Une enquete sur le niveau spirituel et intellectuel des frères en 1828

Le F. François comme parfait disciple ; un avis plus réservé sur le F. Louis? F. André Lanfrey

2018-10-24

La publication de Origines des Frères Maristes a mis à notre disposition tous les documents de l’époque du P. Champagnat, et, comme beaucoup n’ont pas encore été systématiquement étudiés, un énorme champ s’est ouvert à la recherche historique. Dans cet article j’ai l’intention de mettre en évidence la richesse du document OFM/104 qui présente vers 1828 deux tableaux évaluant la conduite religieuse et le niveau d’instruction des Frères et aspirants maristes au nombre de 60 environ. Dans son introduction à ce document, le F. Paul Sester précise que : « Le Registre des Entrées[1] se termine par les deux tableaux qui suivent, de la main de M. Champagnat ».

 

Les entrées en 1817-1828

Comme il n’existe aucun registre des prises d’habit avant 1829 environ, il n’est pas facile de connaître le nombre exact de ceux qui ont été admis au noviciat de La Valla puis L’Hermitage. Cependant en combinant les renseignements fournis par les registre des entrées, des vêtures, des professions temporaires et perpétuelles et le registre mortuaire ainsi que les Annales de l’institut je crois pouvoir évaluer à environ130 le nombre d’admissions au noviciat entre le début de 1817 et la fin de 1828. Bien sûr, un assez grand nombre de ces aspirants n’ont pas persévéré ou sont décédés, mais en 1828 et contrairement à bien d’autres fondateurs de frères, Champagnat a su non seulement accueillir beaucoup d’aspirants mais encore en garder plus ou moins la moitié.

 

La fin d’une époque tourmentée (1826-28)

Cette persévérance de nombreux aspirants est d’autant plus remarquable que l’institut a récemment subi de violentes secousses : grave maladie de Champagnat, départ de M. Courveille puis de M. Terraillon en 1826. Mais ces événements qui auraient pu ruiner la congrégation naissante sont compensés par un autre trop sous-estimé : le 11 octobre 1826 neuf Frères font, pour la première fois, des vœux perpétuels pour manifester leur fidélité indéfectible et leur confiance en l’avenir de l’œuvre. Une telle démarche n’a pu être faite sans l’accord de Mgr.de Pins[2]. L’année 1827 est encore une année de difficulté dont Champagnat évoque les aspects dans ses lettres aux vicaires généraux et à Mgr.de Pins (OM1 /173) en mentionnant : « Nous sommes près de 80. Nous avons dans nos écoles pour le moment au moins 2000 enfants ». Et la visite du prélat à L’Hermitage le 13 juin 1827 (OM1/176 ; Annales, 1827, § 61-65) manifestera publiquement son soutien à M. Champagnat. C’est dans ce contexte de véritable refondation de l’œuvre des Frères sous la direction d’un supérieur désormais incontesté, et avec le soutien de l’archevêché que doivent être compris les tableaux que nous allons présenter.

 

Un premier tableau consacré aux novices.

Il évalue neuf aspirants qui n’ont pas encore reçu leur nom de frère. Les cinq premières colonnes vérifient leurs aptitudes morales et religieuses et les quatre dernières concernent l’instruction profane puisque L’ Hermitage est un lieu de formation mixte : à la fois noviciat et école normale. On est encore à l’époque où ces deux types de formation sont confondus et la notion de vocation est sans doute très vague chez beaucoup de ceux qui entrent dans la maison avec le désir d’être Frères.

[1] (12.283)

Piété

Soumi

Carac

Cathé

Régul.

Scien

Gram

Arit

Ecriture

Nicolas Landon

 

 

 

 

 

 

 

 

 

J.C. Chillet

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jean Cholleton

C

 

 

 

 

 

 

 

 

Jacques Poinard

S

F

L

N

M

Q

Q

J

T

Jean L. Barrallon

D

F

P

N

F

P

Q

R

S

J. C. Bobichon

F

D

F

N

F

Q

Q

Z

S

J. C. Perier

M

D

L

D

F

T

S

 

Z

Etienne Poiyard

D

F

L

N

S

P

S

Z

Q

J. M. Boisset

D

D

F

P

D

Q

S

Z

Q

 

L’ordre des rubriques nous montre quel type d’hommes Champagnat veut comme disciples : d’abord les vertus du bon chrétien et du vertueux citoyen, nécessaires à de futurs maîtres d’école. Les connaissances profanes ne viennent qu’ensuite. On est surpris de ne pas y voir figurer la lecture, mais, outre qu’elle est enseignée en même temps que le catéchisme, elle est incluse dans le terme vague de « science » comprenant les niveaux élémentaires du lire-écrire-compter nécessaires pour acquérir le niveau d’un brevet d’enseignement de niveau inférieur[3]. Grammaire, arithmétique et écriture constituent un degré d’instruction plus élevé.

En somme, même s’il accorde priorité à la formation ascétique, catéchétique et religieuse de ses novices, en 1828 Champagnat est loin de négliger l’instruction, non seulement de niveau basique, mais encore de niveau un peu plus élevé. L’Hermitage passe d’ailleurs pour un lieu de formation d’instituteurs sérieux et on comprend pourquoi les autorités départementales proposeront à M. Champagnat que L’Hermitage devienne l’école normale de la Loire : un projet qui sera réduit à néant par la révolution de 1830. Ceci dit, nous pouvons nous demander comment, en quelques mois, des novices arrivés sans grand bagage de connaissances pouvaient profiter d’un tel programme, d’autant qu’une grande partie du temps était employé à des exercices religieux et à des travaux manuels.

 

Datation du tableau

Tous ces sujets en formation recevront, sauf un, un nom religieux et nous les retrouverons dans le second tableau, ce qui signifie l’antériorité de ce tableau sur le second, explicitement daté de 1828. Comme l’indiquent les dates d’admission et de vêture ci-dessous, il paraît dater de 1827.

 

 

Frère

Admis le

Vêture

VT/VP

Nicolas Landon

Victor

01/09/1826

18/10/1827

08/09/1828

J.C. Chillet

Félix

20/10/1826

20/10/1827

08/09/1828

Jean Cholleton[4]

Jean

1826[5]?

1827 ?

