Circulaires 114

Louis-Marie

1876-01-17

3e Circulaire sur l'Ecole de Pontmain, 17 janvier 1876. ..

CHAPITRE V. - Dispositions intérieures pour bien prier. -1. Disposition de foi et de piété. - Il. Disposition de confiance et d'amour. - III. Disposition d'humilité et de componction.                                      

CHAPITRE VI. - Singularités frappantes de la merveilleuse Inscription. - Les deux grandes dévotions de Pontmain: le Chapelet et le Chemin de la Croix. - Diverses leçons. - 1° Nom et chiffre de Marie, Chapelet. -2°  Nom et chiffre ou signe de Jésus, Crucifix, Chemin de la Croix. - Exercice du Chemin de la Croix. - Neuf Souvenirs de la Passion. - 30 Réflexions sur le nombre des lettres du premier mot de l'Inscription.- 10 Universalité du re mède apporté par Marie. - 20 Leçon universelle de courage, de droiture et de bon esprit à tirer de la céleste Inscription. - Résumé de toutes ces réflexions, de ces singularités extraordinaires. - Nos Chapelles ou Oratoires du mois de Marie.        

CHAPITRE VII. - Prière ardente et persévérante. - I. Con sidérations générales qui nous obligent à prier avec ardeur et persévérance. - II. Motifs particuliers de prier avec ardeur et persévérance. - 10 Maux temporels à conjurer. - 20 Maux spirituels. - Conversion des pé­cheurs à demander. - 31, Trois autres motifs de prier avec ferveur et persévérance. - III. Conclusions générales.

114

51.02.01.1876.1 

1876/01/17 

Aujourd'hui, 17 janvier 1876, cinquième anniversaire de l'Apparition de la Sainte Vierge à Pontmain, nous ferons une troisième séance à l'Ecole de cette bonne Mère et souveraine Institutrice des Chrétiens.

Dans la première, le 6 juin 1874, nous nous sommes appliqués à nous former, de notre mieux, à l'extérieur de la prière, au recueillement, à la gravité, à la modestie, à la parfaite tenue que nous devons y garder constamment, soit en public, soit en particulier.

Dans la seconde, le 24 mai 1875, nous avons tâché de pénétrer plus avant dans cette grande question de la prière, c'est-à-dire, de saisir fortement les principes du salut, du culte de Dieu, du zèle des âmes, qui nous obligent à unir toujours l'intérieur à l'extérieur dans toutes nos prières, dans tous nos exercices religieux

Grâce à la toute puissante intercession de Marie, Dieu a béni nos recherches : il a fait goûter et accepter nos réflexions et nos avis ; et, par sa miséricorde, il faut le reconnaître et lui en rendre mille actions de grâces, nos exercices religieux, nos chants, nos cérémonies, toutes nos prières ont gagné partout et se font avec la plus consolante édification.

Continuons donc, avec courage, avec une nouvelle ardeur, notre étude de la merveilleuse Apparition, afin d'y puiser et de nouveaux motifs de beaucoup prier et le grand secret de le bien faire. J'ai la confiance que les Chapitres suivants nous aideront puissamment à atteindre ce double but.

 

CHAPITRE CINQUIÈME

 

DISPOSITIONS INTÉRIEURES POUR BIEN PRIER

    …….      Mais priez, mes enfants, Dieu vous exaucera en peu de temps. Mon Fils se laisse toucher.

 Nous l'avons remarqué, au début de ces instructions, S'il est vrai que l'Ecole de Pontmain soit une Ecole de piété et de prière, elle l'est surtout par l'admirable Inscription que Marie y laisse tomber de ses mains maternelles, comme le couronnement de ses merveilleuses leçons. C'est dans cette Inscription extraordinaire (on le verra plus loin) que se trouvent toutes les dispositions intérieures que demande la prière ; de sorte que la clef de toute cette Apparition nous est donnée dans les seize mots qui composent l'Inscription.

 Les points en ligne dont nous la faisons précéder sont : 1° Pour rappeler le silence de la divine Marie pendant les deux premières heures de l'Apparition ; 2° Pour montrer que la merveilleuse Inscription répond à une suite de pensées différentes, non exprimées, mais clairement indiquées par les circonstances.

 C'est dans ces pensées, comme dans l'ensemble de l'Apparition, que nous trouverons toutes les dispositions essentielles de la prière : I, disposition de foi et de piété ; II, disposition de confiance et d'amour; III, disposition d'humilité et de repentir; IV, disposition d'ardeur et de persévérance, pour arriver, après un Chapitre particulier sur diverses singularités de la merveilleuse Inscription, au but suprême, au but final et évident de l'Apparition : une sainte et universelle Croisade de prières parmi tous les enfants de Marie : Mais priez, mes enfants.

 I. Disposition de foi et de piété.

 Dans la Circulaire du 15 décembre 1848 sur l'Esprit de foi, nous donnons cette réflexion

 « La cause de tous nos maux spirituels et de notre  peu de progrès dansles vertus religieuses est uniquement dans la faiblesse et la tiédeur de notre foi.

 « Par exemple, disions-nous, si nous avons si peu d'affection et d'ardeur pour l'exercice de la prière, c'est parce que nous ne sommes assez convaincus ni de la nécessité absolue ni de la souveraine efficacité de la prière. Si nous y sommes si souvent sans respect sans attention, tout distraits, tout dissipés, tout languissants, tant intérieurement qu'extérieurement. c'est que nous n'avons pas une foi vive et actuelle de la présence de Dieu et de son infinie Majesté; c'est que la prière étant l'expression de la foi, et ne tirant sa vertu puissante que des soupirs, des gémissements  et de la confiance qu'inspire et que produit la foi,  nous ne pouvons pas être des hommes de prière, parce  que nous ne sommes pas des hommes de foi. »

 C'est cette même pensée qui nous amène, aujourd'hui, à tirer de l'Apparition de Pontmain, comme première leçon que nous donne la divine mère, et comme première disposition aux prières qu'elle attend de nous: UN GRAND ESPRIT DE FOI ET DE PIÉTÉ.

 En effet, ce qui étonne le plus dans l'Apparition de Pontmain, ce sont, avec les chants et les exercices pieux qui s'y prolongent, les paroles mêmes de la merveilleuse Inscription, le caractère tout particulier de doctrine et de vérité dont elles sont marquées : caractère divin qui est la condition essentielle de toute manifestation religieuse.

 En seize mots, d'une simplicité admirable, elles rappellent les plus grandes vérités de la Religion et résument tout l'enseignement de la foi et de l'espérance chrétiennes sur la Trinité, sur l'Incarnation et la Rédemption, sur la Médiation de Justice en Jésus-Christ ; sur la Médiation d'intercession en Marie ; sur sa Maternité divine et notre adoption comme ses enfants ; sur la nécessité, les conditions et la puissance de la prière ; le souverain domaine de Dieu et l'action continuelle de sa Providence dans les événements du monde. Oui, toutes ces vérités, qui combattent directement les erreurs du jour, ressortent, avec évidence, et du sens des mots de l'Inscription et des circonstances dans lesquelles elle est donnée.

 Mais priez, mes enfants, Dieu vous exaucera en peu de temps, mon Fils se laisse toucher.

 Qu'est-ce à dire? sinon l'action visible des trois Personnes divines dans la promesse de salut que Marie apporte à son peuple choisi : le Saint-Esprit, l'Esprit de prière demandant en nous et pour nous par des gémissements ineffables (Rom., vil, 26) ; DIEU, le Père des lumières de qui descend toute grâce excellente et tout don parfait (Jacq., I, 17), nous exauçant en peu de temps ; et le Verbe incarné, le Fils éternel du Père, devenu le Fils de Marie, nous apparaissent comme notre Avocat, notre Médiateur, la Victime de propitiation pour tous nos péchés, toujours vivant pour intercéder pour nous (Héb., VII, 25).

 Qu'est-ce à dire encore? sinon, priez avec humilité et componction, puisque vous êtes si visiblement sous le coup de la justice de Dieu ; priez avec foi et confiance, puisque vous avez, avec la médiation infinie de Jésus-Christ, la médiation toute puissante d'une Mère : MES ENFANTS ; priez avec une ardeur proportionnée à la grandeur de vos maux; qui sont aujourd'hui comme sans remède ; enfin, priez avec persévérance, et Dieu, qui est le Maître souverain des hommes et des choses, Dieu qui n'attend que vos prières pour vous secourir, Dieu, dont la puissanceet la bonté sont également infinies, vous exaucera infailliblement, dut-il, pour vous délivrer, opérer des miraclesde pardon et de protection.

 Tel est le commentaire abrégé, mais rigoureux, des paroles de l'Inscription ; les circonstances ne permettent pas de les comprendre autrement, Et ainsi, on le voit, pas un des dogmes énoncés plus haut qui n'apparaisse très clairement dans ces seize mots. Quelle heureuse présomption en faveur de l'origine céleste du merveilleux écrit ! Les hommes sauraient-ils jamais dire tant et de si grandes choses en des paroles si courtes et si simples?

 Ajoutons que, dans la disposition même de l'Inscription, apparaît un Dessin mystérieux, un Dessin profond, qui répond d'une manière admirable, à deux grandes vérités que saint Paul explique aux Philippiens.

 La première, c'est que Jésus-Christ, ayant la nature de Dieu, n'a point cru que ce fût pour lui une usurpation de s'égaler à Dieu (Phil., II, 5, 6).

 N'est-ce point à ce dogme de la nature divine en Jésus-Christ que répond, avec une exactitude théologique parfaite, ce point lumineux, ce point brillant comme un soleil, point aussi grand que les lettres elles-mêmes et placé sur la même ligne? Pourquoi ne verrions-nous pas là une image, un symbole du Soleil de justice, du Fils unique du Père, l'Eclat de la Lumière éternelle, parfaitement égal au Père et au Saint-Esprit, dans l'essence unique et infinie des trois Personnes divines?

 Mais le Verbe divin vient-il à voiler son éclat sous l'obscurité de la nature humaine, en s'incarnant dans le sein de Marie, la Vierge prend soin de constater elle-même cette seconde vérité, ces abaissements volontaires de son Fils adorable ; elle écrit en seconde ligne : MON FILS SE LAISSE TOUCHER. C'est la nature humaine de Jésus-Christ exprimée en figure, conformément au mot du même apôtre: Jésus-Christ s'est anéanti lui-même en prenant la nature d'esclave, en se rendant semblable aux hommes, et étant reconnu pour homme par tout ce qui a paru de lui au dehors (Phil., 11, 7, 8) ; quoique les deux natures ne fassent en Jésus-Christ qu'une seule Personne, qui est la seconde Personne de la Très Sainte Trinité.

 Et voilà comment, en étudiant à fond le fait de Pontmain et sa merveilleuse Inscription, nous voyons clairement que la divine Mère fait reposer la prière sur l'esprit de foi, en nous la montrant comme formée en nous par l'Esprit-Saint, présentée par son Fils Jésus-Christ, appuyée sur ses mérites, et exaucée par la bonté du Père éternel, principe de tout bien.

 De là, comme conclusion pratique, prenons tous deux grandes résolutions, afin de répondre aux intentions de notre bonne Mère et d'apporter, chacun, à l’œuvre de salut qu'elle veut accomplir, le secours d'une prière fervente et efficace.

 1° Entretenir en nous cette foi très vive, la demander souvent et user de tous les moyens les plus propres à la fortifier : bons catéchismes à nos Enfants, sérieuses méditations sur les grandes vérités du salut, fortes lectures sur ces mêmes vérités, fréquentes visites au Très Saint Sacrement, ferventes neuvaines de temps en temps.

 Il est très certain que plus notre foi sera vive, plus nos prières seront ardentes et soutenues.

 Il n'y a pas longtemps que l'un de nous, étant pris d'insomnie, se lève au milieu de la nuit et va devant le Très Saint Sacrement. Là, depuis une demi-heure il se sentait aussi incapable de prier qu'il éprouvait auparavant de difficulté à reposer.

  Cependant, tout à coup, il porte sa vue et sa pensée vers le Tabernacle et fait à Jésus-Christ cette prière : « Ah ! Seigneur Jésus, ayez pitié de moi et dites-moi ce que je dois vous demander. » Il n'avait pas fini cette invocation que la prière de l'aveugle de l’Evangile lui vint à l'esprit: Domine ut videam ! Seigneur, laites que je voie (Luc, XVII, 41) !

 C'en fut assez.Au moment même, il se sentit comme tout investi de la présence de Jésus-Christ et tout inondé des lumières de la foi. Aussitôt la prière jaillissant, pour ainsi dire, comme un torrent, et de son cœur et de ses lèvres, il ne pouvait assez exposer ses besoins à Notre-Seigneur, assez implorer sa miséricorde et solliciter ses grâces.

 Ah ! M. T. C. F., faisons souvent cette prière de l'aveugle et pour nous-mêmes et pour les autres. Oui, que Notre-Seigneur nous fasse sentir à tous sa divine présence qu'il nous éclaire sur la grandeur des biens et des maux à venir, qu'il daigne réveiller notre foi et nous aider dans notre incrédulité (Marc, IX, 23) : nous n'aurons plus de peine à prier, nous irons, de nous-mêmes, au-devant de l'invitation que nous fait la bonne Mère : MAIS PRIEZ, MES ENFANTS.

 2° La seconde résolution nous est donnée par le fait même qui précède. Puisque nous voyons autour de nous un si grand affaiblissement de la foi, tant de personnes, de tout âge, de tout sexe, de tout rang, vivre comme en dehors de la foi, soyons touchés, avec notre bonne Mère, de cette lamentable situation ; plaignons un si grand nombre d'âmes qui restent si complètement étrangères à tous leurs intérêts éternels.

 Puis, dans cette pensée, redoublons de zèle pour faire arriver la foi à nos Enfants, et par eux à leurs familles ; employons tout ce que nous avons d'autorité et de savoir-faire, pour les faire prier avec foi, attention et respect.

 Tous ensemble, efforçons-nous de répondre le plus parfaitement possible aux désirs maternels de Marie, et excitons toute l'ardeur et toute la vivacité de notre foi, pour réveiller, dans la prière, toute l'ardeur de notre dévotion et de notre piété.

 Il. Disposition de confiance et d'amour.

 Confiance et amour fondés sur ce que l'Apparition de Pontmain est une des plus éclatantes manifestations de la bonté, de la miséricorde et de la puissance de Marie ; de l'efficacité comme infinie d'une prière présentée à Dieu par les mains de cette divine Mère, avec la médiation de son fils Jésus.

 Mais priez, mes enfants, Dieu vous exaucera en peu de temps, mon Fils se laisse toucher.

 Quoi de plus doux, en effet, quoi de plus tendre que ces admirables paroles ! Mais, pour bien comprendre tout ce qu'elles ont d'à-propos, de consolant et de miséricordieux, reportons-nous, par la pensée, au moment même de l'Apparition, au 17 janvier 1871, à l'état lamentable où se trouvait alors, physiquement et moralement, le peuple chéri de Marie.

 Sur lui pèsent des désastres sans nom. La colère de Dieu, lassée de nos crimes et de nos impiétés, a suscité contre nous une armée de géants, une armée innombrable, soumise à une discipline de fer, revêtue d'une force indomptable et munie de tous les moyens de destruction.

  Au même moment, et avec le même empire souverain, Dieu nous a brisés nous-mêmes. Plus de pouvoirs, plus d'armes, plus d'armées, ou des armées impuissantes et sans discipline. Tout un peuple, quarante millions d'hommes, jeté sans défense et sans appui, à la merci d'un vainqueur implacable, qui pénètre dans nos villes, détruit nos forteresses, inonde nos provinces, porte partout le pillage, l'incendie et la mort, sans trouver nulle part de résistance sérieuse.

 Des téméraires, comptant, non sur Dieu, mais sur cette chimère qu'ils appellent la Fortune, le Génie de la France, ont dit que sa grande et puissante Capitale ne pourra jamais être investie, jamais affamée, jamais séparée et isolée du reste de la nation.

 Mais, ô puissance ! ô justice de Dieu ! en quelques jours et en dépit de tous les efforts, la grande ville est renfermée dans un cercle de fer et de feu, complètement impénétrable. Deux millions d'hommes y sont emprisonnés, isolés du monde entier, obligés, eux si sensuels et si délicats, de manger un pain qui n'est plus du pain, et de dévorer, pour échapper à la mort, la chair des plus vils animaux.

 Et, à ces calamités accumulées, viennent s'ajouter les causes morales, bien plus redoutables encore et bien plus difficiles à surmonter, qui les ont amenées : nos longues et innombrables iniquités, le mépris presque universel des lois de Dieu et de l'Eglise, publiquement et officiellement violées.

