Circulaires 105

Louis-Marie

1872-07-26

S. Joachim et Sainte Anne. - Annonce des Retraites. - Décès. - Avis sur le ves­tiaire et les finances. - Exposition de Lyon. - Voyages de Famille. - Rapports avec les Enfants. - Dispense militaire conservée. - Actions de grâces à Dieu pour cette faveur

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51.02.01.1872.2

1872/07/26

 V. J. M. J.

 Saint-Genis-Laval, le vendredi, 26 juillet 1872,

Fête de sainte Anne, Mère de la Sainte Vierge.

        Mes très chers Frères,

 C'est sous la protection de saint Joachim et de sainte Anne, père et mère de la Sainte Vierge, que je vous annonce et que je place nos Retraites de cette année.

 Nous avons aujourd'hui la fête de sainte Anne, et bientôt, le dimanche dans l'Octave de l'Assomption, nous aurons la fête de saint Joachim : quels plus puissants et quels plus dévoués protecteurs pourrions-nous invoquer, pour recommander nos Retraites à Marie, et par Marie à Jésus?

 Nous le savons, le grand objet de l'intercession des Saints est le salut des hommes; et, pour nous, le grand moyen de persévérance et de salut que Dieu nous ménage, ce sont nos Retraites annuelles; nous ne pouvons donc douter que les saints parents de notre divine Mère ne soient disposés à nous couvrir, pendant ces pieux exercices, de toute leur protection, afin de nous aider à les bien faire.

 D'autre part, il est évident que saint Joachim et sainte Anne doivent avoir et ont en effet un tout puissant crédit dans le Ciel.

 C'est à eux, dit le P. Crasset, que le Père Eternel doit sa Fille bien-aimée le Verbe Incarné, sa Mère ; l’Esprit-Saint, son Epouse les pécheurs, leur Avocate ; les malheureux, leur Espérance; les Anges et les hommes, leur Reine. Après une telle libéralité faite au Ciel et à la terre, quel refus pourraient-ils craindre pour eux-mêmes?

 Puis, saint Joachim et sainte Anne, ayant pour Fille la Mère de Jésus, et pour petit-fils, Jésus lui-même, évidemment encore, ils peuvent tout auprès de Marie, leur Fille bien-aimée; et, par Marie, tout auprès de Jésus, qui ne peut rien refuser à sa Mère.

 Ajoutons que, dans saint Joachim et sainte Anne, à l'éminence de la dignité se joint, d'une manière extraordinaire, l'éminence de la sainteté : car, après Marie c'est d'eux surtout qu'on peut dire, selon la parole même de Notre-Seigneur, qu'on connaît l'arbre à son fruit. (Matth. XII, 33).

 De même que les grâces excellentes, les perfections admirables et tous les privilèges de Marie, leur Bienheureuse Fille, nous sont révélés et attestés par ce seul mot de l'Evangile : Marie, de laquelle est né Jésus (Matth., I, 16); de même, les mérites, les vertus, les dons merveilleux de grâces et de sainteté qui ont éclaté en saint Joachim et en sainte Anne, nous sont connus et attestés par ce seul fait, que la Bienheureuse Vierge Marie est le fruit béni de leur sainte union, et que Dieu les a faits les ancêtres immédiats du Verbe Incarné.

 Par Marie, ils touchent au mystère de l'Incarnation et y contribuent, d'une manière qui n'appartient qu'à eux ; par Marie aussi, ils en recueillent les fruits anticipés, c'est-à-dire, une abondance de grâces qui n'est propre qu'à eux.

 Non, non, nous ne pouvons avoir trop d'estime, de respect et de vénération pour l'éminente dignité du Père et de la Mère de Marie, la Mère de Jésus; trop d'amour et de dévotion pour leur incomparable sainteté; trop d'espérance et de confiance en leur toute puissante protection.

 Peut-être même que, nous, Petits Frères de Marie, qui faisons profession de porter le nom de la Fille bien aimée de saint Joachim et de sainte Anne, d'être la famille de Marie, ses enfants adoptifs de prédilection, nous n'avons pas assez compris, jusqu'à ce jour, que nous sommes par là même de la famille de ses saints parents ; que nous devons nous regarder aussi comme leurs petits-fils d'adoption, les honorer et les aimer en cette qualité, et les intéresser spécialement à tout ce qui nous concerne, au spirituel comme au temporel.

