Circulaires 345

LĂ©onida

1957-12-09

I. Souhaits et programme:
Nous appliquer à glorifier Dieu dans tout ce que nous faisons,
être fidèles pour cela, à lui offrir toute notre activité spirituelle et matérielle.
Intention habituelle ; Intention virtuelle; Offrande actuelle
II. Institut supérieur de culture religieuse et apostolique des Frères enseignants
III. Radio et Télévision .
IV. Cause de Canonisation du Bienheureux Fondateur
Décret pour la reprise de la Cause, texte latin et français
Faveurs attribuées au Bienheureux Fondateur
V. Décret concernant le service militaire des religieux
VI. Transfert à Rome de notre Maison Généralice
VII. Union mondiale des anciens élèves . .
VIII. Fondation en Equateur
IX. Elections .
X. Liste des défunts

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V. J. M.J.

 Saint- Genis-Laval, le 9 décembre 1957.

Fête de l'Immaculée-Conception.

 MES BIEN CHERS FRÈRES,

Encore trois semaines et une nouvelle année sera sur le point de commencer. Nous finissons par noue habituer à la fuite rapide des jours ; nous le trouvons tout naturel, ce qui nous expose à perdre de vue que chaque instant qui passe emporte un lambeau de notre vie et nous rapproche de son terme inéluctable : la mort. Nous oublions également que, selon l'expression de saint Jérôme : « le temps est la monnaie de l'éternité », que, ne pouvant le retenir, le thésauriser, il est irrémédiablement perdu si nous ne l'utilisons pas de notre mieux au moment même où il se présente. Nous perdons également de vue que le temps n'acquiert sa vraie valeur que lorsque nous renonçons à ce qu'il détruit pour ne nous attacher qu'à ce qui lui survit.

Le regretté Frère Régis-Aimé, A. G., mort subitement le 16 mars dernier, n'oubliait pas, au milieu des réjouissances auxquelles donne lieu le Nouvel An, les pensées graves que celui-ci doit suggérer à tout esprit réfléchi. C'est ainsi qu'il écrivait dans son journal, le 1ier janvier 1927: « L'année 1926 est tombée dans l'éternité. Il y a quelque chose de triste, de mélancolique lorsque arrive une nouvelle année. C'est une année de plus sur les épaules, une année de moins à vivre. Pour beaucoup de gens elle sera la dernière. Des Frères n'en verront pas la fin. Ne serai-je pas du nombre ? Lorsqu'on est jeune on ne se figure pas que la mort peut nous prendre… A mesure que les années s'ajoutent, que les illusions tombent, on sent qu'on est peu de chose et que la mort peut venir. » Quand il écrivait cela, notre confrère était encore jeune lui-même, 24 ans, mais cela ne l'empêchait pas d'envisager la vie avec tout le sérieux qu'elle mérite.

Que son exemple nous porte à nous recueillir en cette fin d'année, à profiter, en particulier, de la prochaine récollection, pour nous livrer à un examen sérieux de notre marche spirituelle, nous efforçant de préciser les progrès réalisés depuis la retraite et le redressement à envisager en vue d'une sage utilisation des jours, longs ou brefs, que le bon Dieu daignera nous donner encore.

Ce double examen est de la plus grande importance. Du soin que nous y apporterons et des résolutions qu'il nous suggérera peuvent dépendre, et la valeur de notre vie et notre salut éternel.

Les misères et les défaillances que ce retour sur le passé nous fera découvrir ne devront pas nous décourager, mais nous inspirer des sentiments de vive reconnaissance envers la libéralité divine qui malgré toutes nos infidélités, n'a cessé de nous combler de grâces. Croyons fermement que sa bonté infinie tient encore en réserve pour nous d'innombrables bienfaits d'ordre spirituel et matériel. Pour nous exciter à bien y correspondre, rappelons-nous que nous n'avons aucun droit à ces largesses, qu'elles sont un pur effet de l'amour sans bornes de notre Père du Ciel, toujours attentif aux besoins de ses enfants. N'oublions pas non plus « qu'il sera beaucoup demandé à celui qui, comme nous, aura beaucoup reçu ».

Dans chaque année et même dans chaque jour qui commence, ne voyons qu'un simple sursis que nous accorde la divine Providence. Quelle en sera la durée ? Nous l'ignorons, mais toute parcelle de temps qui nous est donnée doit être considérée comme une pressante invitation à améliorer notre vie. Faisons en sorte, par conséquent, que chacun des jours qui nous restent à vivre nous trouve là où nous veut le devoir.

Nous ignorons ce que l'année 1958 nous réserve, mais ce qui est hors de doute, c'est que le bon Dieu veut qu'elle soit meilleure, plus sainte que 1957. Il veut que nous nous efforcions de détruire les mauvaises habitudes et les dispositions de notre cœur et de notre volonté qui  s'opposent à ses desseins d'amour sur nous.

Demandons-lui, les uns pour les autres, par l'intercession de la Très Sainte Vierge, de saint Joseph et du Bienheureux Fondateur, de mieux aimer et de mieux observer que par le passé, sa loi sainte : celle des Commandements et celle des Règles. Qu'il nous fasse croître chaque jour dans les vertus de notre saint état et, qu'en retour de notre fidélité à le servir, il transforme en suavité et en bénédictions le joug de la vie religieuse que seule la tiédeur fait trouver insupportable.

Tels sont mes souhaits les plus ardents pour vous tous, mes bien chers Frères, à l'approche de la nouvelle année. Je les résumerai volontiers en ces trois mots : santé, bonheur et sainteté, mettant particulièrement l'accent sur le dernier.

*

*     *

Examinant quel moyen je pourrais vous conseiller pour vous aider à mieux vous sanctifier, je me suis arrêté à celui-ci :

Nous appliquer à glorifier Dieu dans tout ce que nous faisons, être fidèles, pour cela, à lui offrir toute notre activité spirituelle et matérielle.

Faisons quelques réflexions sur ce programme de vie et disons, tout d'abord, que :

Tout faire pour Dieu est un devoir de stricte justice.

Dieu étant l'infini, ne pouvait nous créer pour nul autre que Lui et, d'autre part, il ne pouvait nous assigner de fin plus noble que celle-là. C'est pourquoi, le servir constitue notre bonheur et notre gloire.

Toutes les créatures, animées et inanimées, lui doivent l'être et la conservation ; aussi, la Sainte Ecriture les invite-t-elle fréquemment à chanter un hymne de louange à la Divinité. Nous en avons de nombreux exemples dans les Psaumes que nous récitons tous les jours.

Mais, l'homme étant la créature privilégiée, le roi de la Création, le chantre conscient des merveilles que le Tout-Puissant a répandues dans l'Univers, c'est à lui qu'incombe le grand devoir qui est aussi le but primordial de sa vie : rendre, en tout et partout, gloire à Dieu.

Notre-Seigneur lui-même, au cours de sa vie mortelle, n'a cessé de rappeler à l'humanité, par son exemple et par son enseignement, l'impérieuse obligation de glorifier Dieu : « Je ne cherche pas ma gloire mais la gloire de Celui qui m'a envoyé. » (Jn, v, 30.) Saint Paul, rendant grâces à Dieu qui, de persécuteur l'a fait apôtre, s'écrie : « Au Roi des siècles, Dieu incorruptible, invisible, unique, honneur et gloire dans les siècles des siècles ! Amen. » (I, Tim., I, 17.)

Mais si tous les hommes doivent se proposer, par-dessus tout, la gloire de Dieu, combien plus ce devoir incombe-t-il aux religieux en tant que séparés, consacrés. Il est donc juste que nous fassions nôtres les accents enflammés du Roi-Prophète, nous écriant avec lui : « Benedicam Domino in omni tempore ; semper laus ejus in ore meo. Je bénirai le Seigneur en tout temps, sa louange sera sans cesse en ma bouche. » (Ps. 33, 2.)

De ce qui précède, nous devons déduire que nous ne pouvons nous contenter de consacrer à Dieu un temps limité : huit ou dix heures par jour. L'ouvrier fait cela pour son patron, mais à notre divin Maître il nous faut donner intégralement tous les instants de notre vie. Par conséquent, nous ne devons pas sectionner nos journées, les divisant en deux parts, l'une pour nous, l'autre pour Dieu. C'est en tout que nous devons avoir en vue la gloire de Dieu, dans les activités les plus importantes et les plus absorbantes, aussi bien que dans les mille riens dont est parsemée notre vie : « Soit que vous mangiez, soit que vous buviez, soit que vous fassiez quelque autre chose, faites tout pour la gloire de Dieu. » (I Cor., X, 31.) Nous n'avons pas à glorifier Dieu et à travailler, mais à glorifier Dieu en travaillant, en mangeant, en nous délassant. C'est ainsi que nous accomplirons le précepte évangélique de « toujours prier sans jamais nous lasser », car tout travail conforme à la volonté de Dieu devient prière vitale et nous unit à Lui, au même titre que l'oraison et la prière vocale, puisque, tandis que la main est occupée à son ouvrage, le regard du cœur reste tourné vers Dieu.

Cette prière incessante répond bien à un besoin des temps actuels où les progrès de la technique et ses merveilleuses réalisations risquent d'émousser en nous la foi sur la nécessité absolue de l'aide divine pour faire œuvre qui vaille. 

Importance de la pureté d'intention.

 L'intention est ce qu'il y a de principal dans nos actes ; c'est l’œil qui les éclaire et les dirige vers leur fin, l'âme qui les inspire et leur donne leur valeur aux yeux de Dieu. C'est la sève, le fluide vital qui fait de nos actes, même les plus vulgaires, un hommage à Notre-Seigneur.

« Parmi toutes les choses que nous faisons au cours d'une journée, écrit le P. Faber, il n'en est pas une qui ne puisse aisément contribuer à servir la gloire de Dieu, les intérêts de Jésus et le salut des âmes. Peu importe que le monde ait sur cet acte l'empreinte de son cachet, ou que ce soit une affaire purement temporelle dès qu'un motif surnaturel l'anime, cette action est pleine de l'esprit de Dieu et elle devient un bijou d'un prix presque infini, que la Majesté du Tout-Puissant daigne accepter avec plaisir. Les heures se succèdent, s'écoulent et chacune est remplie par des actions appartenant aux devoirs de notre état : nous écrivons, nous lisons, nous calculons, ou bien nous achetons, nous vendons, nous parlons, nous pensons, ou nous souffrons ; et pendant tout ce temps, nous pouvons, si nous le voulons, battre monnaie pour acheter le ciel.

