Circulaires 143

Nestor

1881-11-18

Circulaire du 18 novembre 1881 : Renseignements et principales dispositions de la loi du 23 décembre 1880 à propos de  l'impôt Brisson. - Modi­fications provisoires dans le règlement des exercices de la journée.

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1.03.01.1881.5

 V. J. M. J.

Saint-Genis-Laval (Rhône), le 18 novembre 1881.

         Mes très Chers Frères,

A la suite de nos dernières Retraites, nous vous avons entretenus de diverses questions d'administration, et notamment du nouvel impôt qui frappe toutes les Sociétés religieuses. Ce dernier point revêtant un caractère de gravité considérable, je crois devoir vous donner des renseignements plus précis encore. Je les fais précéder des principales dispositions de la loi du 23 décembre 1880.

L'article 3 de cette loi impose une taxe de 3 pour 100 sur le revenu ou bénéfice net des Sociétés financières, industrielles, commerciales ou civiles, et des Congrégations reconnues ou non reconnues, dans lesquelles ce revenu ne doit pas être distribué entre les membres de l'Association.

Ce revenu est déterminé soit par les Délibérations des Conseils d'administration, soit par les Déclarations des représentants des Sociétés ou Associations, appuyées de toutes les justifications nécessaires, soit à raison du 5 pour 100 de l'évaluation détaillée des meubles et des immeubles composant le Capital social.

Chaque Société a la liberté d'option pour l'un ou l'autre de ces trois modes. 

1. DÉLIBÉRATIONS DES CONSEILS D'ADMINISTRATION.- Certaines Associations, bien que non constituées par actions, sont cependant pourvues d'un Conseil d'administration, en vertu d'une clause expresse de leurs Statuts. Lorsqu'un Conseil de cette nature existe, il lui appartient d'établir ou de contrôler le compte annuel dû gestion, d'en faire ressortir les résultats financiers, d'y donner ou non son approbation, et, partant, de déterminer l'importance des produits acquis à l'Association. La loi déclare que la délibération prise, en ce cas, par le Conseil, servira de base à la perception de l'impôt.

Par ce premier mode, la Société n'a d'autres justifications à fournir qu'un extrait de la délibération du Conseil d'administration, établissant le produit qui devrait être distribué, si la prohibition n'existait pas.

 II. DÉCLARATION. – Lorsqu'il n'existe pas de Conseils d'administration réguliers, ou que la Société ne juge pas à propos soit de leur faire prendre des délibérations, soit de produire l'extrait de celles qui auraient eu lieu, la loi du 28 décembre 1880 permet de remplacer ces délibérations par la déclaration des représentants des Sociétés.

Cette Déclaration, ainsi que la délibération indiquée dans le premier mode, doit déterminer les produits ou bénéfices nets qui devraient être distribués, si les Statuts ou la nature de l'Association ne s'y opposaient. Mais comme cette pièce n'offre pas assez de garanties à l'Administration, elle doit être appuyée de toutes les justifications nécessaires.

  JUSTIFICATIONS. – Les pièces justificatives comprennent, d'abord le Compte rendu sommaire des recettes et des dépenses de l'année.

 Les Recettes se justifient par les titres de rente, les baux, s'il y en a, etc. Dans les pensionnats et les externats payants, par le nombre d'élèves et le prix de la pension ou de la rétribution scolaire.

Les dépenses se justifient par des factures quittancées, ou mieux, par des quittances simples, et non par des mémoires, ou par des factures qui pourraient être assimilées à des mémoires.

Pour que les factures ne puissent être assimilées à des mémoires, il faut éviter d'y faire figurer aucun détail ; ainsi le boulanger doit se borner à donner quittance pour le pain fourni pendant un mois, un trimestre ou même pendant un an. Le boucher, l'épicier et autres fournisseurs feront de même. D'ailleurs, rien ne s'oppose à ce que les quittances des fournisseurs, ouvriers ou entrepreneurs soient délivrées pour solde de tout compte jusqu'au jour du paiement.

Nous devrons donc nous procurer des titres de nos recettes et des justifications de nos dépenses toutes les fois que nous le pourrons. Nous disons « toutes les fois que nous le pourrons », car il sera impossible de justifier, par des titres, plusieurs articles de recette et de dépense ; tels sont, par exemple, pour les recettes : les produits de la vente des fruits et des légumes, les collectes, quêtes, aumônes, etc. …….. Pour les dépenses ; celles qui se font pour voyages, achats de comestibles au marché, etc. Dans ces conditions, on ne saurait admettre que l'administration puisse exiger autre chose que la mention portée au compte.

 PRODUITS PASSIBLES DE L'IMPOT. – Ils comprennent, sauf les déductions à faire, toutes les sommes perçues, à quelque titre que ce soit.