 C'est cette pensée qui nous a fait demander, cette année, à la Maison-Mère, la Bénédiction du Saint Sacrement pour la fête de sainte Anne. Mon désir est même qu'elle devienne d'usage dans les maisons de Noviciat, et qu'on transfère à ce jour, selon les circonstances, une des communions de la semaine.

 Sainte Anne est presque toujours représentée faisant l'éducation de la Sainte Vierge, lui apprenant à lire, l'élevant et la formant avec des soins parfaits. Qu'est-ce à dire encore, sinon que sainte Anne nous est donnée, de plus, et comme un modèle à suivre dans notre état, et comme une patronne spéciale à invoquer, pour bien élever les enfants qui nous sont confiés?

 Donc, M. T. C. F., excités et encouragés par ces réflexions, que dictent également la foi et la piété, recourons tous et recourons, avec une confiance absolue, à l'intercession de saint Joachim et de sainte Anne, pour obtenir par eux, avec l'aide de Marie, la grâce d'une bonne, d'une excellente Retraite. L'Eglise elle-même nous en donne l'exemple. Dans ses offices, elle joint à l'intercession de Marie l'intercession de ses saints parents, pour solliciter du bon Dieu les plus grandes grâces comme la rémission des péchés et la gloire éternelle (Secrète de la Messe de saint Joachim).

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 Cette année, les Retraites sont fixées ainsi qu'il suit :

 1°Saint-Genis-Laval, province de Saint-Genis-Laval du 25 août au 1ierseptembre.

 Nous avons l'espoir d'avoir Monseigneur l'Archevêque de Lyon à la clôture de cette première Retraite. Sa Grandeur donnera la Confirmation. Ceux de la province de l'Hermitage qui n'auraient pas reçu ce Sacrement, pourront demander à venir à cette Retraite.

 2° Saint-Genis-Laval, province de N.-D. de l'Hermitage, du 8 au 15 septembre.

 3° Beaucamps, province du Nord, Frères de Sainte Anne, Londres, du 1ier au 8 septembre.

 4° La Bégude, province de Viviers, du 15 au 22 septembre.

 5° Saint-Paul-Trois-Châteaux, province du Midi, du 22 au 29 septembre.

 6° Azerat, province de l'Ouest, du 25 septembre au 2 octobre.

 7° Les Frères du Cap de Bonne-Espérance, les Frères de Syrie et les Frères de l'Océanie font leur Retraite dans le mois et la huitaine qui conviennent le mieux. Les Frères des Iles Britanniques l'ont faite, cette année du 17 au 24 juillet.

 8° Cette année encore, vu les difficultés des temps, les membres du Régime et les Frères qui leur étaient adjoints pour une Retraite spéciale, s'entendront avec le Frère Supérieur Général pour suivre une des retraites générales.

 On doit être rendu la veille de la Retraite, arriver ensemble à la Maison-Mère, et se présenter ensemble aux Supérieurs.

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 Depuis la dernière Circulaire, nous avons eu les quatre décès suivants :

 F. ANATOLIE, Profès, décédé à Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme), le 13 juin 1872.

F. EPIPHANIUS, Obéissant, décédé à la Bégude (Ardèche), le 22 juin 1872.

F. JUVENCE, Profès, décédé à N.-D. de l'Hermitage (Loire), le 30 juin 1872.

F. ELIE-RÉGIS, Profès, décédé à Tavanaki (Océanie), en mai 1872.

 

Point de détails encore sur la mort du bon Frère Elie-Régis, parti pour l'Océanie en 1838. Son décès n'a été annoncé que par dépêche télégraphique.

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 Je vous engage à relire les avis détaillés et très motivés que je vous ai donnés, dans la Circulaire du 2 juillet 1871, concernant les objets de Vestiaire (Taillerie et Cordonnerie), délaissés, par les uns ou par les autres, dans les différents Postes.

 Plus que jamais, nos charges financières deviennent lourdes et embarrassantes : il faut que, dans toutes les Maisons, on redouble de soin et d'attention, pour y faire face et en diminuer le poids, autant que possible et au plus tôt.

 Vous savez qu'on tire très bon parti des vieux objets, tels que souliers, bas, manteaux, soutanes et autres. Ayez soin de tout apporter dans les différentes Maisons provinciales, en vous rendant à la Retraite.

