Circulaires 187

Théophane

1896-12-30

Circulaire du 30 décembre 1896 : Souhaits de nouvelle année. - Coup d’œil sur l'année 1896. - Lettre pastorale de Mgr  l'Archevêque de Lyon (Cause du V. Champagnat). - Relation des fêtes et panégy­riques concernant la cause du  Vénérable. - Encyclique de S. S. Léon XIII, sur le S. Rosaire. - Enseignement, Education. Voyage à Rome, audience pontificale. - Visites épiscopales à la Maison-Mère. - Nominations dans les Missions. - Œuvre de la  Sainte-Enfance. - Fondations en 1896. - Enseignement agricole. - Dé­parts de Frères missionnaires en 1896. Recomman­dations importantes. - Décès

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51.04.01.1896.3

 V. J. M. J.

Saint-Genis-Laval, le 30 décembre 1896.

      Mes Très Chers Frères,

Après les fêtes magnifiques qui viennent de se succéder, et qui ont fait revivre parmi nous notre pieux Fondateur, le Vénérable Marcellin Champagnat ; après les actions de grâces, accompagnées de supplications, qui se sont élevées de nos cœurs vers le ciel, j'ai pensé qu'il ne pourrait se trouver une occasion plus favorable que celle du renouvellement de l'année, pour vous donner la réponse de notre Vénérable Père aux religieuses et filiales manifestations dont il a été, je ne dirai pas l'objet, puisqu'elles s'adressaient directement à Dieu, mais dont il a été l'occasion. C'est donc lui qui va vous parler dans l'expression des vœux que je viens vous adresser pour la nouvelle année qui va commencer. Ces souhaits que je suis heureux de retrouver parmi ses écrits et de faire miens, sont ceux qu'il exprimait à ses Frères en janvier 1836 et 1837. Recevez-les, M. T. C. F., comme formés dans son cœur et tombés du ciel tout exprès pour vous. 

                                                Souhaits pour l'année 1836. 

     « Mes Très Chers Frères,

« Mon cœur aime à se rappeler chaque jour votre souvenir et, au saint autel, à vous présenter tous au Seigneur. Mais aujourd'hui, je ne puis résister à la douce satisfaction de vous exprimer mes sentiments affectueux et de vous témoigner ma tendresse paternelle. Chéris et bien-aimés, vous êtes continuellement l'objet spécial de ma tendre sollicitude.

Tous mes désirs et tous mes vœux sont pour votre félicité, vous ne l'ignorez pas sans doute, M. T. C. F. Cette félicité n'est pas celle que le monde recherche et qu'il croit pouvoir trouver dans la possession des biens  temporels. Je vous souhaite et je vous désire des biens plus solides et plus réels. Servir Dieu avec fidélité, travailler tous les jours à détacher votre cœur des créatures pour le donner à Jésus et à Marie l'abandonnant à tous les mouvements de la grâce : voilà ce qui est vraiment désirable et ce que je vous souhaite. Oui, M. T. C. F., religieux et enfants de Marie, votre gloire doit être d'imiter et de suivre Jésus-Christ. Que ce divin Sauveurvous remplisse de son esprit, que sa sagesse vous dirige dans tout ce que vous ferez pour sa gloire.

« Je désire et je souhaite qu'à l'exemple de Jésus Christ, notre divin modèle, vous ayez une tendre affection pour les enfants afin de remplir avec ferveur tous devoirs de votre état. Rompez-leur, avec un saint zèle, le pain spirituel de la religion ; faites tous vos ef­forts pour les former à la piété et pour graver dans leurs dans leurs jeunes cœurs des sentiments de religion qui ne s'en ef­facent jamais.

« Que l'union  et la charité dont parle le disciple bien­-aimé, règnent toujours entre vous. Que ceux qui doivent obéir s'acquittent de ce devoir avec humilité, et que ceux qui commandent le fassent avec une douce charité­ ; par ces moyens, la paix et la joie du Saint-Esprit seront toujours avec vous. Qu'un vrai zèle vous anime pour votre perfection,  et qu'une fidélité constante à votre Règle vous fasse faire chaque jour de nouveaux progrès.

