08/Nov/2019 FRANCE

Vie toute donnée en « prophète de la fraternité

Suite à la « Journée Henri Vergès » à Espira-de-l’Agly, le 8 mai, rendez-vous avait été pris pour un autre temps-fort à Matemale, village natal de notre Bienheureux Frère. Le samedi, 26 octobre, Mgr Turini, évêque de Perpignan, et Frère Pere Ferré, Provincial, ont d’abord dévoilé une nouvelle plaque commémorative…

Au cours de la messe d’action de grâce, Frère Georges Cellier, dans le cadre de « l’homélie » a souligné quelques traits caractéristiques de cet « Enfant du Capcir » (intériorité, simplicité, esprit de service, vie toute donnée en « prophète de la fraternité »). Le repas rassemblait une trentaine de convives dans la salle prêtée par la mairie…

Dans l’après-midi, des vidéos et des témoignages (notamment celui de Pierre Vergès) ont permis une meilleure connaissance d’Henri, « vrai Petit Frère de Marie ». Un merci tout spécial à Mgr Turini et à la fraternité « El Ribât » d’Espira qui s’est largement investie dans la préparation de cette rencontre : temps festif et chaleureux. « Dieu soit loué », aurait dit Henri !

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Homélie pour la messe en l’honneur du Fr. Henri Vergès

(Je compte sur votre indulgence… Ne soyez pas étonnés que mon propos s’adresse à notre bon Frère Henri – je considère comme une grâce d’avoir cheminé avec lui pendant six ans – pour moi, il est présent mais autrement.)

Frère Henri, une plaque vient d’être dévoilée à l’entrée de l’église de ton baptême ; Certes, elle ne manquera pas d’attirer l’attention, mais quel mystère recouvre-t-elle ?

Quelques notes biographiques et les textes de la liturgie de ce jour fourniront des éléments de réponse. Toi, l’enfant du Capcir, mystique au sens noble du terme, et philosophe, tu as vite saisi que toute vie humaine paraît inachevée. Aussi, dans ta quête d’Absolu, dans ta faim de plénitude, tu as creusé au plus profond de toi-même pour réveiller ce « Don de Dieu » jaillissant en source de vie éternelle. Pour toi, « réussir dans la vie » n’était pas à l’ordre du jour … l’Esprit d’Amour t’a donné non seulement de réussir ta vie mais surtout de l’accomplir !

Je te vois maintenant dans cette foule immense dont il est question dans cette péricope de l’Apocalypse (à noter que l’Apocalypse est avant tout révélation, message d’espérance ; aujourd’hui : de la victoire de l’Amour !).

Comme tant de martyrs tu as purifié ton vêtement dans le sang de l’Agneau : c’est-à-dire tu as revêtu le Christ. Non seulement tu avais la prière, mais tu étais devenu prière ; et par cette Parole « nourriture et Présence », tu avais appris à t’identifier à ton Seigneur, à le connaître pour mieux le reconnaître en ceux vers lesquels tu étais envoyé.

Comme le Fils de l’homme, la veille de sa Passion, tu avais pris la tenue de service en fidèle ouvrier de cette Eglise du tablier. Tu n’aimais pas en paroles mais en actes : « plus vraie une parole que je vis qu’une parole que je dis ! ». Par l’attention aux enfants pauvres de Belcourt, le souci de la réussite des élèves en difficultés à Sour el Ghozlane, la disponibilité auprès des étudiants de Ben Cheneb, l’accueil de réfugiés, l’aide et l’accompagnement de personnes éprouvées … tu as mis en pratique le grand commandement de l’amour : « Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés. »  Pour que chaque rencontre devienne « Visitation », tu as eu souci de te faire proche par l’inculturation et la connaissance approfondie de l’Islam.

Dans ce « vivre avec », cher à Marcellin Champagnat, tu avais ressenti que l’Esprit était à l’œuvre bien au-delà de nos « frontières » culturelles ou religieuses.

Avec saint Jean tu pouvais dire « Ceux qui aiment sont nés de Dieu »…

Dans cette filiation, toute fraternité trouve et son origine et son sens. Membre actif du Ribat es Salam (ce lien de la paix ), tu avais créé des ponts en ardent défenseur du « vivre ensemble ». Dans l’humilité et cette simplicité qui te caractérisait, tu distillais jour après jour cet amour du prochain, en véritable témoin de l’espérance.

Mais dans un monde en effervescence, en proie aux replis communautaristes, les prophètes de la fraternité dérangeaient… L’Eglise d’Algérie, devait effectuer un profond discernement. Nombre de religieux, solidaires de ce peuple martyrisé par la guerre civile, ont fait le choix de rester … Tu savais que ta vie était menacée, mais ta vie tu l’avais déjà donnée… Dans ta lettre du 4 février 1994, à Christian de Chergé, tu écrivais « Dans nos relations quotidiennes, prenons ouvertement le parti de l’amour, du pardon, de la communion contre la haine, la vengeance, la violence… ». Comme le Seigneur ton Maître, et comme le feront par la suite les 18 autres martyrs d’Algérie, tu es allé jusqu’au bout de l’amour : « Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. »

Le 8 décembre dernier, l’Eglise célébrait la béatification des 19 religieux martyrs d’Algérie. Sang versé, vies données, mais chacune avec sa spécificité. Toi, Henri, le « Mariste de Champagnat », tu avais su vivre selon le cœur de Marie. Ton cœur ?

un cœur transparent comme une source ; un cœur tout empreint de simplicité ; un cœur rayonnant de la joie de Celui qui t’habitait ;  un cœur compatissant et puis-je ajouter : un cœur façonné, ciselé par l’Esprit d’Amour… Cet Esprit qui t’a donné d’écrire le bel Evangile de ta vie ! Toi, le « Petit Frère de Marie » tu es « Grand », plutôt tu as grandi, car tu as su t’ouvrir au soleil de Dieu : et comme tu l’écrivais si bien tu as « été la petite fleur épanouie où Dieu l’a transplantée sur la terre des hommes, mais toujours irriguée par l’eau vive de l’Esprit. En tout et toujours tu as été « oui » par et dans le « oui » de Jésus, comme la Vierge Marie. » …

Pour toutes ces vies données, pour la tienne en particulier si généreusement offerte, (le psaume 30 ne dit-il pas : «En toi, Seigneur, j'ai mon refuge….

En tes mains je remets mon esprit ») laisse-moi redire avec toi ces trois mots si chers à ton cœur :

« Dieu soit loué ! »

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