  Que dans le même esprit d'ordre et de bonne économie, les Frères Directeurs veillent avec grand soin, à ce que chacun entretienne son vestiaire en parfait état de propreté et de réparation, surtout pour la chaussure et les habits de dessous.

 Si, partout et toujours, les réparations de vestiaire nécessaires se faisaient à temps et se faisaient convenablement, il en résulterait une économie très considérable pour l'ensemble de la Congrégation, et sans surcharge pour personne.

 Sur ce point donc, nous avons tous, à faire appel à l'esprit de pauvreté, à l'esprit de famille, au bon esprit religieux, pour comprendre et sentir les besoins de l'Institut et les difficultés des temps; pour diminuer les charges des différentes Procures, en nous réduisant même sur les objets de vestiaire, dont on peut encore retarder la demande.

 Une autre observation capitale sur l'article des finances, c'est l'attention et l'énergie persévérantes que tous les Frères Directeurs, ceux des pensionnats surtout, doivent apporter à faire rentrer les mois d'école, les pensions, les traitements communaux et les autres fonds dus à leur Etablissement.

 A cette exactitude, il y a des avantages immenses et certains. Faire ses rentrées à temps, les faire régulièrement, les faire invariablement, les faire, avec la fermeté intelligente et soutenue qui dénote autant le bon religieux que le bon administrateur, c'est le moyen infaillible : 1° de prévenir les difficultés avec les familles et les autorités; 2° d'empêcher les plaintes, les murmures et les défections; 3°d'inspirer la confiance à tous et de soutenir la prospérité d'une maison.

 Un excellent Frère, qui a eu l'administration d'un pensionnat pendant quinze ans, me disait, il y a peu de temps, qu'il n'avait pas perdu quatre-vingts francs dans toute son administration, grâce à cette énergique constance à faire payer à temps.

 Le système des concessions et des arrérages est un système aussi désastreux pour le moral que pour le matériel d'un établissement, pour l'intérieur et la bonne discipline, que pour l'extérieur et la bonne réputation.

 Du reste, pour tous ceux qui ont l'administration des deniers de la Congrégation, Directeurs, Procureurs, Economes, c'est ici une affaire de justice et de vœu, et par conséquent une affaire de conscience.

 De même que, selon la justice et le vœu de pauvreté, ils ne peuvent disposer des fonds reçus, en les employant contrairement à la Règle et aux Constitutions ; de même, ils ne peuvent disposer des fonds à recevoir, en négligeant de les faire rentrer, comme le prescrivent la même Règle et les mêmes Constitutions.

 Ce qu'il y a de sûr, c'est que, si, dorénavant, tous nos Frères Administrateurs, Directeurs et autres, prennent fortement à cœur cette observation, nous aurons très vite et très considérablement amélioré et l'état financier de certaines Maisons, et celui de tout l'Institut.

 Mais, pour compléter cette importante observation, et pour donner à tous le secret d'une bonne administration, il faut ajouter, et pour les mêmes motifs, qu'au soin et à l'attention énergiques et soutenus de se faire payer à temps, il faut joindre le même soin et la même attention à payer soi-même à temps.

 Le mieux serait de faire tout au comptant, ou à peu près, afin de profiter des escomptes et des remises qu'il amène.

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 Les jours derniers, un de nos Frères, appelé à Lyon pour affaires, se trouvant libre un moment, eut la pensée et peut-être le désir d'aller voir l'Exposition; mais, en bon religieux, il ne lui fallut qu'un instant de réflexion, pour combattre et éloigner et cette pensée et ce désir.

 « Je suis sûr, se dit-il à lui-même, que, dans la prochaine Circulaire on défendra cette visite : je ne dois donc pas me la permettre. »

 « Il y a un franc à payer pour l'entrée : si les mille à douze cents Frères qui vont venir à la Maison-Mère,  pour la Retraite, se donnaient la même liberté que  moi, ce serait une dépense de mille à douze cents  francs : évidemment, en conscience, ni les Supérieurs ne peuvent autoriser, ni les Frères se permettre une telle dépense. »

 « Puis que gagnerai-je à cette visite? de perdre mon  temps, de satisfaire une vaine curiosité, peut-être de rapporter les plus tristes impressions et de me créer  de grandes misères spirituelles, par la vue de certaines peintures et autres exhibitions peu faites pour  un religieux. »

 Cela dit, le bon Frère laissa l'Exposition et se hâta de rentrer à la Maison-Mère, tout heureux d'avoir triomphé de sa tentation, et trouvant dans ce sacrifice, fait à l'esprit religieux, cent fois plus de contentement que n'eût pu lui en causer tout le spectacle de l'Exposition.