Mais, ne l'oubliez pas, l'exacte observance de la Règle est le vrai moyen  d'acquérir cette perfection religieuse.

« Courage donc M. T. C. F., les peines et les combats de la vie ne durent qu'un moment. Portons souvent nos regards vers ce poids immense de gloire qui en sera à jamais la récompense, nous souvenant sans cesse que le juste Juge ne couronnera que celui qui aura vaincu et persévéré jusqu'à la fin.

« Que Jésus et Marie vous aient toujours dans leur sainte garde,

« J'ai l'honneurd'être votre tout dévoué et affectionné Père en Jésus et Marie.

    « CHAMPAGNAT. » 

                                  Souhaits pour l'année 1837. 

« Mes Bien-Aimés, Mes Bien Chers Frères,

« Aimons-nous les uns les autres. Je ne pourrais, au commencement de cette année, tenir un langage plus conforme à mes goûts et à mes affections. Que j'interroge mon cœur, mes sentiments, la peine que me cause la moindre de vos disgrâces, vos ennuis qui sont les miens, vos revers, vos afflictions, vingt années de sollicitude : tout cela répond que je puis hardiment et sans crainte vous adresser les paroles que le disciple bien-aimé met à la tête de ses épîtres : Mes bien-aimés, aimons-nous les uns les autres, parce que la charité vient de Dieu (l Saint Jean, IV, 7).

« Les souhaits et les vœux que je forme au commencement de cette année, sont bien différents de ceux que le monde s'efforce d'exprimer par un langage mensonger. Une certaine abondance de biens, d'honneurs, de plaisirs que le cœur ne goûte jamais : voilà ce que le monde souhaite. Pour moi, mes chers Frères, je conjure notre divin Maître, chaque jour que je monte au saint autel, qu'il veuille bien faire pleuvoir sur vous ses grâces et ses bénédictions les plus abondantes ; qu'il vous aide à fuir le péché comme le seul mal à craindre ; qu'il vous aplanisse le chemin des vertus propres aux religieux, surtout aux enfants de Marie. Enfin, je prie notre commune Mère de nous obtenir une sainte mort, afin que nous étant entr'aimés sur la terre, nous nous aimions à jamais dans le ciel.

Après l'expression de ses souhaits, le vénéré Père fait part d'une lettre écrite du Havre, la veille de l'embarquement, par le C. F. Marie-Nizier.

« Que je m'estime heureux, mon cher Père, d'avoir été choisi, quoique j'en sois très indigne, parmi les Frères de Marie, pour être des premiers de ceux qui portent la lumière de l'Evangile à des peuples sauvages! Oh! que Dieu en soit béni! C'est lui qui m'a donné la vocation et me l'a fait suivre. Je suis bien content « de partir, et je puis bien dire sincèrement que je ne céderais pas ma place pour un trône. Je ne crains point, car Marie, notre bonne Mère, sera mon guide dans toutes mes actions, et mon refuge dans mes peines. Je voudrais, mon bien cher Père, pouvoir vous souhaiter la bonne année de vive voix, ainsi qu'à tous mes chers Frères en Jésus et Marie; mais les circonstances ne me permettent pas de satisfaire mes désirs. Je vous souhaite du fond de mon cœur une bonne et heureuse année, ainsi qu'à tous mes chers Frères.

   « CHAMPAGNAT. » 

COUP-D'ŒIL RÉTROSPECTIF SUR L'ANNÉE 1896. 

