiritualité différente ou (et) prudence politico-religieuse ?

Le fait que les frères n’aient pas participé en tant que corps à la confrérie peut signifier deux motivations complémentaires de Champagnat : d’une part, la conscience que la spiritualité mariste et la sienne propre ne sont pas fondées sur l’image des Cœurs de Jésus et de Marie. Nous en avons un indice avec les sentences de la maison de La Valla qui ne font aucune allusion, à une telle dévotion. D’autre part, Champagnat pourrait manifester une grande prudence envers une dévotion chargée de connotations politico-religieuses pouvant créer des divisions. Il se peut d’ailleurs que le titre « Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie » ait été choisi pour atténuer le caractère politique de la dévotion. Et puis, le fait que la confrérie ait été patronnée par les sœurs de La Valla et largement investie par les femmes, contribuait encore à en réduire l’aspect politique. D’autre part, Champagnat ne pouvait guère empêcher les jeunes gens en formation, attirés par cette association, et encore fort peu initiés à l’esprit mariste, de s’y inscrire. La lettre de 1823 au F. J.M. Granjon me paraît renforcer l’hypothèse d’une certaine distance envers l’image des cœurs. Sa formule finale déclare simplement : « … je serai toujours avec plaisir et satisfaction votre très dévoué père en Jésus et Marie ». Et il usera de ce titre de « père en Jésus et Marie » dans ses lettres aux frères jusqu’en 1840.

Je me demande si, pour lui, le temps d’une dévotion au Sacré-Cœur réparatrice et résistante n’est pas terminé et que doit se faire jour une spiritualité plus optimiste et conquérante qui serait celle du temps de la Société de Marie.

 

Une seconde phase plus ambigüe

Une lettre du 15 août 1830 au F. Antoine et à la communauté de Millery (n° 16) marque un changement notable en présentant une double invocation finale : « je vous laisse dans les Sacrés-Cœurs de Jésus et de Marie […] J’ai l’honneur d’être votre tout dévoué père en J. et M. ». Et cette référence aux Sacrés Cœurs n’est pas un hasard car la Révolution de juillet 1830, très anticléricale, fait craindre un retour en force de l’impiété et de la persécution religieuse. Invoquer le Sacré-Cœur c’est faire revivre un symbole de résistance. Cependant, le P. Champagnat fera alterner les deux formules dans un grand nombre de lettres à ses frères : 66 au total, 21 portant la mention « Père en J. et M. » et une trentaine invoquant les Sacrés-Cœurs de Jésus et Marie[24]. Enfin son testament spirituel se clôt par ces mots: « Je vous laisse avec confiance dans les Sacrés Cœurs de Jésus et Marie en attendant que nous puissions nous réunir tous ensemble dans la bienheureuse éternité ».

Je serais donc porté à penser que la dévotion au Sacré-Cœur n’est présente dans les toutes premières années de l’institut que sur un mode mineur et assez problématique. Elle sera encore à peu près absente dans le Manuel de Piété de 1855[25]. Mais un changement de sensibilité s’opère à partir des années 1860 et les difficultés internes et externes de l’Eglise et de la congrégation n’y sont pas étrangères[26]. Convoquant les frères à la retraite, la circulaire du F. François datée du 1° juillet 1859, « fête du Sacré-Cœur de Jésus », (C. II, p. 370-373) leur recommande cette dévotion et l’invocation suivante : « Cœur de Jésus, notre aide dans les grands maux qui ont fondu sur nous, ayez pitié de nous »[27]. Mais c’est la circulaire du F. Louis-Marie du 4 juin 1869, en la fête du Sacré-Cœur (C. IV, p. 12-23 et 30-35), qui développe ce sujet, associant le Cœur Sacré de Jésus et le Cœur immaculé de Marie. Le Directoire de la Solide Piété de 1875 comprend de nombreux textes sur les Cœurs de Jésus et Marie, souvent inspirés de l’ouvrage de Bonnardel. Et le 29 avril 1883 le chapitre général consacrera l’l’institut au Sacré-Cœur (C. VII, p. 137). Les circonstances dramatiques traversées par la congrégation (mort du F. Nestor, lois laïques…) ne sont pas étrangères à cette décision. On ne semble pas, à cette époque, s’être préoccupé de savoir si cette consécration s’inscrivait dans une tradition originelle, pour la simple raison que cela paraissait évident. Mais il me semble que l’officialisation de cette dévotion infléchissait la spiritualité de l’institut dans un sens un peu différent de celui des tout premiers temps où la dévotion au Sacré-Cœur était acceptée seulement comme dévotion personnelle.