 Ah ! redisons-le, dans de telles circonstances, en présence de tant de maux, justes châtiments de tant de crimes, rien de plus doux, rien de plus à propos, rien de plus consolant, de plus miséricordieux que les délicieuses paroles de la merveilleuse Inscription ! C'est la plus haute idée qui puisse nous être donnée de la bonté et du tout puissant crédit de la Mère de Dieu ; car c'est comme si elle nous disait à tous: « Vous souffrez, vos maux sont  extrêmes, vos angoisses et vos craintes sont sans mesure, comme les fautes qui les ont attirés ; mais priez et  prenez confiance. Je suis votre Mère, Jésus mon Fils  est votre Frère. Par lui j'ai demandé votre grâce et je  Viens moi-même la remettre entre vos mains. Oui, priez,  demandez, vous serez exaucés, exaucés promptement exaucés en peu de temps. mon Fils se laisse toucher. »

 Certes ! nous disions tout à l'heure : « En seize mots que de Vérités ! » Et, maintenant, ne pouvons-nous pas ajouter : « En seize mots que de Consolation ! que de Miséricorde ! Non, non, les hommes ne savent pas faire de tels abrégés. Des paroles si courtes, si simples en elles-mêmes, et si pleines de sens, dépassent toutes leurs conceptions.

 Paroles pleines d'à-propos, elles répondent parfaitement aux sentiments et à la situation générale des esprits, oppressés alors par la terrible invasion dont souffre le pays, et par l'impuissance des moyens employés pour le sauver.

 Paroles pleines de consolation, à peine sont-elles prononcées qu'elles font tressaillir de joie la foule entière ; qu'elles rassurent tous les esprits, et ne laissent plus que des pensées d'espérance et de salut. « Marie est avec  nous, s'écrient même les plus timides ; nous aurions à nos portes l'armée ennemie tout entière que nous ne craindrions plus rien ! »

 Paroles pleines de miséricordes, elles ne mettent, à la délivrance des plus grands maux, au pardon des plus grandes fautes, que la condition si douce et si facile de la prière. 0 miséricorde sans borne de la divine Mère ! 0 étendue sans mesure de son crédit auprès de Dieu ! 0 efficacité infinie de la prière que Marie daigne recommander! Elle dissimule tous nos crimes; elle écarte tous reproches et toutes menaces ; elle ne répète ni ses plaintes de la Salette ni ses invitations à la pénitence de Lourdes; elle ne voit que la grandeur de nos souffrances et la profondeur de notre désolation. Et alors, n'écoutant que sa bonté de Mère, malgré toutes nos ingratitudes, elle laisse tomber, en lettres d'or, de ses mains bénies, la parole de délivrance et de pardon.

 Cependant, qui n'admirerait ici avec quelle sagesse, pleine de bonté, Marie sait concilier les intérêts de Dieu avec les besoins de ses enfants? Si elle donne à ces derniers un moyen, à la fois si simple, si facile et si sûr, de miséricorde et de salut, LA PRIÈRE, c'est que la prière, à. son tour, donne à Dieu ce qui lui est essentiellement dû : La foi et la soumission à son souverain domaine, le respect et l'adoration de son infinie Majesté, le désaveu et le repentir de l'offense.

 Merveilleux accommodement, où se rencontrent la miséricorde et la vérité, s'embrassent la justice et la paix (Ps. LXXXIV, 11) L'Incomparable traité que Marie seule pouvait nous ménager et où tout est profit pour nous 1 Hélas ! pourquoi faut-il que la nation, comme nation, ne l'ait pas aussitôt accepté? Qui peut dire si, à cette heure, au 17 janvier 1871, elle se fût humiliée devant Dieu, elle l'eût prié, elle eût rempli la condition posée par notre toute Puissante Patronne : oh! qui peut dire ce que Dieu eût fait lui-même pour tenir les promesses de sa Mère?

 Malheureusement, on ne sut pas le faire; on cria « Merci », non à Dieu, mais à l'ennemi ; et tout le monde sait quelle dure réponse nous fut faite, à quelle inflexible rigueur il fallut se plier.

 Hélas ! il y a plus. Parce qu'on ne prie pas, parce qu'on ne s'humilie pas, Dieu permet, pour nous y forcer, que la guerre civile s'ajoute et succède à la guerre étrangère. Et cette lutte fratricide, il la laissera se prolonger, au milieu de toutes les horreurs, jusqu'au jour, où, par ses Représentants, la nation aura décrété enfin d'offrir à Dieu des prières publiques.

 Mais, dès lors, effet merveilleux d'une humble supplication, preuve nouvelle et admirable de la bonté de Dieu à se laisser toucher par le repentir, la guerre cesse au jour età l'instant où ces prières s'accomplissent ; et le dernier coup de canon se fait entendre, au moment même où elles commencent : tant il est vrai que Dieu seul conduit à la mort et en rappelle ; que la consolation et le salut ne viennent que de lui ; et qu'ils arrivent infailliblement, dès que Marie les demande, pour nous et avec nous, par la médiation de Jésus 1

 Ici, pour mieux faire comprendre cette puissance de la prière, donnons les deux pensées ou comparaisons qui suivent.

 Il est rapporté qu'Archimède, étudiant la puissance du levier, s'écriait: «Qu'on me donne un point d'appui et, avec le levier, je soulèverai le monde entier. » Ce qu'Archimède n'a pu trouver, Marie nous l'apporte, en nous apportant le tout puissant levier de la prière. Le point d'appui est au Cœur de Jésus: MON FILS SE LAISSE TOUCHER ; la main est à Marie et à ses enfants unis avec elle: MAIS PRIEZ, MES ENFANTS ; la puissance est à Dieu, créateur et maître absolu de toutes choses : DIEU VOUS EXAUCERA EN PEU DE TEMPS. Première comparaison qui explique très bien que rien ne résiste à la puissance de la prière, quand Marie y joint son intercession.

 Ne peut-on pas ajouter, pour seconde comparaison, que cette bande miséricordieuse sur laquelle est tracée la merveilleuse Inscription, forme comme une balance aux pieds de la Vierge immaculée, et qu'elle nous donne le spectacle admirable que voici :

 A gauche, comme dans un bassin invisible (nos points de suspension le rappellent), sont accumulés les iniquités énormes et prolongées de tout un peuple, ses crimes sans nombre et ses monstrueuses ingratitudes ; sont accumulés aussi tous les désastres qui en ont été la suite et le châtiment: notre sol envahi, nos armées détruites, nos villes incendiées, partout le pillage et la mort. Voilà ce qui pèse, à gauche, sur la grande nation.

 Or, pour y faire contre poids, que faut-il, à droite? Rien autre, avec l'appui de la Vierge puissante, non, rien autre qu'une prière faite au nom de Jésus, en union avec Marie sa Mère.

 Certes ! opposer la prière seule à tant de crimes et à tant de maux, n'est-ce pas en révéler, avec toute l'évidence de la foi et de l'expérience, la puissance et l'efficacité infinies.

 Donc, confiance sans borne et amour sans mesure à Marie notre Reine et notre invincible Protectrice ! Donc, dans nos prières et nos supplications, à une foi très vive, joignons une espérance très ferme, une confiance inébranlable.

 Ill. Disposition d'humilité et de componction.

 L'humilité et la componction de nos cœurs ne connaîtront point de bornes, si nous considérons, avec attention, la profondeur de nos infidélités et de nos misères personnelles, la profondeur de nos iniquités et de nos calamités publiques. Plus Marie nous montre de compassion et de tendresse, en les dissimulant, en les couvrant d'un voile de miséricorde, plus nous devons, nous, les reconnaître, les sentir et en prendre de confusion.

 Déjà, à la Salette, en 1846, la divine Mère se voile la face et répand des larmes amères sur les crimes de son peuple, sur la profanation du nom de Dieu et des saints jours ; elle commande de redire à tous les châtiments qui les menacent, s'ils ne se hâtent de s'humilier, de se repentir et de faire pénitence.

 A Lourdes, douze ans plus tard, elle répand de nouvelles larmes sur les infidélités persévérantes de sa nation chérie, et elle lui fait répéter le cri du repentir « PÉNITENCE ! PÉNITENCE ! COMPONCTION ! »

 Enfin, à Pontmain, si elle ne répète pas la même parole, si la grandeur et l'urgence de nos besoins obligent sa tendresse à nous donner immédiatement le grand remède de la prière, tout encore y porte au repentir. Marie est voilée de noir; et, au Cantique du pardon, Mon doux Jésus, enfin, voici le temps, son visage se couvre de tristesse : on sent qu'elle porte le poids de toutes nos iniquités. Ce n'est que vers la fin de l'Apparition qu'elle commence à écrire le premier mot du pardon, ce MAIS mystérieux, ce mot de contraste et d'opposition qui annonce que la justice va faire place à la miséricorde ; mais elle l'écrit lentement, elle s'arrête après l'avoir écrit.

 Ah ! c'est qu'elle veut nous faire comprendre que, pour apaiser la colère de Dieu et nous rendre ses miséricordes, elle a dû épuiser, pour ainsi dire, et l'amour qu'elle a pour nous et son crédit auprès de Jésus son divin Fils : tant, depuis un siècle bientôt, nos crimes se sont accrus ; tant le Ciel est demeuré courroucé de la récente et publique glorification d'un blasphémateur insigne; tant, surtout, il a fallu à la bonne Mère de prières et de supplications pour détourner de la France, infidèle au Pape et à l’Eglise, la honte attachée à celui qui abandonne son père, la malédiction portée contre celui qui afflige sa mère (Eccl., III, 18).

 Si donc, après tant de prévarications, la bonté et la puissance de Marie éclatent, d'une manière si admirable, en nous obtenant grâce et pardon, il faut que l'amour et la reconnaissance fassent éclater de même, d'une manière toute nouvelle, et notre repentir et nos larmes, et l'humilité et la componction de nos cœurs.

 C'est encore dans ce même but que Marie veut nous présenter l'image de son Fils crucifié, cette Croix et ce Christ couleur de sang, au haut de laquelle est écrit le nom du divin Rédempteur : JÉSUS-CH RIST !

 En nous rappelant que son Fils adorable se laisse toucher de nos maux et qu'il ne met à notre pardon que la condition infiniment douce de la prière ; en rapprochant cette bonté du Cœur de Jésus du supplice de la Croix auquel nos péchés l'ont condamné, Marie, évidemment, veut nous amener à nous frapper la poitrine de douleur et de repentir, à pleurer d'amour et de componction et à répéter comme le Centenier de l’Evangile : Cet homme est véritablement Fils de Dieu (Matth., XXVII, 54) : car Dieu seul peut aimer si ardemment, Dieu seul peut pardonner si facilement, Dieu seul peut mettre la délivrance et le salut, ses grâces et ses miséricordes, à la disposition même de ceux qui l'ont le plus offensé.

 Donc, en présence d'un Rédempteur si généreux, d'une Mère si affligée, en présence de tant de miséricorde opposée à tant d'ingratitudes, ouvrons nos cœurs à la pénitence et au repentir, à l'humilité et à la componction, Hâtons-nous, dans toutes nos prières et supplications, hâtons-nous, pour désarmer la colère de Dieu, d'ajouter ces sentiments de douleur et de contrition aux sentiments de la foi, de la piété, de la confiance et de l'amour : Vous ne mépriserez point, ô mon Dieu ! un cœur contrit et humilié (PS., L, 19).

——————————————–

 Ce n'est pas seulement une prière inspirée par la foi, pleine de confiance, d'humilité et de componction que Marie nous de mande, c'est encore une prière ardente et persévérante ; mais nous remettons à parler de cette dernière condition à la conclusion générale de ces diverses instructions. Le chapitre suivant nous y préparera heureusement par les réflexions utiles et les Pieuses pratiques qu'il contient : réflexions et pratiques qui, comme nous l'avons déjà fait observer, se recommandent d'elles-mêmes à la piété et au bon esprit de tous, indépendamment des incidents qui les ont fait naître.

 CHAPITRE SIXIÊME

 

SINGULARITÉS FRAPPANTES DE LA MERVEILLEUSE INSCRIPTION

 Les deux grandes dévotions de Pontmain : le Chapelet et le Chemin de la Croix

 Diverses leçons.

 Nous avons dit que Pontmain est une véritable Ecole, où Marie elle-même se fait notre grande Institutrice. Elle tient le Signal, LA CROIX ; elle a son écriture, son alphabet divin, ses nombres sacrés, son dessin mystérieux; elle s'adresse aux enfants et aux adultes; elle a les trois heures réglementaires, pendant lesquelles se succèdent tous les exercices d'une sainte et céleste Ecole.

 Loin de nous donc la pensée de nous refuser à ce pieux enseignement ; loin de nous toute fausse honte, toute influence de respect humain. Quand la Reine des Anges et des hommes tient le signal, il n'y a pas honte à rentrer à l’école, même avec des cheveux blancs. Quand la Souveraine de tous les inondes prend la peine de nous  parler par signes et de nous tracer de sa main des lettres d'or, des lettres et des mots si pleins de sens, ne craignons pas de nous remettre à l'alphabet, à l'épellation ; c'est-à-dire, d'étudier, dans ses moindres détails, la merveilleuse Inscription.

 Si cette Inscription est comme la clef de toute I'Apparition, si elle nous en découvre le secret, le but essentiel et final, on peut dire aussi que le premier mot tracé par Marie est véritablement la clef de l'Inscription elle-même, et qu'il en donne toute l'étendue et la profonde signification. Ce mot mystérieux, ce MAIS singulier, apparaissant le premier, apparaissant seul, restant seul, pendant dix minutes, à la contemplation des Voyants, est aussi surprenant dans sa composition matérielle que dans sa signification extraordinaire.

 Par ses significations diverses, il donne à l'Inscription un caractère frappant d'universalité, et devient, selon l'application qu'on en fait, une source de très utiles réflexions et instructions.

 Parlons d'abord de sa composition matérielle et des singularités qui s'y rattachent :

 1° Le nom et chiffre de Marie. CHAPELET.

 2° Le nom et chiffre ou signe de Jésus. CRUCIFIX, CHEMIN DE LA CROIX.

 3° Réflexions auxquelles donne lieu le nombre même de ses lettres.

 1° NOM ET CHIFFRE DE MARIE. – CHAPELET.

 Déjà, nous l'avons vu, la première lettre qui apparaît nous donne, comme initiale, le nom de Marie, le nom de tous ses privilèges les plus touchants de Mère, de Mère divine, de Mère de Miséricorde, de Médiatrice, etc. (C. du 6 juin 1874).

 A la seconde lettre, qui est un grand A, on se souvient naturellement de ce mot de Jésus-Christ lui-même : Je suis l'Alpha et l’Oméga, le commencement et la fin (Apoc., I,8), le Verbe Eternel fait homme dans le sein de Marie. D'où ces deux lettres, en s'unissant, forment le chiffre de Marie[1]; et, par suite, donnent l'AVE MARIA, le CHAPELET, le ROSAIRE ; c'est-à-dire, la prière du salut, le salut des hommes ayant commencé par la Salutation Angélique, par l'AVE MARIA.

 Or, Marie, en toute occasion, fait éclater une prédilection toute particulière pour le Chapelet, qui est la prière des humbles et des petits.

 Déjà, à Lourdes, elle se présentait à Bernadette avec le Chapelet à la main ; elle montrait à la Voyante la manière de le réciter. A Pontmain, les deux enfants auxquels elle se fait voir tout d'abord, sont des dévots du Chapelet, leur bonne mère les a habitués à le dire tous les jours.

 Dans le cours de l'Apparition, quand on commença le Chapelet, la Vierge parut faire des mouvements d'ascension vers le Ciel, toute la Vision grandit.

 « Voilà, disent les enfants, qu'elle devient deux fois grande comme sœur Vitaline, et que le cercle bleu s'étend en proportion. » Les étoiles dorées se multiplient sur sa robe ; à la fin, elle en était toute couverte.

 Ah ! c'est que le Chapelet est la prière privilégiée de Marie. C'est l'arme puissante qu'elle mit aux mains de saint Dominique pour convertir les Albigeois; aux mainsde saint Pie V, pour donner la victoire aux Chrétiens sur les Musulmans, dans la grande bataille de Lépante, en 1571.

 Si les armées ennemies se sont arrêtées subitement à la frontière de nos provinces de l'Ouest, n'est-ce pas à la sainte habitude qu'ont les paroisses de réciter le Rosaire dans les Eglises, le Dimanche? N'est-ce pas au Chapelet qui se récite, chaque soir, dans les familles, qu'on doit cet arrêt subit et comme irrésistible que les troupes allemandes subissent à ce moment?