Dcd en 1829

Jacques Poinard

Isidore

15/12/1826

14/10/1827

18/10/1828

Jean L. Barrallon

Antonin

20/12/1826

08/10/1828

02/10/1831

J. C. Bobichon[6]

 

03/01/1827

 

 

J. C. Perier

F. Clément

08/01/1827

08/09/1827

 

Etienne Poiyard (Poujard)[7]

F. Anselme

05/02/1827

22/04/1827

08/09/1830

J. M. Boisset

F. Jean-François

05/02/1827

22/04/1827

08/09/1828

 

Confrontation avec les Annales de l’institut

Pour autant, ces neuf noms ne représentent pas tous les sujets en formation. Le F. Avit note qu’en 1826: (Annales 1826, § 51) : « Les Frères Jean-Marie Bonnet, Hippolyte (Remillieux), Jean-Joseph (Chillet) et Jean Cholleton prirent le costume bleu pendant cette année ». Et en 1827, (Annales, 1827, § 70) il cite dix frères ayant pris « l’habit religieux » (et non plus le costume bleu), mais un seul (Anselme, Poujard) se trouve dans la liste du tableau ci-dessus. Pour la vêture de 1828 sept noms sont cités, dont celui du F. Clément Perrier. Le F. Avit signale donc 21 prises d’habit en 1826-28 dont trois figurent dans notre tableau. Il n’a pas pris en compte trois prises d’habit de frères que nomme OFM/104

 

Nom civil

Nom religieux

vêture

V.T.

Chillet J. Cl.

Félix

1827

1828

Landon

Victor

1827

1828

Boisset

Jean-François

1827

1828

 

Les aspirants du tableau de OFM/104 ne sont donc qu’une petite partie des Frères ayant pris l’habit en 1826-28. Il s’agit peut-être d’aspirants qui, d’une manière ou d’une autre, posent des problèmes d’admission au cours de 1827[8].

Convertir les lettres en chiffres

Comment interpréter leur évaluation en lettres ? Cette notation ne me paraît pas offrir de difficultés majeures si on situe celles-ci sur l’alphabet. On aurait ainsi : A = 20/20 ; B = 19 ; C= 18 ; D = 17 ; E = 16 ; F = 15 et ainsi de suite. Mais certaines lettres ont été mises ensemble, comme dans l’alphabet latin : (I-J/U-V) ou omises (W,X, Y). Ainsi le Z correspondrait à 0. Testons sur ce tableau en combinant chiffres et lettres :

 

[1] (12.283)

Piété

Soumi

Carac

Cathé

Régul.

Scien

Gram

Arit

Ecri-ture

Nicolas Landon

 

 

 

 

 

 

 

 

 

J.C. Chillet

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Jean Cholleton

C/18

 

 

 

 

 

 

 

 

Jacques Poinard

S/3

F/15

L/10

N/8

M/9

Q/5

Q/5

J/12

T/2

Jean L. Barrallon

D/17

F/15

P/6

N/8

F/15

P/6

Q/5

R/4

S/3

J. C. Bobichon

F/15

D/17

F/15

N/8

F/15

Q/5

Q/5

Z/0

S/3

J. C. Perier

M/9

D/17

L/10

D/17

F/15

T/3

S/3

 

Z/0

Etienne Poiyard (Poujard)

D/17

F/15

L/10

N/8

S/3

P/6

S/3

Z/0

Q/5

J. M. Boisset

D/17

D/17

F/15

P/6

D/17

Q/5

S/3

Z/0

Q/5

Evalués

7

6

6

6

6

6

6

6

6

Moyenne sur 20

13,7

16

11

9,1

12,3

5

4

2,6

3

 

La conversion en chiffres permet de d’effectuer des totaux et des moyennes impossibles avec des lettres. Néanmoins, en groupant les lettres par séries de cinq nous aboutissons à des appréciations globales suffisantes :

-                  A-F d’excellent (A) à satisfaisant (F) ;

-                  I-M = passable ;

-                  N-Q = insuffisant

-                  R-Z= De très insuffisant à nul (Z)

Nous obtenons le résultat suivant :

 

Conduite + Catéchisme.

Instruction profane

Appréciation globale

A/20

 

 

Niveaux excellent et satisfaisant

B/19

 

 

C/18

X

 

D/17

XXXXXXXX (8)

 

E/16

 

 

F/15

XXXXXXXXX (9)

 

G/14

 

 

H/13

 

 

 

 

 

I-J/12

 

X (1)

Niveau médiocre

K/11

 

 

L/10

XXX (3)

 

M/9

XX (2)

 

 

 

 

N/8

XXXX (4)

 

Niveau insuffisant

0/7

 

 

P/6

XX (2)

XX (2)

Q/5

 

XXXXXXXX (8)

 

 

 

 

R/4

 

X (1)

Niveau très insuffisant

S/3

XX (2)

XXXXX (5)

T/2

 

XX (2)

U-V/1

 

 

Z

 

XXXX (4)

 

Que nous choisissions une notation sur 20 ou une vision plus qualitative, le tableau met en évidence un groupe à la conduite plutôt satisfaisante mais faible quant aux connaissances. Pour le catéchisme le résultat est à peine plus brillant que dans les matières profanes. C’est au fond ce que disent les documents maristes de l’époque, et Champagnat lui-même. Mais le tableau sélectionne peut-être les derniers de la classe du noviciat. Quant aux trois aspirants non évalués, la difficulté est sans doute plus sérieuse. En tout cas au moins deux d’entre eux prendront l’habit à la fin de 1827, après un temps de formation assez long. Pour les autres, les premières vêtures ont lieu dès fin avril. Le tableau aurait donc été rédigé au cours du premier trimestre de cette année afin d’aider à la prise de décision quant à l’admission à la vêture. Il aurait pu être construit d’après les indications de M. Bourdin, un des pères de L’Hermitage qui « a l’intendance des classes des novices, de l’écriture, du calcul, du chant, du catéchisme[9] »…

 

Progrès réalisés

Comme nous retrouvons la plupart de ces aspirants avec leur nom de Frère dans le second tableau qui les évalue sur les mêmes disciplines, sauf la grammaire, en 1828, j’essaie de mettre en évidence les progrès réalisés en comparant les résultats d’une année à l’autre.

 

[1] (12.283)

Piété

Cathé

Soumi

Carac

Régul.

Scien

Arit

Ecri-ture

Nicolas Landon

F. Victor

?/

F/15 

?

D/17

?/

D/17

?/

L/10

?/

F/15

?/

L/10

?/

N/08

?/

M/09

J.C. Chillet

F. Félix

?

L/10

?