F. André Lanfrey 19/08/2017

 



[1] En fait « des Sacrés-Cœurs ».

[2] Ce document se trouve probablement aujourd’hui aux archives paroissiales de St. Chamond.

[3] Philippe Martin, Une religion des livres (1640-1850), Cerf, 2003 p. 237-240.

[4] Anne-Marie Gutton, Confréries et dévotion sous l’Ancien-Régime, Editions lyonnaises d’art et d’histoire, p. 66-67.

[5] J’ai pu me procurer l’édition de 1817 reproduite en fac simile par un éditeur traditionnaliste. Les annales de l’école de Semur donnent une biographie assez complète de M. Bonnardel.

[6] Ibid.

[7] Lyon, Rusand, 1818, 397 p.

[8] Ce sont les noms des Sœurs de Saint Joseph de la communauté de la Valla

[9] Ces mentions ont ajoutées tardivement.

[10] Dans cette page et celles qui suivent j’ai séparé les femmes des hommes, mais la liste originale ne comprend qu’une seule colonne.

[11] Le nom de la personne est accompagné de celui du hameau où elle habite.

[12] L’écriture semble être du scripteur de 1822.

[13] Ecriture tardive.

[14] Il l’avait d’abord établie en 1718 comme fête chômée le vendredi suivant la Fête-Dieu. Mais en 1721 il la reporte au dimanche. Anne-Marie Gutton, op.cit. p. 66.

[15] A moins qu’il n’y ait eu erreur de date ou que l’ouverture du registre ait été faite ce jour-là.

[16] Il est d’ailleurs étrange que G. Clergon ne dise rien des sœurs de st Joseph, présentes en corps.

[17] Informatisé mais non publié.

[18] Sur les confréries des agonisants, Anne-Marie Gutton, op. cit. p. 69.

[19] J.C. Barge nous raconte qu’en 1793, pour éviter le pillage de l’église par les révolutionnaires, « Les confrères du Rosaire dégarnirent leur chapelle et la grille de fer » et que « Pierre Champalier enleva tout ce qui concernait la confrérie du Saint-Sacrement ». Rien n’est dit sur cette quelque autre confrérie.

[20] Le F. André Bardyn ne précise pas l’origine de ce texte, mais il s’agit certainement du registre des procès-verbaux des marguilliers de La Valla.

[21] La confusion des prénoms pourrait venir du fait que les deux Aubert sont parents.

[22] La notice sur ce frère (Lettres, t. II p.45) nous dit qu’on ne sait pas où il est en 1823-24. Ce renseignement est donc d’un réel intérêt.

[23] La plupart d’entre eux ne portent pas l’habit religieux.

[24] Comme cinq lettres présentent les deux invocations, ce sont 51 lettres sur 66 qui portent au moins l’une des deux invocations.

[25] Sa 3° partie qui comprend les prières officielles de l’institut ne donne aucune oraison au Sacré-Cœur.

[26] L’index du volume XIII des Circulaires (p. 547) offre de nombreuses références sur le Sacré-Cœur.

[27] C’est un temps de crise interne de l’institut après le chapitre de 1852-54. Mais le F. François peut faire allusion au conflit entre le pape et le Risorgimento.

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