 Grande leçon, qui doit nous affectionner tous à la dévotion du Chapelet, nous faire chercher, dans cette pieuse pratique de chaque jour, notre salut, le salut de nos Frères, le salut de nos Enfants, le salut et la délivrance de toute l'Eglise, le salut et la conversion de toute la France. C'est la première Croisade de prières que la Vierge vient nous demander à tous, comme à ses enfants privilégiés : MAIS PRIEZ, MES ENFANTS.

 2° NOM ET CHIFFRE OU SIGNE DE JÉSUS. – CRUCIFIX, CHEMIN DE LA CROIX.

 C'est un I, s'écrient les enfants, l'initiale du nom de Jésus ! C'est un S, l'initiale du nom du Sauveur: JÉSUS SAUVEUR ! la grande nouvelle annoncée par l'Ange aux bergers. Voici que je viens vous annoncer une grande nouvelle, c'est qu'aujourd'hui il vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur (Luc, II, 10, 11).

 Deux lettres mystérieuses encore qui rappellent, la première étant surmontée de la seconde, le Serpent d'airain, le nom et le chiffre de Jésus : JÉSUS SAUVEUR DES HOMMES, JÉSUS CRUCIFIÉ[2].

 Le peuple commençant à murmurer contre Dieu et contre Moïse, le Seigneur envoya contre lui des serpents de feu, dont la morsure en fit mourir plusieurs. Et ils vinrent à Moïse et lui dirent : Nous avons péché contre le Seigneur et contre vous. Priez-le qu'il nous délivre des serpents. Moïse pria donc, et le Seigneur lui dit : FAIS UN SERPENT D'AIRAIN, ET METS-LE AU BOUT D'UNE PIQUE, pour servir de signe. Quiconque étant blessé le regardera, sera guéri (Nombres, XXI, 4 et suiv.).

 De là cette parole de Notre-Seigneur Jésus-Christ lui-même dans saint Jean : Comme Moïse éleva le serpent dans le désert, en forme de croix, il faut de même que le Fils de l'homme soit élevé, c'est-à-dire crucifié, afin que tous ceux qui croient en lui ne périssent point, mais qu’ils aient la vie éternelle (Jean, 111, 14, 15).

 O bonté admirable de Jésus ! il fait entendre contre les pécheurs, contre les Docteurs de la loi et les Pharisiens hypocrites, des paroles et des menaces qui semblent leur ôter tout espoir : Serpents, race de vipères, comment éviterez-vous d'être condamnés au leu de l'enfer (Matth., XXIII, 33)? et il se charge lui-même de leur en fournir le moyen, en réalisant, en sa Personne adorable, ce que Moïse n'avait donné qu'en figure. Il prend la place des pécheurs ; il recueille, non la coulpe, mais la peine du péché ; et, comme le serpent d'airain, il est élevé, cloué sur la Croix ; de telle sorte que nous n'avons qu'à le regarder, à nous appliquer les mérites de ses souffrances pour être guéris des morsures infernales que le péché nous a faites.

 Voilà pourquoi, dans l'Apparition de Pontmain, Marie se montre constamment avec la Croix : d'abord, une petite Croix rouge sur la poitrine ; puis, une Croix et un Christ de même couleur dans les mains, appelant ses enfants à méditer les souffrances de son Fils, à chercher leur salut dans la voie douloureuse du Calvaire ; enfin, deux Croix blanches sur les épaules, symbole du triomphe et de la résurrection ; signe manifeste que le salut de son peuple, qui a commencé par l'Incarnation, l'Ave Maria, le CHAPELET, s'achèvera par la Passion et par la Croix le CHEMIN DE LA CROIX.

 Du reste, la pensée de notre bonne Mère sur ces deux grandes dévotions, se révèle tout entière et dans le choix des enfants auxquels elle daigne se montrer, et par toutes les circonstances de l'Apparition. Les heureux Voyants sont des dévots du Chapelet et des dévots du Chemin de la Croix ; puis, après la récitation du Chapelet, marquée dans l'Apparition, comme nous l'avons dit, d'incidents si extraordinaires, vient l'exhibition de la Croix, qui en est comme la conclusion et le tableau le plus saisissant.

 Marie elle-même veut nous présenter l'image de son Fils expiré, encore tout sanglant ; elle écrit de sa main son nom adorable, JÊSUS-CHRIST ! et nous redit à tous « Voyez en quel état vos crimes l'ont réduit…  Voyez à quel grand prix vous avez été rachetés. Profitez donc de son sang et de ses souffrances… Suivez  Jésus-Christ, avec moi, dans cette voie douloureuse  du Calvaire, et demandez grâce pour vous et pour mon  peuple, dans un grand esprit de pénitence et de componction. »

 C'est dans cette vue, M. T. C. F., que je donne ici les quatorze Stations du Chemin de la Croix, en demandant, à chaque Station, avec un cœur pur et un esprit droit, le cœur contrit et humilié auquel Dieu ne résiste jamais.

 Je le fais aussi pour vous remercier tous de l'empressement que vous avez mis à nous venir en aide, par vos bonnes offrandes, à avoir, à la Maison-Mère, un Chemin de Croix plus convenable.

 Puisse cette dévotion salutaire gagner tous nos cœurs et nous faire trouver, dans les Plaies adorables de Jésus crucifié, le remède à tous nos maux, notre propre salut et le salut de tous ceux qui nous sont chers!

 EXERCICE  du CHEMIN DE LA CROIX

 Dans le but d'obtenir la parfaite Contrition et la parfaite Pureté de cœur.

 Ordre de l'exercice.

 1° Prières préparatoires, à l'ordinaire: O Crux ave, etc. Vive Jésus, vive sa Croix, etc. O Jésus, notre aimable Sauveur, etc.

 2° Avant la première Station, et en allant d'une Station à une autre :

 

Sancta Mater, istude agas, crucifixi fige plagas cordi meo valide.

Sainte Mère, je vous en supplie, imprimez profondément dans mon cœur les plaies de Jésus crucifié

                                   

 

3° Enoncer la Station et la faire suivre de l'invocation de saint François d'Assise :

  

V/. *Adoramus te, Christe, et benedicimu tibi ;

V/. Nous vous adorons, ô Jésus ! et nous vous bénissons ;

R/.Quia per sanctam crucen tuam redemisti mundum.

R/. Parce que vous avez racheté le monde par votre sainte croix.

 

4° Trois invocations qui reviennent à chaque Station, sous une forme ou sous une autre, selon l'attrait de chacun :

 

Créez en moi un cœur contrit et humilié, ô mon Dieu ! afin que vous ne me méprisiez jamais.

Cor contritum et humiliatum crea in me, Deus, ut me non despicias.

Donne, Seigneur mon Dieu, à mon cœur la pénitence, à mon âme,  la contrition, à mes yeux une source de larmes.

Da, Domine Deus, cordimeo paenitentiam, spiritui contritionem, oculis lacrymarun fontem.

Créez en  moi un cœur pur, ô mon Dieu, ! et renouvelez au fond de mes entrailles l’esprit de droiture et de justice.

Cor mundum crea in me, Deus, et spiritum rectum innova in visceribus meis.

 

5° On termine par Pater, Ave, Gloria; ou, simplement, par un Gloria, qu'on peut faire suivre de nos six invocations ordinaires :

 Cœur sacré de Jésus, ayez pitié de nous.

Cœur immaculé de Marie, priez pour nous.

Saint Joseph, priez pour nous.

Saints Anges Gardiens, priez pour nous.

Saints et Saintes de Dieu, intercédez pour nous.

Que les âmes des fidèles trépassés reposent en paix par la miséricorde de Dieu. Ainsi soit-il.

——————————————–

 Nous insérons ici un moyen très facile et très pieux de faire de ferventes et rapides Neuvaines.

 NEUF SOUVENIRS DE LA PASSION

 Neuf Souvenirs de la Passion servant très utilement à répéter, en forme de Neuvaine, certaines invocations courtes et pieuses.

Premiers Souvenirs, les cinq plaies: I. La plaie du pied droit

II. la plaie du pied gauche ; III. la plaie de la main droite ; IV. la plaie de la main gauche ; V. la plaie du Sacré Côté.

Quatre autres Souvenirs : VI. l'agonie et la sueur de sang; VII. la flagellation ; VIII. le couronnement d'épines ; IX, la croix et l'abandonnement.

Il est à remarquer que ces neuf Souvenirs donnent les neuf sources de sang et les neuf grands tourments de la Passion.

Ce sont des vues de l'esprit pour se fixer dans la 'Neuvaine et la faire avec plus de ferveur, il n'est pas nécessaire de les articuler de bouche.

On peut s'en servir, en toute occasion, soit le jour, soit la nuit, pour réciter neuf fois, par exemple, ces invocations ou d'autres 0 Jésus ! soyez-moi Jésus et sauvez-moi ! – 0 Jésus .1 ô Marie soyez mon salut ! – De la mort éternelle, délivrez-nous, Jésus ! Jésus, attaché et élevé en croix, ayez pitié de nous ! – Par votre croix et votre abandonnement, délivrez-nous, Jésus ! etc., etc. En récitant ces invocations, demander la grâce en vue par les neuf Souvenirs qu'on parcourt de cœur.

  PREMIÈRE  STATION

 Jésus est condamné à mort.

 Reconnaissance éternelle à Jésus pour le grand bienfait de la Rédemption ; crainte salutaire de ses jugements.

 O Jésus, mon Seigneur et mon Dieu ! qui vous laissez condamner à la mort pour nous donner la vie, je vous dois une reconnaissance éternelle et pour les maux infinis de l'enfer dont vous m'avez délivré, et pour les biens infinis du paradis que vous m'avez mérités. Non, non, mon Dieu, ce ne serait point assez de la vie la plus longue pour vous bénir, vous remercier et vous aimer comme je le dois, pour cette double et infinie miséricorde; donnez-moi, je vous en supplie, donnez-moi l'éternité bienheureuse, afin que je m'acquitte éternellement de ce grand et inépuisable devoir.

 Et maintenant, ô Juge suprême des vivants et des morts, n'entrez pas en jugement avec votre serviteur, parce que nul homme vivant ne sera justifié devant vous ; ôtez de mon âme et de mon corps la source ordinaire de toute condamnation, l'orgueil et l'impureté ; et faites-moi le don d'une entière rémission, avant le jour terrible de vos jugements et de vos vengeances[3].

 Créez, etc. … Donnez, etc. … Créez, etc. …

 Gloria. Invocations ordinaires.

 DEUXIÈME STATION

 Jésus est chargé de sa croix.

 Demander, avec instance, la victoire sur nos mauvais penchants et l'amour de la croix.

 O Jésus, mon Seigneur et mon Dieu ! par la miséricorde infinie avec laquelle vous avez pris sur vous mes iniquités et celles de tous les hommes, délivrez-moi du poids horrible de mes nombreux, péchés, et donnez-moi la victoire sur tous mes mauvais penchants.

 Par la douceur infinie cri que vous avez montrée en recevant, sur vos épaules meurtries et ensanglantées, le terrible instrument de votre supplice, ô Jésus ! accordez-moi la grâce de me renoncer moi-même, de prendre ma croix, de la porter tous les jours et de vous suivre.

 Par cette plaie affreuse, un des plus cruels tourments de votre Passion, creusée par la croix dans votre épaule sacrée, pendant que vous montiez au Calvaire[4], créez en moi un cœur contrit et humilié, ô mon Dieu 1 afin que vous ne me méprisiez jamais; donnez, etc. ; créez, etc.

 Gloria. Invocations ordinaires.

 TROISIÈME  STATION

 Jésus tombe sous le poids de sa croix.

 Compatir à Jésus tombant pour nous relever, s'affaiblissant pour nous fortifier; lui demander, avec ardeur, sa divine assistance.

 O Jésus, vous tombez sous le poids des tourments que vous avez déjà endurés dans la flagellation et le couronnement d'épines; vous tombez sous le poids de votre croix qui ne porte que sur des plaies, et plus encore sous le poids de nos innombrables péchés ; vous tombez, ô Jésus ! pour nous relever, vous vous affaiblissez pour nous fortifier. Ah ! tendez-moi, tendez-nous à tous une main secourable, au milieu de tant de dangers auxquels nous sommes exposés. « 0 mon Dieu ! qui savez que, faibles comme nous le sommes, nous ne pouvons nous soutenir, donnez-nous la force de l'âme et du  corps, afin que nous surmontions, par votre assis« tance et e nous avons à souffrir pour nos péchés[5].

 Créez, etc. Donnez, etc. Créez, etc.

 Gloria. Invocations ordinaires.

 QUATRIÈME STATION

 Jésus rencontre sa très sainte Mère.

 S'unir à l'amour et aux adorations de Marie rencontrant son divin Fils; prier Jésus et Marie d'être notre salut.

 O Jésus ! ô Marie ! votre vie sur la terre n'a été qu'une croix et un martyre continuel, pour mon salut et le salut de tous les hommes ; et maintenant, vous vous réunissez encore, sur lechemin du Calvaire, pour accomplir ensemble dans Jérusalem, l'excès de miséricorde que vous avez résolu d'accomplir pour notre amour : O Jésus ! ô Marie ! soyez mon salut ! (neuf fois).

 O Jésus ! soyez mon salut, en me donnant, par Marie, un cœur profondément contrit et profondément humilié, que vous ne méprisez jamais; en donnant à mon cœur une véritable pénitence, à mon âme une parfaite contrition, à mes yeux une source abondante de larmes; en créant en moi un cœur pur, ô mon Dieu ! et en renouvelant, etc.

 Faites, s'il vous plaît, ô Jésus ! que je sois rempli toute ma vie, de respect, de confiance et d'amour pour Marie votre Mère; et vous, Marie, mon espérance, soyez mon salut, en m'obtenant la haine de moi-même et l'amour de Jésus, cet amour ardent avec lequel vous l'avez accompagné dans sa douloureuse Passion.

 Gloria. Invocations ordinaires.

 CINQUIÈME STATION

 Simon le Cyrénéen aide à Jésus à porter sa croix.

 Prier Jésus, le Dieu fort, de nous aider à garder ses Commandements et ses Conseils, et à partager ses souffrances.

 0 Jésus ! je vous en supplie, par la bonté infinie avec laquelle vous avez permis à Simon le Cyrénéen de vous aider à porter votre croix, accordez-moi toutes les lumières et toutes les grâces qui me sont nécessaires pour garder vos Commandements. Donnez-moi votre esprit de sainteté avec la plénitude de votre force, afin que je puisse observer mes Vœux et mes Règles, suivre en tout vos divins Conseils, et faire constamment votre très sainte volonté.

 Créez en moi, ô Jésus ! comme participation à vos souffrances et à votre calice d'amertume, un cœur profondément contrit et profondément humilié que vous ne méprisez jamais ; donnez, Seigneur Dieu, à mon cœur une véritable pénitence, à mon âme une parfaite contrition, à nies yeux une source abondante de larmes; créez en moi un cœur pur, ô mon Dieu ! et renouvelez, etc.

 Gloria. Invocations ordinaires.

 SIXIÈME STATION

 Une femme pieuse essuie la face de Jésus-Christ.

 Prier Jésus, par ses humiliations infinies, de nous purifier des souillures du vice, et de renouveler, par son divin Esprit, la face de notre âme.

 O Jésus, Lumière éternelle! maintenant tout couvert de crachats, de poussière, de sueur et de sang, ah! je vous en supplie, par votre beauté infinie et par vos profondes humiliations, purifiez mon âme et mon corps, arrachez-moi de la boue des vices, de peur que je n'en sois souillé.

 Daignez, ô Jésus ! envoyer votre Esprit-Saint, pour renouveler la face de mon âme, en la délivrant de tout péché et en la remplissant de ses dons sacrés.

 O Saints et Saintes de Dieu ! qui éprouvez si heureusement dans le Ciel que Jésus-Christ tient fait à lui-même tout ce qu'on fait aux moindres des siens, ah ! je vous en supplie, par amour et par reconnaissance pour notre commun Seigneur et Maître, faites à son pauvre serviteur ce que vous ne pouvez faire à sa Personne adorable : conjurez son infinie puissance et bonté de créer en moi un cœur profondément contrit et profondément humilié, qui rende à mon âme son ancienne beauté qu'elle a perdue par le péché ; de donner, etc., de créer, etc., et de renouveler, etc.

 Gloria. Invocations ordinaires.

 SEPTIÈME  STATION

 Jésus tombe à terre pour la seconde lots.

 Prier Jésus, tombant de nouveau, de nous rendre profitable tant de souffrances et de nous préserver de toute rechute.