D/17

?

D/17

?

E/16

?

E/16

?

M/09

?

Q/05

?

B/19

Jean Cholleton

F. Jean

C/18

B/19

?

B/19

?

D/17

?

D/17

?

L/10

?

M/09

?

M/09

?

L/10

Jacques Poinard

F. Isidore

S/3

C/18

N/08

L/10

F/15

M/09

L/10

D/17

M/9

F/15

Q/5

L/10

J/12

N/08

T/2

M/09

Jean L. Barrallon

F. Antonin[10]

D/17

A/20

N/8

D/17

F/15

A/20

P/6

B/19

F/15

C/18

P/6

L/10

R/4

Q/05

S/3

F/15

J. C. Perier

F. Clément

M/9

M/09

D/17

L/10

D/17

Q/05

L/10

Q/05

F/15

P/06

T/3

P/06

?

P/06

Z/0

ZN

Etienne Poujard

F. Anselme

D/17

B/19

N/8

D/17

F/15

D/17

L/10

C/18

S/3

C/18

P/6

?

Z/0

?

Q/5

?

J. M. Boisset

F. Jean-François

D/17

O/07

P/6

L/10

D/17

?

F/15

P/06

D/17

Q/05

Q/5

L/10

Z/0

Q/05

Q/5

F/15

Moyenne 1827

13,5

9,1

16

11

12,3

5

2,6

3

Moyenne 1828

15,25

13,8

14,5

13,5

12,8

8,7

6,5

11

 

Globalement le progrès est manifeste et des jeunes gens non évalués en 1827 obtiennent des résultats très honorables. Pour autant, les disciplines profanes demeurent à un niveau faible. Le progrès spectaculaire en écriture montre que l’institut accorde une grande importance à la calligraphie à une époque où cette discipline est encore peu pratiquée.

 

Un second tableau à la fonction tout autre 

Quoique de forme très semblable au premier tableau, le second a une portée et une finalité très différentes. On a l’impression qu’il s’agit de l’évaluation de l’ensemble des Frères et aspirants réunis à l’Hermitage au moment des vacances de 1828. Quant au mot « examen » qui sert de titre, il est un peu ambigu. S’il convient pour les matières profanes et le catéchisme, les appréciations sur les vertus morales et religieuses supposent une bonne connaissance personnelle des candidats. Comprenant 61 noms de frères et d’aspirants, cette liste dresserait donc une sorte de photo du nombre et de la qualité des disciples de M. Champagnat, en un moment crucial.

 

Résultats de l’examen de l’an 1828

Nom

Piété

Caté

Carac

Soumi

Régul

Science

Arith.

Ecrit.

Gab. Thomasson

F

 

 

 

 

Q

 

 

Alex. Vebre

 

M

 

M

 

P

 

 

Cl. Dumaître

 

S

 

 

 

 

 

 

J. Toucheboeuf

 

F

 

 

 

M

 

Q

J.M. Chavanot

E

F

 

 

 

S

 

N

Jh. M. Beaujeux

E

F

O

 

 

Q

 

 

Pierre Bonnevie

C

F

M

A

 

F

Q

N

J. f. Bouchet

C

D

D

C

M

D

S

M

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Fr. f. Chérubin[11]

 

F

S

D

M

M

Q

Q

F. Bruno

L

F

F

F

N

N

N

N

F. Basile

A

N

D

D

F

Q

 

 

f. Gébuin

A

N

A

A

F

Q

 

 

f. Jérôme

 

 

 

 

 

 

 

 

f. Maxime

 

F

E

E

O

N

O

ZQ

f. Sylvestre

C

E

B

B

B

M

Q

ZE

f. Clément

M

L

Q

Q

P

P

P

ZN

f. Théodoret

F

D

A

C

Q

M

 

ON

f. Mathieu

CF

CF

B

C

CF

F

N

LM

f. Bernardin

 

 

F

F

F

 

 

 

f. Vincent

F

S

C

B

F

Q

X

EQ

f. André

N

L

F

N

 

 

 

 

f. Charles

B

D

B

A

D

F

 

L

f. J. François

O

L

 

P

Q

L

N

FC

f. Anselme

B

D

D

C

C

 

 

 

f. Antoine

A

D

A

B

C

L

Q

F

f. Philippe

 

 

 

 

 

 

 

 

f. Isidore

C

L

M

D

D

N

Q

E

f. Victor

F

C

L

D

F

L

N

M

f. Jean

B

B

D

D

L

F

D

ET

f. Joachim

F

D

F

D

L

M

M

L

f. Félix

L

D

D

E

E

M

Q

B

f. Lazard

N

P

L

L

Q

Q

 

O

f. Lucien

D

B

D

D

D

A

D

B

f. Jean-Pierre

B

B

D

B

A

C

D

D

f. Alexandre

B

D

A

A

A

L

Q

L

f. Dosité

O

O

Q

M

N

Q

L

L

f. Exavier

D

L

E

P

L

Q

Q

P

f. Nilamon

L

F

O

F

D

E

N

F

f. Dominique

L

L

L

F

D

E

L

F

f. Gabriel

F

D

F

J

I

D

D

F

f. Damien

A

B

B

B

A

C

A

D

f. Pierre

E

O

B

B

D

Q

 

 

f. Abel

D

F

L

D

D

Q

D

D

f. Ambroise

E

L

D

E

D

O

Q

P

f. Gonzague

D

F

CF

B

B

D

L

D

f. Arsène

A

D

A

B

B

D

A

E

f. Jean Marie

A

C

A

A

A

D

D

D

f. Cyprien

B

E

B

D

B

E

D

F

f. Etienne

A

B

B

A

A

A

C

F

f. Paul

A

B

D

A

D

L

C

L

f. Hilarion

F

E

L

L

F

D

D

L

f. Augustin

E

D

B

B

D

C

D

CF

f. C. Michel

E

D

B

D

D

B

B

CF

f. J. Baptiste

F

B

B

B

D

D

B

C

f. Bernard

F

D

F

CF

O

CF

E

A

f. Barthélemy

B

B

D

B

B

C

B

B

f. François

A

A

A

A

A

A

B

B

f. Laurent

A

B

B

A

F

F

F

F

f. Antoine

A

B

A

A

A

C

D

D

f. Louis

A

A

A

A

L

A

A

B

f. Régis[12]

 

 

 

 

 

 

 

 

                             

 

Les items sont un peu différents de ceux du premier tableau. Le catéchisme vient en seconde place et la soumission se trouve maintenant proche de la régularité. C’est une répartition qui paraît plus logique que la précédente et qui commence à distinguer les qualités du maître d’école (piété, catéchisme, bon caractère) de celles du religieux (soumission-régularité). Pour les matières profanes la grammaire n’existe pas, sans doute parce qu’en 1828 son étude est une nouveauté. Le classement commence par les novices, les plus faibles, et qui n’ont pas encore de nom religieux, et se termine par les frères les plus anciens, en général plus savants.

