Lettres de Marcellin 044
Marcellin Champagnat
1834-08
Le Père Champagnat qui ne cesse de se préoccuper de limplantation de la Société des Pères Maristes dans le diocèse de Lyon, jugeait que la maison de Valbenoite noffrait pas les conditions nécessaires. Or une occasions soffre à lui. Mademoiselle Marie Fournas (cf. L. 27 et répertoire biographique), avant sa mort survenue le 3 juin 1833, donne par testament, le 15 mai 1833, sa propriété de Grange-Payre au Père Champagnat. Celui-ci sempresse de la proposer pour les Pères. En fait, cela ne se réalisera pas (cf. Vie, p.238).
Une lettre du R. P. Colin, du 4 septembre 1834 (cf. AM. 1, doc.322), permet de situer cette lettre approximativement en août.
M. le v(icaire) g(énéral).
Ne considérant que la gloire de Dieu dans lobjet de ma lettre, quelquen soit le succès, jadorerai ses (desseins?). La position de mes confrères à Valbenoite nest point avantageuse. Cette cure et ce vicariat ne peut aller à la société, surtout dans le moment où se trouvent ses prêtres.
Ladministration de la paroisse les occupe tous et en occuperoit bien davantage. Les meilleurs sujets y perdent leur vocation; ceux qui se sentent quelque attrait pour la vie religieuse nose se présenter, dans la crainte dêtre employés comme vicaire. Ceux qui y sont désirent en sortir, disant quils ne peuvent se former ni préparer aucun sermon, rien, en un mot, qui puisse servir à un mission(naire). Je ne parle pas du recueillement, quon perd pres- que toujours dans les altercations quon est obligé davoir avec les uns, avec les autres, très souvant avec les colaborateurs.
Dans quelle triste position ils se jettent en achetant le casuelle de Mr le curé, nouvelle source de brouilles, soit avec Mr Rouchon, soit avec ses paroissiens; pourra-til sempêcher de blâmer la manière de percevoir ou la prétendu rigueur quil lui semblera quon met. La paroisse leur sera vite à dos. Que de choses à dire dans ce plan. Le contra nest pas plus avancé que le premier jour. Quelque personne même croit que Mr Rouchon prend des moyens pour le casser. Dun autre côté, le clergé de St Etienne, qui a été de tous temps prévenu contre cette oeuvre. Enfin mes confrères mont dit quils navoient reçu aucun cadeau depuis quils sont à Valbenoite.
Mr le Vicaire Général, touché du triste état où je vois réduite laffaire des prêtres dans le diocèse, je viens, pour la plus grande gloire de Dieu et lhonneur de Marie, offir à M(on)segneur larchevêque le local de la Grange Pere, dont la situation est charmante, soit par létandu des bâtimens, soit par la grandeur immense dun chos qui est attenant. Il nest aucun sacrifice que je ne soit prêt à faire pour cet oeuvre, que je verrai dans un autre jour sous la conduite dun saint prêtre que Monseigneur veut bien nous accorder, et avec le quel je mentendrai parfaitement. Je promest bien faire davantage, contant toujours sur la Providence, qui ne nous a jamais manqué. Jai des ressources jose le dire, ou plutôt disons mieux, cest Marie qui en a de très grande pour ceux (qui comptent?) sur elle. Voyez, Mr le Vicaire Général, ce que jai cru devoir vous faire connoître pour que je ne manque aucune occasion daider une oeuvre à la quelle je me suis voué depuis si longtemps. Vous ayant mis au fait de toutes ces circonstances, jadorerai les desseins de Dieu quoiquil arrive, nayant aucun reproche à me faire.
Dans la suposition où ma proposition seroit acceptée, on pourra laisser Mr Seon à Valbenoite, soccupant conjouintement avec Mr Rouchon de la providence des jeunes gens. Par là , tout me paroîtroit concilié. Loeuvre des prêtres ne seroit plus sacrifiée. Omnia ad majorem Dei gloriam. Non nobis, Domine, non nobis gloriam.
Édition: Lettres de Marcellin J. B. Champagnat (1789-1840) Fondateur de l?Institut des Frères Maristes, présentés par Frère Paul Sester. Rome, Casa Generalizia dei Fratelli Maristi, 1985.
fonte: Daprès la minute, AFM, 132.1, pp. 38-40; éditée dans OM, I, doc. 321, pp. 719-721