M. T. C. F., si nous jetons un regard sur l'année qui vient de s'écouler, notre première pensée doit être une pensée de reconnaissance au souvenir des bienfaits que Dieu a répandus sur chacun de nous et sur tout notre Institut. Oui, chacun de nous peut s'écrier avec le Roi-Prophète : Que rendrai-je au Seigneur pour tous les biens dont il m'a comblé? Je prendrai le calice du salut et j'invoquerai le nom du Seigneur… J'accomplirai les vœux que je lui ai faits… (Ps. CXV).C'est-à-dire qu'en retour de tant de grâces reçues, et dans l'attente de celles que Dieu nous réserve, nous devons accepter généreusement, courageusement, amoureusement, tous les travaux, toutes les fatigues, toutes les peines, toutes les croix, toutes les épreuves qui se trouvent dans notre état, et dont toute notre vie est remplie. Disciples de Jésus-Christ, qui a bu jusqu'à la lie le Calice que son Père lui avait préparé, il faut qu'à son exemple nous marchions généreusement dans la voie du sacrifice, que nous soyons des hommes de dévouement, des apôtres tout animés du zèle de la gloire de Dieu. C'est ce que demandent également de nous les bénédictions, tant spirituelles que temporelles, répandues sur notre Institut. Combien le détail en serait long et édifiant ! Mais il nous suffit de rappeler ici l'heureux événement qui naguère a répandu une si grande joie dans tout l'Institut. 

CAUSE DE BÉATIFICATION ET DE CANONISATION

DU VÉNÉRABLE

MARCELLIN-JOSEPH-BENOIT CHAMPAGNAT 

La Circulaire du 25 août 1896 vous a donné, M. T. C. F., le décret pontifical du 9 du même mois, relatif à l'introduction de la cause de notre Vénérable Fondateur; en faisant appel, à votre piété, elle vous a indiqué les prières et les pratiques d'actions de grâces dont nous aurions à nous acquitter à cette occasion.

Depuis lors il m'est revenu que, de tous côtés, cet appel a été parfaitement entendu : partout, nos Frères, le Clergé et les enfants de nos écoles ont mis une sainte émulation, un élan admirable, un véritable enthousiasme, dans la manifestation de la reconnaissance due à Dieu pour l'heureux événement qui a apporté une si grande joie dans notre Institut. Dans beaucoup de localités, les fidèles eux-mêmes, en grand nombre, ont voulu prendre part à ces pieuses manifestations. Je prendrais plaisir, si je ne craignais d'être trop long, à relater ici tout ce qui s'est fait, à mettre surtout sous vos yeux les beaux panégyriques qui ont été prononcés; mais tout cela sera l'objet d'une brochure qui vous sera adressée. Je me borne aujourd'hui à un abrégé, dans lequel la première place est due à la Lettre pastorale de S. G. Mgr Coullié, archevêque de Lyon. 

LETTRE PASTORALE

DE

MONSEIGNEUR L'ARCHEVÊQUE DE LYON

à l’occasion de

L'introduction de la cause du vénérable Serviteur de Dieu

MARCELLIN -JOSEPH-BENOIT CHAMPAGNAT

Prêtre Mariste et fondateur des Petits Frères de Marie. 

PIERRE-HECTOR COULLIÉ, par la miséricorde divine et l'autorité du Saint-Siège apostolique, archevêque de Lyon et de Vienne, primat des Gaules, etc.

« Nos Très Chers Frères, »

Il est toujours d'un touchant intérêt pour le chrétien vraiment attaché à sa foi catholique, de suivre dans la marche de l'Eglise l'éclosion incessante des saints, qui manifeste sa vie divine.

« Mais il y a une joie particulière à assister, en nos temps troublés, à la manifestation de cette fécondité qui ne saurait tarir. L'âme y trouve consolation et y raffermit son espérance.

« Et c'est à la fois une joie plus profonde, une grâce plus précieuse, de saluer ces vertus éminentes et cette sainteté de vie, dans les enfants des régions mêmes qui sont notre pays, et de voir s'élever de nos rangs, aux honneurs des autels,ceux qui furent, et qui demeurent en vérité, les membres de notre famille diocésaine.

« Aussi sommes-nous heureux aujourd'hui de vous communiquer le décret par lequel N. S. P. le Pape vient d'introduire la cause de béatification du Serviteur de Dieu Marcellin-Joseph-Benoît Champagnat, prêtre mariste, fondateur de la congrégation enseignante des Petits Frères de Marie.

« Le P. Champagnat, en effet, nous appartient à tous les titres.