 O Jésus ! vous tombez de lassitude à me chercher et à me poursuivre ; vous passez par toutes les douleurs du chemin de la Croix pour me racheter : qu'un si grand travail ne soit pas sans fruit.

 Daignez, ô Jésus notre force ! malgré mon excessive faiblesse et la malice de mes ennemis, me préserver de toute rechute, et me rendre à jamais profitables dans le Ciel tant de fatigues et de peines que vous avez endurées pour nous délivrer de la mort éternelle.

 Créez, etc. Donnez, etc. Créez, etc.

 Gloria. Invocationsordinaires

 HUITIÈME STATION

 Jésus console les filles d'Israël qui le suivent.

 Demander à Jésus, notre unique Consolateur, l'unique consolation qui soit possible à un pécheur ici-bas : un cœur vraiment contrit et vraiment humilié.

 O Jésus, vrai Consolateur, unique Consolateur, souverain Consolateur des âmes affligées ! ah ! je vous en conjure, par la générosité infinie avec laquelle vous avez recommandé aux saintes femmes de pleurer, non sur vous, mais sur elles-mêmes et sur leur perfide patrie, accordez-moi la seule consolation qui me soit possible sur la terre : un cœur profondément contrit et profondément humilié, afin que vous ne me méprisiez jamais et que je puisse pleurer mes péchés, ceux de mes frères et ceux de tous les hommes.

 Donnez, etc. Créez, etc.

 Gloria. Invocations ordinaires.

 NEUVIÈME STATION

 Jésus tombe à terre pour la troisième fois.

 A cette troisième chute de Jésus, le conjurer, avec instance, de nous délivrer de l'impénitence finale et d'avoir pitié des pauvres pécheurs.

 O Jésus, mon Seigneur et mon Dieu ! par cette troisième chute, plus humiliante et plus douloureuse que les deux premières, par la douleur extrême que vous cause la désolante pensée de l'inutilité de votre sang pour le grand nombre des pécheurs, je vous en supplie et vous en conjure, délivrez-moi de l'aveuglement, de l'endurcissement et de l'impénitence finale ; ayez pitié des pauvres aveugles, des pauvres endurcis, des pauvres impénitents pécheurs.

 Daignez, ô Jésus, victime d'amour ! qui allez être immolé pour le salut des hommes, daignez nous appliquer à tous les mérites de votre sacrifice dans le temps, afin que nous puissions vous offrir celui de nos louanges pendant l'éternité.

 DIXIÈME LEÇON

 Jésus est dépouillé de ses vêtements

 A la vue de Jésus, Agneau immolé, Agneau écorché, tout couvert de sang et de plaies, nous écrier trois fois, en nous frappant la poitrine.

 Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, pardonnez-nous, Jésus.

Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, exaucez-nous, Jésus

Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, ayez pitié de nous, Jésus.

 Trois fois aussi:

Cœur de Jésus, brûlant d'amour pour moi, enflammez mon cœur d'amour pour vous.

 Puis demander, avec instance, d'être dépouillé du vieil homme et d'être revêtu de l'homme nouveau.

 O Jésus, mon amour ! je vous supplie et vous conjure, par cet horrible dépouillement, par tous les tourments de la flagellation qu'il vous fait souffrir à la fois, par l'état affreux où il vous réduit pour mon salut, par les douleurs de la couronne d'épines, Jésus, ô Jésus ! arrachez de mon cœur tout ce qui vous déplaît, dépouillez-moi entièrement du vieil homme et de ses convoitises, et revêtez-moi de l'homme nouveau qui a été créé dans une justice et une sainteté véritables.

 Créez, etc. Donnez, etc. Créez, etc.

 Gloria. Invocations ordinaires.

 ——————————————–

 Profiter de la 11° et de la 12° Station, pour demander la délivrance de l'enfer; de la peine du sens, parle crucifiement; de la peine du dam, par l'abandonnement. Par votre croix et votre abandonnement, délivrez-nous, Jésus.Ces deux Stations, en particulier plus développées que les autres, sont laissées à la dévotion de chacun.

 ONZIÈME STATION

 Jésus est attaché à la croix.

 A la vue de Jésus, attaché et élevé en croix, subissant le plus cruel de tous les supplices, nous écrier avec amour: Jésus, attaché et élevé en croix, ayez pitié de nous(neuf fois); puis faire les demandes suivantes :

 0 Jésus, mon divin Rédempteur ! permettez-moi de me servir de cette invocation, si douloureuse pour vous, si miséricordieuse pour moi, pour vous demander vos grâces et vous exposer tous nos besoins, afin que, par vos souffrances, nous soyons délivrés des supplices de l'enfer, de la peine du sens.

 Jésus, attaché et élevé en croix, créez en moi un cœur profondément contrit et profondément humilié, afin que vous ne me méprisiez jamais ; donnez à mon cœur une véritable pénitence, à mon âme une parfaite contrition, à mes yeux une source abondante de larmes; créez en moi un cœur pur, ô mon Dieu 1 et renouvelez, etc.

 Jésus, attaché et élevé en croix, donnez-moi une foi très vive, une espérance très ferme, une charité très ardente.

 Jésus, attaché et élevé en croix, donnez-moi la fidélité à mes Vœux : une parfaite Pauvreté, une parfaite Chasteté, une parfaite Obéissance et la Persévérance finale.

 Jésus, attaché et élevé en croix, donnez-moi une patience à toute épreuve, une douceur inaltérable, une véritable et parfaite humilité.

 Jésus, attaché et élevé en croix, donnez-moi la piété, la ferveur, la dévotion, le zèle et toutes les vertus de mon saint état.

 Jésus, attaché et élevé en croix, ayez pitié de la Sainte Eglise et de son auguste Chef, N. ; de la France et de tout le peuple chrétien ; de ma famille et de tous ses membres; de la Congrégation et de tous ses membres. Ayez pitié des pécheurs, afin qu'ils se convertissent ; des justes, afin qu'ils persévèrent; des tièdes, afin qu'ils deviennent fervents; des fervents, afin qu'ils avancent dans la vertu et la sainteté. Mon Dieu, ayez pitié de moi, qui suis le plus coupable et le plus misérable des hommes.

 O Jésus ! je vous demande toutes ces grâces et je vous recommande tous ces besoins, par votre horrible crucifiement, par l'élévation, la plantation et la construction de la croix, par tous ces ébranlements si douloureux et si cruellement répétés.

  O Jésus, mon amour ! souffrez que je vous offre à la même fin, vos trois heures d'agonie sur la croix, les torrents de sang qui coulent de tout votre corps, tout le poids de ce corps divin qui ne porte que sur des plaies, tout le poids de votre tête sacrée couronnée d'épines et laissée sans appui, le déboîtement de vos os, la rupture de vos veines et de vos nerfs, l'épuisement de vos forces, la soif horrible qui vous dévore, les ténèbres qui vous environnent, les douleurs incompréhensibles du cœur immaculé de Marie votre Mère ; et, par dessus tout, l'amour infini qui vous consume et qui, seul, vous fait endurer tant et de si grands supplices.

 Ah ! Jésus, mon Seigneur et mon Dieu, que cet excès de tourments, que cette mer de douleurs, que cet océan d'amertumes et d'angoisses, que cet abîme de toutes les souffrances, rassemblées sur votre Humanité sainte, me transportent d'amour et de reconnaissance ; qu'ils me fixent sur la croix avec vous jusqu'à mon dernier soupir; et que, me purifiant de toutes mes iniquités, ils me délivrent de l'assemblage de tous les maux dont seront accablés éternellement, en enfer, les pécheurs impénitents qui auront refusé de profiter de votre Passion.

 O très douloureuse Vierge Marie ! par votre cœur transpercé, soyez ma défense au jour du jugement, et obtenez-moi, du cœur entrouvert de Jésus votre divin Fils, que je ne sois point brûlé des flammes éternelles[6].

 Gloria. Invocations ordinaires.

 DOUZIÈME STATION

 Jésus meurt sur la croix.

 C'est ici la consommation de l'amour et des douleurs de Jésus. En le voyant mort sur la croix, abandonné de Dieu et des hommes, le conjurer instamment de nous délivrer de la perte de Dieu, de la peine du dam.

 O Jésus, mon Seigneur et mon Dieu ! je vous supplie et vous conjure, par votre mort si douloureuse et si ignominieuse, de me délivrer de la peine du dam, de la perte de Dieu, qui est l'enfer des enfers.

 De la mort éternelle[7]délivrez-nous, Jésus (neuf fois).

 Je vous demande cette grâce suprême, ô Jésus ! par la douleur infinie que vous a causée l'abandon de votre Père, et par ce cri déchirant sorti de votre Cœur adorable: Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'avez-vous abandonné?

 O doux Jésus ! après avoir supporté, sans vous plaindre, toutes les tortures de la Passion, vous n'avez pu endurer ce terrible abandon, même passager, de votre divin Père, ah ! je vous en conjure, ne m'abandonnez pas !. .

 Ne m'abandonnez pas, pendant ma vie, à la fureur de mes passions, à la puissance des démons, à ma faiblesse, à mon ignorance, à ma profonde malice et perversité.

 Ne m'abandonnez pas à la mort, au jugement, dans l'éternité… Seigneur Jésus, qui vous êtes rendu vous-même malédiction pour nous, en vous laissant attacher à la croix[8], ah ! je vous en supplie, que je n'entende point tomber sur moi l'épouvantable sentence de la réprobation – Retirez-vous de moi, maudits, allez au leu éternel[9].

 0 Jésus mon Dieu ! je veux m'humilier et me repentir, je veux croire et espérer en vous, je veux vous aimer et vous servir généreusement sur la terre: faites qu'un jour, à votre droite, avec les Elus, j'entende ces douces paroles Venez, les bénis de mon Père, possédez le royaume qui vous a été préparé dès le commencement du monde[10].

 Divin Jésus, Dieu de toute sainteté, expirant entre deux scélérats pour mon amour, afin que je sois séparé des pécheurs dans l'éternité, faites que je m'en sépare volontairement sur la terre par une parfaite contrition et une entière pureté de cœur. Créez, etc. Donnez, etc. Créez, etc. Gloria. Invocations ordinaires.

 TREIZIÈME STATION

 Jésus est déposé de la croix et remis à sa Mère.

 Nous unir à tous les sentiments de Marie recevant dans ses bras le corps adorable et inanimé de Jésus son divin Fils. Offrir à Dieu le martyre ineffable de cette tendre Mère en réparation de toutes nos infidélités.

 0 Jésus, mon Seigneur et mon Dieu ! je. vous en supplie, acceptez le martyre ineffable de votre Mère, lorsqu'elle vit votre visage pâle, sanglant et défiguré ; vos yeux éteints, votre bouche fermée, votre côté ouvert, vos mains et vos pieds percés, tout votre corps couvert de plaies et noyé dans la mort ; acceptez, ô Jésus ! ce martyre ineffable, dont vous seul avez connu tout le prix ; acceptez-le, je vous en conjure, en réparation de ma dureté, de mon insensibilité et de toutes mes ingratitudes. Par cet ineffable martyre, créez en moi, ô Jésus ! etc. Donnez, etc., Créez, etc.

 Gloria. Invocations ordinaires.

 QUATORZIÈME STATION

 Jésus est mis dans le sépulcre.

 Par la Sépulture de Jésus et par toutes les vertus que Marie pratique dans ce mystère, demander, avec instance, que notre cœur soit toujours un tombeau vivant, un digne sanctuaire pouf le corps de Jésus-Christ vivant dans l'Eucharistie.

 0 Jésus, mon Seigneur et mon Dieu! je vous supplie, par votre divine Sépulture et par toutes les vertus que Marie pratique dans ce mystère, de me donner une constante et ardente piété. Et, puisque vous avez voulu être placé dans un sépulcre nouveau, pour nous faire connaître que c'est avec un nouveau cœur que nous devons nous approcher de vous dans le Sacrement de votre amour, daignez nous purifier de toutes nos taches, et nous rendre dignes de nous asseoir souvent à votre sacré Banquet.

 Ensevelissez dans ce même tombeau, toutes nos iniquités et toutes nos convoitises, afin que,mourant à nos passions et à toutes les choses d'ici-bas, pour mener avec vous une vie cachée en Dieu, nous méritions de faire une fin heureuse, et de vous contempler à découvert, dans la splendeur de votre gloire.

 Créez, etc. Donnez, etc. Créez, etc.

 Gloria. Invocations; et, ensuite, Prières ordinaires.

 ——————————————–

 C'est de la Croix, du cœur percé de Jésus, par le cœur transpercé de Marie, que nous viendront la parfaite contrition, la parfaite humilité et la parfaite pureté de cœur, qui ne peuvent manquer de relever notre confiance et de donner à nos prières une très grande efficacité. C'est dans ce but que nous avons réuni ces pensées et ces affections, laissant à chacun pleine liberté de s'en servir selon sa piété et son attrait.

 On sait combien nous désirons de voir le Chemin de la Croix, canoniquement érigé, dans chaque Etablissement mais on sait également que, pour gagner les nombreuses indulgences qui y sont attachées, il n'y a qu'à parcourir, successivement, les Stations, en méditant sur la Passion, sans s'astreindre à réciter telle ou telle prière, telles ou telles invocations. Pas de meilleur exercice pour se préparer à la Confession, et pour obtenir ce cœur profondément contrit et profondément humilié qui est la condition nécessaire du pardon des péchés.

 Reste le 3e Paragraphe annoncé sur la composition matérielle du mot MAIS, le nombre de ses lettres : nous le donnons ici rapidement.

 3° Réflexions sur le nombre des lettres du premier moi de l'Inscription.

 Il y a plus, c'est que le nombre même des lettres de la mystérieuse conjonction peut donner lieu à de très sérieuses réflexions.

 Paraissant une à une et à distance, ces lettres se comptent : une, deux, trois, quatre.

 Or, d'après les Pères, saint Augustin en particulier, ces nombres sont très mystérieux.

 Le nombre trois est comme le signe de Dieu et le nombre quatre est comme le signe des créatures mais pour le bien comprendre, il faut rappeler qu'il y a « la  science des nombres sacrés[11], science sans laquelle, dit  le saint Docteur, on ne peut connaître les merveilles  de Dieu ; car, ajoute-t-il, si l'on n'étudie les mathématiques divines d'après lesquelles le Suprême Architecte a travaillé, on ne saurait avoir le secret de ses  ouvrages, toutes ses opérations reposant sur le nombre, selon cette parole de la Sagesse : Dieu a réglé  toutes choses avec mesure, avec nombre et avec poids » (Sag., XI, 23).

 Le nombre trois, un, simple, indivisible, est le signe de l'éternité, le signe de Dieu : un en nature, trine en personnes, simple et indivisible en essence et en substance.

 Il est aussi le signe de l'âme, créée à l'image de Dieu substance spirituelle, indivisible, immortelle, capable d'intelligence et d'amour.

 Le nombre quatre, considéré comme procédant du nombre trois, le suivant immédiatement et en dépendant, est proprement le signe de la création. Il annonce l'action de Dieu se manifestant au dehors, par la production des êtres. Il est visible, d'ailleurs, que le nombre quatre est la loi et la mesure des choses matérielles, avec leur quatre dimensions: longueur, largeur, hauteur et profondeur. Puis, on a les quatre points cardinaux: le nord, le midi, l'est et l'ouest; les quatre saisons de l'année : le printemps, l'été, l'automne et l'hiver ; les quatre éléments des Anciens : l'eau, l'air, la terre et le leu, etc., etc.

 Quant à l'homme qui est, par sa nature, à la fois esprit et corps, il repose sur le nombre sept : car, par son âme substance spirituelle, capable de connaître et d'aimer, il a le nombre trois ; et, par son corps, qui tient à la matière, il a le nombre quatre.

 Mais perfectionné par la grâce, l'homme repose sur le nombre dix, qui est, selon saint Thomas, le signe de la perfection, comme étant la première et infranchissable limite au-delà de laquelle les nombres ne continuent pas, mais recommencent.

 Merveilleuse pensée qu'explique admirablement ce passage de saint Jean : Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole, et mon Père l'aimera et nous viendrons à lui, et nous ferons en lui notre demeure (Jean, XIV, 23).

 C'est-à-dire qu'à l'homme, représenté par le nombre sept, vient s'ajouter la Trinité elle-même, représentée par le nombre trois : le Père qui le perfectionne par sa Puissance ; le Fils, qui le perfectionne par sa Sagesse ; le Saint-Esprit, qui le perfectionne par son Amour: les trois Personnes divines qui le rendent participant de leur nature, le sanctifient par la grâce des sept Sacrements et par la puissance des sept Dons du Saint-Esprit, dans la fidélité aux dix Commandements et la pratique des sept Vertus principales : le formant ainsi sur le modèle de l'homme nouveau, créé selon Dieu, dans une justice et une sainteté véritable (Eph., IV, 24).