Les recettes comprennent donc

1° Les allocations soit budgétaires, soit autres, perçues comme traitement des Frères ;

2° Dans les pensionnats et les  externats payants, le montant de la pension et de la rétribution scolaire

3° Les quêtes, collectes, aumônes dont le produit sert à l'entretien des Frères, des écoles ou des immeubles ;

4° Les rentes des fonds publics qui, en vertu d'un décret du gouvernement, forment la dotation totale ou partielle de quelques établissements ;

5° Les légumes et les fruits non consommés dans les maisons, mais vendus au dehors ;

6° Les sommes reçues pour arrérages et généralement tout ce qui augmente l'Avoir ou le Capital social.

Les valeurs mobilières et immobilières acquises au moyen des produits de l'année en augmentation du Capital social, sont même passibles de l'impôt.

 DÉDUCTION À FAIRE SUR LES PRODUITS. – Les déductions à faire sur les produits sont toutes les charges acquittées pendant l'année. Elles comprennent notamment :

1° L'entretien complet du personnel de la communauté : nourriture, vestiaire, blanchissage, chauffage, éclairage, etc. ;

2° Les émoluments des professeurs étrangers, les gages des domestiques, etc. ;

3° Le prix de location des bâtiments, s'il y a lieu, les réparations locatives, l'entretien du mobilier, etc. ;

4° Les intérêts des dettes ou autres charges des fruits, les contributions, les droits de patente, les impositions de toute nature, les cotes personnelle et mobilière, les journées de prestation, l'assurance contre l'incendie, etc.

5° Les frais de culte, d'infirmerie, d'eaux, etc., etc.

6° Les secours annuels aux Noviciats pour frais de formation des sujets, de soins aux infirmes, aux vieillards, etc.

7° La redevance annuelle à la Procure générale pour couvrir les frais généraux d'administration, d'entretien des membres du Régime, etc. …

Les aumônes ou libéralités un peu considérables faites en dehors des oeuvres de la Congrégation, ne seront probablement pas admises, par l'Enregistrement, en déduction sur les produits.

 III. EVALUATION A 5 %. – Lorsqu'il n'est pas produit de délibérations des conseils d'administration, et lorsque les sociétés ne souscrivent pas de déclaration régulière, le revenu est fixé à raison de 5 % de l'évaluation détaillée des meubles et des immeubles composant le Capital social.

Cette troisième manière de déterminer le revenu passible de la taxe, paraît plus facile et plus simple que la deuxième, puisqu'elle n'entraîne pas l'obligation de produire l'état des recettes et des dépenses, ni, par conséquent, aucunes justifications, mais elle peut donner lieu à de sérieuses difficultés et faire établir un impôt considérable sur des meubles et des immeubles qui, loin de produire un revenu, exigent de grandes dépenses de la part de la Congrégation.

 De plus, les erreurs ou omissions dans l'inventaire et dans l'estimation des meubles ou des immeubles, exposeraient à des poursuites judiciaires qui ne manque­raient pas d'être fort désagréables et très onéreuse.

   Vous le voyez, M. T. C. F., les difficultés sont de plus d'une sorte. Il est donc extrêmement nécessaire que nous nous appliquions à les éviter. Dans ce but, comme aussi pour nous mettre en état de nous prononcer pour celui des trois modes qui paraîtra le plus avantageux à la Congrégation, vous aurez à faire et à nous envoyer dans le plus  bref délai possible, l'inventaire avec l'esti­mation, article par article, de tout le mobilier de votre maison. Nous vous adressons deux listes destinées à vous faciliter ce travail. Après les avoir remplies, vous nous en enverrez une et conserverez l'autre. Vous voudrez bien barrer, sur ces listes, les noms des objets que vous n'avez pas et y ajouter les noms de ceux qui n'y figurent point.

 En second lieu, le paiement de la taxe devant se faire à fin mars 1882, vous aurez à nous faire parvenir l'arrêté de vos comptes pour toute l'année 1881, avant le 15 janvier prochain. C'est à cette époque seulement que nous pourrons établir d'une manière définitive le dossier de chaque maison et vous donner, s'il est nécessaire, des instructions plus complètes sur le mode à adopter et sur ce que vous aurez à faire pour le paiement du nouvel impôt.

 OBSERVATIONS. – 1° On admet assez généralement qu'un objet qui a déjà servi, a perdu par là même la moitié de son prix. Cette indication vous sera utile dans l'estimation de votre mobilier. Pour l'évaluation des articles qu'il vous serait difficile d'apprécier, vous ferez bien de vous aider des conseils de l'un de vos fournisseurs marchand de meubles, menuisier, etc.

2° Nos livres de compte, n'ayant pas été tenus en vue du nouvel impôt, peuvent renfermer des indications hasardées ou inexactes. Il importe donc qu'ils soient remplacés partout, au moins pour cette année, par des livres nouveaux commençant au 1ier  janvier 1881, et ne mentionnant, comme reports des anciens registres, que l'encaisse et les dettes qu'il y avait au 31 décembre 1880.