Le code est le même que dans le tableau précédent, sauf que, dans une dizaine de cas, le P. Champagnat groupe deux lettres. C’est le plus souvent l’amalgame de deux lettres proches, par exemple CF, FC, LM, qui trahit une évaluation hésitante. D’autres fois c’est un peu surprenant comme ET et X [13]. Quant aux évaluations ZQ, ZE, ZN, utilisées dans la colonne de l’écriture, elles traduiraient un très mauvais niveau d’écriture mais avec quelques nuances, à une époque où la calligraphie, d’une extrême importance, peut justifier un fort degré de raffinement dans l’évaluation.

 

Les aspirants de 1828

Le début du tableau, donne encore huit noms civils. L’examen des registres de prises d’habit (RPH)l, de Vœux temporaires (RVT) et perpétuels (RVP) ainsi que du Registre mortuaire (RM) permet de les situer de manière plus précise.

 

Nom civil

Nom religieux

RPH

RVT

RVP

RM

Gab. Thomasson

Postulant

 

 

 

+1829 (Avit)

Alex. Vebre

Sylvestre

1829 (Avit)

 

 

 

Cl. Dumaître

Jean

1829

1830

 

 

J. Toucheboeuf[14]

Pothin

1829

 

 

 

J.M. Chanavat

Célestin

1829

 

 

 

Jh. M. Beaujeux[15]

?

 

 

 

 

Pierre Bonnevie

Postulant

 

 

 

+ 1829 (Avit)

J. f. Bouchet

Timothée

1828

1829

 

+ 1829

 

Dans les Annales, le F. Avit nous donne les noms des dix Frères ayant pris l’habit en 1829 et nous trouvons parmi eux quatre des noms cités ci-dessus. Le F. Timothée (Bouchet) a pris l’habit en 1828. Deux postulants, sans doute déjà malades en 1828, vont décéder l’année suivante. Et un autre (Beaujeu) admis au noviciat en juillet 1828, ne prendra pas l’habit. La date de cette admission est d’ailleurs intéressante car elle permet de dater cette liste d’après juillet 1828. Elle a dû être établie lors des vacances et de la retraite, en octobre. Comme dans le tableau précédent il s’agirait de novices ayant eu un parcours un peu problématique pour des raisons diverses. Leurs évaluations sont en général partielles.

 

Frères non évalués ou non cités dans la liste de 1828

Il n’est pas difficile de percevoir que les frères Régis, Philippe[16], Jérôme, sont nommés mais non évalués et que les F. André et Bernardin semblent dispensés des épreuves concernant l’instruction. Mais surtout, le tableau omet neuf Frères [17].

 

Frère

Nom

Admission

Vêture

Voeux

F. Stanislas

Claude Fayol

1822

1822

VP/1826

F. Joseph

Georges Ponset

1822

1822

VP/1826

F. Dorothée

Jean Villelonge

20/12/1823

03/04/1825

VT/1826

F. Gonzague

Jacques Sabatier

1824

1825

VP/1828

F. Alexis

Sébast. Frécon

01/09/1826

?/08 :1827

VT/ 1830

F. Jean-Joseph

J. Chillet

04/07/1826

11/10/1826

VT/1828

VP/1830

F. Athanase

J.C. Billon

05/09/1826

18/10/1827

VT/1828

VP/1831

F. Hyppolite[18]

Jean Remillieux

1826

1826

VP/1828

F. Benoît

Jean Deville

19/05/1828

08/09/1828

VT/1829

VP/1831

 

Apparemment, les cinq frères cités plus haut et les neuf du tableau ci-dessus, sont, peut-être à l’exception du F. Benoît qui aurait pu entrer après la composition du tableau, dispensés des examens car, pour la plupart, employés à L’Hermitage à des postes importants (F. Stanislas, administrateur, F. Jean-Joseph chargé de l’atelier de tissage du drap, F. Hyppolite, tailleur) ou ne sont pas considérés comme capables de faire des études (F. Dorothée). Reconnus comme bons religieux, mais jugés inaptes aux études, ils sont hors concours.

Le nombre des Frères soumis à l’examen est donc de 53 et l’effectif total serait de 53 + 9, soit 62. Quelques Frères étant certainement absents de L’Hermitage pour des raisons diverses l’effectif réel doit approcher les 70 Frères. Avec les sujets en formation la maison doit accueillir entre 80 et 90 personnes. On est très proche de ce que dit Champagnat en 1827, qui évalue l’effectif à environ 80 retraitants.

 

Evaluation globale des membres de l’œuvre en 1828

Additionnons le nombre de frères ayant obtenu telle ou telle lettre afin de déterminer des groupes de niveau. Ainsi la note A, la plus élevée, est obtenue par 49 Frères, dont 12 pour la piété, 2 piur le catéchisme etc…

 

 

Piété

Catéch

Caract.

Soumis

Rég.

Science

Arith.

Ecrit.

Total

A/20

12

2

9

11

7

4

3

1

49

B/19

7

10

11

11

5

1

4

5

54

C/18

4

2

1

4

2

5

2

1

21

D/17

4

13

10

10

12

7

10

6

72

E/16

6

3

2

3

1

3

1

2

21

F/15

9

10

6

3

7

5

1

7

49

Total A-F

42

40

39

42

34

25

21

22

 

G/14

 

 

 

 

 

 

 

 

 

H/13

 

 

 

 

 

 

 

 

 

I/J/12

 

 

 

1

1

 

 

 

 

K/11

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Total G-K

0

0

0

1

1

0

0

0

0

L/10

4

7

5

2

4

5

3

6

36

M/09

1

1

2

2

2

5

1

2

16

N/08

2

2

 

1

2

4

5

3

19

O/07

2

2

2

 

2

1

 

1

10

P/06

 

1

 

2

1

2

1

2

9

Q/5

 

 

2

1

3

10

10

2

28

Total L-Q

9

13

11

8

14

27

20

16

 