Pour donner cette valeur presque infinie à toutes nos actions, il suffit de les offrir à Dieu, et, par cette offrande, de les unir à celles de Dieu fait homme. » (Tout pour Jésus, p. 178.) Nous pouvons, par conséquent, nous proposer l'obtention de biens temporels : santé, succès d'une affaire, etc. …, pourvu que ce soit avec pleine résignation à la volonté de Dieu. Nous pouvons, à plus forte raison, demander des biens spirituels : pardon des péchés, victoire sur les tentations, vertus chrétiennes et religieuses, persévérance, salut, etc. …, mais il n'y a rien de plus avantageux pour nous que l'oubli de nous-mêmes et la recherche, en tout, de la plus grande gloire de Dieu : vouloir lui plaire, lui témoigner notre amour, accomplir sa sainte volonté. C'est observer le premier commandement avec toute la perfection possible : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces et de tout ton esprit. » Saint Alphonse dit à ce propos : « Plus nous nous oublions en faisant le bien, plus Dieu se souvient de nous et nous comble de grâces. »

Aussi est-ce par le degré de pureté d'intention que se distinguent la vie chrétienne parfaite et l'imparfaite. Dans la première, on oriente tout vers Dieu par des motifs surnaturels, dans la seconde on ne tend vers Lui que d'une façon intermittente. De ce fait, il y a dans les actes des motifs de valeur fort distincte. Faits de poussière et d'esprit, nous sommes enclins à poser sur tout ce que nous faisons l'empreinte de cette dualité qui se manifeste par la place que, trop souvent, nous donnons, même dans les actions les plus saintes, à l'égoïsme, à l'amour des aises, à la vanité, à la peur de l'opinion, etc. … 

Manières d'offrir tout à Dieu.

 Notre intention de tout offrir à Dieu peut être habituelle, virtuelle, ou actuelle. Les auteurs ne sont pas toujours d'accord pour préciser les limites des deux premières ; dans ce qui suit, nous adopterons la distinction qu'en font nos Principes de Perfection chrétienne et religieuse

Intention habituelle.

 Cette intention est constituée, d'abord, par l'état de grâce, qui est la condition indispensable de tout mérite, et, ensuite, par la profession religieuse.

Par l'état de grâce, tous les actes, même les plus humbles, dès qu'ils n'impliquent pas de péché, sont méritoires car ils sont influencés par la charité, c'est-à-dire que nous sommes censés agir pour Dieu et en vue du salut. C'est bien, en effet, pour plaire à Dieu que nous conservons ou recouvrons la grâce sanctifiante.

Nos distractions et préoccupations peuvent diminuer le mérite de nos actes, mais sans nous le faire perdre entièrement, car, même quand nous sommes distraits, notre volonté reste tacitement tournée vers Dieu. Une comparaison très simple nous aide à le comprendre : de même que celui qui a résolu de se rendre à un endroit déterminé n'a pas besoin d'y penser tout le long du chemin; de même, en vertu de la charité, de l'état de grâce, tout ce que nous faisons est orienté vers Dieu et y aboutit, alors même que nous ne pensions pas à le lui offrir d'une façon actuelle.

La valeur de chacun de ces actes, les autres circonstances restant égales, est proportionnée au degré de grâce sanctifiante ou de sainteté de celui qui les fait. C'est ainsi que les moindres actions de Notre-Seigneur étaient d'une valeur infinie. Nous voyons par là la différence de mérites qu'une âme peut acquérir, selon qu'elle est fervente ou tiède, et cela en chacun de ses actes. Nous voyons également comment une vie longue est un magnifique don du Ciel pour celui qui, vivant saintement, accroît sans cesse son capital de grâce sanctifiante et rend ainsi les mêmes activités chaque jour plus méritoires.

Que cela nous rende très prudents pour éviter tout ce qui pourrait nous être occasion de péché. Par celui-ci nous perdrions, avec la grâce sanctifiante, tous les mérites passés et la possibilité de mériter pour le Ciel. Si, cependant, nous avons le malheur de perdre l'amitié de Dieu, recourons sans délai au sacrement de Pénitence. Formons également nos élèves au culte de l'état de grâce. Pour eux, comme pour nous, plutôt la mort que la souillure.

Mais notre délicatesse de conscience doit être telle qu'elle nous fasse éviter, autant que possible, tout péché véniel qui, en diminuant l'effusion des grâces divines, nous prédisposerait peu à peu au péché mortel.

La profession religieuse, avons-nous dit, constitue également une intention habituelle. Par elle, en effet, nous avons accepté toutes les obligations de la vie religieuse et, par conséquent, la volonté de Dieu dont elles sont l'expression. De ce fait, il y a intention habituelle dans tout ce que nous faisons en conformité avec les vœux, les règles, la volonté des Supérieurs. Notre offrande est totale et irrévocable. Ayant tout reçu du Créateur, nous lui donnons tout : le corps et l'âme, les facultés spirituelles et sensibles, comme l'exprime très bien la prière de saint Ignace : Recevez, Seigneur, toute ma liberté, etc. …

Nous remettons aussi entre les mains du bon Dieu toute notre activité interne ou externe. Propriétaire de l'arbre, Dieu l'est également des fruits. Tout est donné, sacrifié, à tel point que la moindre réserve tournerait au larcin sacrilège. C'est un engagement sacré que celui de la profession ; nous l'avons pris avec enthousiasme et sincérité. Nous sommes, à n'en pas douter, dans la disposition de ne jamais le révoquer ; mais ne nous arrive-t-il pas de nourrir des vues égoïstes ? de nous rechercher nous-mêmes au lieu de penser à la gloire de Dieu ? Tâchons d'imiter la générosité de la confidente du Sacré-Cœur qui, le soir de sa profession, rentrée dans sa cellule, écrivait avec son sang : « Sœur Marguerite-Marie, morte au monde. Tout de Dieu et rien de moi ; tout à Dieu et rien à moi ; tout pour Dieu et rien pour moi. »

Seule une donation sincère et totale nous assurera les avantages spirituels et matériels que saint Bernard attribue à la vie religieuse. En méditant sur leur excellence, nous estimerons mieux la vocation qui nous les procure, nous reprendrons promptement confiance aux heures où notre vie nous paraîtrait stérile, parce que monotone, et nous estimerons bien légers les sacrifices de notre saint état.

Pour mieux nous assurer les mérites de l'intention habituelle, prenons l'heureuse habitude de renouveler souvent, en notre particulier, les vœux de religion. Faisons-le surtout à la messe au moment de l'élévation, lorsque nous nous offrons unis à Jésus, à Dieu le Père, ainsi qu'après la Sainte Communion. 

Intention virtuelle.

 Quelque excellente que soit l'intention habituelle constituée par l'état de grâce et par la profession, nous ne devons pas négliger la pratique de l'intention virtuelle. Elle consiste à offrir à Dieu l'ensemble des actes que nous réalisons en un laps de temps déterminé et à agir en vue de cette première intention, qui est valable tant que nous ne la révoquons pas, soit par un acte contraire, soit en laissant passer un temps trop long sans la renouveler.

Si, après avoir formulé une intention conforme à la volonté de Dieu, nous en avions une seconde, impliquant une faute grave, la première intention perdrait toute sa valeur, mais elle ne la perdrait qu'en partie si la nouvelle intention, quoique moins bonne, était exempte de péché mortel.

Le Bienheureux Père Champagnat conseillait cette intention virtuelle aux paroissiens de La Valla lorsqu'il leur disait : « Nous voilà à l'époque des grands travaux, les journées sont longues, les chaleurs accablantes ; vous allez au travail de grand matin, vous n'en revenez souvent qu'à la nuit ; vous vous fatiguez ; vous suez tout le jour. Oh ! que vous pouvez mériter pour le Ciel si vous le voulez ! Oh ! que vous serez agréables à Dieu ! Oh ! que de grâces il répandra sur vous si vous savez sanctifier vos actions et vos peines !

« Et que faut-il pour cela ? Les offrir à Dieu le matin, unir vos souffrances et vos fatigues à celles du bon Sauveur. Avant de commencer la journée et quelquefois quand vous y pensez pendant le jour, offrez votre travail à Dieu, dites-lui : Mon Dieu, je veux supporter tout cela pour accomplir votre sainte volonté, imiter Jésus-Christ, expier mes péchés, mériter votre grâce et le Paradis, pour que vous bénissiez mes enfants, tout ce qui m'appartient. » (Vie, p. 72.)

Nous exprimons plus particulièrement cette intention virtuelle au commencement de la journée par la formule d'Offrande de l'Apostolat de la prière au Sacré-Cœur. Je m'étendrai un peu plus sur ce point pour nous aider à rendre plus vivante une formule que la répétition quotidienne nous expose à prononcer d'une façon routinière et sans attention.

Nos actes, redisons-le, tirent leur mérite de leur conformité à la volonté de Dieu. Or, quelle conformité plus grande que celle qu'implique la formule par laquelle nous faisons nôtres les intentions de Dieu lui-même et de son Vicaire ? Par ces intentions qui s'étendent à tous les besoins de l'humanité, nous prenons conscience de notre dignité de membres et de collaborateurs de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Quand tant d'hommes méconnaissent les droits de Dieu et organisent leur vie comme s'il n'existait pas, ou ne pensent à Lui que pour le combattre, comment douter de la valeur de l'acte par lequel, chaque matin, nous Lui redisons que nous sommes à Lui et que nous Lui consacrons toute notre activité spirituelle, intellectuelle et apostolique ?

Voyons en quels termes, en juillet 1952, Notre Saint-Père le Pape conseillait cette pratique à un groupe de cheminots, pour les engager à ne pas se prévaloir de leur travail des jours fériés pour se dispenser de l'obligation de prier, d'élever leur esprit à Dieu : « Vous savez, par expérience qu'aucune occupation, aucun travail n'interrompt le rythme de votre respiration. La respiration continue même pendant le sommeil. Pourquoi en devrait-il être autrement pour la respiration de l'âme qu'est la prière ? Une méthode simple et facile pour pratiquer cette respiration de l'âme est la suivante : Au début de la journée, offrez au divin Cœur de Jésus vos pensées, vos paroles, vos actes, vos joies, vos peines. Cette offrande répétée, si possible, au cours de la journée, surtout avant les moments les plus importants, suffit pour que votre vie de chaque jour devienne une constante prière. »

 Cette offrande du matin est d'abord, sanctifiante. « Car, dit Mgr Garrone, archevêque de Toulouse, on ne s'ajuste pas à la volonté divine sans que tout le reste, dans l'âme, ne s'en ressente. C'est corriger en nous les attitudes mal discernées qui compromettent l'efficacité de la prière. C'est nous mettre dans l'axe des grâces et donc les recueillir au maximum. »

Reprenant une idée que nous n'avons fait qu'énoncer plus haut, l'offrande fait de nos actes, religieux et profanes, un hommage à Dieu, elle change toute notre vie en un sacrifice de louange et d'expiation. Il n'y a pas à opposer le temps de la prière et celui de l'étude, ou de la récréation, ou des repas, le temps de l'oraison et le temps de l'action comme, si le premier rapprochait de Dieu et comme si le second en éloignait. Dans une vie vraiment et totalement offerte, tout est oraison ; on se sanctifie, non malgré l'action ou en s'évadant de l'action ; on se sanctifie par le moyen de l'action aussi efficacement que par le moyen de l'oraison.

 L'offrande est non seulement sanctifiante, elle est de plus, apostolique et conquérante. N'est-ce pas là, en effet, le but que se propose le R. P. Gautrelet, S. J. lorsque, pour répondre aux désirs d'apostolat immédiat des étudiants jésuites de Vals, il les engagea à mettre en commun prières, travaux, sacrifices pour venir en aide aux missionnaires ?