 C'est l'homme sérieux et réfléchi, attiré au plaisir et à la frivolité, comme l'homme léger et dissipé. Mais celui-ci ne sait ni réfléchir ni résister, il cède à la première imagination et contente aussitôt la nature aux dépens de la grâce ; celui-là, au contraire, se ravisant et examinant toutes choses, en elles-mêmes et dans leurs suites, comprend les convenances et son devoir, et il y reste fidèle à tout prix.

 Ainsi de tout, M. T. C. F., dans la grande œuvre de notre salut éternel. Elle doit être conduite avec sagesse et réflexion; elle demande un esprit bien avisé, qui comprenne qu'elle n'est moralement assurée que par une constante fidélité aux petites choses, et qu'on doit toujours agir en conséquence.

 Je regrette que ces mêmes réflexions, pourtant si justes et si solides, n'aient pas été faites par quelques-uns de ceux qui ont passé à Lyon, depuis peu. Comme je les sais consciencieux aussi et pleins de sens, je ne doute pas quelles ne les eussent retenus, comme elles ont retenu le bon Frère qui me les a données.

 Aujourd'hui qu'elles vont arriver à tous par cette Circulaire, je compte qu'elles seront comprises de tous, et que nous n'aurons pas le regret d'apprendre qu'on a enfreint la défense qui est faite à tous nos Frères, de l'avis de tout le Régime, d'aller voir l'Exposition.

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 Employez les mêmes réflexions, le même esprit sérieux, à combattre la tendance trop naturelle, beaucoup trop vive quelquefois, aux voyages de famille.

    Le détachement des parents et l'éloignement du monde étant les premiers pas à faire pour entrer dans la voie de la vie religieuse, nous devons comprendre que nous ne pouvons y persévérer et y avancer, qu'on nous affermissant de plus en plus dans ces dispositions, selon cette vérité fondamentale que les choses ne se conservent et ne se perfectionnent que par les principes mêmes qui leur ont donné naissance.

 Puisque nous voulons avoir les sûretés, les mérites et les récompenses de la vie religieuse, sachons en accepter tous les devoirs et en supporter tous les sacrifices.

 Toutefois nous ne rappelons ici ces premiers principes, à propos des permissions de voyage, que parce que,  dans les circonstances présentes, ils entraînent des inconvénients tout exceptionnels, que nous nous réservons de vous faire connaître à la Retraite.

 Il faut donc que, chacun faisant le sacrifice de ses satisfactions personnelles au bien général, on ne nous demande que les voyages de nécessité absolue, pour arrangements ou autres motifs de rigueur.

 On ne devra pas même se prévaloir des espérances qui auraient pu être données, soit à la Retraite dernière, soit pendant l'année.

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 Dans la précédente Circulaire, nous avons rappelé aux Frères Directeurs avec quel soin extrême, avec quelle attention de tous les jours et de tous les instants, ils doivent veiller, pour prévenir tout rapport scandaleux avec les enfants, et, pour maintenir, dans ce but, la stricte observation de la Règle sur l'article des familiarités.

 Aujourd'hui, nous sommes obligés de donner les mêmes avis et de faire les mêmes recommandations en ce qui concerne les sévices, auxquels quelques-uns pourraient se laisser entraîner.

  Dans aucun temps, on ne doit se les permettre, puisque nos Règles, aussi bien que les prescriptions légales, les interdisent absolument ; mais, en ce moment, où, dans certaines localités du moins, il y a tant de mauvais vouloir contre les écoles religieuses, s'oublier sur ce point serait s'exposer soi-même et exposer les Maisons aux suites les plus fâcheuses et les plus compromettantes. Nous avons le regret, depuis quelques semaines, de voir que deux ou trois Etablissements se sont créé des embarras de ce genre.

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 Rien de changé dans les dispositions et avis de nos précédentes Circulaires concernant les fournitures classiques, les livres de prix, le linge personnel des Frères pour la Retraite, les brevets, les examens, les actes de naissance et les renseignements sur la résidence et autres.

