Alain Bégay
Le Seigneur a accueilli dans la paix de sa maison FrĂšre Alain BĂGAY dĂ©cĂ©dĂ© le mercredi 5 janvier 2022, Ă lâĂąge de 78 ans, dont 60 ans de profession religieuse. Le FrĂšre Provincial des FrĂšres Maristes, les FrĂšres de la Province LâHermitage, la communautĂ© de Saint Genis-Laval, sa famille et ses amis, vous invitent Ă les rejoindre par la priĂšre. Ses funĂ©railles seront cĂ©lĂ©brĂ©es le jeudi 13 janvier 2022, Ă 15 heures, Ă la chapelle des FrĂšres de Saint Genis-Laval (Le Montet), et seront suivies de lâinhumation au cimetiĂšre de la communautĂ©.
Contrairement Ă la plupart des FrĂšres Maristes français, dâorigine rurale, Alain, nĂ© Ă la fin de 1943, vit ses premiĂšres annĂ©es Ă Lyon, puis Ă Villeurbanne (cours TolstoĂŻ), prĂšs de lâactuelle maison provinciale. Son pĂšre est agent commercial dans les mĂ©tiers du textile. Câest trĂšs tĂŽt quâil perd sa mĂšre ; et cet Ă©vĂ©nement contribue Ă expliquer chez lui une extrĂȘme sensibilitĂ© qui lui rendra difficile la vie communautaire. Il termine ses Ă©tudes primaires au pensionnat de Neuville-sur-SaĂŽne oĂč il apprĂ©cie particuliĂšrement lâenseignement de FrĂšre DĂ©chenaud. Puis il suit, Ă Saint Genis-Laval, sans Ă©clat ni difficultĂ© particuliers, la formation habituelle pour devenir FrĂšre Mariste, dâabord au juvĂ©nat (en 1955-59), puis au noviciat (1959-61), pour finir ses Ă©tudes au scolasticat en 1961-63, annĂ©es oĂč il anime le patronage de la paroisse. Il exerce deux ans au pensionnat de PĂ©lussin comme professeur en classe de 6°. TrĂšs dynamique, il rĂ©ussit bien dans son enseignement, mais voudrait rĂ©aliser un rĂȘve qui le possĂšde depuis son adolescence : devenir missionnaire. Aussi, dĂšs 1966, il sâenvole pour la RĂ©publique Centrafricaine oĂč il enseigne dâabord, de 1966 Ă 1971, au collĂšge (C.E.G.) de BerbĂ©rati, puis, de 1971 Ă 1973, au petit sĂ©minaire diocĂ©sain Saint AndrĂ©, qui sâest installĂ© dans les locaux occupĂ©s par le collĂšge Ă Berberati, il achĂšve sa formation professionnelle en passant le CAP dâinstituteur (1968) et en satisfaisant Ă ses obligations militaires (coopĂ©ration). Ses activitĂ©s sont multiples : il est plus spĂ©cialement professeur de français et de dessin. DouĂ© pour les arts graphiques, ainsi que dans ce que lâon appelle communĂ©ment « les travaux manuels », il conçoit et rĂ©alise les vitraux de la toute nouvelle Ă©glise du SacrĂ©-CĆur, au centreville de BerbĂ©rati. Il est Ă©galement entraĂźneur de sport (basket). Pour se perfectionner en anglais, il fait, FrĂšre Provincial â 45, rue dâInkermann – 69006 LYON FrĂšres Maristes â 9, rue Francisque Darcieux â 69230 SAINT GENIS-LAVAL en 1969, un stage dâĂ©tĂ© Ă Londres. Il exerce aussi la charge de surveillant. Mais ses activitĂ©s dĂ©vorantes lui posent de sĂ©rieux problĂšmes de santĂ© et favorisent chez lui un style de vie de « baroudeur », si on peut se permettre cette expression, qui ne facilite guĂšre son intĂ©gration communautaire. Peu de temps aprĂšs sa profession perpĂ©tuelle (1971), il est invitĂ© Ă un stage de recyclage spirituel et thĂ©ologique quâil effectue chez les Dominicains, Ă Ăveux, Ă la fin de 1973, avant de partir Ă Dumfries, en Ăcosse, au pensionnat des FrĂšres Maristes oĂč il se perfectionne en anglais, tout en enseignant le français.
AprĂšs un bref temps de formation en mĂ©decine tropicale, il reprend ses activitĂ©s Ă BerbĂ©rati, de 1974 Ă 1978, dans le cadre du sĂ©minaire dirigĂ© par le PĂšre Laurent Bryer, Capucin, dans une ambiance moins favorable : le temps post-colonial est passĂ©, et les initiatives personnelles sont davantage confrontĂ©es aux nĂ©cessitĂ©s dâune bonne organisation ; ce qui ne plaĂźt guĂšre Ă Alain. De retour en Europe, il fait un long stage Ă la maison gĂ©nĂ©ralice Ă Rome, de septembre 1979 Ă juillet 1980, dans le rĂŽle de factotum quâil affectionne : accueil, traduction, photo, et mĂȘme Ă©tudes de missiologie Ă lâuniversitĂ© grĂ©gorienne, et, bien sĂ»r, apprentissage de lâitalien.