R/4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

S/3

 

2

1

 

 

1

1

 

5

T/2

 

 

 

 

 

 

 

 

 

U/V/1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Z/0

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Total R-Z

0

2

1

0

0

1

1

0

5

Total

51

53

51

51

49

53

42

38

 

 

En somme les 4/5 des frères et aspirants évalués ont une conduite et un savoir catéchétique satisfaisants, mais, dans les disciplines profanes, ils sont seulement 50 % à donner satisfaction. Ils sont meilleurs religieux catéchistes que maîtres d’école. Quant à ceux qui ne sont pas évalués, un peu plus de 10, ils sont encore trop peu connus ou leur ancienneté (F.Régis…) rend inutile une évaluation. Pour les matières profanes, en particulier l’arithmétique et l’écriture (en fait la calligraphie) ils ont été jugés incapables de concourir ou bien, ce qui revient au même, leur résultat est nul. Dans l’ensemble la maîtrise de la « science » (probablement lire-écrire-compter) est relativement assurée, mais des disciplines plus techniques demeurent des problèmes pour beaucoup.

 

Qualité religieuse individuelle et collective

Ce tableau nous permet de faire émerger des profils individuels en tentant une évaluation chiffrée de chacun. Dans le tableau ci-dessous je focalise l’attention sur l’évaluation morale et religieuse des frères. Par commodité j’ai établi un classement. Un fond gris souligne les notes médiocres ou basses.

 

 

Nom

Piété

Caté

Carac

Soumi

Régul

Total

100

1

f. François

A/20

A/20

A/20

A/20

A/20

100

2

f. Antoine

A/20

B/19

A/20

A/20

A/20

99

3

f. Etienne

A/20

B/19

B/19

A/20

A/20

98

4

f. Jean Marie

A/20

C/18

A/20

A/20

A/20

98

5

f. Damien

A/20

B/19

B/19

B/19

A/20

97

6

f. Arsène

A/20

D/17

A/20

B/19

B/19

95

7

f. Jean-Pierre

B/19

B/19

D/17

B/19

A/20

94

8

f. Antoine

A/20

D/17

A/20

B/19

C/18

94

9

f. Barthélemy

B/19

B/19

D/17

B/19

B/19

93

10

f. Laurent

A/20

B/19

B/19

A/20

F/15

93

11

f. Paul

A/20

B/19

D/17

A/20

D/17

93

12

f. Charles

B/19

D/17

B/19

A/20

D/17

92

13

f. Mathieu

CF/18

-15

CF/18

-15

B/19

C/18

CF/18

-15

91-

82

14

f. Sylvestre

C/18

E/16

B/19

B/19

B/19

91

15

f. Cyprien

B/19

E/16

B/19

D/17

B/19

90

16

f. Louis

A/20

A/20

A/20

A/20

L/ 10

90

 

 

 

 

 

 

 

 

17

f. Anselme

B/19

D/17

D/17

C/18

C/18

89

18

f. J. Baptiste

F/15

B/19

B/19

B/19

D/17

89

19

f. Augustin

E/16

D/17

B/19

B/19

D/17

88

20

f. Lucien

D/17

B/19

D/17

D/17

D/17

87

21

f. C. Michel

E/16

D/17

B/19

D/17

D/17

86

22

f. Alexandre

B/19

D/17

A/19

A/20

A/20

86

23

f. Gébuin

A/20

N/08

A/20

A/20

F/15

83

24

f. Gonzague

D/17

F/15

CF/18

-15

B/19

B/19

85-88

25

f. Jean

B/19

B/19

D/17

D/17

L/10

82

 

 

 

 

 

 

 

 

26

J. f. Bouchet

C/18

D/17

D/17

C/18

M/09

79

27

f. Pierre

E/16

O/07

B/19

B/19

D/17

78

28

F. Basile

A/20

N/08

D/17

D/17

F/15

77

29

f. Ambroise

E/16

L/10

D/17

E/16

D/17

76

30

f. Félix

L/10

D/17

D/17

E/16

E/16

76

31

f. Abel

D/17

F/15

L/10

D/17

D/17

76

32

f. Victor

F/15

C/18

L/10

D/17

F/15

75

33

f. Théodoret

F/15

D/17

A/20

C/18

Q/05

75

34

f. Joachim

F/15

D/17

F/15

D/17

L/10

74

35

f. Gabriel

F/15

D/17

F/15

J/12

I/12

71

36

f. Bernard

F/15

D/17

F/15

CF/18-

15

O/07

72-

69

37

f. Isidore

C/18

L/10

M/09

D/17

D/17

71

38

f. Vincent

F/15

S/03

C/18

B/19

F/15

70

 

 

 

 

 

 

 

 

39

f. Hilarion

F/15

E/16

L/10

L/10

F/15

66

40

f. Nilamon

L/10

F/15

O/07

F/15

D/17

64

41

F. Bruno

L/10

F/15

F/15

F/15

N/08

63

42

f. Dominique

L/10

L/10

L/10

F/15

D/17

62

43

f. Xavier

D/17

L/10

E/16

P/06

L/10

59

 

 

 

 

 

 

 

 

44

f. Lazard

N/08

P/06

L/10

L/10

Q/05

39

45

f. Dosité

O/07

O/07

Q/05

M/09

N/08

36

46

f. Clément

M/09

L/10

Q/05

Q/05

P/06

35

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Gab. Thomasson

F/15

 

 

 

 

 

 

Cl. Dumaître

 

S/03

 

 

 

 

 

f. J. François

O/07

L/10

 

P/06

Q/05

 

 

f. André

N/08

L/10

F/15

N/08

 

 

 

Alex. Vebre

 

M/09

 

M/09

 

 

 

f. Bernardin

 

 

F/15

F/15

F/15

 

 

f. Maxime

 

F/15

E/16

E/16

O/07

 

 

Fr. f. Chérubin

 

F/15

S/03

D/17

M/09

 

 

Pierre Bonnevie

C/18

F/15

M/09

A/20

 

 

 

f. Régis

 

 

 

 

 

 

 

/f. Philippe

 

 

 

 

 

 

 

/ f. Jérôme

 

 

 

 

 

 

 

/Jh. M. Beaujeux

E/16

F/15

O/07

 

 

 

 

/J.M. Chavanot

E/16

F/15

 

 

 

 

 

J. Toucheboeuf

 

F/15

 

 

 

 

 

Frères évalués

51

56

51

54

50

 