« Il est né à Marlhes, dans cette partie de notre diocèse où s'est conservée plus vivante que nulle part, l'ardeur des convictions chrétiennes, l'estime et la pratique des mœurs antiques, que l'impiété et le sensualisme moderne cherchent en vain à détruire ; dans une de ces paroisses où sont nombreux les hommes d'énergie, disposés à défendre leur foi contre toutes les attaques et toutes les entreprises.

« Le P. Champagnat a passé le temps de ses études dans nos séminaires diocésains. Verrières luia donné là première formation littéraire, et dans notre grand séminaire il fut l'un de ces courageux qui se présentèrent au lendemain de la Révolution, pour relever les ruines amoncelées, et qui formèrent ce clergé à la foi robuste, au dévouement sans mesure que notre enfance a connu, et qui se personnifie dans nos souvenirs en des types aux traits ineffaçables.

« Il a vécu au milieu de nos populations sa vie tout entière, et c'est au cœur du diocèse qu'il a fondé cet Institut vaillant, profondément imprégné de son esprit.

« Ecoutez donc, N. T. C. F., avec recueillement la lecture de ce décret, qui nous permet de donner désormais à ce prêtre, l'un d'entre nous, le titre de Vénérable, et dans lequel vous trouverez avec édification le récit succinct de sa vie. »

(Suit le décret pontifical du 9 août 1896.)

« En suivant la lecture de ce décret, N. T. C. F., vous avez remarqué, sans doute, que la vie du Serviteur de Dieu, pleine d'héroïques vertus, fut cependant tout obscure et toute cachée. On n'y voit pas de ces actions extraordinaires qui attirent l'attention des hommes.

« C'est dans la pratique journalière de l'humilité la plus profonde, de l'abnégation la plus austère, du zèle le plus ardent et le plus efficace, que ce prêtre s'est sanctifié. Par là, il nous est un modèle, ce semble, plus accessible, et nous nous sentons encouragés à poursuivre, avec une générosité sans défaillance, des travaux qui s'exercent dans un cadre modeste, mais qui peuvent nous conduire à une sainteté consommée et faire rayonner autour de nous, pour la gloire de Dieu, une salutaire influence.

« Cette vie simple et obscure fut féconde. Dieu a coutume, en effet, de bénir les entreprises de zèle lorsqu'elles sont accomplies purement pour sa gloire. Et c'est merveille de voir l'Institut fondé par le P. Champagnat, cinquante ans seulement après la mort du Serviteur de Dieu, couvrir, pour ainsi dire, le monde entier de ses maisons d'écoles, de ses juvénats, de ses noviciats et compter plus de 5.000 membres qui donnent l'enseignement de la foi à plus de 100.000 âmes d'enfants.

« Nous ne saurions trop vous recommander, N.T.C.F., après avoir lu cette vie en un résumé si rapide, de chercher à connaître avec plus de détails une histoire où les détails surtout ont de l'intérêt et présentent de l'édification. L'étude que vous ferez de cette âme si attachante vous portera, nous en avons la confiance, à imiter ses vertus et à estimer davantage encore l’œuvre sainte que Dieu a accomplie par son action.

               « A ces causes,

« Après en avoir conféré avec les Doyen, Chanoines et Chapitre de notre église primatiale,

« Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit 

ARTICLE PREMIER. 

En actions de grâces de l'Introduction de la cause du Vénérable Serviteur de Dieu Marcellin-Joseph-Benoît Champagnat, un Te Deum solennel sera chanté à la Primatiale, le dimanche 13 septembre, au salut qui suivra l'office canonial. 

ART. 2. 

Nous invitons à cette cérémonie les délégations des Petits-Frères de Marie et des enfants de leurs écoles. 

ART. 3. 

Dans toutes les résidences des Petits Frères de Marie Nous autorisons un salut solennel d'actions de grâces, aux jours fixés par MM. les Aumôniers et les Supérieurs des Frères, dans les chapelles particulières, et par MM. les Curés, dans les paroisses où se trouvent des écoles dirigées par les Petits Frères de Marie. 