Notre Saint-Père le Pape développe cette même idée dans la lettre d'approbation des nouveaux statuts de l'Apostolat de la Prière (oct. 1952). « En invitant et en poussant les fidèles à offrir à Dieu leurs prières, leurs travaux, leurs peines, leurs sacrifices pour aider au ministère de l'Eglise et collaborer ainsi à l'extension du règne du Christ, cette Association ne se borne pas à éveiller en eux le zèle des âmes et le souci intense du salut éternel du prochain ; elle encourage aussi et développe l'usage des moyens et des forces surnaturelles d'où dépendent l'efficacité et le succès de tout travail apostolique. Pour cette raison, elle empêche l'Apostolat de se réduire à un déploiement d'activité purement extérieure et d'être privé de résultats durables. »

Il est beaucoup de choses que Notre-Seigneur se propose et veut, mais en y mettant comme condition que les hommes coopèrent avec Lui. Ainsi, il ne prétend pas convertir les infidèles, si les missionnaires ne vont pas les instruire chez eux. De même, il ne veut pas mettre, sans notre collaboration, un terme aux persécutions qui sévissent en Russie, en Chine et autres pays.

Sans doute y a-t-il des rideaux de fer et de bambou pour arrêter les missionnaires, mais nos prières, nos actes offerts aux intentions du Sacré-Cœur de Jésus, sont des missionnaires qui pénètrent partout. Beaucoup d'âmes ne seront converties ou sauvées que si l'on prie pour elles et pas autrement. Ne nous étonnons pas dès lors si l'on nous dit que peut-être sainte Thérèse d'Avila a converti autant d'infidèles que saint François Xavier. Rien d'étonnant non plus que, sans sortir de son monastère, sainte Thérèse de Lisieux ait mérité d'être déclarée patronne des missions au même titre que l'Apôtre des Indes. Dans ce même ordre d'idées, Dom Chautard nous parle d'un évêque de Cochinchine qui tenait pour plus efficaces les prières et les sacrifices de dix Carmélites que les courses et les prédications de vingt missionnaires.

Quelle belle perspective pour nous ! Quel bel encouragement pour ceux qui se croient incapables de faire aucun bien, parce qu'ils n'en perçoivent pas les fruits ou parce qu'ils n'ont pas les qualités que l'on est porté à tenir pour indispensables dans l'apostolat ! Combien dignes de méditation et combien consolantes sont ces réflexions du Père Plus, S. J. : « Si j'avais l'intelligence des répercussions possibles de mes moindres actes, quelle puissance serait la mienne ! Suivre, à travers le monde, le cheminement pour le bien de ce petit acte ignoré qui m'a tant coûté mais que j'ai offert généreusement… Le voir aboutissant à ce geste de paralytique depuis des années immobilisé dans son péché et se redressant tout à coup… Le voir, ce petit acte ignoré, aboutissant à telle vocation jusque-là combattue, hésitant à percer et qui, soudainement, s'affirme. Le voir ce petit acte ignoré, aboutissant à cette conversion merveilleuse, à ces désirs de sainteté si grands en plusieurs âmes.

Partout où il y a une âme en détresse, je puis l'aider ; partout où il y a une âme en ascension, je puis contribuer à la faire monter ; partout où quelqu'un souffre, je puis l'aider à porter sa souffrance ; partout où quelqu'un tombe, je puis fermer l'abîme ou soutenir ses forces et le remettre en chemin. »

 Notre offrande du matin est faite en union avec Notre-Seigneur et aux intentions pour lesquelles il s'immole sur l'autel. Or il n'est pas de prière plus efficace que celle que Jésus-Christ fait sienne lorsqu'il s'offre en sacrifice à son Père à la messe. Sans doute, nous ne pouvons pas passer tout le jour à entendre des messes, mais, grâce à notre formule d'offrande du matin, notre prière en action de toute la journée, se fait à « toutes les intentions pour lesquelles Jésus s'immole continuellement sur l'autel », nous unissant ainsi aux centaines de milliers de messes qui se célèbrent chaque jour dans le monde entier.

Elle met sur chaque autel notre travail et nos délassements, nos paroles et nos pensées, nos peines et nos souffrances, nos plaisirs et nos joies ainsi que tous nos actes volontaires, à la seule exception, comme nous l'avons déjà dit, de ce qui, étant péché, est incapable d'entrer en union avec l'oblation, l'offrande du corps et du sang de Notre-Seigneur.

 Nous faisons passer nos offrandes par Marie, ce qui est parfaitement selon notre esprit : Tout à Jésus par Marie, par son Cœur Immaculé, ciboire de prédilection de Notre-Seigneur, temple de la Sainte Trinité. Par Elle, notre Médiatrice, nous allons à Jésus. Elle prie et présente nos offrandes. Nul doute que sa médiation ne les rende agréables à Notre-Seigneur, comme la médiation de Rébecca rendit agréables à Isaac les présents qui obtinrent à Jacob les privilèges du droit d'aînesse.

D'ailleurs, Marie n'est-elle pas dans l'offrande, comme en tout, notre modèle ? Notre donation par la profession doit être une réplique de sa Présentation au Temple. Or Marie fit ensuite de toute sa vie une sublime offrande, un long sacrifice uni à celui du Christ Rédempteur. Imitons sa ferveur et mettons dans notre offrande quotidienne la même générosité et le même amour qu'Elle mit dans la sienne. De la sorte, nous serons tout le long du jour, selon le désir de noire Bienheureux  Fondateur, « les collaborateurs de Jésus-Christ. dans l'œuvre de la rédemption des âmes ».

Si par le passé nous avions oublié de vivre en « Consacrés à Notre-Dame », nous profiterons de l'année jubilaire de ses apparitions à la grotte de Massabielle pour redonner à notre spiritualité son caractère mariste, donc marial. Tous les matins, après la Sainte Communion, nous supplierons Marie de vouloir bien offrir à Jésus présent en nous, l'humble bouquet de nos sacrifices et actes de vertu, et de nous obtenir en retour, pour l'Institut tout entier, pour chacune de nos Provinces et chacune de nos âmes, les grâces de sainteté dont elle inonda, il y aura cent ans, le cœur de Bernadette et qu'elle ne cesse de répandre en ce lieu sur les foules qui accourent à ses pieds. 

Offrande actuelle.

 Comme nous l'avons dit déjà, l'offrande du matin peut devenir facilement routinière. Nous sommes exposés à n'en prononcer la formule que du bout des lèvres. D'autre part, dans le courant de la journée, bien des occupations et des préoccupations nous absorbent et nos actions risquent de perdre, en partie du moins, l'élan vers Dieu que nous leur avions imprimé par l'Offrande du matin. C'est pourquoi, il est fortement recommandé de renouveler celle-ci, aussi souvent que possible, au commencement des actions principales.

Chaque fois que nous faisons cela, nous mettons un peu plus de volonté dans l'exécution de l'acte offert et nous nous sentons portés à y apporter plus de soin. De plus, nous tenons en échec le démon qui rôde autour de nous pour nous suggérer des intentions égoïstes et même coupables. Nous évitons l'automatisme qui est si fréquent et qui tue la ferveur. Nos actions deviennent, de la sorte, plus aptes à glorifier Notre-Seigneur et plus méritoires.

Nous avons dit qu'il convient de renouveler notre intention au commencement des principales occupations. Il est conseillé de le faire également, à l'occasion de la prière de l'heure que nous ne devrions jamais omettre. Si nous avons contracté l'habitude de nous rappeler de temps en temps le souvenir de la présence de Dieu ou de vivre sous le regard de Marie, nous pouvons en profiter aussi pour assurer un but surnaturel à notre activité. Point n'est besoin d'une longue prière, dit saint Grignion de Montfort parlant de cette offrande mariale, une œillade de l'esprit suffit ; et saint François de Sales dit que nous ne devrions pas passer un quart d'heure sans orienter notre cœur vers Dieu, comme le navigateur ne passe jamais longtemps sans regarder la boussole.

Si nous sommes portés à tenir pour difficile ce renouvellement fréquent de l'intention, pensons au soin scrupuleux avec lequel les malades suivent les instructions du médecin qui leur prescrit de prendre un remède à intervalles précis. Ils ont la médecine à portée de main, ils observent chaque détail du mode d'emploi car ils ont un grand désir de guérir. Le bien de notre âme ne mérite-t-il pas un soin au moins égal ?

La pratique du Trésor du Sacré-Cœur, c'est-à-dire l'habitude d'inscrire dans un carnet, ou sur des feuilles détachées, les œuvres offertes est un excellent moyen d'actualiser notre intention. Bien que cette méthode ne convienne pas à tout le monde, Dieu ne conduisant pas toutes les âmes par des voies identiques, elle peut rendre grandement service à des commençants ou à des esprits légers et dissipés. Ce qui est hors de doute, c'est que ceux qui se livrent à ce contrôle personnel avec application et constance y trouvent un excellent moyen de ne pas perdre le contact avec Dieu, même les jours de plus d'activité et de tracas.

Nous avons dit que l'intention est très favorable à notre sanctification et à notre action apostolique, mais elle assure de plus, surtout si elle est actuelle, notre valeur humaine et professionnelle. Elle exclut, en effet, le formalisme, car offrir un travail bâclé serait un manque de respect, une offrande pharisaïque ; le cœur n'y étant pas, elle serait sans valeur. Ce serait donc un non-sens que d'offrir et ne pas s'appliquer à bien faire.

On se plaint partout de l'esprit mercenaire, du sabotage, de la tendance au moindre effort. La conscience professionnelle s'est émoussée en bien des gens. Nous, les religieux, sommes-nous complètement à l'abri de ce mal ? Ne sommes-nous pas exposés, à certaines heures, à remplir nos obligations vaille que vaille ? L'offrande sera le contrepoids efficace qui nous maintiendra dans les dispositions voulues et nous fera fournir l'effort et accepter la peine qu'exige l'ouvrage bien fait, le travail fini. Elle nous rappellera que si la simple honnêteté demande que l'on serve bien les hommes avec qui on a des engagements, la fidélité à Dieu requiert, à plus forte raison, qu'on le serve de son mieux. 

La fidélité à l'offrande doit nous être un motif

de grande confiance.

 Bien des heures dans notre vie peuvent nous paraître un temps perdu : temps du sommeil, des repas, des délassements, des rapports habituels avec les confrères, les élèves, leurs parents, les employés, les fournisseurs, etc. … Mais, par l'intention, nous communiquons à ces occupations une valeur surnaturelle ; elles sont ainsi vivifiées comme le fut, par le souffle divin, le limon dont nous avons été formés.

Nous trouvons en cela une des preuves les plus évidentes de la bonté divine à notre égard, car il a mis notre perfection dans ce qui est à notre portée. S'il avait exigé de longues contemplations et de grandes austérités, nous aurions été exposés à nous décourager devant la difficulté de la tâche, mais qui peut dire qu'il lui est impossible de sanctifier, par l'offrande, les actions les plus communes ?

Lorsque le soir, mes bien chers Frères, nous allons prendre notre repos, et nous pourrions appliquer cela au soir de la vie, nous nous demandons peut-être ce qui nous reste pour l'éternité de toutes nos actions et démarches de la journée, quel placement nous avons fait pour le ciel. Mais, si nous avons cultivé fidèlement l'état de grâce et si nous avons pris l'heureuse habitude d'offrir à Dieu tous les détails de notre existence, nous aurons l'assurance de tout retrouver dans l'autre vie. Tantôt nous aurons réussi, tantôt nous aurons échoué, mais tout sera récompensé. 

Conclusion.