 Pour l'engagement décennal, il est probable qu'il sera donné une nouvelle formule, conforme à la nouvelle loi militaire ; mais elle ne peut différer de l'ancienne que de quelques mots relatifs à l'enseignement publie. On prendra les mesures pour l'avoir au plus tôt, et faire signer, comme à l'ordinaire, la feuille de l'engagement.

 Le nouveau projet de loi sur l'enseignement primaire ajoute aux matières obligatoires quelques notions usuelles sur l'agriculture et l'horticulture. Je ne présume pas cependant qu'elles soient exigées aux premiers examens de 1873.

 Il nous revient que, dans quelques départements, les Frères Directeurs sont invités à donner leurs appréciations sur les principales dispositions du projet de loi présenté par le Gouvernement à l'Assemblée Nationale et sur le projet élaboré par la Commission de l’enseignement. On fera bien de remettre ce travail après la rentrée. Du reste, il n'est demandé que conditionnellement.

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 L'année dernière, à l'occasion de la nouvelle loi sur le service militaire et sur la réorganisation de l'armée, je vous recommandais de prier tous et de prier très instamment, pour obtenir de Dieu que la dispense fût assurée à tous les membres des Congrégations religieuses, dûment reconnues, dans toutes les écoles libres et publiques, comme avant les circulaires de M. Duruy. En face du service obligatoire, c'était, disions-nous, une question de vie ou de mort pour toutes nos œuvres.

 Grâce à Dieu, j'ai la consolation de vous annoncer aujourd'hui que vos prières et nos longs efforts ont été couronnés d'un plein succès. Le 26 de ce mois, le jour même de la fête de sainte Anne, que nous choisissons cette année, pour la patronne spéciale de nos Retraites, l'Assemblée Nationale a consacré, par un vote définitif, en troisième lecture, la dispense de tous les Frères dans tous les établissements dépendant de l'Association.

 Voici, dans son entier, l'art. 20 de la loi, relatif aux dispenses. J'accompagne de guillemets les paragraphes qui nous concernent, et je mets en italique les derniers amendements par lesquels la Commission de l'armée, d'abord, et l'Assemblée Nationale, ensuite, ont introduit, d'une manière très claire, dans le texte même de la loi, les dispositions spéciales prises en faveur des Congrégations enseignantes, religieuses ou laïques.

 Art. 2°. Sont, à titre conditionnel, dispensés du service militaire :

 1° Les membres de !'instruction publique, les élèves de l'Ecole normale supérieure de Paris, dont l'engagement de se vouer pendant dix ans à la carrière de l'enseignement, aura été accepté par le recteur de l'Académie, avant le tirage au sort, et s'ils réalisent cet engagement.

  2° Les professeurs des institutions nationales des sourds-muets et des institutions nationales des jeunes aveugles, aux mêmes conditions que les membres de l'instruction publique.

 3° Les artistes qui ont remporté les grands prix de l'Institut, à condition qu'ils passeront à l'école de Rome les années réglementaires et rempliront toutes leurs obligations envers l'État.

 4° Les élèves pensionnaires de l'école des langues orientales vivantes et les élèves de l'école des chartes nommés après examen, à condition, de passer dix ans tant dans lesdites écoles que dans un service public.

 5° Les membres et novices des associations religieuses vouées à l'enseignement et reconnues comme  établissements d'utilité publique, et les directeurs,  maîtres-adjoints, élèves-maîtres des écoles fondées ou entretenues par les associations laïques, lorsqu'elles remplissent les mêmes conditions, pourvu toutefois que les uns et les autres, avant le tirage au sort, aient  pris devant le recteur de l'Académie l'engagement de se consacrer pendant dix ans à l'enseignement et s'ils réalisent cet engagement dans un des établissements  de l'association religieuse ou laïque, à condition que  cet établissement existe depuis deux ans, ou renferme  trente élèves au moins. »

  6° Les jeunes gens qui, sans être compris dans les paragraphes précédents, se trouvent dans les cas prévus par l'article 79 de la loi du 15 mars 1850, et par l'article 18 de la loi du 10 avril 1867, et ont, avant l'époque fixée pour le tirage, contracté devant le recteur le même engagement et aux mêmes conditions.

  « L'engagement de se vouer pendant dix ans à l'enseignement peut être réalisé, par les instituteurs et par les instituteurs adjoints mentionnés au paragraphe 6, tant dans les écoles publiques que dans les écoles libres désignées à cet effet par le Ministre de l'Instruction publique, après avis du Conseil Départemental.