 En Jésus-Christ, dit saint Paul, vrai Dieu et vrai homme, véritable prototype de tous les Elus, il a plu au Père de tout réunir comme dans le chef, tant ce qui est dans le ciel que ce qui est dans la terre. (Eph., I, 10).

 Ainsi, uni à la Trinité, soutenu, dirigé et complété par la Trinité, l'homme arrive au nombre de la perfection et y reste comme dans un château fort; c'est-à-dire que, renfermant ses pensées et ses actions dans les limites morales des dix commandements de Dieu, il s'y perfectionne et s'y sanctifie, sous l'action particulière et continuelle de l'Esprit-Saint.

 Oh ! que le monde serait beau, que la terre serait heureuse, si ce plan divin était compris et fidèlement suivi; si chacun s'efforçait d'arriver à la perfection des saints, à l'édification du corps de Jésus-Christ, jusqu'à ce que nous parvenions tous à l'unité d'une même foi et d'une même connaissance du Fils de Dieu, à l'état d'un homme parfait, à la mesure de l'âge complet de Jésus-Christ! (Éphe., IV, 12, 13).

 Mais hélas ! bientôt la faiblesse et l'orgueil de l'homme, sa corruption et son esprit de révolte, exploités par la fureur de Satan, viennent tout troubler et tout bouleverser. Le nombre de la transgression et du péché, le nombre onze, appelé de ce nom par les Pères, est bientôt atteint.

 Dans l'individu, il se multiplie par l'abus des trois facultés de l'âme et des quatre éléments du corps ; par les trois concupiscences et les sept grandes passions.

 Dans la famille et la société, il s'étend et se développe par la contagion et l'entraînement de l'exemple, par toutes les perversités de l'esprit et du cœur, par tous les dérèglements des sens. De là tous nos maux publics et privés. C'est ce que voit la divine Mère, ce qui excite sa compassion et ce à quoi elle veut apporter remède.

 Par la prière, elle veut soustraire son peuple chéri à l'action du démon, elle veut le faire remonter vers Dieu, son principe, le faire rentrer dans les limites de ses Commandements; en un mot, le mettre dans une voie où les bénédictions divines puissent de nouveau l'environner et lui rendre son ancienne splendeur. Voilà pourquoi elle daigne venir du Ciel à ses enfants, se montrer à eux pendant trois heures, et leur dicter elle-même le souverain moyen de salut, la prière.

 Et, on le voit, le nombre même des lettres du mot singulier qui tombe d'abord de ses mains maternelles, représente l'homme tout entier, annonce l'universalité du remède.

 Mais cette universalité précieuse ressort bien davantage de la signification profonde que ce mot mystérieux donne à toute l'Inscription: nous allons l'examiner dans les trois Paragraphes suivants.

 1° Universalité du remède apporté par Marie.

 Jésus-Christ a dit: veillez et priez. (Matth., XXVI, 41); et, en ces deux mots, il a résumé tout ce qui a jamais été enseigné sur le combat des tentations, soit pour les prévenir soit pour les vaincre.

 A Pontmain, Marie se contente de rappeler la seconde parole; mais, par le mot singulier dont elle la fait précéder, elle répond également à tout. Oui, ces deux mots, MAIS PRIEZ, si heureusement et si nouvellement unis répondent à tous les besoins et à toutes les difficultés. Point de douleurs, point d'angoisses, point de faiblesses ; nulle nécessité soit publique, soit particulière, soit spirituelle, soit temporelle, soit présente, soit à venir, auxquelles ne puisse suffire cette courte, merveilleuse et toute miséricordieuse Inscription : MAIS PRIEZ.

 Dernièrement, un de nos Religieux, fut réveillé en sursaut, au milieu de la nuit. Là, seul, dans la profondeur des ténèbres, il se trouve tout à coup, comme il est dit au Chapitre XXV du 1ierLivre de l'Imitation, troublé, agité, écrasé plutôt sous le poids de ses misères personnelles et des difficultés extérieures; écrasé surtout par la vue des maux qui désolent l’Eglise et la France, et la perspective de maux plus grands encore. Rien ne peut dire la tristesse profonde qui s'emparait de lui, malgré lui, à ces douloureuses pensées ; mais voilà que, subitement, il entend au fond de son cœur les douces paroles tracées à Pontmain par la miséricordieuse Marie : Mais priez, mes enfants, Dieu vous exaucera en peu de temps, mon Fils se laisse toucher.

 A l'instant, il sent, lui aussi, ses inquiétudes et ses agitations s'évanouir ; il reçoit de la merveilleuse Inscription une consolation et une force extraordinaires, et il comprend plus que jamais que, soit pendant la vie, soit à la mort, il n'a autre chose à faire que de se confier en Dieu et de recourir à sa bonté infinie par la toute puissante intercession de Marie, selon cette parole et cette promesse universelles : MAIS PRIEZ.

 En effet, voyez comme ces deux mots répondent à tout. Vous ne pouvez méditer, vous ne pouvez réfléchir, mais priez. Vous ne pouvez vous vaincre, vous ne pouvez porter vos Vœux, vous ne pouvez vous défendre contre les tentations qui vous obsèdent, contre les dangers qui vous entourent ; mais priez, mais priez.

 Vos péchés vous effraient, la mort vous épouvante, tous les démons s'acharnent contre vous; mais priez. Priez par Marie, priez avec Marie, priez au nom de Jésus votre Avocat, au nom de Jésus qui se laisse toucher ; priez par l'Esprit-Saint qui gémit et demande en vous et pour vous ; priez, persévérez dans la prière et votre salut est assuré : car Dieu le Père, de qui vient toute grâce, est toujours prêt à vous exaucer et à vous exaucer en peu de temps.

 La prière, le recours à Dieu par Marie, avec la médiation de Jésus, est aux pécheurs un refuge assuré contre le nombre et la grandeur de leurs crimes.

 Elle est contre le démon, une forteresse insurmontable à sa puissance, à ses ruses et à toute sa rage.

 Elle est, dans le monde, une sauvegarde assurée contre les attraits séducteurs de sa fausse liberté, de ses faux biens et de ses faux plaisirs.

 Elle est, dans les emplois, un soutien tout puissant contre les difficultés qui découragent, contre la multitude qui absorbe, contre la monotonie et la continuité qui écrasent.

 Elle est, dans les épreuves, un adoucissement à toutes les ingratitudes, un dédommagement de tous les oublis, un refuge et une défense contre toutes les injustices.

 Enfin, elle est un principe de pardon infaillible pour le passé le plus criminel, un remède souverain au présent le plus misérable, et une garantie certaine contre l'avenir le plus effrayant.

  Mais, c'est à la mort surtout, M. T. C. F., qu'il faudra nous souvenir de cette consolante et toute puissante parole de Marie : MAIS PRIEZ ; à la mort, c'est-à-dire, au moment où, comme nous en avertit saint Jean, le diable descend vers nous, plein de fureur et de rage, sachant qu'il lui reste peu de temps (Apoc., XII, 12); à la mort, où, dit encore Isaïe, l'enfer tout entier s'émeut et suscite contre nous des géants, les démons les plus redoutables, pour nous faire tomber (Is., XIV, 9). Eh bien, c'est à ce moment suprême et décisif qu'il faudra nous souvenir de ce mot délicieux de notre bonne Mère, afin d'opposer au peu de temps dont l'enfer veut profiter pour nous perdre, le peu de temps que Dieu met à nous exaucer, toutes les fois que Marie nous prête son secours. Elle dit elle-même, un jour, à sainte Brigitte: « A la mort de mes serviteurs, je viens au devant d'eux, moi leur Mère et Maîtresse, et je leur apporte toutes les consolations et tous les secours dont ils ont besoin. » Et c'est ainsi que Marie est pour ses enfants une consolation universelle et perpétuelle ; c'est pour eux particulièrement, en quelque état qu'ils puissent se trouver, qu'elle a écrit sa maternelle Inscription.

 En confirmation de tout ce qui précède sur la bonté, la miséricorde et la puissance sans bornes de Marie, résumons ici, rapidement, ce que l'Eglise nous en dit dans les Hymnes, les Antiennes, les Prières et Cantiques que la Sainte Vierge elle-même met dans la bouche des enfants et des pieux fidèles de Pontmain, pendant la céleste Apparition.

 Oui, toujours, avec Marie et par Marie, confiance, espérance, sainte joie et complète assurance :

 Avec Marie, la Mère du Rédempteur, la Mère de Jésus et ma Mère; Marie, la Porte du Ciel, l'Etoile de la mer (Alma Redemptoris).

 Avec Marie, la Reine des Cieux, la Maîtresse des ,Anges, la Vierge glorieuse, belle entre toutes, Marie qui ne prie jamais en vain le Christ Jésus (Ave, Regina Coelorum).

 Avec Marie, que nous saluons comme notre Reine, la Mère de Miséricorde, notre Vie, notre Douceur, notre Espérance, notre Avocate, la clémente, la pieuse, la douce Vierge Marie (Salve Regina).

 Avec Marie, l'aimable Mère de Dieu, la toujours Vierge, l'heureuse Porte du Ciel; celle qui brise les liens des captifs, qui éclaire les aveugles, qui dissipe tous les maux et obtient tous les biens; Marie, la Vierge incomparable, qui se montre toujours Mère, fait recevoir toutes les prières, délivre de tous les péchés, rend doux et chastes, donne la vie pure, et conduit à Jésus par un chemin sûr (Ave, maris Stella).

 Avec Marie, et les quarante-cinq titres de ses Litanies tous doux, plus consolants les uns que les autres : Marie Mère de Dieu, la Vierge des vierges, Pure, Aimable, Admirable, Puissante, Clémente, toujours Fidèle; Marie, le Salut des infirmes, le Refuge des pécheurs, la Consolation des affligés, le Secours des Chrétiens; Marie, l'incomparable Marie, Conçue sans la tache originelle, toujours en état de demander et d'obtenir grâce pour ses enfants, de son Fils adorable, l'Agneau de Dieu qui ôte tous les péchés du monde.

 Voyez, M. T. C. F., voyez, je vous prie, quels titres admirables s'ajoutent, dans l'Apparition même, par ces Antiennes, ces Hymnes et ces Litanies, à tous les motifs déjà donnés d'avoir confiance en Marie et de tout attendre de la bonté divine par son tout-puissant secours !

 2° Leçon universelle de courage, de droiture et de bon esprit à tirer de la céleste Inscription.

 En étudiant et contemplant, sur sa magnifique bande blanche, la merveilleuse Inscription de Pontmain, mais priez, mes enfants, Dieu vous exaucera en peu de temps, mon Fils se laisse toucher, on voit clairement que la Sainte Vierge laisse à gauche et couvre d'un silence miséricordieux et les maux extrêmes et humiliants qui pèsent sur sa nation privilégiée, et les longues iniquités plus humiliantes encore, qui les ont préparés et amenés. Dans la délicatesse incomparable de sa maternelle tendresse, elle épargne à ses enfants ce tableau déchirant, et laisse à leurs cœurs humiliés de les repasser eux-mêmes et de s'en repentir. Elle se hâte d'écrire à droite cette parole de miséricorde si propre à relever la confiance et le courage : MAIS PRIEZ. La mystérieuse conjonction indique évidemment qu'à des maux extrêmes, Marie apporte, comme souverain remède, la grande ressource de la prière. Or, c'est de là, de la disposition adoptée par la bonne Mère, et pour ce qu'elle écrit et pour ce qu'elle dissimule, qu'en réfléchissant, nous pouvons tirer une excellente leçon, une leçon universelle de charité, de droiture, de courage, de bon esprit, pour la direction de toute notre vie.

 En ce monde, rien n'est parfait ; les choses les plus excellentes sont accompagnées de défauts inhérents à notre pauvre nature humaine ; et les actes de vertu ne s'accomplissent qu'au milieu d'épreuves et de violences d'autant plus grandes et plus coûteuses à la nature que ces actes sont plus méritoires et doivent se répéter plus longtemps et plus souvent.

 Si donc, à l'exemple de la divine Mère, on n'avait soin de laisser à gauche les défauts, de les couvrir d'unoubli généreux, il n'y aurait ni charité, ni obéissance, ni dévouement ; il n'y aurait surtout, dans nos épreuves et nos combats si prolongés, ni courage ni persévérance qui pussent se soutenir. Expliquons ces pensées, en donnant quelques détails qui nous feront toucher au doigt qu'en tout et partout, la droiture d'intention et le bon esprit doivent nous faire laisser à gauche ce qui déplaît, ce qui décourage, ce qui abat; pour nous faire tomber, à droite, sur ce qui relève, sur ce qui encourage, sur tout ce qui est généreux.

 Chose singulière, c'est le bon emploi du premier mot de l'Inscription, de cette conjonction singulière qui marque le contraste et l'opposition, c'est ce mot, dis-je, qui révèle, pour ainsi dire, tous les secrets de l'âme, selon l'usage qu'on en fait.

 Ainsi, l'homme de foi tourne et tombe toujours à droite, jamais à gauche. Dans le cas d'opposition et de contraste, comme à Pontmain, entre le péché et la miséricorde, entre le châtiment et la délivrance ; le péché et le châtiment sont rejetés sur la gauche ; la miséricorde et la délivrance sont ramenées sur la droite: observation profonde, je le répète, qu'il nous importe extrêmement d'étudier ; car nous devons nous juger selon cette direction, à droite ou à gauche, donnée à nos pensées.

 Si elles laissent à gauche, dans l'oubli, la crainte servile, les plaintes, l'irritation, l'impatience, le murmure, la peine, tout ce qui attriste, pour nous faire tomber à droite, sur la confiance, la charité, la douceur, la soumission, le courage, la générosité, la sainte joie, bon signe; si nous tombons ainsi le plus souvent, très bon signe ; si c'est habituellement, signe excellent ; et si c'est toujours, signe infaillible, marque certaine, dans les choses ordinaires de la vie, de droiture, de bon esprit, de bon caractère, de bon jugement ; et, dans la grande affaire du salut, marque comme assurée de persévérance et de prédestination.

 Ainsi, le Juste dira : « C'est pénible ; mais Jésus en a souffert bien davantage. Je suis horriblement tenté ; mais tous les Saints l'ont été ; Dieu m'aidera, je puis tout en celui qui me fortifie (Ph., IV, 13). Les violences sont de tous les jours; mais on ne va au ciel que par la violence (Matth., II, 12). Je souffre, j'ai de la peine; mais ne souffre-t-on rien dans le monde? Mon état a ses  sacrifices ; mais tous en ont, mais peu ont les douceurs que me donnent la piété, la charité et le bon esprit qui règnent en Communauté. » Et ainsi de tout le reste; c'est le caractère propre des Elus de toujours s'arrêter, se fixersur des pensées de joie et d'espérance.

 Mauvais signe, au contraire, si, fréquemment, vous faites passer le bien à gauche, pour tomber, à droite, sur l'aigreur, le mécontentement, le murmure, l'abattement. Une telle tendance est-elle ordinaire, très mauvais signe, est-elle passée en habitude, signe détestable ; si elle date de loin, si elle ne nous permet presque plus de revenir aux pensées consolantes, marque lamentable pour l'ensemble de la vie, pour les rapports avec les Confrères, avec les Supérieurs, pour la Vocation et pour tout ; puis, à l'endroit du salut, marque plus lamentable encore.

 C'est alors le mais de l'impénitence, le mais de Judas. Il laisse à gauche la bonté du Cœur de Jésus ; il oublie le nom d'ami qu'il vient d'entendre, l'impression d'un baiser plein de miséricorde ; et il n'arrive, à droite, qu'à la confession satanique qui conduit au désespoir et au suicide : J'ai péché, dit le traître, j'ai livré le sang innocent ; et, étant sorti, il alla se pendre (Matth., XXVII, 4, 5).

 Malheureux ! il n'avait qu'à tourner la phrase et à dire : J'ai péché, MAIS je pleure… A la grandeur de mon crime, Jésus opposera la grandeur infinie de ses bontés ; et il serait sorti, comme Pierre, pour aller mourir avec Jésus, noyer son forfait dans le sang de Jésus; ou au moins, le pleurer amèrement, en attendant le martyre : Et Pierre étant sorti, il pleura amèrement (Matth., XXVI, 75).