 Les religieuses de la Visitation d'Annecy demandèrent à saint François de Sales :« Que ferons-nous de plus cette année-ci que l'année dernière ? » Le saint leur répondit :« Vous avez jeûné trois fois par semaine et autant de fois vous vous êtes donné la discipline ; si chaque année vous voulez faire davantage, bientôt les jours de la semaine n'y suffiront plus et il vous faudra jeûner deux fois par jour. On n'avance pas en perfection par la multiplicité des actes, mais par la perfection avec laquelle on les accomplit ».    

Nous aussi, mes bien chers Frères, nous sommes exposés parfois à voir, pour nous et pour les autres, une plus haute sainteté sous forme d'addition. Nous nous demandons quelles prières et quelles mortifications nous pourrons ajouter à celles que nous faisons déjà. En général, les saints se sont moins occupés de la quantité, mais ils se sont appliqués principalement à tirer profit de tout, à rendre méritoire tout ce qu'ils faisaient.

Imitons-les en prenant l'excellente habitude de tout offrir à Dieu ; de la sorte, quoique nous ne soyons que de pauvres sarments, nous porterons beaucoup de fruit, parce que nous nous maintiendrons intimement unis au cep, à Notre-Seigneur. La sève de la grâce passera en nous avec abondance, elle nous sanctifiera et, par nous, elle passera à tous ceux dont nous avons la responsabilité, à tous ceux qui nous entourent. 

Institut Supérieur

de Culture Religieuse et Apostolique

des Frères Enseignants

 Vous aurez appris la fondation, à Rome, de cet Institut et vous désirez, sans doute, avoir quelques données à son sujet car, dès le premier moment et avec raison, vous aurez eu, comme nous, l'impression qu'il s'agissait d'une mesure très importante.

Son origine est. bien indiquée dans la lettre suivante, qu'en date du 19 juillet 1956 m'adressait le Très Honoré Frère Supérieur Général des Frères des Ecoles Chrétiennes :

                 Très Révérend Frère Supérieur Général,

 A l'occasion de notre 38ième Chapitre Général, qui s'est tenu à Rome du 9 mai au 14 juin de la présente année, nous avons reçu une lettre de la Sacrée Congrégation des Religieux, signée du Cardinal Valerio Valeri. Parmi les recommandations, nous trouvons celle-ci : « Votre Institut… donnerait un très bel exemple en ouvrant un Institut Supérieur de culture religieuse spécialisée dans toutes les connaissances utiles à l'apostolat des religieux laïques enseignants. »

Cette directive de la Sainte Église, nous voudrions essayer de la concrétiser avec vous sans trop tarder. Comme elle intéresse tous les Instituts des Frères Enseignants, je m'adresse à Votre Révérence, pour lui demander des suggestions.

Cette Fondation, répondant à des fins analogues à celles de l'Institut Pontifical Regina Mundi pour les religieuses, s'en rapprocherait également quant aux programmes, aux conditions d'inscription et de durée.

L'Institut délivrerait un diplôme à la fin de chacune des trois années d'études. Les certificats donneraient à nos Frères le droit d'enseigner la religion dans nos établissements, car nous avons l'espoir, ainsi que la chose a lieu pour l'Institut Pontifical Regina Mundi, qu'ils seraient reconnus par le Saint-Siège. De plus, ces cours prépareraient efficacement des responsables pour nos maisons de formation.

Pensez-vous qu'il soit possible de commencer avec l'année académique 1957-58 ?

Nous comptons débuter par la section en langue française ; l'expérience fera connaître quelles autres sections pourraient s'y adjoindre dans la suite.

Pourriez-vous assurer un certain nombre d'élèves au départ, ainsi que des professeurs pour l'enseignement ? – Comme rien ne vaut un échange d'idées amical – une réunion de Supérieurs, ou de délégués de Supérieurs, ne serait-elle pas possible au cours des présentes vacances ?

Il est bien évident que plusieurs cours seront donnés par des professeurs des Universités romaines.

Je vous prie d'excuser la liberté que je prends de vous écrire ces lignes, mais vous comprendrez que, devant le désir si clairement exprimé de la S. C. des Religieux, il faille aller de l'avant. Un tel désir ne pourra se réaliser que par la collaboration de nos diverses familles religieuses. Coopération, vous le savez, voulue et encouragée par le Saint-Siège.

Veuillez agréer… etc. …

 Pour diverses raisons la réunion des Supérieurs Généraux ou de leurs Délégués, dont parle cette lettre, n'a pu avoir lieu que le 9 mai de la présente année. Elle a été suivie d'une autre, qui s'est tenue le 11 juin. A la première réunion le C. F. Sébastiani, A. G., nous représentait et le C. F. Alessandro, Procureur Général, représentait les Frères de la Sainte-Famille. A la seconde, le C. F. Procureur Général avait la représentation des deux Congrégations.

Après avoir pris connaissance des données, explications et échanges de vues résultant de ces deux réunions, le Conseil Général a chargé le C. F. Sébastiani, A. G., de communiquer aux Frères Provinciaux la résolution des Supérieurs de seconder de leur mieux la fondation projetée.

De la lettre-circulaire qu'il leur adressa, j'extrais ce qui suit : 

Principales caractéristiques.

 Cet Institut s'appellera « Institutum Jesus Magister» et il vise à être un organisme « sui generis» parfaitement adapté à son objet ; il sera de niveau nettement universitaire ; ses diplômes, officiellement sanctionnés par la Sacrée Congrégation des Religieux, seront reconnus par tous les diocèses du monde.

En un mot, on voudrait que cet Institut soit, dans son genre et pour les Frères, ce que les autres Universités Pontificales de Rome sont pour les prêtres.

Il personnifiera en quelque sorte la vocation et la mission du religieux éducateur sur le plan de l'Eglise universelle.

Voici, à ce sujet, des précisions établies dans une des séances plénières de la Commission organisatrice composée de représentants de toutes les Congrégations de Frères enseignants, sous la présidence de délégués de la Sacrée Congrégation des Religieux :

 1. La durée des études à l'Institutum sera de 3 ans.

 2. Le programme ne comportera pas de Philosophie; les candidats devront donc se présenter avec une connaissance sérieuse de la Philosophie thomiste ; c'est à chaque Congrégation d'assurer cette préparation.

 3. Exceptionnellement, en octobre 1957, on organisera des cours de Philosophie et de Latin, pour préparer les Frères qui peuvent y participer à aborder les cours réguliers de l'Institutum en octobre 1958.

 4. Dès que possible, on dressera le programme de cette session 1957-1958 et on en enverra copie à tous les intéressés, afin que les candidats qui ne peuvent venir à Rome cette année puissent préparer leur entrée à l'Institutum pour 1958.

 5. Les disciplines principales prévues pour les trois années de l'Institutum sont :

Théologie dogmatique, morale et ascétique, Droit Canon des religieux,

Histoire de l'Eglise,

Ecriture sainte,

Pédagogie catéchistique.

Au bout de deux ans, les étudiants obtiendront un grade équivalent à la licence, et après la 3ième année, un grade équivalent au doctorat.

En définitive, le nouvel Institut sera ce que nous, les Congrégations de Frères, le ferons. 

Occasion unique.

 « Il est absolument nécessaire de faire réussir ce projet que nous avons tous si longtemps caressé sans cependant oser espérer sa réalisation à si bref délai.

Aujourd'hui, l'Eglise, consciente de nos besoins et comprenant que la réalisation d'un tel projet ne pouvait être envisagée par les initiatives privées, nous tend la main, faisant sienne cette Institution et mettant gracieusement à notre disposition une partie des beaux édifices de son Université du Latran avec ses riches bibliothèques.

L'occasion est unique et il serait impardonnable de la perdre, privant ainsi nos successeurs des avantages qu'elle présente.

On a le local et on est en train d'engager des professeurs chargés de cours aux actuelles Universités Pontificales de Rome.

Il ne manque que les élèves…

Voilà la raison de cet appel urgent. Le sort de l'Institutum est entre vos mains, Frères Provinciaux. Nous comptons sur votre compréhension et votre collaboration.»    

 Après avoir indiqué les conditions d'admission au cours Préparatoire, le C. F. Assistant ajoute, en guise de conclusion que le Conseil Général fait pleinement sienne :

« Je ne voudrais pas, mon cher Frère Provincial, par cette proposition, compliquer les problèmes de votre Province, mais, comptant sur votre large compréhension de l'importance que revêt pour nous le projet, je désire seulement vous dire ceci :

S'il vous est possible, même au prix de quelque sacrifice, de procurer déjà cette année un candidat au moins, remplissant les conditions ci-dessus, dès maintenant les Congrégations des Frères Enseignants vous remercient ; et si vous ne le pouvez absolument pas, veuillez bien songer dès à présent à la préparation d'un candidat pour la première année du cours régulier de 1958-1959.

Plus que personne, vous sentez le besoin d'avoir dans votre Province des éléments mieux formés pour assumer des responsabilités – pour travailler plus efficacement à la formation de vos sujets – pour organiser les études religieuses et catéchistiques – pour faire face à l'angoissant problème de la formation chrétienne de vos grands élèves – pour composer, si les circonstances le demandent, des textes de religion et autres ouvrages de formation de la jeunesse.»

 Dans la pensée des fondateurs de l'Institutum, le cours Préparatoire sera supprimé l'année prochaine, comme il a été dit plus haut. De sorte que les candidats devront avoir une connaissance suffisante du latin qui leur permette de comprendre les textes courants et une connaissance suffisante, également, de la Philosophie scolastique. Il conviendra, par conséquent, que les Frères Provinciaux les désignent le plus tôt possible afin qu'ils se préparent.

Depuis le 21 octobre, l'Institutum est en marche. On a fait coïncider l'ouverture des cours avec celle de l'Université du Latran. D'ailleurs les deux Institutions ont le même Recteur, Mgr Antonio Piolanti, ce qui pourra faciliter bien des choses. 

DÉCRET

conférant à l'Institution le titre de Pontifical

 Afin que les hommes consacrés à Dieu, qui promettent l'observance des conseils évangéliques dans les Religions laïques ou Instituts similaires, deviennent toujours mieux et plus sûrement aptes à promouvoir leur sanctification et celle d'autrui, et pour qu'ils excellent à instruire leurs élèves dans la vérité et dans la vertu chrétienne, ce qui du reste est la tâche principale qui leur est confiée par l'Eglise, la Sacrée Congrégation des Religieux, dans l'audience accordée à Son Eminence le Cardinal Valerio Valeri, Préfet, le 5 mars 1957, a obtenu de Notre Saint-Père le Pape Pie XII la faculté de fonder à Rome un Institut de Culture Religieuse Supérieure destiné à cette fin particulière et de lui décerner le titre de Pontifical.

C'est pourquoi la même Sacrée Congrégation, appuyée par l'autorité suprême et bienveillante du Souverain Pontife, par la forme et la teneur du présent décret, érige et déclare érigé dans cette même ville l'Institut dont il est question ci-dessus et qui est déclaré Pontifical avec le titre de JESUS MAGISTER, lequel aura sa direction propre.

Tout le reste se rapportant aux locaux, au Conseil directif, au programme des études, aux diplômes à décerner, aux professeurs et aux élèves, sera convenablement fixé par les statuts dudit Institut Pontifical.

Nonobstant toutes choses contraires.

Donné à Rome, au Palais de la Sacrée Congrégation des Religieux, le 1ier juillet 1957, fête du Très Précieux Sang de N.-S. J.-C.