 7° Les élèves ecclésiastiques désignés à cet effet par les Archevêques et par les Evêques, et les jeunes gens autorisés à continuer leurs études pour se vouer au ministère dans les cultes salariés par l’État, sous la condition qu'ils seront assujettis au service militaire, s'ils cessent les études en vue desquelles ils auront été dispensés, ou, si à vingt-six ans, les premiers ne sont pas entrés dans les ordres majeurs, et les seconds n'ont pas reçu la consécration. »

 C'est ainsi que, par des dispositions toutes providentielles, les Associations enseignantes se trouvent complètement affranchies d'une entrave énorme, créée contre elles il y a sept ans, et qui, un jour ou l'autre, ne pouvait que rendre leur administration tout à fait impossible.

 Nous devons certainement en remercier Dieu de tout notre cœur, et admirer combien sa puissance et sa bonté sont grandes envers les siens.

 Il les humilie et les éprouve ; pour un temps il semble que les méchants, triomphent sur tous les points et que leur règne ne finira jamais. Mais il n'en est rien : à un moment donné, au jour et à l'heure que Dieu a fixés, les méchants disparaissent, et ses serviteurs sont sauvés par les événements mêmes qui semblaient devoir les anéantir.

 Voyez ! La révolution de 1848 nous apporte, à nous, en 1851, l'autorisation complète que le gouvernement tombé alors nous refusait depuis dix-sept ans.

 Aujourd'hui, après la terrible révolution de 1870, Dieu veut qu'on rende à toutes les Congrégations la dispense que l'Empire leur avait enlevée, malgré les plus fortes réclamations.

 Qui ne bénirait cette toute miséricordieuse et toute puissante Providence de Dieu? Qui ne s'abandonnerait à elle avec une confiance absolue? Qui n'en prendrait occasion de réveiller son zèle pour la gloire de Dieu et le salut des enfants?

 Il n'y a pas à douter qu'en donnant à l'enseignement catholique ce triomphe éclatant, Dieu ne veuille confondre l'enfer et tous ses suppôts conjurés aujourd'hui contre les écoles religieuses; qu'il ne veuille aussi exciter, encourager, accroître partout la charité et la piété de ceux qui les soutiennent par leurs aumônes, le zèle et la foi de ceux qui s'y dévouent dans les travaux d'une Mission toute spéciale.

 Pour nous, M. T. C. F., j'ai la confiance que cette grâce insigne, nous venant à la veille même de nos Retraites, sera pour tous un puissant motif de les faire avec une ferveur extraordinaire. C'est par de bonnes Retraites que nous nous mettrons à même de répondre aux desseins de Dieu et de remplir, avec une fidélité toute nouvelle, le double but de notre vocation qui est, dit le premier article de nos Règles, « de travailler  d'abord au salut de notre âme et à notre perfection ; puis, au salut du prochain, en instruisant les enfants  des vérités de notre sainte Religion et en les formant  aux vertus chrétiennes. »

 Pour comprendre combien une bonne, une fervente Retraite nous aiderait à atteindre ce double but, nous n'avons qu'à relire dans les Règles Communes quelles sont les fins principales de ces exercices spirituels, ce que nous devons nous y proposer.

 Avant tout, dit la Règle, « nous devons nous pénétrer et nous convaincre de plus en plus de l'importance de la fin de l'homme, de la nécessité du salut, du malheur infini de perdre son Dieu et son âme. »

 Oh ! si nous pouvions, une bonne fois, pénétrer ces vérités si grandes, si capitales, si fondamentales, en saisir l'importance infinie, quelles lumières elles jetteraient sur toute notre vie, sur tous nos devoirs, sur toutes les choses présentes et à venir ! quelle force, quelle énergie, quelle constance elles imprimeraient à toute notre conduite, dans l’œuvre de notre propre sanctification et de la sanctification des enfants !

 Il est certain que, ce seul premier point gagné, au premier jour de la Retraite, nous ne pourrions nous empêcher de remplir les sept autres que demande la Règle, et de les remplir, Dieu aidant, avec toute l'application dont nous sommes capables.

