La foi vecue de Marcellin Champagnat

Seán D. Sammon

1999

Dans les semaines où le Cardinal Joseph Bernardin mourait d’un cancer, son médecin disait de cet homme:”J’ai compris aussitôt qu’il me fascinait”. Le docteur se trouvait devant un dilemme et essayait de trouver ce qui précisément l’attirait si soudainement chez l’ancien archevêque de Chicago (E.U.). Etait-ce son naturel aimable, sa vivacité d’esprit ou sa perspicacité qui la fascinait ainsi? Finalement, elle comprit que c’était tout cet ensemble de qualités si différentes qui distinguait le cardinal Bernardin de ses autres malades: son honnêteté, son courage et sa grande foi. Après tout, disait-elle ,”il ne m’a demandé que d’être honnête avec lui”.

La dernière rencontre du docteur avec le Cardinal est éloquente:”Quand je le vis le vendredi avant sa mort, je lui dis qu’il allait mourir avant Noël. Il répondit simplement,”Je suis prêt”. Je lui promis aussi que je lui dirais clairement quand il serait tout près de la mort, et quand je le revis, trois jours plus tard, il y avait eu une très rapide détérioration de son état. Je lui dis donc:”Vous êtes au bout, vous allez mourir cette semaine. Comment le ressentez-vous? Ce à quoi il répondit”. Si cela doit arriver, je suis prêt”. Un telle paix intérieure comme celle qui rayonnait de Joseph Bernardin ne s’improvise pas ; elle est née de la pratique de toute une vie”.

Le Cardinal et Marcellin Champagnat ont beaucoup de points communs: la paix intérieure qui a marqué les dernières années du Cardinal Bernardin était également évidente dans la vie du Fondateur des Petits Frères de Marie, groupe plus connu aujourd’hui sous le nom de Maristes. L’adversité et la maladie ont aidé le Cardinal à façonner sa spiritualité. Bien d’autres éléments ont contribué ensemble à construire la”foi vécue”qui a caractérisé la spiritualité du Père Champagnat.

Marcellin aimait les jeunes. En retour, les jeunes trouvaient contagieux son enthousiasme et son énergie. Qu’est-ce qui a nourri sa passion pour la vie et façonné sa spiritualité? Une conscience profonde de la présence de Dieu, une confiance inébranlable en Marie et en sa protection et les deux vertus naturelles de simplicité et d’humilité.

Le Testament Spirituel de Marcellin, n’a pas été écrit de sa propre main, mais il exprime les sentiments de son cœur, développe en détails la spiritualité de ses”Petits Frères”. Persévérez fidèlement dans le saint exercice de la présence de Dieu, leur disait-il, c’est l’âme de la prière, de l’oraison et de toutes les vertus. Que la simplicité et l’humilité soient toujours le caractére des Petits Frères de Marie conservez-vous toujours dans un grand esprit de pauvreté et de détachement. Qu’une dévotion tendre et filiale vous anime pour notre bonne Mère conseillait-il, faites la aimer partout Soyez fidèles à votre vocation, aimez-la et persévérez-y avec courage.
Les origines de la spiritualité de Marcellin Champagnat ne se trouvent pas dans des monastères ; mieux, sa spiritualité a ses racines sur les places de marché. Il n’y avait pour le Fondateur des Frères maristes rien de petit ou de méprisable: il prenait l’Evangile au sérieux. Il n’est pas surprenant alors, que l’obéissance et l’amour soient les deux attitudes qu’il recommandait avec force à ses premiers disciples. Ce sont finalement, les fondements de toute communauté. L’obéissance en est l’élément principal ; l’amour rassemble toutes les vertus pour les rendre parfaites. Sur ce point, il n’y avait pas de limite.

Marcellin aimait ses Frères ; il en attendait en retour qu’ils s’aiment aussi les uns les autres.

Comme Fondateur, il était jeune, 27 ans seulement, quand il invita ses deux premières recrues à le rejoindre. Il donna à ses petits Frères une mission claire: proclamez directement la Parole de Dieu aux jeunes, leur disait-il, faites leur connaître et aimer Jésus, spécialement aux plus délaissés. Il savait que pour enseigner aux jeunes, il fallait d’abord les aimer. Marcellin a toujours guidé sa vie et son œuvre selon ce principe. Il attendait de ses Frères et de ceux qui embrasserait sa spiritualité chrétienne qu’ils fassent de même.

Tout au long de sa vie de prêtre, le fondateur aimait dire: ”pour éduquer convenablement les enfants, il faut les aimer et les aimer tous de la même manière”. L’amour donc, ne devait pas être seulement le fondement de la communauté, mais aussi le signe distinctif de la manière mariste d’évangéliser et d’éduquer. C’était la manière de Marie avec Jésus ; ce sera désormais la manière de tous ceux qui suivent le rêve qui avait tant fasciné le cœur de ce prêtre de campagne et celui de ses premiers frères.

En mai 1789, Marcellin Champagnat est né dans un monde déjà tourmenté par les convulsions des changements. Le monde qu’il a laissé cinquante et un ans plus tard, a connu la guerre et la paix, la prospérité et la pénurie, la mort d’une Église et la naissance d’une autre. Homme de son temps, il portait en lui toute la grandeur et les limites des gens de son temps. La souffrance le motivait, les revers le rendaient plus fort, il était déterminé et la grâce l’aidait à dépasser les circonstances du moment.

Marcellin Champagnat était prêtre de la Société de Marie et supérieur et fondateur de ses petits Frères. Il était aussi apôtre de la jeunesse et l’exemple d’une vraie”foi vivante”. C’était un homme et un saint pour son époque et son milieu, il est homme et saint pour nous aussi.

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