L. † S. Valerio Cardinal VALERI, Préfet.

Pietro PALAZZINI, Sous-Secrétaire

Radio et Télévision

 Vous aurez pris connaissance de l'importante encyclique sur le cinéma, la radio et la télévision, donnée par Notre Saint-Père le Pape le 8 septembre dernier. Les limites de cette circulaire ne nous permettent pas de la reproduire; d'ailleurs elle a obtenu une grande diffusion et chacun peut se la procurer dans sa propre langue.

Je me fais cependant un devoir de vous donner connaissance de la lettre suivante, adressée par la Sacrée Congrégation des Religieux aux Supérieurs Généraux des Instituts de Perfection, au sujet de la Radio et de la Télévision.

Rome, le 6 août 1957.

Dès le 1ierjanvier 1954, date où avaient lieu, en Italie, les premières transmissions de télévision, le Saint-Père manifestait aux Eminentissimes Ordinaires, par une importante exhortation, ses vives préoccupations personnelles au sujet de l'influence que ce récent et puissant moyen de diffusion de nouvelles, de faits et de spectacles de toutes les parties du monde, pouvait exercer sur la vie morale et spirituelle des âmes.

Un si merveilleux produit de la technique moderne ayant été mis pratiquement, en très peu de temps, à la portée de tout le monde, on constate qu'il se trouve déjà assez répandu jusque dans les maisons religieuses.

On remarque que, même en Italie, où les bonnes intentions, les promesses et la bonne volonté de plusieurs laissaient espérer que les programmes seraient maintenus dans les limites de l'honnêteté et de la morale, ces limites n'ont pas toujours été respectées.

De ce fait, les préoccupations du Souverain Pontife se sont accrues, pour ce qui concerne l'usage, particulièrement dans les Instituts de perfection chrétienne, de cette invention aussi précieuse que dangereuse.

Dans la vie religieuse il s'agit, en effet, de sauvegarder la discipline et la sainteté qui lui sont propres et qui sont menacées, non seulement par ce qui est évidemment mauvais, mais encore par cette influence de mondanité qui fait perdre le goût des choses spirituelles et amoindrit, peu à peu, ce désir de perfection qui doit être toujours vivant dans toute âme religieuse en vertu même de sa profession.

Cette Sacrée Congrégation, à la suite du Congrès des états de perfection, tenue en 1950, s'est vivement préoccupée de la réglementation de l'usage des inventions modernes : cinéma, radio, télévision, sous leurs divers aspects, en rapport avec la vie religieuse, sa discipline et son apostolat.

En particulier, au sujet de la Radio et de la Télévision, après avoir profité des données fournies par le Congrès lui-même, elle a demandé et recueilli l'avis des Supérieurs religieux et d'autres personnes qualifiées par leur science, leur piété, leur expérience de la vie spirituelle. Elle les a choisies de nationalité et de sensibilité diverses, dans le but de préparer et d'envoyer une Instruction dans laquelle on fixerait les normes générales dont les Supérieurs des Instituts religieux, tenant compte de leur esprit particulier, de leur discipline propre, de leurs buts internes et externes, pourraient tirer, du point en question, une réglementation plus détaillée et plus adaptée.

Il est aisé de comprendre que, eu égard aux biens et aux maux, à l'utilité et aux dangers que peut présenter la Télévision, cette Sacrée Congrégation ne considère pas sa suppression comme nécessaire pour tous les Instituts religieux, sans discrimination, pas plus qu'il n'est dans ses intentions de l'admettre ou de la tolérer d'une façon pleine et absolue. Dans le premier cas, on courrait le danger de trop couper de la vie extérieure des Instituts qui doivent travailler dans le monde et y exercer une mission sociale et religieuse. Dans le second cas, on ramènerait simplement le Religieux dans le monde qu'il a abandonné au risque de l'y voir absorber graduellement cet esprit mondain qui est inconciliable avec l'esprit religieux.

L'Eglise ne prétend pas bannir tout ce que la science et le progrès fournissent à l'humanité et qui est susceptible de servir au bien ; mais elle ne peut ni ne veut, sous peine d'être infidèle à sa mission, s'écarter du principe : « Salus animarum suprema lex. » En outre, à l'égard de cette portion choisie de ses enfants que sont les religieux, l'Eglise a, non seulement la préoccupation d'écarter les graves et évidents dangers du mal, mais encore tout ce qui peut empêcher ou retarder l'avancement de la perfection qui en est le but précis.

En ce qui concerne la question de la Radio-Télévision, il importe donc de faire des distinctions opportunes. Autres sont, en effet, les exigences de la vie contemplative et autres celles de la vie active. Dans la vie active elle-même, autre est ce qui peut être admis comme un honnête repos et divertissement, et autre ce qui fait partie des exigences de l'apostolat, Et dans l'apostolat même, autre est ce qui peut être admis comme instruction et comme expérience pour l'apôtre lui-même et autre ce que les religieux peuvent fournir aux fidèles sous leur contrôle et assistance.

Tenant compte des considérations qui précèdent, cette Sacrée Congrégation a cru opportun d'établir quelques normes fondamentales et d'inviter, ensuite, les Supérieurs de chaque Institut à préciser, d'accord avec leur Conseil respectif, dans l'esprit et dans la tradition qui leur sont propres, des règles plus concrètes sur la matière en question, afin que ce qui peut être une aide efficace pour l'apostolat ne dégénère pas en ruine spirituelle pour les Religieux et, pire encore, en un relâchement général de la discipline religieuse.

Tout bien considéré, cette Sacrée Congrégation établit les règles suivantes et demande aux Supérieurs qu'elles soient bien observées graviter onerata eorum conscientia (leur en faisant un grave devoir de conscience).

1. Il n'y a aucun motif qui justifie l'introduction des appareils de Télévision dans les communautés de vie contemplative, soit d'hommes soit de femmes. Un poste de Radio peut être toléré dans le but unique de permettre aux religieux d'écouter le Pape s'adressant au monde entier et d'en recevoir la Bénédiction, ou bien pour quelque exceptionnelle manifestation à caractère religieux.

2. Dans les Religions de vie active :

a) On ne peut jamais permettre l'usage d'appareils individuels de Radio et moins encore de Télévision dont on se servirait librement et sans contrôle du Supérieur.

b) Les appareils de Radio ou de Télévision doivent être toujours et exclusivement placés dans une salle de communauté, en un lieu public et sous le contrôle du Supérieur ou de son délégué.

c) Les Supérieurs doivent contrôler le temps consacré à la télévision ou aux auditions radiophoniques, de telle façon qu'elles ne gênent pas les occupations et les devoirs d'état ou de l'emploi de chacun : apostolat, exercices de piété, ou de communauté, heures consacrées au repos, d'après l'horaire de la maison.

d) Les Supérieurs doivent interdire les programmes de radio ou de télévision qui, pour des raisons de moralité ou de mondanité, ne conviennent pas à la vie religieuse. On peut donc dire que, par rapport à la vie religieuse, tous les programmes doivent être ou du moins peuvent être inclus dans cette prohibition, excepté les transmissions d'ordre instructif ou religieux. On doit donc les interdire si elles n'ont pour les religieux qu'un but récréatif.

e) Si des raisons d'apostolat demandaient clairement, pour certains religieux et dans des cas concrets, des exceptions raisonnables, il appartiendrait toujours au Supérieur d'en décider. Mais il prendra graviter onerata conscientia toutes tes précautions voulues pour que le danger reste le plus éloigné possible, en choisissant des sujets d'un solide esprit religieux: d'une sérieuse expérience de la vie, capables de discerner, non seulement ce qui pourrait leur nuire personnellement, mais aussi ce qui pourrait faire du mal à ceux auxquels le spectacle serait présenté.

P. A. LARRAONA, Secrétaire.

P. PALASSINI, Sous-Secrétaire.  

Cause de Canonisation

du Bienheureux Fondateur

 Le 15 mai dernier j'adressai aux Frères Provinciaux, qui vous les ont transmises aussitôt, les lignes suivantes :

J'apprends, à l'instant, que le 21 de ce mois, se tiendra au Palais du Vatican, la Congrégation Ordinaire qui décidera de la reprise de la Cause de notre Bienheureux Fondateur en vue de sa canonisation.

Quoique le délai soit bien court, j'espère que cet avis vous parviendra à temps pour inviter les Frères à de ferventes prières et à de généreux sacrifices pour le succès de ladite réunion.

Je vous reste bien dévoué en J. M. J.

Le résultat favorable de cette Congrégation donna lieu au Décret suivant que vous lirez avec joie et reconnaissance. 

DECRETUM

LUGDUNEN.

CANONIZATIONIS

Beati

MARCELLINI IOSEPHI BENEDICTI

CHAMPAGNAT

Sacerdotis Confessoris

Instituti Parvulorum Fratrum Mariae fundatoris

SUPER DUBIO

An signanda sit Cominissio resumptionis Causæ in casu et ad effectum de quo agitur.

Beatorum èælitum honoribus vix duobus ab hinc annis, die scilicet 29 mensis Maii 1955, Venerabili MARCELLINO IOSEPHO BENEDICTO CHAMPAGNAT in Patriarchali Vaticana Basilica sollemni ritu decretis, novensilis Beati sanetimoniæ fama et Christihdelium cultus erga eum cotidie magis ac cotidie latius propagatus et ferventius auctus est, adeo ut Deus, eodem suffragante Beato, plures gratias, ni forte et miracula, devotis adprecatoribus con.cesserit et patrare sibi complacuerit. Hine Christifideles permulti, præter ipsos Parvulos Fratres Mariæ eorumque innumeros alumnos, eundem Beatum. suprema Sanctorum corona redirnitum exoptant. Id testati sunt in suis ad Summurn Pontificem missis litteris Purpurati Patres Archiepiscopi : Lugdunen., Sydneyen., Marianopolitan., Neo-Eboracen., Januen., Compostellan., S. Pauli in Brasilia et S. Sebas tiani Fluminis Ianuarii, necnon plures aii Archiepiscopi et Episcopi, Sanctitatem Suam enixe supplicantes ut commissionem resumptionis eausæ canonizationis prædicti Beati signare benigne dignaretur.

Instante igitur Fr. Alexandro, Generali Postulatore Instituti Parvulorum Fratrum Mariæ, E.mus ac Rev.mus Dominus Benedictus Cardinalis Aloisi Masela, Episcopus Prænestin., huius Causæ Relator, in Ordinario S. Rituum Congregationis cœtu die 21 mensis Maii a. 1957 ad Vaticanum habito, dubium proposuit discutiendum : An signanda sit commissio resumptionis causae in casu et ad effectum de quo agitur. Et E.mi Patres sacris ritibus tuendis præpositi, post auscultatam ipsius Cardinalis Ponentis relationem, audito quoque R.P.E. Sylvia Romani, Promotore Generali Fidei, omnibus mature perpensis ceterisque de jure servandis servatis, rescribere censuerunt : Affirmative, seu Signandam esse commissionem resumptionis causæ canonizationis Beati MARCELLINI IOSEPHI BENEDICTI CHAMPAGNAT, si Sanctissimo placuerit.