 O Judas, que n'as-tu fait ainsi? Au lieu de porter le poids éternel d'un éternel supplice, tu passais à l'instant dans les embrassements de l'éternelle amitié de Jésus ! Mon Dieu, donnez-moi toujours le mais de la confiance, du repentir et de l'amour, le mais de Pierre ; le mais de Madeleine, à qui beaucoup de péchés sont remis, parce qu'elle a beaucoup aimé (Luc, VII, 47) le mais du bon Larron, auquel l'esprit droit fait dire Pour nous, nous souffrons la peine que nous avons méritée ; mais pour lui, il n'a lait aucun mal (Luc, XXIII, 41).

 Le Larron a péché; il a commis des vols, des assassinats ; il est puni pour des crimes énormes ; mais il a confiance, il s'humilie, il dit à Jésus : Souvenez-vous de moi (Luc, XXIII, 42). A l'instant, à gauche, dans un éternel oubli, tous les crimes, tous les forfaits, il n'en est plus question. A droite, le pardon, le salut : Aujourd'hui, vous serez avec moi en paradis (Luc, XXIII, 43).

 N'ayons donc jamais un langage comme serait celui-ci : « Les Vœux sont excellents, mais ils coûtent trop à la nature ; la Vocation religieuse est très belle, mais elle est trop pénible; l'enseignement est une œuvre admirable, mais il est trop rude. Ces Enfants sont trop paresseux… Ce Confrère est d'un caractère trop difficile. Les Supérieurs sont trop exigeants. Il y a trop de peines… C'est toujours à recommencer…  Il n'y a plus moyen d'y tenir, etc., etc. »

 Prenez garde, mon cher Frère ; avec ce langage et ces sentiments, vous tombez sur les épines, vous vous jetez sur les cailloux ; vous n'arrêtez votre pensée que sur des amertumes : vous n'y tiendrez pas, en effet, vous ne persévérerez pas.

 Hâtez-vous de tourner la phrase, de faire passer à gauche les cailloux, les épines, toutes les amertumes, et de ramener à droite l'espérance, en répétant avec courage : « Nature crucifiée, il est vrai; Vocation laborieuse, il est vrai ; tâche de l'enseignement, tâche rude, il est vrai ; continuité de travail, de violence chrétienne, d'épreuves de toutes sortes, c'est vrai ; tout ce que VOUS voudrez, soit… » Mais à gauche, je vous prie, toutes ces choses qui écrasent, toutes ces choses qui découragent. La foi et l'amour ne les veulent que sur l'arrière-plan ; la foi et l'amour nous crient, à droite : « MAIS Dieu ! MAIS le Ciel ! MAIS l'éternité ! MAIS les âmes à sauver ! MAIS Jésus à imiter ! MAIS le Calvaire ! MAIS l'Eucharistie ! MAIS la prière ! MAIS la grâce ! MAIS Marie ! MAIS, finalement et en un seul mot, la grande sentence de saint Paul : Toutes les souffrances de la vie présente n'ont aucune proportion avec cette gloire qui un jour doit éclater en nous (Rom., VIII, 18); car, dit-il ailleurs, les afflictions si courtes et si légères de la vie nous produisent le poids éternel d'une sublime et incomparable gloire (Il Cor., IV, 17).

 Et voyez, M. T. C. F., au verset 18,qui suit dans la même Epître, comme le MAIS chrétien laisse à gauche le temps et place à droite l'éternité : Nous ne considérons point, dit saint Paul, les choses visibles, MAIS les invisibles ; car les choses visibles sont passagères, MAIS les invisibles sont éternelles.

 Ainsi donc, à gauche : plaisirs, richesses, honneurs, joies, délices, tout ce que le monde aime et recherche. L'homme de foi dit saint Augustin, l'âme aimante, voit toutes ces choses, elle les dédaigne et elle passe ; elle va à Jésus, en s'écriant : MAIS Jésus !

 A gauche, les souffrances, la pauvreté, les afflictions les tourments, le fer, le feu, les tortures, la mort la plus cruelle. L'homme de foi, l'âme aimante voit ces maux, les affronte et elle passe; elle va à Jésus: MAIS Jésus !

 Il arrive même, quelquefois, pour l'âme aimante et pour l'homme de foi vive, qu'il n'y a plus de mais ni de si ; il n'écoute que le parfait amour. Témoin cette femme d'Alexandrie qui parcourt les rues de la ville, l'eau et le feu à la main: « L'eau, dit-elle, pour éteindre l'enfer;  le feu, pour brûler le Ciel ! afin qu'on ne serve plus Dieu que pour Dieu seul ». 0 puissance de la foi ! ô héroïsme du courage! ô sublimité de l'amour !

 Efforçons-nous tous d'ouvrir ainsi notre cœur à la confiance, à l'espérance et d'aller toujours en avant. Le Juste, dit saint Jérôme, n'a que des élévations dans le cœur, et le pécheur n'a que des abaissements. Ces abaissements, le Religieux fervent ne doit pas les connaître ; il doit être constamment cet homme robuste, dont parle le Sage, qui a ses pensées à l'abondance et à l'accroissement (Prov., IV, 18).

 Telle était la disposition du grand saint Paul. Oubliant ce qui est derrière moi, dit-il, et m'avançant vers ce qui est devant moi, je m'efforce d'atteindre le but, pour remporter le prix auquel Dieu m'a appelé d'en haut par Jésus-Christ (Philip., III, 14).

Comme lui, ne disons jamais : C'est assez ; assez de travail, assez de privations, assez de peines au contraire, répétons comme les Saints : Encore plus ! encore plus de croix et de souffrances 1 encore plus de travaux et d'épreuves : puisque le sentier des justes, au langage de l'Esprit-Saint, est comme une lumière brillante qui s'avance et qui croît toujours jusqu'au jour partait, c'est-à-dire, jusqu'au jour de l'éternité (Prov., IV, 18).

 Qui de nous n'a pas admiré, dans notre cher Frère Jean-Baptiste défunt, ce courage persévérant, ces pensées toujours à droite, toujours en avant, toujours en haut ; jamais en arrière, jamais à gauche, jamais en bas ! Pendant ces cinquante ans de Communauté, pendant ses trente-trois ans d'Assistance, qui a pu surprendre en lui, je ne dis pas un jour, une heure, mais un instant d'abattement, de découragement ?

 Non jamais ; même pendant ses longues maladies de près de trente années, on n'a pu lui faire dire qu'il était malade, qu'il souffrait. « Comment allez-vous? lui disait-on. – A l'ordinaire. – Comme d'habitude. Je ne vais pas mal. » Et toujours quelques réponses de ce genre, avec un air si gai, qu'il n'y avait pas possibilité de parler de maladie.

 Les derniers jours de sa vie, on voyait, avec une vive inquiétude, l'enflure très marquée de sa main gauche, on l'entrevoyait comme un mauvais signe, un symptôme effrayant. « Ce n'est rien, disait-il; c'est mon cautère  qui fait cela. » Enfin, il était si habitué à dominer et ses indispositions physiques et ses peines morales, à les dissimuler à lui-même et aux autres, qu'il n'avait jamais que des paroles d'encouragement à donner.

 O heureuse disposition ! ô précieux courage ! Combien nous devons les désirer et comme moyen et comme gage de contentement et de persévérance !

 Mais ce n'est pas seulement une leçon de confiance, d'espérance et de courage que nous donne ici la Sainte Vierge ; c'est le caractère propre de toutes les solides vertus qu'elle nous trace : de la charité envers le prochain, de l'obéissance aux Supérieurs, du zèle pour les Enfants, de la droiture et du bon esprit en tout et partout.

 Avec le prochain, dissimuler les défauts, cacher les fautes, oublier tout ce qui déplaît ; ne s'arrêter que sur les bonnes qualités, et les opposer toujours aux imperfections et aux manquements. Avoir en horreur ces réticences, ces mais suspensifs qui ne font que rendre la médisance, et souvent la calomnie, plus acerbes, plus incisives, plus méchantes. On dira d'un Confrère qu'il est capable, qu'il a des talents, qu'il réussit. Aussitôt l'esprit méchant d'ajouter : « Mais c'est un orgueilleux, mais sa conduite est très louche, mais,… mais… on  ne peut pas tout dire… » Voyez ici comme la malice laisse le bien à gauche, s'arrête à droite sur le mal et le grossit par le silence et la dissimulation.

 Pourquoi pas plutôt le langage de la charité et de la droiture? On donne votre Confrère comme un peu suffisant, un peu haut ; et vous savez qu'il est dévoué, qu'il est zélé, qu'il travaille à se corriger qu'il accepte bien un avis : pourquoi ne pas relever ces bonnes qualités, faire glisser sur les défauts, afin de ne laisser que de bonnes impressions?

 Et de même à l'égard des Supérieurs: ne pas se prendre à l'extérieur, à la capacité ; au caractère, parfois un peu difficile ; au genre, parfois un peu pénible, même avec une bonne vertu. Mais toujours voir Dieu en eux : son autorité dans leur autorité, sa volonté dans leur volonté ; ne pas les juger, ne pas les condamner, ne leur prêter que de bonnes intentions.

 Avec les Enfants, même bon esprit ! passer sur les grossièretés, sur l'ignorance, sur les formes désagréables; ne considérer en eux que le caractère divin d'Enfants de Dieu, de Frères de Jésus-Christ, d'âmes rachetées au prix de tout son sang, d'Héritiers du Ciel.

 N'allons pas plus loin. A ce simple énoncé, on sent quelle droiture, quelles idées vraies et justes, quel solide jugement, quel bon esprit ; et, par là même, quelle facilité dans la conduite des autres, quelle paix et quelle tranquillité pour nous-mêmes, nous donnerait cette attention à ne nous arrêter jamais que sur ce qui est bien, sur ce qui relève et encourage ; à y revenir du moins et à nous y fixer, lorsque notre devoir nous oblige à remarquer les fautes, à les reprendre et à les corriger.

 C'est bien, du reste, l'esprit de la Règle. Voyez ce qui est dit à la page 111 des Règles Communes: « Sans cacher  aux parents les défauts et les fautes de leurs enfants,  les Frères leur en parleront toujours de manière à ne pas les irriter, leur faisant entendre que, malgré leurs défauts, ils donnent beaucoup à espérer, et qu'avec des soins assidus, en agissant de concert, on parviendra à les corriger et à les bien former. »

 Puisse cette grande leçon être parfaitement comprise de tous, nous conserver partout dans une sainte joie et un religieux contentement ! Puisse-t-elle dissiper toutes les pensées tristes et amères qui, trop souvent, font souffrir certains Religieux et les tiennent continuellement sur les épines !

 3° Résumé de toutes ces réflexions, de ces singularités extraordinaires. Nos chapelles ou Oratoires du Mois de Marie.

 En étudiant le fait de Pontmain dans ses diverses circonstances et surtout dans sa merveilleuse Inscription, nous en avons tiré toutes les réflexions et considérations qui font la matière des cinq Chapitres précédents. Ce qui nous reste à faire, dans le présent Paragraphe, c'est de les résumer comme dans un tableau raccourci ; c'est de les rendre sensibles à nos Enfants, de telle sorte qu'ils puissent comme les toucher au doigt.

 Pour cela, essayons de les faire entrer dans la construction des petites Chapelles que nous élevons dans nos Classes, en l'honneur de la Sainte Vierge, surtout pendant le Mois qui lui est consacré.

 Comme tout fait image dans cette Apparition, et que la Sainte Vierge ne nous parle que par écrit ; comme elle s'entoure des décorations ordinaires que nous apportons à ses Autels, il nous sera très facile de les disposer de manière qu'ils soient un souvenir permanent et toujours présent de cette grande Ecole de piété, élevée par la bonne Mère.

 Après toutes les explications données plus haut, un Frère intelligent et zélé comprendra, sans peine, tout le parti qu'il peut tirer, pour l'instruction et l'édification de ses Enfants, d'un Trône dressé à Marie, devant eux, dans les conditions qui suivent :

 En haut, dans son cercle bleu, la Vierge immaculée, avec toutes les décorations de l'Apparition et autres, selon le goût, la piété et les moyens de chacun.

 A ses pieds, la bande blanche de l'Inscription et l'Inscription elle-même, précédée des points de suspension, en caractères assez gros et assez apparents, pour être parfaitement vus de tous les Enfants.

 A gauche, indiquer, de la manière qu'on jugera laplus convenable, ce que ces points signifient, par exemple : une image de l'enfer, du jugement, de la mort; quelques signes ou figures qui rappellent les désastres, les ruines, la douleur, la crainte, les tentations, la rage des démons.

 A droite, des images contraires : l'Eucharistie, le Ciel, les Anges; quelques signes indiquant le salut, la victoire, la délivrance, la charité, etc. ….

 Entre ces deux extrémités, en beaux caractères, l'Inscription merveilleuse donnant la prière comme le moyen infaillible d'échapper aux maux qui sont à gauche, et d'obtenir les biens qui sont à droite.

 Et, comme signes explicatifs de la puissance de la prière, représenter, dans un endroit ou dans l'autre, un levier, une balance, la vapeur, l'électricité, la foudre, le paratonnerre, etc.

 Ici, comme application, soient les réflexions suivantes. A une Retraite de première Communion, par exemple, en se servant du signe de la balance, faire comprendre aux Enfants, que le plateau de gauche fut-il chargé des plus monstrueux péchés, et le plateau de droite complètement vide de bonnes œuvres, s'ils prient, s'ils appellent Marie à leur secours, aussitôt Marie leur viendra en aide, appuiera sur le plateau vide, et fera disparaître tous leurs péchés, en leur obtenant la grâce de les bien confesser, de s'en humilier, de les détester et d'en recevoir le pardon.

 Expliquer de même la puissance de la prière par la puissance de la vapeur, qui met en mouvement les plus lourdes machines et emporte invinciblement les plus énormes fardeaux. Ainsi la prière soulève les plus grands pécheurs, amollit les cœurs les plus endurcis et les entraîne vers Dieu, malgré toutes les résistance de la nature, toutes les fureurs de Satan, toutes les oppositions du monde.

 La comparaison de l’électricité servira à expliquer avec quelle rapidité une prière vive et ardente fait descendre sur nous la grâce et les miséricordes de Dieu. C'est le fil électrique entre le Ciel et la terre, par lequel nos besoins vont directement au Cœur de Dieu, et nous font arriver immédiatement son assistance.

 On joint à ces comparaisons quelques traits frappants qui les confirment et servent à y mettre de la variété.

 On les appuie encore de quelques-uns des passages si nombreux et si frappants de la Sainte Ecriture et des Saints Pères, donnés par saint Liguori, dans son admirable Traité de l’importance de la Prière.

 Enfin, on explique que nos Savants, à force de recherches, d'études, d'expériences, de combinaisons répétées, parviennent à dérober à la nature tous ses secrets; à la dominer ensuite et à s'en rendre maîtres : telle l'invention du daguerréotype, du télégraphe électrique et autres.

 Ainsi, le bon Chrétien, le bon Religieux, l’enfant pieux, qui sait prier, dérobe à Dieu, pour ainsi dire, tout le secret du salut, tout le secret de se rendre maître de Dieu lui-même et de tous ses dons; le secret d'emporter le Ciel très sûrement et très facilement.

 Toutes ces pensées, aussi fortes, aussi saisissantes qu'elles sont justes, données clairement, en face d'un Autel composé comme nous l'avons dit, rendues sensibles par ces signes extérieurs, sont parfaitement comprises des Enfants, et se gravent pour jamais dans leur mémoire. Oh ! quel bien à leur faire ! quel principe de salut à déposer dans leurs âmes !

 Mais le Frère lui-même en est frappé tout le premier; et la bonne Mère qui le voit ainsi continuer son admirable Ecole de Pontmain, la reproduire et la répandre avec zèle, avec amour, ne peut manquer de le bénir, et de lui obtenir, en grande abondance, l'esprit de grâce et de prière qui est, par excellence, le moyen et le gage du salut. Donc, plaise à Dieu que nous entrions tous dans cette bonne voie, et pour nous-mêmes et pour nos Enfants !

 ——————————————–

 CHAPITRE SEPTIÈME

 

PRIÈRE ARDENTE ET PERSÉVÉRANTE. – CONCLUSION.

 Dans ce Chapitre, nous aurons trois Paragraphes : le premier, sur les raisons ou considérations générales qui nous obligent à prier avec ardeur et persévérance ; le deuxième, sur les motifs particuliers de zèle et de charité qui nous pressent de le faire ; et le troisième sera la conclusion de toutes nos réflexions.

 I. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES QUI NOUS OBLIGENT A PRIER AVEC ARDEUR ET PERSÉVÉRANCE.