 

Moyenne

16,4

14,3

15,5

16,1

14,7

 

 

C’est donc un bilan satisfaisant que reconnaît le P. Champagnat puisque 43 frères pourraient être classés comme allant d’assez satisfaisant (59-75) à excellent (90-100). Et seulement trois frères sont considérés comme insuffisants. Mais bien des frères ou aspirants qui n’ont qu’une appréciation partielle pourraient être classés dans ce dernier groupe. Certains disparaîtront des listes par renvoi ou sortie mais d’autres comme les F. Dominique ou Hilarion feront une longue carrière dans l’institut en dépit d’un tempérament passablement original dont le F. Avit se fera l’écho dans ses Annales des maisons. Quant aux Frères modèles, le F. François bat tous les records et nous comprenons pourquoi le P.Champagnat l’appelle auprès de lui : dès 1828 il est le parfait disciple. Le F. Jean-Baptiste (89/10) et surtout le F. Jean-Marie (98/100) présentent aussi un bilan flatteur. Ces frères obtiendront un grand nombre de voix en 1839 lors de l’élection du directeur général [19]:

-                  F. François : 87/92

-                  F. Jean-Baptiste : 57/92

-                  F. Jean-Marie : 45/92

Mais nous avons la surprise de trouver un F. Louis, pourtant le premier disciple, noté comme médiocrement régulier et donc, pour cela, relégué au 16° rang. Et en 1839 i n’aura que quelques voix.Je tenterai plus loin une explication de cette apparente anomalie.

 

Degré d’instruction

Le classement des résultats intellectuels se révèle assez différent de celui des vertus.

N°.

Frère

Science

Arithm.

Ecriture

Total/60

Niveaux excellent

1

/f. Louis

A/20

A/20

B/19

59/60

2

/f.François

A/20

B/19

B/19

58

3

/f. Michel

B/19

B/19

CF/18-15

56/53

4

/f. Barthélemy

C/18

B/19

B/19

56

5

/f. Lucien

A/20

D/17

B/19

56

6

/f. Damien

C/18

A/20

D/17

55

Niveau très satisfaisant

7

/f. Bernard

CF/18-15

E/16

A/20

54/51

8

/f. J. Baptiste.

D/17

B/19

C/18

54

9

/f. Etienne

A/20

C/18

F/15

53

10

/f. Arsène

D/17

A/20

E/16

53

11

/f. Augustin

C/18

D/17

CF/18-15

53/50

12

/ f. Antoine

C/18

D/17

D/17

52

13

/f. Jean-Pierre

C/18

D/17

D/17

52

14

/f. Jean Marie

D/17

D/17

D/17

51

Niveau satisfaisant

15

/f. Gabriel

D/17

D/17

F/15

49

16

/f. Jean

F/15

D/17

ET[20]/16-15

48/47

17

/f. Cyprien

E/16

D/17

F/15

48

18

/f. Laurent

F/15

F/15

F/15

45

19

/f. Hilarion

D/17

D/17

L/10

44

20

/f. Gonzague

D/17

L/10

D/17

44

Niveau assez satisfaisant

21

/f. Dominique

E/16

L/10

F/15

41

22

/f. Nilamon

E/16

N/09

F/15

40

23

/f. Abel

Q/05

D/17

D/17

39

24

/f. Paul

L/10

C/18

L/10

38

25

/f. J. François

L/10

N/08

FC/18-15

36/33

Niveau médiocre

26

/f. Mathieu

F/15

N/08

LM/10-09

33/32

27

/f. Félix

M/09

Q/05

B/19

33

28

/f. Antoine

L/10

Q/05

F/15

30

29

/J. f. Bouchet

D/17

S/03

M/09

29

30

/f. Joachim

M/09

M/09

L/10

28

31

/Pierre Bonnevie

F/15

Q/05

N/08

28

Niveau insuffisant

32

/f. Victor

L/10

N/08

M/09

27

33

/f. Dosité

Q/05

L/10

L/10

25

34

/f. Alexandre

L/10

Q/05

L/10

25

35

/F. Bruno

N/08

N/08

N/08

24

Très insuffisant

36

/Fr. f. Chérubin

M/09

Q/05

Q/05

19

37

/f. Ambroise

O/07

Q/05

P/06

18

38

/f. Xavier

Q/05

Q/05

P/06

16

Evaluations partielles ou inexistantes

 

/f. Régis

 

 

 

 

 

/f. Pierre

Q/05

 

 

 

 

/f. Lazard

Q/05

 

O/07

 

 

/f. Philippe

 

 

 

 

 

/f. Anselme

 

 

 

 

 

/f. Charles

F/15

 

L/10

 

 

/f. André

 

 

 

 

 

/f. Vincent

Q/07

X/ ?

EQ/16 ?

 

 

/f. Bernardin

 

 

 

 

 

/f. Théodoret

M/09

 

ON/08-07

 

 

/f. Clément

P/06

P/06

ZN/ ?[21]

 

 

/f. Sylvestre

M/09

Q/05

ZE/ ?

 

 

/f. Maxime

N/08

O/07

ZQ/ ?

 

 

/ f. Jérôme

 

 

 

 

 

/f. Gébuin

Q/05

 

 

 

 

/F. Basile

Q/05

 

 

 

 

/f. Isidore

N/08

Q/05

E/16

 

 

/Jh. M. Beaujeux

Q/05

 

 

 

 

/J.M. Chavanot

S/03

 

N/08

 

 

J. Toucheboeuf

M/09

 

Q/05

 

 

/Cl. Dumaître

 

 

 

 

 

/Alex. Vebre

P/06

 

 

 

 

/Gab. Thomassou

Q/05

 

 

 

 

Frères évalués

54

41

45

 

 

Moyenne

12, 05

12,4

13,4[22]

 

 

Si par « science » nous entendons les connaissances de base dont la lecture est le pilier, nous aurions 26 frères de bon niveau (A-F ou 15 à 20) dont les F. Louis, François et Jean-Baptiste ; 14 de niveau médiocre (L-N ou 8 à 10) ; et 14 (O-S ou 7-3) de niveau nettement insuffisant. Une situation tout à fait semblable se retrouve avec l’arithmétique et l’écriture. Le résultat est donc mitigé. Un regard optimiste constate l’existence d’une certaine élite avoisinant les 30 % ; un regard pessimiste constatera que plus de la moitié des frères et novices sont de niveau insuffisant ou très insuffisant.