De præmissis omnibus facta postmodum Sanctissimo Domino Nostro Pio Papæ XII per subscriptum Cardinalem fideli relatione, Sanetitas Sua Em.morum Patrum sententiam ratam habens, commissionem resumptionis causae canonizationis Beati MARCELLINI IOSEPHI BENEDICTI CHAMPAGNAT, Confessoris, Manu propria dignata est signare.

Datum Romæ, die 21 mensis Iunii, A.D. 1957.

C. Card. CicoGNANI, S. R. C. Prœfectus.

L. †  S.   †  A. CARINCI, Archiep. Seleucien.,

 S.R.C. a Secretis.

     TRADUCTION 

DÉCRET

DIOCÈSE DE LYON

Cause de Canonisation du Bienheureux

MARCELLIN-JOSEPH-BENOIT CHAMPAGNAT

Prêtre, Confesseur,

Fondateur de l'Institut des Petits Frères de Marie 

SUR LE DOUTE

Si dans le cas actuel et en vue du but à obtenir, la Commission de la reprise de la Cause doit être signée.

 Il y a à peine deux ans, c'est-à-dire le 29 mai 1955, dans la Basilique Patriarcale du Vatican, les honneurs des Bienheureux du Ciel étaient décernés, par une cérémonie solennelle, au Vénérable Marcellin-Joseph-Benoît Champagnat. La réputation de sainteté du nouveau Bienheureux s'est propagée chaque jour de plus en plus et a augmenté toujours avec plus de ferveur, de telle façon que Dieu, par l'intercession du même Bienheureux, a accordé plusieurs faveurs et peut-être des miracles à ceux qui le priaient avec ferveur et s'est plu à les exaucer. C'est pourquoi de très nombreux fidèles, sans compter les Petits Frères de Marie eux-mêmes, ainsi que leurs innombrables élèves, désirent ardemment que ce même Bienheureux reçoive la couronne suprême des Saints. Ceci a été exprimé dans les lettres envoyées au Souverain Pontife par leurs Eminentissimes Cardinaux, Archevêques de Lyon, Sydney, Montréal, New York, Gênes, Compostelle, Sao Paulo et Rio de Janeiro, ainsi que par plusieurs autres Archevêques et Evêques, suppliant instamment Sa Sainteté de vouloir bien signer une commission pour la reprise de la cause de canonisation dudit Bienheureux.

C'est pourquoi, à la requête du Frère Alessandro, Postulateur Général de l'Institut des Petits Frères de Marie, l'Eminentissime et Révérendissime Seigneur Benedetto Cardinal Aloisi Masella, évêque de Palestrina, Rapporteur de la présente Cause, à la réunion Ordinaire de la Sacrée Congrégation des Rites, qui s'est tenue au Vatican le 21 mai 1957, a proposé la discussion du doute suivant : « Dans le cas actuel et en vue du but à obtenir la Commission de la Reprise de la Cause doit-elle être signée ? » Et les Eminentissimes Pères préposés à la sauvegarde des rites sacrés, après avoir entendu la relation du Cardinal Ponent, ayant également entendu le R. P. D. Silvio Romani, Promoteur Général de la Foi, après avoir tout mûrement pesé et observé toutes les autres questions de droit, ont été d'avis de répondre « AFFIRMATIVEMENT », c'est-à-dire : « La Commission pour la reprise de la cause de canonisation du Bienheureux Marcellin-Joseph-Benoît Champagnat doit être signée, s'il plaît à Sa Sainteté. »

Une relation fidèle de tout ce qui précède ayant été faite ensuite à Notre Très Saint Père le Pape Pie XII par le Cardinal soussigné, Sa Sainteté, ratifiant l'avis des Eminentissimes Pères, a daigné signer de sa propre main la Commission pour la reprise de la cause de canonisation du Bienheureux Marcellin-Joseph-Benoît Champagnat, Confesseur.

Donné à Rome, le 21 juin, l'an du Seigneur 1957.

C. Card. CICOGNANI,

L. †  S.               Préfet de la S. C. des Rites.

† A. CARINCI, Arch. de Séleucie,

Secrétaire de la S. C. des Rites.

 Le pas que vient de franchir la Cause du Bienheureux Fondateur est très important à condition que nous puissions présenter à l'examen de la Sacrée Congrégation des Rites des faveurs insignes. Efforçons-nous tous de les obtenir et, le cas échéant, mettons un grand soin à recueillir, sans retard, toutes les données capables de prouver l'intervention divine.  

FAVEURS ATTRIBUÉES

AU BIENHEUREUX FONDATEUR

 Guérison de M. Jean-Paul Moreau,

demeurant à Iberville, Canada.

 A l'école Chabanel, nous sommes encore imbus des grâces du Triduum solennel au Bienheureux Père Champagnat. Ces trois jours d'actions de grâces, très bien préparés, avaient fait connaître le mérite et l’œuvre du Bienheureux Fondateur. Le Frère Directeur parlait un peu chaque jour de nouveaux miracles de la part du Bienheureux.

Le 10 février 1956, Mme Jean-Paul Moreau téléphone à l'école pour annoncer le cas désespéré de son mari et demande à ce que les élèves fassent une neuvaine pour obtenir la guérison du malade. Il s'agit d'une tumeur cancéreuse au cerveau.

Mme Moreau a son frère prêtre, directeur des élèves au séminaire de Saint-Jean. Cet abbé dit sa messe chaque matin chez nos Frères de Saint-Jean et a été au courant du triduum de cette paroisse. Il encourage sa sœur à la neuvaine.

Le Frère Directeur acquiesce à la demande et décide que la neuvaine commencera le lundi 13 février. Plusieurs groupements se joignent à l'école Chabanel : la famille, la Maison Provinciale, l'école secondaire Saint-Georges, l'école secondaire Notre-Dame Auxiliatrice de Saint-Jean, plusieurs confrères de l'abbé Létourneau commencent une neuvaine de messes à la même intention.

Pour ce qui est de l'école Chabanel, la ferveur est grande. La neuvaine proprement dite se fait à l'entrée des élèves, à midi. Tout le long du jour, on entend dans les classes l'invocation : « Bienheureux Marcellin Champagnat, guérissez notre malade ! »

Aux entrées, pendant que les élèves défilent, le Frère Directeur fait répéter l'invocation. L'assistance à la messe se fait plus nombreuse.

Le vendredi 17 février, le Frère Directeur rappelle aux élèves de ne pas oublier la neuvaine, le samedi et le dimanche. C'est peut-être la fidélité de ces deux jours de congé qui va décider de la réussite.

Le Frère Directeur, par téléphone, se met assez souvent au courant de l'état du malade. Le samedi et le dimanche, l'état du malade baisse au point que l'on croit à la fin.

Le lundi, huitième jour de la neuvaine, la ferveur est grande toute la journée et spécialement à l'exercice de midi. Au cours de l'après-midi, Mme Moreau téléphone pour dire qu'un bien sensible vient de se produire. Le Frère Directeur passe par les classes pour demander encore plus de ferveur pour le lendemain, dernier jour de la neuvaine.

Le matin du lundi, le docteur trouve M. Moreau debout à sa fenêtre. Le médecin étonné lui dit : « Que faites-vous ? » Le patient de répondre : « Je m'en vais chez moi. » Le médecin, le croyant dans le délire, répondit affirmativement. Justement M. Moreau quitta l'hôpital le 24 courant et son cas alla toujours en s'améliorant.

Il retournait de temps en temps à l'hôpital et son médecin constatait l'amélioration. Voulant en avoir le cœur net, le Dr André Pelletier, avec l'aide de son confrère, le Dr Gilbert Rinfret, décidèrent l'opération à l'hôpital Notre-Dame de Montréal. M. Moreau se rendit donc à Montréal le 24 avril. Les traitements procurés ne changèrent rien. La veille de l'opération, on prit une radiographie du cerveau du malade. Celle-ci révéla qu'il n'y avait plus rien, sinon une trace quelconque de maladie. Alors l'opération n'eut pas lieu.

M. Moreau revint chez lui, continuant sa convalescence, puis reprit ses forces et commença à travailler. Depuis qu'il s'est remis au travail, il n'a pas manqué une journée. Il se permet même du travail supplémentaire. Il ne sent aucun malaise de ce côté-là.

M. Moreau et sa famille rie cessent de remercier le Bienheureux Champagnat.     

F. J.-A.

 Guérison du neveu d'un Frère au Canada.

 Il semble que notre Père Champagnat a voulu prendre sous sa protection spéciale le jeune Léo Mireault de Malartic. C'est un enfant de 6 ans. Alors que déjà apparaissaient, pour son intelligence éveillée, toutes les joies et les beautés d'une jeune vie en fleur, il était frappé d'une maladie mystérieuse. Il perdait connaissance dix à quinze fois par jour. Durant un mois, la science médicale fut impuissante à diagnostiquer la maladie du jeune Léo. En désespoir de cause, les médecins recommandèrent à ses parents de le conduire à l'hôpital Sainte-Justine, à Montréal. Là, ce fut encore le même résultat. On expérimenta tous les traitements les plus susceptibles de produire une guérison. Au bout d'un mois et demi, l'enfant n'était pas encore guéri quoique, sous l'influence des remèdes, on parvenait à diminuer les chutes. Le père reçut l'instruction de venir chercher son enfant. Tout ce qui pouvait être fait l'avait été ! Les parents se trouvaient devant un problème crucial. Ils devaient accompagner Léo partout. Impossible de penser à l'envoyer à l'école. Si l'enfant voulait aller jouer, la maman devait toujours l'accompagner, de crainte d'une chute.

J'eus la pensée de confier mon neveu au Bienheureux Père Champagnat. J'écrivis à la famille, j'envoyai la prière à faire pour la neuvaine que j'accompagnai d'un médaillon-reliquaire pour le malade. On fit la neuvaine en famille, l'enfant porta la médaille relique à son cou.

A partir de ce moment, l'enfant n'eut plus de rechute. Ces faits se sont passés en août 1956.

Depuis lors, l'enfant n'a eu aucune crise et a repris les activités normales, d'un enfant de 6 ans. On envisage la possibilité de le mettre à l'école en septembre prochain, car tout danger semble passé.

F. L.-A.

 Guérison, au Brésil Septentrional, d'une dame,

sœur de deux Frères Maristes et proche parente

de plusieurs autres.

 Le C. Frère Maître du Noviciat de Ipauarana (Brésil Septentrional), nous écrit :

Nous venons de commencer une neuvaine d'actions de grâces pour remercier le Bienheureux Fondateur de la guérison vraiment extraordinaire de ma nièce. Dans les premiers mois de 1956, elle commença à souffrir de grandes douleurs au côté gauche, pensant qu'elles seraient occasionnées par une tumeur au sein. Ces douleurs augmentèrent tout le long de l'année ; et finalement elle se résolut à consulter le médecin de la localité qui l'envoya à un spécialiste. Celui-ci lui prescrivit quelques remèdes anodins. Je rencontrai ce médecin quelques semaines plus tard, et en toute confiance lui demandai son opinion sur l'état de la malade. – « C'est un cas perdu et désespéré, me dit-il. L'action du cancer est évidente ; il a pris racine profondément sur les deux côtés du sein ; on ne peut songer à aucune intervention chirurgicale, l'unique solution est de lui appliquer quelques palliatifs, pour diminuer les souffrances et attendre le dénouement fatal. » J'écrivis à ses deux frères, membres de notre Congrégation et à quelques parents, et avec la malade et sa famille, nous commençâmes une neuvaine au Bienheureux , Père Fondateur, pour obtenir la guérison. Chaque jour, la malade invoquait avec confiance la protection de notre Bienheureux Fondateur et ingérait, dans les potions, quelques filaments d'une relique qu'elle possédait. Vers la fin de la neuvaine, elle se sentit mieux et, bientôt, toute trace d'infirmité et de douleur disparaissait. Elle jouit, depuis lors, d'une très bonne santé qui s'est maintenue jusqu'à présent. Il n'y a qu'une voix, parmi ses parents, pour célébrer la puissance du Bienheureux Père, à qui elle attribue sa complète guérison. »

F. O. B. 

Décret

concernant le service militaire

des religieux

 Le service militaire, qui est imposé aux religieux et aux membres des Congrégations de vie commune, par les pouvoirs civils qui ne tiennent pas compte du privilège de l'immunité cléricale, met facilement en danger, comme le démontre l'expérience, la vocation divine et l'esprit religieux. Pour obvier à un si grave danger, le Siège Apostolique a jugé opportun et nécessaire de donner des directives spéciales et de prescrire des précautions.