En conséquence, nos Chers Frères Directeurs voudront bien faire le relevé de leurs comptes, de janvier 1881 au 31 décembre prochain.

Pour cette année, ils pourront n'employer à cette opération qu'une simple main-courante, dont le tracé sera conforme à celui de la feuille ci-jointe.

3° Nous ne devons pas perdre de vue que toute contravention à la nouvelle loi et aux règlements qui sont faits pour en assurer l'exécution, est punie d'une amende de 100 à 5.000 francs, sans préjudice des frais d'expertise, du double droit, etc.

De là encore la nécessité de ne rien négliger pour l'établissement très sérieux des comptes et de l'inventaire du mobilier de toutes les maisons de l'Institut ;

4° Il nous est bien recommandé de ne pas oublier que toute quittance d'une somme supérieure à 10 francs, est soumise au timbre de 10 centimes. Ce droit est acquitté au moyen de l'apposition d'un timbre mobile en regard de la signature de ce dernier et la mention de la date de l'oblitération.

Le droit de timbre est à la charge du débiteur. En cas de contravention, une amende de 50 francs est encourue par le créancier qui a donné la quittance ;

5° Des modèles de l'état sommaire de l'Actif et du Passif et des formules de déclaration seront envoyés plus tard, s'il y a lieu, à chacun de nos Frères Directeurs ;

6° Je crois devoir vous rappeler que vous n'avez aucune indication à fournir aux agents de l’Enregistrement, soit sur la valeur de vos meubles et de vos immeubles, soit sur les revenus de votre maison et la tenue de votre comptabilité, soit sur le mode d'évaluation du revenu que vous adopterez. Si vous étiez interrogés, vous vous contenteriez de répondre que la loi ne vous obligeant pas à produire vos livres de compte vous vous refusez à en donner communication ; que vous n'êtes encore fixés sur aucun des autres points, et que vous attendez la fin de l'exercice de 1881 pour vous en occuper. Au reste, ne donnez jamais aucun renseignement dont vous ne seriez pas absolument certains : mieux vaut consulter que de s'exposer à des embarras. Vous savez que le cher Frère Euthyme est chargé de vous guider dans les difficultés qui peuvent surgir ; vous n'aurez qu'à les lui exposer.

 MODIFICATIONS PROVISOIRES DANS LE RÈGLEMENT DES EXERCICES DE LA JOURNÉE. – Dans le but de favoriser les études de nos Frères non brevetés, et de les mettre plus sûrement en mesure de se présenter aux Examens dans le courant de la présente année scolaire, on pourra, dès la réception de cet Avis et jusqu'à Pâques de l'année 1882, apporter au Règlement de la journée, les modifications suivantes

1° A 4 heures, la fin de la classe du soir, puis récréation. La demi-heure retranchée se prendra sur le temps de la lecture et de l'arithmétique ;

2° A 4 heures et demie : Office, Lecture spirituelle et étude du Catéchisme ;

3° A 6 heures : études profanes, sous la direction et avec le concours du Frère Directeur ;

4° A 7 heures et demie souper, récréation

5° A 8 heures et demie prière du soir et coucher.

Ceux de nos Chers Frères Directeurs qui jugeraient inutile de faire bénéficier leurs Frères de cette autorisation PROVISOIRE ET TOUTE EXCEPTIONNELLE, sont invités à en informer immédiatement le Cher Frère Assistant de leur Province respective.

 Nous nous occupons, en ce moment, de l'impression d'un bon travail sur la Composition française, pour l'usage de nos Aspirants au brevet de capacité. On le trouvera, vers la mi-décembre, au prix de 40 centimes, dans toutes les Procures de la Congrégation.

Cet ouvrage nous est spécialement destiné ; nous ne devrons donc pas, sans une permission expresse, le remettre aux personnes étrangères à l’Institut.

 Que Dieu le Père et Jésus-Christ Fils du Père vous donnent la grâce, la miséricorde et la paix dans la vérité et la charité (2, S. Jean, 3). C'est ce que je vous souhaite bien cordialement, en vous renouvelant les sentiments de très religieuse affection avec lesquels je suis, en Jésus, Marie, Joseph, et en union de prières.

 Mes Très chers Frères, 

Votre très humble et tout dévoué serviteur,

                          Frère NESTOR.

 

P.-S. Nous avons décidé que notre Procure Générale paiera l'impôt Brisson pour tous les Etablissements de l'Institut. Nos Frères n'auront donc pas à s'en occuper. Nous leur rappelons qu'ils n'ont aucun renseignement à fournir aux agents du fisc relativement à leur comptabilité. Ils devront au besoin, s'adresser à la Maison-Mère avant de répondre aux questions qui pourront leur être posées.

Des exemplaires brochés du Plan d'Etudes ont été déposés dans toutes nos Maisons Provinciales. On aura par conséquent toute facilité de se le procurer.

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