 

Dégagement d’une élite

 

Finalement, en groupant le tableau des items religieux et intellectuels nous pouvons établir les groupes de niveau suivants. Evidemment, dans bien des cas, niveau religieux (à gauche) et niveau intellectuel (à droite) ne coïncident pas.

 

Nom

Total/

100

N°.

Frère

Total/

60

Niveau excellent

1

f.François*[23]

100

1

/f. Louis

59/60

2

f. Antoine

99

2

/f.François

58

3

f. Etienne*

98

3

/f. Michel

56/53

4

f. Jean Marie*

98

4

/f. Barthélemy

56

5

f. Damien*

97

5

/f. Lucien

56

6

f. Arsène*

95

6

/f. Damien

55

7

f. Jean-Pierre*

94

7

/f. Bernard

54/51

8

f. Antoine*

94

8

/f. J. Baptiste.

54

9

f. Barthélemy*

93

9

/f. Etienne

53

10

f. Laurent

93

10

/f. Arsène

53

11

f. Paul

93

11

/f. Augustin

53/50

12

f. Charles

92

12

/ f. Antoine

52

13

f. Mathieu

91-

82

13

/f. Jean-Pierre

52

14

f. Sylvestre

91

14

/f. Jean Marie

51

Très satisfaisant

15

f. Cyprien*

90

15

/f. Gabriel

49

16

f. Louis

90

16

/f. Jean

48/47

17

f. Anselme

89

17

/f. Cyprien

48

18

f. J. Baptiste

89

18

/f. Laurent

45

19

f. Augustin

88

19

/f. Hilarion

44

20

f. Lucien

87

20

/f. Gonzague

44

21

f. C. Michel

86

21

/f. Dominique

41

22

f. Alexandre

86

22

/f. Nilamon

40

23

f. Gébuin

83

 

 

 

24

f. Gonzague

85-88

 

 

 

25

f. Jean

82

 

 

 

Satisfaisant

26

J. f. Bouchet

79

23

/f. Abel

39

27

f. Pierre

78

24

/f. Paul

38

28

F. Basile

77

25

/f. J. François

36/33

29

f. Ambroise

76

 

 

 

30

f. Félix

76

 

 

 

31

f. Abel

76

 

 

 

32

f. Victor

75

 

 

 

33

f. Théodoret

75

 

 

 

34

f. Joachim

74

 

 

 

35

f. Gabriel

71

 

 

 

36

f. Bernard

72-69

 

 

 

37

f. Isidore

71

 

 

 

38

f. Vincent

70

 

 

 

Médiocre

39

f. Hilarion

66

26

/f. Mathieu

33/32

40

f. Nilamon

64

27

/f. Félix

33

41

F. Bruno

63

28

/f. Antoine

30

42

f. Dominique

62

 

 

 

43

f. Xavier

59

 

 

 

Insuffisant

 

 

 

29

/J. f. Bouchet

29

 

 

 

30

/f. Joachim

28

 

 

 

31

/Pierre Bonnevie

28

 

 

 

32

/f. Victor

27

 

 

 

33

/f. Dosité

25

 

 

 

34

/f. Alexandre

25

 

 

 

35

/F. Bruno

24

Très insuffisant

44

f. Lazard

39

36

Fr. f. Chérubin

19

45

f. Dosité

36

37

/ f. Ambroise

18

46

f. Clément

35

38

/ f. Xavier

16

 

Si l’on se fie à ce tableau le P. Champagnat disposerait d’une trentaine de Frères religieusement solides et professionnellement compétents.

 

Une nouvelle étape dans la structuration de l’institut

Rappelons donc quelques grands acquis de cette étude. Tout d’abord, du début de 1817 à la fin de 1828, le noviciat a accueilli environ 130 aspirants. Sans doute à la fin de l’année 1828[24], le P. Champagnat tente une évaluation de la plupart de ses disciples, dont le total s’élève à environ 70, dont les 2/3 religieusement bien formés, et la moitié professionnellement capables. Les critères d’évaluation soigneusement hiérarchisés nous révèlent les idées de Champagnat sur le type d’homme à la fois pieux et instruit qu’il veut former.

Ce système d’évaluation apporte sur les individus des éléments qualitatifs complémentaires de ce que la tradition nous apprend d’eux. Ainsi nous avons vu que, dès 1828, le F. François est considéré comme le disciple à peu près parfait. Et c’est dans le groupe des Frères en tête de classement que Champagnat choisira ses collaborateurs proches.

 

Des réserves sur le F. Louis

Il est temps de revenir sur le cas du F. Louis à la régularité très sujette à caution qui le relègue au 16° rang de l’examen. Cette appréciation mitigée de 1828 contribue à expliquer pourquoi en 1839 le F. Louis ne sera élu ni Directeur général ni même assistant. Le F. Avit signale même que, sur 92 suffrages exprimés, il n’a eu que quelques voix[25]. Son âge n’est pas en cause : à la fin de 1839 il a trente-sept ans. D’autres raisons ont poussé les électeurs à délaisser sa candidature. Sa notice biographique (Lettres II p. 339-340) peut expliquer partiellement ce fait : de 1818 à 1836 il est peu présent auprès du Fondateur. Fixé ensuite à L’Hermitage, il y exerce un emploi relativement subalterne (Annales, 1838, § 387) de « libraire et maître des cérémonies. De plus il donnait des leçons de civilité ». Au même moment, le F. François est le bras droit du P. Champagnat et le F. Jean-Baptiste l’aide à gouverner tout en faisant des conférences aux Frères et aux novices (Annales, 1838, § 385). Il est également frappant de constater que le long récit de la maladie et de la mort du P. Champagnat ne parle pas du F. Louis, alors qu’il est présent à NDH.

Si l’on y prend garde, le F. Jean-Baptiste, dans la Vie du P. Champagnat, nous offre du F. Louis une image un peu problématique : en 1818 (ch. XV) il refuse les changements préconisés par J.M. Granjon et Champagnat ; en 1824 il accompagne M. Courveille pour la fondation de Charlieu ; en 1826-28 il est tenté par la prêtrise[26]. Son rôle aux origines et sa relation à Champagnat sont donc plus complexes que ne l’a retenu la tradition de l’institut.

Mais la raison fondamentale de cette sorte de disgrâce devient manifeste lorsque nous constatons que, lors de l’élection d’un Directeur général en 1839, le F. Louis ne figure pas au premier rang d’ancienneté mais seulement au 10°, juste avant le F. Jean-Baptiste.