 Impossible, en effet, à celui qui a bien compris sa fin dernière, le prix de son âme, l'importance de son salut, impossible, dis-je,  qu'il ne rentre très sérieusement « en lui-même, qu'il ne descende le plus avant possible dans les secrets de sa conscience, pour voir, devant  Dieu et en face de l'éternité, en quel état elle est ; si  elle est bonne, droite, éclairée ; si elle craint le péché;  si elle n'est troublée par aucun doute fondé ; si elle  n'est coupable d'aucun péché mortel, et s'il n'y a aucune mauvaise habitude conduisant à des fautes graves. »

 Impossible qu'il continue à se faire illusion sur ses devoirs comme Religieux ; à négliger ses Règles et à vivre dans l'habitude réfléchie du péché véniel, s'exposant ainsi à manquer gravement à l'obligation rigoureuse que lui impose la profession des trois vœux, de tendre à la perfection.

 Impossible qu'il ne comprenne que, comme Instituteur, son salut est lié au salut de ses enfants ; et que si, faute de soins, ils ne sont pas instruits de leurs devoirs de chrétiens, défendus contre le vice, formés à la vertu, il en rendra compte âme pour âme au Tribunal de Dieu.

 Impossible, enfin, avec une Retraite sérieuse, avec une considération approfondie des grandes vérités, qu'il ne se prenne à rougir et à trembler pour une vie si tiède et si relâchée, une vie si sensuelle et si mondaine, une vie, pour ainsi dire, toute matérielle, unie à tant de Sacrements reçus, à tant de Messes entendues, à tant d'exercices de piété, à tant de moyens de salut et de perfection ; une vie, en un mot, accompagnée de tant de grâces intérieures et extérieures et néanmoins si imparfaite.

 Non, non, devant la pensée de Dieu, devant notre fin dernière, devant le salut de l'âme, devant l'éternité, pour quiconque croit et réfléchit, aucun point noir ne peut tenir.

 Il faut, de toute nécessité, que la conscience soit apaisée et que l'âme chrétienne, l'âme religieuse surtout s'affranchisse, autant que possible, de la redoutable perspective d'un malheur sans mesure et sans fin.

 Elle sont alors comme un besoin indispensable « de se renouveler dans l'esprit de son Etat, dans l'esprit de  son Institut et dans sa première ferveur. » (Règles Communes, chapitre XI).

 Pour aider à toutes ces réflexions si sérieuses et si décisives, reconnaissant notre impuissance et notre faiblesse, sentant de plus en plus, nos misères et nos besoins,ayons soin, comme je l'ai dit en commençant, d'invoquer, avec une ferveur extraordinaire, la protection de Marie, notre bonne Mère, et de ses saints Parents.

 Tous ensemble, dans les sentiments d'une charité parfaite, dans l'ardeur d'une prière commune et persévérante, dans l'union de nos derniers travaux scolaires ne faisons qu'un cœur et qu'une âme, pour obtenir de Dieu, par l'intercession de nos saints Protecteurs, la grâce d'une excellente Retraite.

 A cette intention, jusqu'à la fin de septembre, on ajoutera l'invocation suivante, après le Salve Regina du matin et avant le dernier Sub tuum du soir :

 Saint Joachim et sainte Anne, Père et Mère de la Sainte Vierge, priez pour nous qui avons recours à vous.

 Et on répondra : Afin que nous imitions vos vertus et que nous marchions sur vos traces.

 2° A l'occasion de la grande Fête de l'Assomption, les neuf jours qui suivront la réception de la Circulaire, on récitera le Veni Creator et trois Ave Maria, avant la prière du soir, pour remercier Dieu de la grâce de nos dispenses, pour demander une bonne loi sur l'enseignement primaire, et pour nous préparer plus prochainement à la Retraite.

 Ne manquons pas, dans toutes nos prières et bonnes œuvres de l'année, d'avoir toujours en vue de remercier le bon Dieu de ses grâces, et de lui recommander les besoins de l'Eglise, les besoins de l’Etat, et, en particulier, tout ce qui intéresse l'éducation chrétienne de la jeunesse. Il est extrêmement remarquable, qu'au milieu de toutes ses épreuves, Notre Très Saint Père le Pape revient sans cesse sur cette grande question de l'éducation chrétienne des enfants, et en fait le premier objet de toutes ses recommandations.

 Je vous renouvelle l'assurance de mon religieux attachement en Jésus, Marie, Joseph, et je suis toujours, en union de prières et de travaux,

    Mes très chers Frères,

      Votre très humble et très dévoué Frère et serviteur,

       Frère Louis-Marie.

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