 Le Prophète David demande au Seigneur que sa prière s'élève vers lui comme la fumée de l'encens du matin (Ps. CXI, 2); et chaque fois que le Prêtre offre l'encens à l'Autel, il répète la même demande. Pourquoi cette prière et pourquoi cette figure? C'est, dit Saint-Jure, que l'encens, s'il ne brûle, ne monte point et ne fait point sentir son parfum. Ainsi en est-il de la prière ; elle ne s'élève point, et ne répand point son parfum devant la Majesté divine, si elle n'est échauffée et allumée par le feu de la dévotion. La prière froide ou tiède demeure sans effet ; et son impuissance est telle, que le démon nous laisse faire autant de prières vocales et mentales que nous le voulons, pourvu qu'elles soient, comme les armes que les Philistins permettaient aux Juifs, sans tranchant et sans pointe, c'est-à-dire, languissantes, sans affection et sans ardeur.

 Donc, toutes les autres conditions de la prière doivent être relevées et fortifiées par ce feu divin, par cette ardeur de dévotion, pour qu'elle soit réellement efficace.

 Quand est-ce que l'enfant est entendu et écouté de sa mère? C'est lorsqu'il demande avec empressement, avec instance, avec larmes. Alors, il l'emporte infailliblement ; la mère ne peut le voir pleurer, elle lui accorde tout ce qu'il désire.

 Ainsi fait le bon Dieu avec ceux qui prient de grand cœur, qui crient vers lui comme faisait le Prophète David: J'ai crié vers mon Dieu, j'ai crié vers lui tout le jour, j'ai crié du fond des abîmes, je me suis lassé à force de crier, mon gosier en est tout desséché. C'est à cause de cette ardeur extrême, de cette grande affection qui animait ses prières, que le Prophète les appelle des clameurs, des cris, et qu'il prie Dieu de les exaucer : Seigneur, dit-il, exaucez ma prière et que mes cris s'élèvent jusqu'à vous (Ps. CI, 2).

 Au reste, David avait péché. Par un double crime, il avait mérité l'enfer; et, quoique Dieu l'eût averti, par le prophète Nathan, que son péché avait été transféré, pardonné (Il Rois, XII, 13), il ne laissait pas d'en garder frayeur, de pousser des cris et de demander miséricorde. Quiconque a péché mortellement, doit faire de même et bien davantage, puisqu'il n'a pas la certitude de son pardon.

 Comment, en effet, songer à la durée infinie d'une éternité malheureuse, comment croire fermement que, tant que Dieu sera Dieu, il faudra brûler en enfer, et ne pas conjurer, avec ardeur, avec des cris et des larmes, la miséricorde divine de nous en délivrer? Ne faudrait-il pas avoir l'esprit atteint de la plus insigne folie qui puisse jamais s'imaginer ?

 Oh ! si nous avions la foi, la foi actuelle, une foi forte à cette redoutable vérité, nos prières seraient incomparablement plus ardentes, nos supplications plus vives et plus répétées, nos instances, nos gémissements et nos cris plus perçants, plus déchirants que tous ceux du condamné, à la vue du dernier supplice, à la vue du bûcher sur lequel il va être attaché et brûlé vif. Et cependant, tant qu'il lui reste une lueur d'espérance, quels cris, quelles supplications, quelles ardentes prières ne fait-il pas entendre, pour exciter la compassion et avoir un mot de pardon?

 C'est sous le poids des grandes vérités de la foi, d'une crainte extrême de l'enfer, d'un désir violent du Ciel, d'un sentiment profond de respect et d'amour pour Dieu, que les Saints ont été si ardents, si persévérants dans la prière. C'est une véritable merveille que l'incroyable ferveur avec laquelle ils les faisaient. Les Disciples, au rapport de saint Luc, firent la leur avec tant de ferveur que la maison en fut ébranlée: A près qu'ils eurent achevé leur prière, le lieu où ils étaient assemblés trembla ; tous lurent remplis du Saint-Esprit, et ils prêchaient hardiment la parole de Dieu (Actes, IV, 31).

 De vives flammes semblaient sortir de la bouche et des yeux de saint François d'Assise pendant sa prière, tant il la faisait avec foi et avec ferveur. Saint Paphnuce, priant dans son cachot pendant la nuit, le remplit de lumière – ses bras, qu'il tenait élevés vers le Ciel, étaient comme deux flambeaux allumés. La véhémence de l'amour et l'ardeur dans la prière étaient si extraordinaires en saint Philippe de Néri, qu'au fort de l'hiver et dans sa plus grande vieillesse, il ne pouvait rien avoir sur la poitrine ; il était obligé de tenir les portes et les fenêtres de sa chambre toujours ouvertes, afin de tempérer l'ardeur qui le consumait.

 Ah ! c'est encore que tous ces Saints, outre les pensées d e crainte et d'amour qu'inspire la foi, avaient à cœur d'imiter Jésus-Christ, dont la prière, au jardin des Oliviers,fut d'une telle force et d'une telle ardeur qu'il ensua sang et eau et que la terre où il priait en fut tout arrosée.

 Du reste, ce sont ces prières ardentes qui vont au Cœur de Jésus, qui le touchent, obtiennent des miracles et lui font demander : Qui m'a touché? (Luc, VII, 45, 46); tandis que les prières froides et languissantes, comme la foule qui le pressait, passent inaperçues.

 Efforçons-nous donc d'animer toutes nos prières d'une ardente affection; faisons-les monter vers Dieu comme un encens d'agréable odeur; qu'elles soient auprès de lui comme des clameurs; tout ce que nous demandons à sa miséricorde, demandons-le du plus profond de nos cœurs et du plus intime de nos âmes.

 Il faut que l'ardeur de nos prières soit en proportion avec la grandeur des grâces et des biens éternels que nous sollicitons; en proportion avec le mal du péché et ses épouvantables châtiments dont nous voulons être délivrés.

 Demander à Dieu son Paradis, sa gloire, ses richesses, ses plaisirs, la possession éternelle de lui-même, c'est lui demander des biens auprès desquels tous les royaumes et tous les empires ne sont qu'un grain de poussière.

 Demander l'humilité, la patience, la charité, l'obéissance, les grâces et les dons du Saint-Esprit, c'est demander des choses si grandes que rien sur la terre ne leur est comparable.

 Comment pourrions-nous donc les demander lâchement, avec des désirs faibles et à peine formés de les obtenir? Demander à Dieu des trésors immenses, des biens qui ont coûté à Jésus-Christ trente-trois ans de souffrances et de travaux, qu'il a payés de tout son sang, sur la croix, les demander, dis-je, comme si c'étaient des choses communes et de peu de valeur, n'est-ce pas, pour ainsi dire, nous moquer de lui et de ses dons, et le mettre dans l'impossibilité de nous les accorder?

 Donc, M. T. C. F., redisons-le, prions avec ferveur, prions avec ardeur et de toute la force de nos âmes ; car c'est la langueur et la lâcheté de nos prières qui les rendent si souvent inefficaces. Non, ce n'est point assez de prier, si l'on ne prie avec ferveur. Dieu, dit le Psalmiste, est proche de ceux qui l'invoquent dans la vérité (Ps., CXLIV, 18), c'est-à-dire, avec ardeur. Prier lâchement et froidement, ce n'est pas prier dans la vérité, car la négligence à demander est la preuve évidente qu'on n'a pas souci d'obtenir.

 Pour résumer, disons que notre ardeur dans la prière doit être celle des malades qui demandent leur guérison; des navigateurs qui sont sur le point de faire naufrage ; des commerçants qui trouvent l'occasion de faire une fortune immense ; l'ardeur du condamné qui demande grâce et veut échapper à l'échafaud. Disons que prier avec ardeur, c'est assurer le succès de la prière, c'est amasser des mérites immenses, c'est courir à pas de géant dans la voie de la vertu. Disons, enfin, que la prière fervente est l'arme avec laquelle nous nous défendons victorieusement contre tous les ennemis de notre âme ; la monnaie avec laquelle nous achetons tous les trésors de l'éternité ; le secret infaillible pour faire réussir la grande affaire de notre salut ; le moyen, en un mot, de faire des Saints et de grands Saints.

 II MOTIFS PARTICULIERS DE PRIER AVEC ARDEUR ET PERSÉVÉRANCE.

 A ces considérations générales, ajoutons, comme motifs particuliers, l'esprit de zèle et de charité pour nos Frères : 1° la compassion, pour les maux temporels dont Dieu les afflige ; 2° la compassion bien plus grande encore pour les maux spirituels qui en sont la cause ; 3° l'urgence des besoins de l’Eglise, des besoins de la Congrégation, de nos propres besoins.

 1° Maux temporels à conjurer.

 Dieu, en effet, ne frappe les hommes qu'à regret. S'il rassemble sur eux les fléaux : la guerre, la famine et autres maux, c'est qu'ils ne peuvent plus être guéris par les moyens ordinaires.

 Ainsi d'un père de famille qui a son enfant atteint d'un énorme abcès. Il met tout en œuvre pour le guérir, il appelle à son secours les plus habiles médecins, il épuise tous les remèdes ; mais, si le mal résiste, si la vie de l'enfant est en danger, la tendresse même porte le père à demander l'amputation du membre gangrené. Son cœur est déchiré à la simple pensée de la terrible opération mais tout cède au désir de sauver l'enfant.

 De même pour Dieu à l'égard des nations qu'il a faites guérissables et qu'il aime. Quand les moyens de douceur et de bonté sont impuissants, il recourt, lui aussi, au fer et au feu pour arrêter les progrès du mal.

 Il appelle alors des armées ennemies et en fait comme ses chirurgiens, pour couper, tailler dans le corps social, expurger, retrancher, opérer, enfin, jusqu'à guérison de ces énormes plaies; jusqu'à arrêter au moins l'invasion générale du mal.

 Telles ont été les armées qui ont fondu sur nous, avec leurs nombreux alliés, avec leur formidable artillerie, avec tous leurs instruments de destruction. Ces redoutables ennemis n'ont été que les chirurgiens de Dieu, pour purifier la nation catholique par excellence.

 Certes ! il en coûtait à Dieu, pour employer ce remède extrême, infiniment plus qu'il n'en coûte au père de famille pour faire amputer le bras malade de son enfant ; « car personne, dit saint Augustin, n'est aussi père que Dieu. »

 Cependant, que n'eût pas fait ce père de famille, au moment de l'opération, que n’eut-il pas donné à l'homme habile, au thaumaturge puissant, qui se fût offert à guérir le malade sans lui faire subir la redoutable amputation ?

 Et vous croiriez que Dieu, qui est tout charité, ne ferait rien pour l'homme de foi et de prière qui viendrait s'interposer entre lui et tout un peuple, afin de détourner les fléaux qui le menacent, en obtenant sa conversion, par l'ardeur de ses prières et la sainteté de ses œuvres?

 Mais n'est-ce pas ce que Dieu lui-même insinuait à Moïse, lorsqu'il lui disait : Maintenant donc laisse-moi : mon indignation s'allumera contre eux, et je les exterminerai et je me vengerai (Exode, XXXII, 10). Admirable invention de la tendresse de Dieu, qui s'abaisse jusqu'à la prière, pour que son serviteur comprenne mieux que la colère divine ne saurait éclater contre Israël, tant qu'il demandera grâce pour lui. Pensée miséricordieuse que Moïse comprit si parfaitement que, bien loin de cesser ses prières pour le peuple, il osa dire à Dieu : Ou pardonnez-lui, ou effacez-moi de votre livre que vous avez écrit (Exode, XXXII, 31, 32).

 Et Dieu, en effet, avait pour si agréables les supplications de son serviteur, qu'il les écoutait toujours et multipliait les miracles sur les pas d'Israël, malgré ses révoltes et ses ingratitudes. Donc, dans les maux et calamités publiques, les guerres, les pestes et autres, où sont engagés la vie et les biens de tant d'hommes, comprenons qu'arrêter ces maux par la prière, les abréger même d'un moment, les tempérer de quelque manière, c'est exercer la charité dans une étendue immense ; souvent c'est sauver des milliers et des milliers de vies c'est épargner à une multitude d'hommes, quelquefois à tout un pays, des pertes irréparables. Et surtout, c'est entrer pleinement dans la pensée et le désir de Dieu lui-même, qui nous appelle bien plus encore à soulager les maux spirituels de nos frères, comme nous allons le voir.

 2° Maux spirituels. – Conversion des pécheurs à demander.

 A Pontmain, Marie oppose aux menaces de la justice de Dieu et à tous ses coups, le grand paratonnerre de la prière; et elle l'oppose si bien qu'au moment même de l'Apparition, alors que la France était livrée à l'ennemi sans résistance possible, alors qu'il avait toute facilité pour la conquérir, la partager, l'effacer même, Marie, joignant son intercession aux prières de ses enfants, l'arrête tout à coup, et lui dit: «Tu n'iras pas plus loin ! La nation catholique vivra: Mon Fils se laisse toucher. »

 Et l'ennemi ne va pas plus loin, et l'espérance rentre dans tous les cœurs. Une fois de plus, Marie a équilibré les affaires de sa nation privilégiée. Une fois de plus, elle l'a rendue maîtresse d'elle-même et elle a mis le salut entre ses mains.

 Mais hélas! ce retour à la prière, ce recours solennel à Dieu n'a été que comme un éclair dans une longue nuit. Le péril passé, il y a recrudescence dans le crime plutôt qu'amendement : même oubli de Dieu, mêmes attaques contre la Religion et ses Ministres ; mêmes plaies morales, toujours plus profondes, toujours plus humiliantes: écrits impies, spectacles immondes, sociétés de perdition, profanation des saints jours, mépris de toute autorité, impatience de tout frein, licence effrénée de tout dire, de tout écrire, de tout faire: en un mot, le règne du péché à peine diminué par ces épouvantables châtiments dont Dieu nous a frappés.

 C'est donc à ces maux des âmes, à ces maux spirituels que Marie nous appelle à porter sans retard le remède souverain d'une ardente et persévérante prière. Voilà l’œuvre par excellence que la divine Mère laisse à notre zèle et à notre charité : LA CONVERSION DES PÉCHEURS.

 Or, sept sortes d'amour doivent nous exciter à prier pour les malheureux pécheurs ; sept sortes d'amour s'unissent pour enflammer notre ardeur et soutenir notre persévérance dans ces prières et supplications de la charité.

 1° L'AMOUR DE JÉSUS. Jésus se plaint, disait souvent sainte Madeleine de Pazzi, après sainte Catherine de Sienne, qu'il ne trouve personne qui s'oppose à sa colère, en priant pour les pécheurs. «Nous aurons à rendre compte, ajoutait-elle, de tant d'âmes qui tombent journellement dans l'enfer : car si nous avions assez prié pour elles, assez offert le sang de Jésus-Christ, assez demandé grâce, peut-être aurions-nous prévenu leur perte. »

 Prier pour les pécheurs, demander leur conversion, c'est demander ce qu'il y a de plus cher au Cœur de Jésus, ce qu'il a le plus désiré, ce qu'il a payé de tout son sang: SA VIE MYSTIQUE DANS LES AMES.

 Pour conquérir cette vie et pour nous l'assurer, il a sacrifié sa vie naturelle, quoique divine et d'une valeur infinie. Oui, c'est pour vivre en nous de la vie de la grâce qu'il s'est incarné, qu'il est né, qu'il a vécu, travaillé, enseigné, prié, jeûné, tout fait, tout souffert, jusqu'à la mort et à la mort de la Croix. Je suis venu, dit-il, pour qu'ils aient la vie et qu'ils l'aient abondamment (Jean, X, 10).

 Encore aujourd'hui, si Jésus-Christ s'offre chaque jour, s'il s'immole, s'il meurt mystiquement sur nos Autels, c'est pour conserver en nous cette vie divine; c'est afin que nous vivions par lui, comme lui vit par son Père (Jean, VII, 58). Jésus-Christ a un si grand désir de posséder nos âmes par la grâce, d'y vivre mystiquement par la charité, que, s'il avait été nécessaire, il aurait consenti à mourir pour chaque homme en particulier, à rester même sur la Croix pour un seul homme, jusqu'à la consommation des siècles.

 Enfin, tout ce que le Verbe a fait ou fait encore au dehors, par la Création, par l'Incarnation, par la Rédemption, par son Evangile, par ses Sacrements, par son Eglise, il l'a fait en vue de sa vie divine dans nos âmes par la grâce.

 C'est donc répondre à un besoin pressant de son cœur, à l'immensité de son amour, que de nous employer, de toutes nos forces, par la prière et par les bonnes œuvres, à la conversion des pécheurs.