Préséance

Frère

Date de vêture

Voeux perpétuels

Nb. de voix

1er

f. Antoine / Couturier

1819

1826

 

2

f. Laurent / Audras

1819

1826

 

3

f. François / Rivat

1819

1826

87

4

f. Stanislas / Fayol

1822

1826

 

5

f. Joseph/ Poncet

1822

1826

 

6

f. Paul/ Préher

1823

1826

 

7

f. Etienne/ Poinard

1824

1826

 

8

f. Damien/ Mercier

1825

1826

 

9

f. Jn-Pierre/ Deville

1825

1826

 

 

 

 

 

 

10

f. Louis/ Audras

1817

1828

 

11

f. Jn-Baptiste/Furet

1822

1828

57

12

f. Barthelemi/ Badard

1819

1828

 

13

f. Hilarion/ Girard

1822

1828

 

14

f. Jn-Marie/ Bonnet

1826

1828

48

15

f. Hippolyte/ Remillieux

1826

1828

 

16

f. Matthieu/ Dérisoud

1828

1829

 

 

 

 

 

 

35

f. Louis-Marie

1832

1834

70

 

L’explication est simple : le F. Louis n’a pas fait ses vœux perpétuels en 1826, comme les neuf Frères qui le précèdent, mais seulement le 8 septembre 1828, en même temps que le F. Jean-Baptiste Furet, qui n’a pas fait preuve non plus de beaucoup d’empressement. D’ailleurs, lorsqu’il évoque ces vœux de 1826 au chapitre 15 de la Vie, il justifie le retard du F. Louis à s’engager[27] (et dans une certaine mesure le sien) et sous-estime grandement l’instauration de ces vœux vécus comme une véritable refondation.

La tentation du sacerdoce, dont parle le F. Jean-Baptiste, n’est sans doute qu’une partie de l’explication de ses vœux retardés. En fait, entre 1826 et 1828 il y a eu crise entre les Frères les plus anciens (et les directeurs ?) et Champagnat sur la forme à donner à l’oeuvre[28]. L’affaire de la soutane cousue, des bas de drap et de la méthode de lecture n’en est que la phase finale. Aussi, l’appréciation réservée du P. Champagnat sur la régularité du F. Louis en 1828 manifesterait discrètement une divergence entre eux. Comme, à cette date le F. Louis figure toujours comme le Frère le plus ancien, c’est entre 1828 et 1839 que, quoique reconnu comme acteur majeur d’une première phase de l’œuvre des Frères, mais n’ayant pas su prendre la tête de sa refondation en 1826[29], il s’est trouvé relativement marginalisé. C’est seulement après sa mort (1847) que le F. Jean-Baptiste, dans la Vie de Champagnat (1856) puis les Biographies de quelques frères, saura le présenter comme un modèle d’esprit mariste.

F. André Lanfrey novembre 2017

 



[1] OFM2/142. Le titre est « registre des inscriptions », de 1822 à 1848 (281 p.).

[2] Un accord officieux : les statuts synodaux de Lyon interdisent les nouvelles congrégations diocésaines.

[3] Le brevet est alors à trois degrés.

[4] Voir dans Annales de l’institut (1829, § 103) le résumé de sa vie

[5] Il entre à L’Hermitage en 1826 comme pensionnaire. Sa pension est payée par son oncle, vicaire général. Il n’est pas porté sur le registre des vêtures, très incomplet.

[6] Il a dû sortir rapidement. Voir sur son entrée : OFM2/142/12

[7] Voir OM1/142.122

[8] C’est particulièrement le cas pour Jean Cholleton, neveu du vicaire-général, au parcours très spécifique (Annales, 1829, § 103).

[9] Lettres de Champagnat, T. 1, n° 11, 18/12/1828. A cette époque le Frère maître des novices semble être surtout le modèle et le surveillant des novices.

[10] Ou Antoine.

[11] Il est difficile de savoir si « Chérubin » est un nom de famille ou de frère.

[12] Il avait sans doute été oublié dans la liste.

[13] Cela peut venir d’une lecture fautive de l’original.

[14] Ce n’est pas François Touchebeuf, (F.Joachim) adims en 1826 et prenant l’habit en 1827.

[15] Le document OFM 143.7 indique un Mario Beaujeu admis le 9 juillet 1828.

[16] Entré en 1821, puis sorti, il revient en 1827. (OFM3/652)

[17] Le 11° nom, (F.Benoît) est intéressant à cause de ses dates d’admission et de vêture. Entré le 19 mai 1828, il ne figure pas parmi les postulants, ce qui suggère que la liste a été faite avant cette date, peut-être suite à des examens des vacances de 1827.

[18] Tailleur à NDH. Voir dans A.L.S. le chapitre XVI : « Frère Hyppolite avec sa lampe ».

[19] Annales de l’institut, t. 1,1839, § 521.

[20] Il s’agit plutôt de EF.

[21] Il faut sans doute interpréter ces trois notes ZN, ZQ et ZE comme essayant de différencier le niveau de frères ne sachant à peu près pas écrire, ce qui serait cohérent avec les deux autres rubriques qui mettent en évidence des frères maîtrisant très mal le lire et le compter.

[22] En comptant les rubriques ZN, ZQ et ZE on aurait 48 noms et la moyenne serait de 12, 6.

[23] L’astérisque indique que le frère est aussi présent dans unautre groupe de niveau.

[24] L’évaluation de Champagnat pourrait reposer sur les rencontres avec les frères au cours des vacances et de la retraite de 1827.

[25] Il est vrai qu’il a été nommé scrutateur. Mais c’était une fonction surtout honorifique.

[26] Sa présence lors de cette fondation pose le problème de l’adhésion à la stratégie de M. Courveille qui veut non seulement fonder une école mais établir une maison missionnaire et un noviciat de frères. Sa tentation de devenir prêtre paraît liée à la situation trouble de 1826 et à l’échec de M. Courveille qui suscitent le départ de J.M. Granjon et d’Etienne Roumésy. (Vie 1° partie ch. 14)

[27] Il rappelle ses réticences de 1818 devant une modification de l’engagement.

[28] Les vœux font passer l’institut du statut d’association à celui de congrégation.

[29] Dans le registre des vœux perpétuels, son nom figure en premier, comme si tout avait été prêt pour qu’il y inscrive le procès-verbal de son engagement en 1826.

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