Dans ce but, la Sacrée Congrégation préposée aux affaires des Religieux a publié le 1ier janvier 1911 le décret « Inter reliquas », confirmé par une approbation spéciale de saint Pie X. Ce même décret a été interprété et appliqué par des déclarations successives de la même Sacrée Congrégation, comme celles du 1ier février 1912, du 15 juillet et du 30 novembre 1919, du 16 mars 1922.

Cependant, étant donné que dans ces derniers temps les conditions dans lesquelles s'accomplit le service militaire ont subi de grands changements et que l'on peut disposer de moyens plus efficaces de préservation, il a semblé opportun de reconsidérer toute la question.

C'est pourquoi la même Sacrée Congrégation, après avoir mûrement examiné la chose, au cours de la Réunion Plénière des Eminentissimes Pères, avec l'approbation de Notre Saint-Père le Pape Pie XII, dans l'Audience du 30 juillet 1957, a décidé d'établir ce qui suit :

 Art. 1. – Notion du service militaire.

 Dans ce Décret, par « service militaire » on entend le service ordinaire que, selon les prescriptions des lois civiles, les jeunes religieux appelés pour la première fois dans les rangs de l'armée et soumis au pouvoir et à la discipline militaire, doivent accomplir, au moins pendant un semestre continu et ininterrompu, soit dans le service armé, soit dans n'importe quel service auxiliaire, y compris le service exclusivement sanitaire.

 Art. 2. – Les vœux perpétuels et le service militaire.

 Nul ne peut être admis validement à la profession perpétuelle avant d'avoir achevé le service militaire ou en avoir été absolument déclaré inapte ou encore, pour n'importe quel motif, en avoir été légalement exempt pour toujours.

 Art. 3. – Les vœux temporaires et le service militaire.

 § 1. Les vœux temporaires du religieux appelé sous les drapeaux (restant ferme la prescription du paragraphe 2) cessent dès qu'il est astreint la discipline militaire.

§ 2. Cependant le Supérieur Majeur, avec l'avis de ses Consulteurs, peut accorder, pour un temps déterminé ou à son gré, selon sa conscience et sa prudence, la conservation des vœux temporaires pendant la période du service militaire au religieux appelé sous les drapeaux qui en soit vraiment digne et qui en aurait fait la demande.

§ 3. Pendant la même période du service militaire, ledit Supérieur, pour un motif juste et grave, peut suspendre, par une déclaration écrite, les vœux accordés au religieux, conformément au paragraphe 2 ; pareillement, il peut accorder la restitution des mêmes vœux qui ont été suspendus au début ou au cours du service militaire.

 Art. 4. – Condition juridique du religieux pendant le service militaire.

 § 1. Le religieux, pendant le service militaire, est légitimement absent de la maison religieuse néanmoins, il reste tenu aux obligations de la vie religieuse qui, d'après l'avis du Supérieur Majeur, sont compatibles avec sa condition militaire.

§ 2. Le temps que l'on passe au service militaire étant lié par des vœux religieux, selon ce qui est dit à l'article 3, paragraphes 2 et 3, peut se calculer conformément au canon 574, paragraphe 1, restant ferme l'article 6.

§ 3. Le religieux, bien qu'il ne soit pas lié par des vœux pendant le service militaire, continue d'être membre de sa Religion, soumis à l'autorité de ses Supérieurs.

§ 4. Le religieux non lié par des vœux peut, conformément au canon 637, abandonner librement la Religion après avoir, pour la validité de l'acte, averti préalablement les Supérieurs moyennant une déclaration écrite ou faite oralement au Supérieur devant témoins. La déclaration verbale a un effet immédiat ; la déclaration écrite, lorsque le religieux aura été dûment informé que le Supérieur l'a reçue. La Religion peut également prononcer le renvoi du religieux, conformément au même canon 637, pour un juste motif et pour des causes raisonnables, en employant le même procédé.

 Art. 5. – De la pauvreté.

 Pour ce qui se rapporte aux biens acquis par les religieux pendant le service militaire et à ceux qui leur parviennent ensuite du fait de l'accomplissement du service militaire, soit que pendant le même service militaire ils aient été liés par des vœux, soit qu'ils en aient été déliés, on doit observer ce qui suit :

§ 1. 1° Tout ce que le soldat acquiert par son travail ou en qualité de religieux, il l'acquiert pour la Religion.

2° Par son service, le soldat acquiert la solde militaire et, en général, tout ce qu'il reçoit en tant que soldat.

§ 2. 10 La « prime » qui est accordée à un profès à vœux simples et qui peut être transformée en patrimoine devra l'être comme une dotation dont les fruits seront attribués à la Religion tout le temps que le religieux en fera partie. Après la mort du soldat, la prime est acquise à la Religion. Si le religieux, pour n'importe quel motif, se retire, il faut la restituer sans les fruits déjà perçus. D'autre part, pour tout ce qui regarde les réguliers (vœux solennels) que l'on observe les canons 581 et 582.

2° Les pensions accordées au soldat pour mérites insignes, ou pour blessure, ou pour maladie contractée au service militaire, sont attribuées à la Religion et lui appartiennent tout le temps que le religieux en fait partie ; elles reviennent à celui-ci s'il se retire.

3° Les primes, les dons et autres largesses de ce genre accordées pour un soldat mort au service, appartiennent à la Religion s'il est mort comme membre de la Religion.

 Art. 6. – Probation après le service militaire.

 Restant ferme le canon 574 cité plus haut, le soldat, une fois le service militaire achevé, doit rester quelque temps sous le régime de la vie commune avec des vœux temporaires. Ce temps, généralement, ne sera pas inférieur à un trimestre. Le Supérieur Majeur, après avoir pris l'avis de ses conseillers, pourra, pour un motif grave, abréger cette période de trois mois, ou bien, selon son jugement prudent, prolonger cette période d'épreuve jusqu'à un an, avant d'admettre le soldat à la profession perpétuelle.

 Art. 7.  Extension du Décret.

 § 1. Sont également soumises aux prescriptions dont il est question dans les articles précédents les Associations qui vivent en commun sans avoir de vœux.

§ 2. Restant ferme le canon 556, paragraphe 1, les novices qui sont appelés au service militaire, s'ils n'ont pas été légitimement renvoyés et s'ils n'ont pas eux-mêmes abandonné la Religion, continuent d'être unis à la Religion et jouissent des privilèges des novices.

 Art. 8. – Référence au droit précédent.

 Par le présent Décret sont régularisées, pour tous leurs effets canoniques, toutes les professions émises jusqu'à ce jour contre les prescriptions du Décret « Inter reliquas » et des déclarations ultérieures.

Nonobstant toutes choses contraires, et étant annulés les privilèges ou concessions accordés en cette matière.

Donné à Rome le 30 juillet 1957.

Valerio Cardinal VALERI, Préfet.

L. †  S.               Arcadio LARRAONA, C.M.F., Secrétaire

Transfert à Rome

de notre Maison Généralice

 En date du 10 juin 1957, le Conseil Général adressait à Notre Saint Père le Pape la requête suivante :

                 TRÈS SAINT PÈRE,

Le soussigné, Supérieur Général de l'Institut des Petits Frères de Marie, humblement prosterné aux pieds de VOTRE SAINTETÉ, expose ce qui suit :

La Maison Généralice de l'Institut se trouvait à Saint-Genis-Laval jusqu'en 1903, date à laquelle elle dut, à la suite des événements douloureux qui aboutirent à l'expulsion des religieux de France, se transporter à Grugliasco, près de Turin.

A l'approche de la dernière guerre, grâce aux dispositions plus bienveillantes du Gouvernement Français, les Supérieurs purent regagner leur ancienne résidence qui, entre temps, avait été rachetée à l'Administration des Domaines à laquelle elle avait été dévolue par les lois spoliatrices de 1903.

Cependant l'extension de l'Institut. due à la bénédiction visible de la Providence, lui confère un caractère d'universalité qui ne prendra tout son sens que par la présence à Rome de la Maison Généralice. C'est aussi le désir des Supérieurs de se rapprocher (lu centre de la catholicité et le vœu unanime des Frères de se sentir en communion encore plus étroite avec le Saint-Siège.

C'est pourquoi le Supérieur Général et les membres de son Conseil, par un vote unanime, sollicitent humblement de VOTRE SAINTETÉ, l'autorisation requise par les Constitutions (art. 155, paragraphe 2), de procéder au transfert de la Maison Généralice à Rome.

Et que Dieu.. .

 La faveur demandée nous a été accordée en date du 2 juillet suivant. Le document porte le N° 853/57.

Pour que le transfert devienne effectif, il va falloir arrêter le choix d'un terrain, l'acquérir, faire des plans et les exécuter. Tout cela demande beaucoup de prudence et ne saurait se faire avec précipitation. De toute façon, l'affaire est en marche et je vous invite tous à bien prier pour que cette grave décision soit très favorable à la prospérité spirituelle et matérielle de notre chère Congrégation.  

Union Mondiale des Anciens Elèves

 Le 30 mai 1955, à l'occasion de la Béatification de notre Fondateur, eut lieu, à Rome, un Congrès de nos Anciens Elèves.

Le temps très réduit dont on disposait permit seulement d'approuver la fondation de l'Union Mondiale. Il fut décidé que les statuts seraient étudiés et arrêtés dans un second Congrès qui se tiendrait dans deux ans. Le Bureau de la Fédération italienne fut placé, provisoirement, à la tête de l'Union.

Ce Congrès s'est tenu à Madrid, du 2 au 6 octobre dernier. Je laisse au Bulletin de l'Institut et autres revues de famille d'en parler en détail, me bornant à publier la lettre suivante adressée aux congressistes, au nom du Saint Père, par Mgr Dell'Acqua, Substitut à la Secrétairerie d'Etat : 

N°40957            Dal Vaticano, le 14 septembre 1957.

                     Révérend Frère Supérieur Général,

L' Union Mondiale des Anciens Elèves des Frères Maristes tiendra son deuxième Congrès international à Madrid, du 2 au 6 octobre prochain, pour approuver ses Statuts définitifs. Vous avez voulu, à cette occasion, vous tourner vers le Souverain Pontife afin de Lui demander de bénir et d'encourager les travaux de ces importantes assises.

