Les Frères Maristes – 1817-2012

Laurent Potvin, fms

2012

À l’occasion de cette année 2012 où nous célébrons le 195e anniversaire de fondation de l’Institut des Frères Maristes, je voudrais brièvement mettre en lumière  trois caractéristiques de notre Fondateur, saint Marcellin Champagnat, caractéristiques que notre précédent Supérieur général, F. Sean Sammon,  rappelait dans une circulaire dans ce passage : « Marcellin n’était pas un imprudent, mais il était audacieux, novateur dans ses réponses, et intrépide dans ses actions. » 

Ouvrons  le dictionnaire Larousse à chacun de ces adjectifs que j’ai soulignés plus haut :
Audacieux : qui est décidé, téméraire. Je remplace le mot téméraire, mot  qui ne convient pas ici,   par le mot fonceur, même si ce mot est plutôt familier.
Novateur : qui introduit quelque chose de nouveau.
Intrépide : qui ne craint pas le danger, qui ne se laisse pas arrêter par l’obstacle.

En quoi, surtout, Marcellin Champagnat fut-il un audacieux novateur  intrépide?

 

1-  Champagnat : un audacieux

 Marcellin Champagnat se rendait compte de l’ignorance religieuse autour de lui. Il s’est dit : « Il faut faire quelque chose d’abord auprès des jeunes. » Il ne s’est pas rendu chez son évêque pour lui dire : « Monseigneur, je me rends compte de l’ignorance religieuse chez les gens du diocèse et je la déplore…Comme vous êtes le responsable de ce diocèse, faites quelque chose! » Il s’est plutôt dit : «Tout cela, Monseigneur le sait trop bien! Je vais agir moi-même. » À ses confrères maristes, il disait donc souvent : « Il nous faut des Frères pour enseigner la jeunesse et combattre l’ignorance religieuse. » Il a répété cela 25 fois à ses confrères de la Société de Marie.  Fatigués  d’entendre son petit refrain, ils ont fini par lui dire : « Vous nous parlez souvent des Frères! C’est votre idée à vous. Chargez-vous-en! » C’est tout ce qu’il voulait se faire dire!  Alors, il a foncé. Il n’a pas attendu que des gens viennent à lui en lui offrant leurs services pour devenir membres d’une sorte d’Institut     virtuel! Il a invité certains jeunes gens à travailler dans avec lui à un projet : son projet…

Le 2 janvier 1817, – il y a 190 ans cette année – il avait acheté une petite maison où il réunissait  un vétéran des guerres de Napoléon d’environ 23 ans, et un jeune  de 15 ans. Voilà ses deux premières pierres de fondation!   Mais je ne rédigerai pas ici « le journal quotidien » de cette  communauté naissante avant même qu’elle porte le nom de « Petits Frères de Marie. »

 

2- Champagnat : un novateur

Dans son idée bien arrêtée,  il ne voulait pas que les Frères auxquels il rêvait soient des Frères   coadjuteurs des Pères Maristes. Il ne voulait pas   non plus des Frères catéchistes.  Il ne voulait pas des Frères sacristains.  Il voulait des Frères éducateurs. Donc des religieux non-prêtres,  dépendant de leur supérieur général Frère, enseignant  les diverses matières profanes et la religion en coopération avec les curés des paroisses dans de petites écoles.

Pour  grouper et former de tels religieux, il fallait des autorisations… celle de l’évêque de Lyon, le Cardinal Fesch, oncle de Napoléon. Le Cardinal  était à Rome, éloigné de son diocèse pour des raisons politiques. Il dut donc rencontrer le Vicaire général, M. Bochard, qui s’est montré  tout à fait fermé au plan du Père Champagnat. Qu’à cela ne tienne : Marcellin ira de l’avant et les Petits Frères de Marie commenceront quand même grâce à l’arrivée et  à la sympathie de l’administrateur apostolique, Mgr Gaston de Pins. Mais, il faut aussi une autorisation de l’État pour fonder des écoles. On   demandera plus tard cette permission quand il y aura des écoles…Ce sera le fait accompli pour répondre à un besoin déjà là.

Les Frères vivront en petits groupes de deux ou trois  dans les villages pour enseigner en coopération avec les mairies et les curés. Pour réduire les coûts, ils demanderont des petits salaires et ils auront un petit jardin à leur disposition. Tout est petit, même leur nom : Petits Frères de Marie.… Comme l’école ne dure  alors que quelques mois par année, les Frères seront regroupés pour travailler  le reste du temps à la maison principale.

Mais ce vicaire novateur ne partait pas de zéro.  En homme pratique, il a tenu à s’inspirer des méthodes en vigueur chez les Frères des écoles chrétiennes pour l’enseignement. Mais eux allaient dans les villes seulement laissant de côté les villages. Ses Frères à lui  iront donc dans ces villages oubliés.

 

3- Champagnat : un intrépide

Pour loger ses Frères,  les établir et les former comme religieux et comme enseignants, il fallait… de l’argent.  Il emprunte à gauche et à droite en contractant ces dettes sous sa responsabilité personnelle.  Il accepte aussi les dons de généreux donateurs.

Quand son confesseur se rend compte qu’il s’endette encore  et encore, malgré ses conseils, pour agrandir et développer son œuvre, il lui dit de se trouver un autre confesseur…Malgré cette situation délicate, il poursuit son œuvre.  Il avait déjà entendu, plus jeune, de la part d’un prêtre cette invitation au sacerdoce : «Marcellin,  il faut te faire prêtre, Dieu le veut! » Mais là   une petite voix, intérieure celle-là, lui murmurait : « Il faut des Frères, Dieu le veut! »

Quand le Père  Marcellin Champagnat meurt, en 1840,- son Institut n’avait que 23 ans – les Frères découvrent avec étonnement que celui  qui avait été endetté presque  toute sa vie,  n’avait plus alors que peu de dettes… Il ne restait qu’un emprunt qui fut rapidement payé par un bienfaiteur.  Ce fondateur  intrépide n’a pas voulu laisser de dettes en héritage à ses Frères. 

Intrépide encore Champagnat le fut quand, vers 1830, des troubles politiques éclatent, Contrairement aux autres communautés, il continue à recevoir des sujets, à les former, à ouvrir des écoles.  Vêtures et professions se poursuivent comme en temps de paix!

 

Conclusion

Ce  novateur audacieux et intrépide a toujours compté sur la Providence et sur Notre Dame.

Nous vivons, de nos jours,  une période où l’Église fait face à de graves problèmes : l’ignorance religieuse progresse tandis que les vocations sacerdotales et religieuses se raréfient…   Des situations tellement analogues à celles que ce Fondateur a connues de son temps. Devant tout cela, demandons au Seigneur et à Marie, notre Ressource Ordinaire,   de susciter chez nous  des hommes qui lui ressemblent : des hommes qui s’affirment  des audacieux, des novateurs, des intrépides pour poursuivre avec cœur et mener à bien l’œuvre d’un apôtre  qui fut un novateur audacieux intrépide.

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