De retour en France, il cherche Ă se rĂ©intĂ©grer dans lâenseignement secondaire ; mais cette voie lui est barrĂ©e, du fait que, parti trĂšs tĂŽt en Centrafrique, il nâa jamais enseignĂ© sous contrat. Il a dĂ©sormais besoin dâune licence. Quoique relativement ĂągĂ©, il sâinscrit Ă lâuniversitĂ©, et obtient, en 1982, un DEUG en Lettres et civilisations Ă©trangĂšres. Ces Ă©tudes ne lâempĂȘchent pas de faire des remplacements dans divers collĂšges, et de participer Ă des animations durant les vacances scolaires, par exemple en accompagnant des sĂ©jours linguistiques (Irlande, 1981) ou dans le domaine quâil affectionne : les activitĂ©s manuelles dâart. Mais elles lâincitent Ă cĂ©der, une fois de plus, Ă lâimpatience, et Ă renoncer Ă un cadre trop contraignant pour lui. Il renonce Ă sa troisiĂšme annĂ©e dâuniversitĂ© qui, par lâacquisition de la licence, lui aurait permis de rĂ©intĂ©grer lâenseignement.
Ă partir de 1982, basĂ© Ă la maison de Saint Genis-Laval dont il partage peu la vie quotidienne, il exerce au Foyer Notre-Dame des Sans Abri, intervenant dans lâaccueil et lâanimation des jeunes, dans la formation des Ă©ducateurs (BAFA), ainsi que comme travailleur social dans les quartiers difficiles de Villeurbanne, Irigny, et Vaulx en Velin.
Comme lâInstitut a besoin dâun FrĂšre Ă Bangui pour renforcer la communautĂ© et assurer des services Ă lâarchevĂȘchĂ©, alors sous la responsabilitĂ© de Mgr Joachim Ndayen, Alain quitte les Sans Abri en 1988, et devient chancelier du diocĂšse. Câest un poste quâil va particuliĂšrement affectionner et dont il restera trĂšs fier ; mais, comme dâhabitude, il aura du mal Ă concilier ce travail avec la vie communautaire.
Il rentre en France en 1995, et il est nommĂ© Ă Saint Genis-Laval. Ne pouvant sâengager dans lâenseignement, il assure deux emplois : un service de nuit Ă lâinfirmerie, et, de 1995 Ă 1998, un mi-temps dans lâorganisme Service de CoopĂ©ration au DĂ©veloppement (SCD), chargĂ© de la prĂ©paration et du suivi de volontaires en Afrique. Il participe Ă lâorganisation de stages pour les partants et fait des voyages de suivi auprĂšs dâeux, notamment Ă Madagascar et en CĂŽte dâIvoire. Mais le SCD doit rĂ©duire ses activitĂ©s, et Alain passe, en 1998, Ă la Pastorale des migrants du diocĂšse de Lyon, oĂč il est chargĂ© des migrants et des prĂȘtres dâorigine africaine. Il exerce encore cette activitĂ© basĂ©e Ă la paroisse Saint Michel (Lyon, 7e arr.) lorsque, en raison du changement de statut de la maison de Saint Genis-Laval, il est nommĂ© Ă la toute petite communautĂ© de Villeurbanne, en 2003.
ĂgĂ© alors de 60 ans, câest un homme Ă©prouvĂ© par de nombreux problĂšmes de santĂ© et des deuils familiaux, qui commence une semi-retraite. Marchant difficilement, il abandonne peu Ă peu ses activitĂ©s extĂ©rieures. Excellent cuisinier, il assure volontiers cette fonction et rĂ©gale volontiers ses invitĂ©s, notamment africains. Heureusement, il reste en relation suivie avec sa sĆur qui habite non loin de la maison. Une partie de son temps est consacrĂ©e Ă classer sa documentation africaine, particuliĂšrement ses nombreuses diapositives et photos. Lorsque la communautĂ© de Villeurbanne ferme, il rejoint celle de Pontcharra-sur-Turdine, au dĂ©but de 2018 ; mais, dĂ©jĂ trĂšs affaibli, il doit faire de nouveaux sĂ©jours en hĂŽpital et finalement rejoindre lâEHPAD de Saint Genis-Laval. HospitalisĂ© Ă plusieurs reprises, depuis octobre 2021, pour des problĂšmes respiratoires, sans diagnostic prĂ©cis, il est ensuite placĂ© en permanence sous oxygĂšne, Ă domicile ; mais des complications ont raison de lui.
Finalement Alain a Ă©tĂ© parmi nous un personnage atypique : enrichi et, en mĂȘme temps, Ă©prouvĂ© par un grand sens artistique. Il semble que, chez lui, se mĂȘlaient le sens esthĂ©tique, le goĂ»t de lâaction et lâesprit religieux, de telle sorte quâil dĂ©sirait construire autour de lui un impossible milieu Ă la fois rassurant et idĂ©al. Ce nâest pas quâil manquait de rĂ©alisme, mais sa sensibilitĂ© exacerbĂ©e le poussait Ă beaucoup exiger des autres, tout en lâempĂȘchant dâapprofondir les voies quâil tentait dâexplorer. Nous espĂ©rons que, maintenant, il a enfin trouvĂ© en Dieu ce quâil a cherchĂ© Ă tĂątons toute sa vie