 2° L'AMOUR DE MARIE. Marie a tant aimé les pécheurs dit saint Bonaventure, que, pour les sauver, elle a sacrifié son Fils unique, son Premier-Né, qu'elle aimait incomparablement plus qu'elle ne s'aimait elle-même. Comme Mère, elle lui a permis d'aller mourir pour eux ; et elle s'est tue devant ses juges au lieu de le défendre. Tel était son désir de les sauver, disent à la fois saint Antonin et saint Anselme, qu'à défaut de bourreaux elle l'eût immolé de ses propres mains.

 Qui de nous pourrait rester insensible à cet amour de Marie pour les pécheurs ! Quoi ! par un peu plus de ferveur dans nos exercices de piété, à l'Office, à la Messe, à la Communion; par quelques bonnes prières, unies à la pratique de nos Règles, selon la révélation faite à saint François d'Assise, nous pouvons, sans autre peine ni danger, obtenir le salut de nos frères, le salut de notre chère patrie, son retour à la foi et aux bonnes mœurs, sa régénération religieuse quipar son influence, serait le salut du monde : et nous ne le ferions pas !… Ah 1 gardons-nous de résister ainsi à l'appel que nous fait la divine Mère, de faillir à la mission qu'elle donne à tous ses enfants. Unissons-nous, au contraire, unissons-nous sans délai, unissons-nous sans interruption, dans l'ardeur d'une prière humble et fervente, pour demander la conversion des pécheurs.

 3° Pour nous y exciter, à l'amour de Jésus et à l'amour de Marie se joint l'AMOUR DE Nos ENFANTS. Combien de nos Enfants, en effet, se trouvent au milieu des pécheurs, comme d'innocentes brebis au milieu des loups ! Hélas ! chaque jour, ne se fait-il pas comme un carnage, un massacre moral de ces pauvres Enfants, par les blasphèmes, par les impiétés, par les paroles impures qu'ils entendent et par tous les crimes dont ils sont témoins? Donc , convertir leurs parents, convertir les scandaleux qui les environnent, c'est évidemment les sauver eux-mêmes.

 4° L'AMOUR DU PROCHAIN. Qui peut penser sans frémir à cette multitude d'âmes créées à l'image de Dieu rachetées par le sang de Jésus-Christ, dont la vie entière s'écoule dans les horreurs de tous les péchés; et qui, à la mort, tombent pour jamais dans les abîmes de la damnation? Ne pas être touché de leur malheureux sort, ne pas le conjurer et le prévenir par de continuelles et ferventes prières, ne serait-ce pas méconnaître le premier et le plus pressant devoir de la charité chrétienne?

 5° L'AMOUR DE L'ÉGLISE. Comme une Mère tendre, elle ne cesse de pleurer et de gémir sur l’aveuglement d'une foule de ses enfants, qui refusent de l'entendre et résistent à toutes ses sollicitations. Peut-on aimer l'Eglise sans s'associer à ses douleurs, sans accompagner des plus ardentes prières, les efforts qu'elle fait, dans tout l'Univers, par son Chef, par ses Evêques et par ses prêtres, pour convertir les pécheurs?

 6° L'AMOUR DE LA PATRIE. La patrie ne doit ses malheurs et ses humiliations qu'aux crimes de ses enfants. Inutilement, les politiques cherchent une autre cause à nos défaites ; c'est la justice, dit l'Esprit-Saint, qui élève les nations, et c'est le péché qui les abaisse, qui rend les peuples malheureux (Prov., XIV).

 « Combien durera mon Etat », demanda Clovis à saint Rémi. – « Autant de temps, Sire, répondit le Saint, que la justice et la Religion y fleuriront. »

 « Quand reviendrez-vous en France? » disait à un Anglais un gentilhomme français, après la délivrance du pays par les soins merveilleux de Jeanne d'Arc. « Quand la somme de vos crimes, répondit l'Anglais, surpassera la somme des nôtres. »

 Parole profonde, que devraient méditer sans cesse tous ceux qui gèrent les intérêts des peuples; paroles d'expérience, que confirme d'avance cette sentence de l'Esprit-Saint : Les royaumes passent d'une nation à une autre, les provinces changent de maîtres à cause des iniquités (Eccl., X, 6). Que cette parole nous reste au moins à nous, Religieux, qui devons aimer notre patrie plus que personne ; qu'elle nous porte à supplier sans cesse la miséricorde divine de diminuer, de plus en plus, parmi nous, et le nombre des péchés et le nombre des pécheurs.

 7° Enfin, l'AMOURDE NOUS-MEMES. C'est saint Jacques qui nous l'apprend : Celui qui convertit un pécheur et le retire de son égarement, sauve son âme et couvre la multitude de ses péchés (Jacq., V, 20).

 Donc, plus nous avons à craindre pour nous-mêmes de la justice de Dieu, plus nous devons nous efforcer, par nos prières et par tous les exercices du zèle, de ramener au bien et à la grâce le plus d'âmes possible.

 Nous savons, d'ailleurs, que de saintes âmes, comme sainte Thérèse, saint Alphonse Rodriguez et autres, ont converti, par leur sainte vie et par leurs brûlantes prières, plus de pécheurs et d'infidèles que les Missionnaires, des Saints mêmes, par tous leurs travaux. Certes! quelle ardeur, quelle dévotion ces pensées nous donneraient dans tous nos exercices de piété, si nous avions soin de les rappeler souvent !

 Non, non, nous ne prions pas assez pour la conversion des pécheurs, nous n'avons pas suffisamment à cœur de nous donner à nous-mêmes cette assurance de notre propre salut. Il faut le faire, dorénavant, avec une ferveur extraordinaire, pour plaire à Jésus et à Marie, qui nous le demandent ; par amour pour nos frères, qui en ont un si pressant besoin; par dévouement à la sainte Eglise, qui le désire si ardemment ; et par l'intérêt souverain que nous avons à nous sauver nous-mêmes.

 3° Trois autres motifs de prier avec ferveur et persévérance.

 1° Qui peut douter encore que la Vierge immaculée, celle que Pie IX a tant exaltée, ne nous demande des prières ardentes, des prières persévérantes, pour le triomphe de l'Eglise? Qui peut douter qu'elle ne veuille aujourd'hui, comme aux temps des apôtres, les opposer à toute la violence et à tout l'acharnement des persécuteurs à toute la force et à toute la puissance dont ils se croient investis?

 Non, non, pas de doute que ce ne soit le désir de notre bonne Mère. Pas de doute aussi que si tous prient, Prêtres, Religieux, pieux Fidèles, si tous prient avec ferveur, avec persévérance, la victoire ne vienne bientôt aux enfants de Dieu.

 En ce temps-là, disent les actes, Hérode se mit à persécuter l'Eglise ; il fit mourir Jacques par l'épée ; il fit aussi prendre Pierre et en commit la garde à quatre bandes de quatre soldats chacune, dans le dessein de le faire exécuter publiquement après la Pâque. Pierre était donc gardé dans la prison et l’Eglise faisait sans cesse des prières à Dieu pour lui (Act., XII).

 Or, ces prières, plus puissantes que la malice d'Hérode plus fortes que les chaînes qui lient le Vicaire du Christ, plus vigilantes que la garde qui le tient enfermé, plus solides que les murs de son cachot et les portes de fer de la cité : ces prières des Fidèles suffisent seules à faire tomber les chaînes du captif, à délivrer Pierre de la main d'Hérode et de toute l'attente, du peuple juif (Actes, XII, 11).

 Que nos prières, comme celles des premiers Fidèles, soient donc ferventes, qu'elles soient continuelles, qu'elles soient pleines de foi et d'espérance, et il en sera de même du successeur de Pierre, au jour et à l'heure que le Seigneur a marqués.

 2°  Un motif de plus, c'est le bien de la Congrégation, ce sont tous ses besoins spirituels et temporels: de bonnes Vocations à obtenir, les Vocations déjà reçues à conserver; tous nos Religieux dont il faut soutenir le zèle et le courage, qu'il faut faire avancer dans la vertu ; l'innocence à sauvegarder dans une multitude d'Enfants ; puis, par dessus tout, de bons Directeurs à obtenir pour chacune de nos Maisons, c'est-à-dire des Directeurs zélés, pieux, tout dévoués à la Règle, sachant l'observer et la faire observer ; sachant soutenir nos avis, nos instructions et recommandations; tels, en un mot, que les demande l'excellent Livre qui doit être leur Manuel quotidien, leBon Supérieur.

 Mon Dieu ! qui nous donnera d'avoir partout des Religieux très consciencieux ; craignant le péché par dessus tout, lui faisant une guerre acharnée en eux-mêmes et dans les Enfants ; aimant et estimant leur état, solidement obéissants, tout remplis du véritable esprit de la Congrégation !

 Qui nous donnera d'avoir des Maisons où règnent la PIÉTÉ, la RÉGULARITÉ, l'UNION et le ZÈLE : les quatre bases ou colonnes qui seules, peuvent les soutenir?

 Certes ! nos besoins temporels sont bien grands ! Que de difficultés extérieures de toutes sortes, que de craintes et d'embarras dans les temps si troublés que nous traversons ! Mais combien nous serions rassurés sur tous ces besoins temporels, si au spirituel, nous répondions à tous les desseins de Dieu sur nous; si nous pouvions dire de tous nos Frères qu'ils ne cherchent  que son royaume et sa justice ! Oh ! pour tout le reste, comme il serait facile de s'abandonner, en toute tranquillité, à la Providence infinie de celui qui a promis de le donner toujours, et de le donner par surcroît !

 3° Enfin, M. T. C. F., à tous ces motifs si pressants de bien prier, ajoutons, pour chacun de nous, le motif suprême, le motif capital de nos propres besoins : besoins si grands, si nombreux, si urgents…

 Les sociétés, comme sociétés, remplissent leur destinée ici-bas ; leurs prospérités comme leurs revers se terminent avec le temps et n'ont d'importance réelle que dans leur rapport avec le salut de chacun. Mais, en nous et pour nous, on peut le dire, tout est marqué du sceau de l'éternité – le bien, pour un bonheur éternel; le mal, pour un châtiment éternel. Quelle importance donc, quel suprême intérêt, quelle infinie gravité ne prend point notre existence ici-bas et tout ce qui s'y rapporte?

 O Dieu ! au-dessus de moi, un Paradis éternel ! au-dessous de moi, un enfer éternel ! devant moi, Jésus-Christ avec sa croix, Jésus-Christ Dieu et homme, m'invitant à le suivre ! à ma droite, Marie, les Anges et les Saints, m'excitant à toutes les vertus et m'offrant leur appui ! à ma gauche, le démon, le monde et la chair m'attirant à tous les vices ! derrière moi, le temps et la mort qui me poursuivent sans cesse et me poussent forcément vers l'une ou l'autre éternité !…

 Puis, hélas ! au-dedans de moi, dans mon esprit, une ignorance profonde; dans mon cœur, une corruption affreuse ; dans ma volonté, une faiblesse inconcevable dans tout mon être, une foule de mauvaises passions, de mauvais penchants; enfin, toutes mes facultés et tous mes sens continuellement ouverts à toutes les séductions ! …

 Quelle situation ! sur quels abîmes suis-je suspendu et la nuit et le jour? quels besoins extrêmes par conséquent !

 C'est de là, c'est de tous ces motifs accumulés que doit sortir notre grande Conclusion.

 III. CONCLUSION GENÉRALE.

 MAIS PRIEZ ! Voilà la réponse à tout, que Marie elle-même nous donne; voilà le remède souverain qu'elle nous apporte pour tous les maux, le secours dans toutes les nécessités, le moyen infaillible de faire face à tous les besoins : et aux nôtres, et à ceux de la Congrégation, et à ceux de l’Eglise, et à ceux de la France et de tout le peuple chrétien.

 Donc, prendre à cœur les solides instructions que la Sainte Vierge est venue nous donner sur le grand précepte de la prière, sur l'accomplissement de tous nos exercices de piété.

 Nous faire une loi invariable de les faire toujours, de les faire à l'heure et de les faire parfaitement.

 A l'extérieur, grande modestie et profond recueillement, tenue exemplaire, point de précipitation, attention persévérante à bien prononcer nos prières, à les commencer toujours par un Signe de Croix très religieusement fait, et à répondre à voix haute et intelligible, afin d'imprimer à toutes nos Maisons le cachet de la vraie piété et d'une solide dévotion.

 A l'extérieur et à l'intérieur, donner à nos Chants, à nos Cérémonies, à nos Offices, à tout ce qui se fait dans nos Chapelles, un soin, une attention, une perfection qui soient pour nous, pour nos Enfants et pour toutes nos Communautés, un moyen constant et efficace de bonne édification et de salut ; et, pour Dieu, une louange, une gloire, une adoration, un culte saint et parfait qui puisse être accepté de sa divine Majesté.

  Oui, selon les intentions de notre bonne Mère, prions, tous, prions partout, prions toujours : avec foi et piété avec confiance et amour, avec humilité et componction, avec ardeur et persévérance. Prions, redoublons de prières, pour l’Eglise, pour la France, pour tout le peuple chrétien, pour l'Institut et pour nous-mêmes. Prions et prions ardemment pour la conversion des pauvres pécheurs.

 C'est une sainte et universelle Croisade de prières et de supplications que la Sainte Vierge attend de nous et qui doit se faire dans toutes nos Communautés, dans toutes nos Ecoles. Mais surtout qu'une dévotion toute nouvelle nous anime pour réciter le Chapelet chaque jour, et faire le Chemin de la Croix, aussi souvent que l'Obéissance et nos emplois pourront nous le permettre apportant une ferveur extraordinaire à ces deux pratiques de piété, si chères à Marie et recommandées par elle, tout de nouveau, avec tant d'évidence.

 Ajoutons à la prière un renouvellement général d'exactitude et de fidélité dans l'accomplissement de la Règle et de tous nos devoirs, afin de répondre, comme nous l'avons déjà insinué, à la révélation faite autrefois au grand saint François d'Assise: «Que tes religieux prient! que tes Religieux soient fervents et réguliers ! et, à cause d'eux, je ferai grâce au monde, je détournerai tous les fléaux dont je voulais le frapper. »

 Voilà, Mes Très Chers Frères, la Conclusion générale, la Conclusion pratique que nous devons tirer de toutes ces instructions; c'est celle que Marie elle-même nous demande. Notre fidélité à la garder ne peut manquer de nous assurer à chacun et d'assurer à tout l'Institut le secours perpétuel de sa toute puissante protection.

 Recevez la nouvelle assurance du tendre et respectueux attachement avec lequel j e suis, en union de prières et de travaux, Mes Très Chers Frères,  Votre très humble et très dévoué Frère et Serviteur,

                    Frère LOUIS-MARIE.

——————————————–

 


[1] A avec M : AVE MARIA; ou M avec A: Marie, Jésus;MARIE MÈRE DE Jésus, selon le nouveau annoncé par Jérémie: Une femme vierge environnera un homme-Dieu (Jér. XXXI, 22): deux interprétations du chiffre de Marie qui rappellent également le mystère de l'Incarnation.

[2] :  I surmonté de S donne la figure du Serpent d'airain, donne la Croix, donne Jésus crucifié, qui est la mort du Serpent, du démon dans les âmes: Jésus-Christ, dit saint Paul, ayant désarmé les principautés et les puissances, il les a exposées en spectacle, avec une pleine autorité, après avoir triomphé d'elles en sa propre personne Col. , 11,15).

Il a détruit, pour le bon Chrétien, jusqu'au sifflement trompeur de leurs séductions empoisonnées : rien n'étant si doux, si harmonieux que le nom de JESUS, dans lequel vient tomber et se perdre le son dur et sifflant du Serpent séducteur.

[3] : Juste Judex ultionis, donurn fac remissionis ante diem rationis (Prose des Morts).

[4]  Révélation faite à saint Bernard.

[5]  Collecte du IV° Dimanche après l'Epiphanie.

[6]  Prose Stabat Mater.

[7]  C'est-à-dire, du péché mortel, plus à craindre que tous les feux de l'enfer, puisque lui seul les allume et nous sépare de Dieu.

[8]  Gal., III, 13.

[9]  Matth., XXV, 42.

[10]Matth., XXV, 34.

[11] : Les nombres, dit Mgr Gaume, d'après Saint Augustin, sont infinis, sont immuables ; et c'est en Dieu lui-même que se trouve le nombre éternel, type et source de tous les autres : L'UNITÉ de la nature divine dans la TRINITÉ des Personnes. Nous donnons ces notes, parce qu'à l'appui de nos réflexions nous aurons plusieurs fois recours aux nombres croyant ne pouvoir faire un meilleur usage d'une science que nous avons à enseigner tous les jours, et dans laquelle il est si facile de ne s'arrêter qu'à des idées ou à des calculs tout matériels.

 

RETOUR

Circulaires 118...

SUIVANT

Circulaires 120...