Sa Sainteté accède volontiers à votre demande et forme des vœux paternels pour la réussite et l'efficacité de ce deuxième rassemblement.

Placée sous le patronage de l'Immaculée Conception et du Bienheureux Marcellin Champagnat, fondateur des Petits Frères de Marie, l'Union Mondiale des Anciens Elèves des Frères Maristes se propose de défendre, aider et développer l'enseignement chrétien et de maintenir vivantes en eux les grandes vertus d'humilité, de simplicité et de modestie chrétienne, que leur ont fait aimer les Fils du Bienheureux Champagnat.

De tels buts sont particulièrement indiqués à une époque où les hommes tendent de partout à se regrouper par affinités en vue d'une action commune. C'est donc avec satisfaction que le Chef de l'Eglise voit se former définitivement l'union de vos Anciens Elèves et félicite tous ceux qui ont participé à cet effort de coopération internationale.

Invoquant sur les travaux de votre prochaine assemblée l'abondance des grâces divines, Il accorde de grand cœur à vous-même, au Comité Directeur de l'Union, aux Religieux Maristes, aux délégués des Fédérations et Associations nationales et à tous les participants une paternelle Bénédiction Apostolique.

Veuillez agréer, Révérend Frère Supérieur Général, l'assurance de mes sentiments bien dévoués en N.S.

A. DELL'ACQUA, Subst.

 Cette lettre si paternelle doit nous porter à faire le possible pour organiser les Amicales dans chacune de nos écoles et à les réunir en Fédération dans chaque Pays.

Je ne saurais trop engager les Frères Provinciaux et leur Conseil à prendre Ies mesures nécessaires à cet effet. Je les prie, de plus, de m'envoyer, d'ici au mois de mars, un tableau des Associations qui existent dans leurs Provinces avec le nombre de membres de chacune d'elles.

L'Eglise, devenue particulièrement militante par les temps actuels, veut pouvoir compter sur tous ceux qui ont été formés dans les écoles catholiques. Partout, elle fait appel à leur concours dans la lutte contre l'erreur et l'impiété. La bonne volonté de la plupart de nos anciens est entièrement acquise à la cause du bien, mais ils ne deviendront une force efficace qu'en s'unissant et ils ne s'uniront qu'avec l'aide et sous la direction de leurs anciens maîtres. C'est là une tâche apostolique vraiment digne d'exciter le zèle de tous les Frères.  

Fondation en Equateur

 Chacun sait que, ces derniers temps, le protestantisme a intensifié sa propagande en Amérique du Sud, utilisant, pour cela, un nombreux personnel et d'abondantes ressources qui, autrefois, allaient normalement en Chine.

Devant ce grave danger, auquel, comme le disait récemment le Pape, s'ajoute celui de la sécularisation de toute la vie, du marxisme et du spiritisme, la Hiérarchie s'est organisée. Après le Congrès de Rio de Janeiro, le Conseil Episcopal de l'Amérique Latine a établi un Secrétariat Général à Bogotá. Il comporte diverses Commissions qui recueillent des données, élaborent des projets, préparent des Congrès régionaux ou coopèrent aux internationaux, etc. … On s'aperçoit déjà, en divers secteurs, des heureux résultats de cette action concertée.

Comme nous avons eu l'occasion de le dire précédemment, nos quatre Provinces d'Espagne ont accepté, en mai 1956, l'invitation qui leur était faite d'établir quelque œuvre nouvelle en Amérique Latine, afin de procurer le bienfait de l'éducation catholique à des enfants exposés à devoir fréquenter les écoles protestantes.

C'est ainsi que la Province de Bética a ouvert, il y a un an, une école à Roboré, en Bolivie. Des auxiliaires vont être envoyés, sous peu, aux trois Frères qui sont déjà au travail et l'on envisage quelque autre fondation pour un proche avenir.

A son tour, la Province de Léon a considéré comme un honneur l'invitation à ouvrir des écoles en Equateur. Trois Frères se sont embarqués pour ce pays, à Barcelone, le 20 octobre dernier. Ils ont pris en charge une école gratuite qui fonctionnait déjà à Catacocha. dans le District de Loja. L'envoi de quatre autres Frères est prévu pour mars prochain, époque où commence l'année scolaire.

La Province de Levante fait des plans pour aller au Paraguay et celle de Norte, pour ouvrir quelque école gratuite au Venezuela où elle possède trois écoles florissantes pour la classe aisée.

Devant le besoin des maisons existantes et les offres de fondations qui leur sont faites dans leur propre pays, ces quatre Provinces pourraient invoquer le manque de personnel pour ajourner l'envoi de Frères en Amérique. Mais, d'autre part, elles sont encouragées à ne pas marchander leur collaboration missionnaire par la pensée que, plus les œuvres exigent de sacrifices et plus elles sont assurées des bénédictions du Ciel.

Que cette même pensée suscite des volontaires de plus en plus nombreux pour les Missions. Il en est où la moisson s'annonce très riche mais, malheureusement, les ouvriers font défaut. Il faudrait que toutes les Provinces, qui n'ont pas d'œuvre en pays de Mission, se fissent un devoir et un honneur d'y envoyer, au moins, quelques représentants, choisis parmi les meilleurs religieux. 

Elections

 Dans sa séance du 2 juin 1957, le Conseil Général a élu le C. F. SIMON-HENRI Econome Général, à la place du C. F. Louis-MARIE, démissionnaire.

Dans la même séance, le C. F. ALESSANDRO a été réélu Procureur Général près le Saint Siège.

Dans sa séance du 22 mai 1957, le Conseil Général a élu le C. F. GUY-MAURICE, Provincial du Brésil Septentrional, pour un second triennat.

Dans sa séance du 25 juin 1957, il a élu le C. F. JOSEPH-AZARIAS, Provincial de la Province d'Iberville (Canada), pour un premier triennat, à la place du C. F. ANTOINE-ALBERT, arrivé au terme de son mandat.

Dans la même séance, il a élu le C. F. JOSEPH-EUSTOLE, Provincial de la Province du Sud-Est (France), pour un premier triennat, à la place du C. F. EMILE-ANTOINE, démissionnaire.

Dans sa séance du 16 novembre 1957, il a élu, pour un nouveau triennat, le C. F. DIONISIO FELIX, Provincial du Brésil Méridional, et le C. F. JANUARIO, Provincial de Santa Catarina.  

LISTE DES FRÈRES

dont nous avons appris le décès

depuis la circulaire du 24 mai 1957 

 

Nom et âge des Défunts                               Lieux de Décès                                 Dates des Décès

 

F. Arturo                    69     Stable                  Lo Lillo (Chili)                                     1iermai            1957

IF. Félix-Désiré         67     Profès perp.       Château-Richer (Canada)                5          » »

F. Charles-Rémi       52     »                           Lévis (Canada)                                  10         » »

F. Charles-Vincent   58     Stable                  Saint-Genis-Laval (France)              11         » »

F. Sixtus Joachim    70     Profès perp.       Melbourne (Australie)                        15         » »

F. Damase                64     Stable                  Léopoldville (Congo belge)              16         » »

F. Joseph-Achille     75     »                           Palta (Nouvelle-Calédonie)              21         »»

F. Paul-Daniel          78     »                           Saint-Genis-Laval (France)              24         »»

F. Auguste-Eugène  69     »                           Varennes-sur-Allier (France)            16 juin  »

F. Louis-Félicien      66     Profès perp.       Beaucamps (France)                        16 »     »

F. Joâo Marcellino   71     Stable                  Porto Alegre (Brésil)                         16  »    »

F. Athanasius           59     »                           Dumfries (Ecosse)                            22  »    »

F. Camille-Daniel     72     »                           N.-D. de l'Hermitage (France)          2 jull.    »

F. François-Norbert74     Profès perp.       Novo Hamburgo (Brésil)                   2  »      »

F. Marie-Cervin        79     Stable                  Mont-Saint-Guibert (Belgique)         3  »      »

F. Exupérance          78     »                           Mendes (Brésil)                                 3  »      »

F. Juan Romualdo    44     Profès perp.       Buenos Aires (Argentine)                 4  »      »

F. Miguel                   68     Stable                  Cali (Colombie)                                 13  »    »

F. Cécilius                71     Profès perp.       S»-Paul-Trois-Châteaux (France)   19  »    »

F. Telme                    87     Stable                  Kinharvie (Ecosse)                            21  »    »

F. Charles                 55     Profès perp.       Saint-Genis-Laval (France)              23  »    »

F. Adalberto              74     Stable                  Avellanas (Espagne)                         29  »    »

F. Turibe                    77     »                           N.-D. de l'Hermitage (France)          31  »    »

F. Tarcisius Mary     69     »                           Masterton (Australie)                         31  »    »

F. Esdras                  62     Profès perp.       Mouguerre (France)                          2 août              »

F. Emile-Ferdinand  71     Stable                  Saint-Hyacinthe (Canada)                10  »    »

F. Pablo Isidoro        26     Profès perp.       Granada (Espagne)                          12  »    »

F. Francis Hilary       71     Stable                  Kinharvie (Ecosse)                            13  »    »

F. Mary Ambrose     96     Profès perp.       Kinharvie (Ecosse)                            14  »    »

F. Marie-Narcisse    72     »                           N.-D, de l'Hermitage (France)          22  »    »

F. Joseph-Ambroise         72   Stable          N.-D. de l'Hermitage (France)                        27  »»

F. Pierre-Ludovic     65     »                           Poços de Caldas (Brésil)                 4sept. »

F. Antoninus              70     Profès perp.       Largs (Ecosse)                                  7  »      »

F. Stéphanus            75     Stable                  La Habana (Cuba)                            14  »    »

F. Clément                90     A. Ass. Gén.       Mittagong (Australie)                         21  »    »

F. Silvère                   91     Profès perp.       Grugiiasco (Italie)                              9 oct.    »

F. Eloi-Victor             62     »                           Aubenas (France)                             11  »    »

F. Roger-Maurice     17     Profès temp.       Poughkeepsie (Etats-Unis)              16  »    »

F. Astier                    92     Profès perp.       St-Paul-Trois-Châteaux (France)    17         »

F. Nicholas Mary      50     Stable                  New-York (Etats-Unis)                      20  »    »

F. Pol de Léon          80     »                           Santiago (Colombie)                        20  »    »

F. Louis-Xavier         86     »                           Saint-Genis-Laval (France)              21  »    »

F. Xavier-André        49     Profès perp.       Montréal (Canada)                            23  »    »

F. Ireneus Sebas      72     »                           Richmond (Australie)                        27  »    »

F. Cyro Albino          44     Stable                  Porto Alegre (Brésil)                         30  »    »

F. Raymond-Célestin 75   »                           Recklinghausen (Allemagne)           3 nov.   »

F. Joseph-Stanislas74     »                           Hongkong (Chine)                             11  »    »

F. Urbano José        81     »                           Cali (Colombie)                                 12  »    »

F. Jaime Augusto     22     Profès temp.       Curitiba (Brésil)                                 14  »    »         

 

La présente circulaire sera lue en communauté, à l'heure ordinaire de la lecture spirituelle.

Recevez, mes bien chers Frères, la nouvelle assurance du religieux attachement avec lequel je suis, en J.M.J., Votre très humble et tout dévoué serviteur.

      Frère LÉONIDA,  Supérieur Général.

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