ART. 4. 

Nous invitons nos communautés religieuses et tous nos fidèles à unir leurs actions de grâces à celles de la communauté des Petits Frères de Marie, dans une circonstance si consolante pour le diocèse de Lyon.

Et seront notre Lettre et le Mandement lus, dans les églises et chapelles du diocèse, le dimanche qui en suivra la réception.

Fait à Lyon, le 3 septembre 1896.

† PIERRE, Archevêque de Lyon et de Vienne, primat des Gaules.

Par mandement :

P. PAGNON, chanoine, chancelier. 

Conformément à ces prescriptions, un Te Deum solennel a été chanté au Salut qui a suivi les vêpres, le dimanche 13 septembre, à l'église primatiale de Lyon. C'était précisément le jour où les Frères de la province de Saint-Genis-Laval terminaient leur retraite annuelle. Par suite de cette coïncidence, l'Institut a pu être représenté à cette pieuse cérémonie par six cents Frères, auxquels s'étaient joints les Novices et les Juvénistes de la Maison-Mère et des dérogations d'élèves.

A 3 heures, tous étaient réunis à la cathédrale et occupaient les places qui leur avaient été réservées au chœur. En même temps, une assistance choisie, recueillie, considérable, remplissait la vaste enceinte de la Primatiale, comptant dans ses rangs de nombreux représentants de la Société des Pères Maristes, du clergé et des ordres religieux d'hommes et de femmes.

Après le chant des vêpres, Mgr l'Archevêque, accompagné de deux de ses vicaires généraux, Mgr Déchelette et Mgr Jeannerot, du vénérable Chapitre de sa cathédrale et d'autres ecclésiastiques, prit place dans le sanctuaire, et le R. P. Gressien, de la Compagnie de Jésus, qui avait bien voulu accepter de prononcer le panégyrique du Vénérable Marcellin Champagnat, monta en chaire et, pendant trois quarts d'heure, tint son nombreux auditoire sous le charme de sa parole. Dans son discours, aussi riche pour le fond que pour la forme, il a développé ces deux pensées :

1° Jésus et Marie ont fait à la France un bien incomparable par le Vénérable Champagnat;

2° Le Vénérable Champagnat a merveilleusement secondé l'action de Jésus et de Marie pour le bien de la France.

Le panégyrique terminé, Mgr l’Archevêque a exposé le saint Sacrement et entonné le Te Deum qui a été continué par le chœur des Frères, des Novices et des Juvénistes, avec une puissance et une harmonie que l'Echo de Fourvière dit avoir été justement admirées. La bonne exécution des chants du Salut a donné une preuve de plus de la beauté et de la richesse du chant grégorien.

Après la bénédiction du Très Saint Sacrement, les choristes ont fait entendre le cantique : Un Mariste à Marie: « Toujours, toujours, je veux bénir Marie, etc. » Ensuite les assistants se sont retirés sous la délicieuse et salutaire impression de cette belle et touchante cérémonie. Combien étaient heureux surtout les Petits Frères de Marie de pouvoir se dire les enfants du Vénérable Marcellin Champagnat, et prendre une si large part à cette fête ! Combien aussi ils se sentaient disposés et résolus à se montrer toujours les dignes fils d'un tel père !

Après le Te Deum chanté dans de telles circonstances à la Primatiale de Lyon, il ne reste rien de plus émouvant à imaginer, si ce n'est ce Te Deum, plus solennel encore qui ébranle les voûtes de Saint-Pierre quand, après la triple interrogation, la voix du Vicaire de Jésus-Christ vient de proclamer qu'un nouveau bienheureux peut être publiquement honoré et invoqué par les fidèles.

Au Te Deum qui avait retenti sous les voûtes de l'antique basilique de Lyon, ont répondu, comme un écho multiplié, les mêmes accents répétés sur tous les points de la France et dans toutes les parties du monde. Toutes ces manifestations, pour avoir revêtu un caractère moins grandiose que celle du 13 septembre, n'en sont pas moins dignes d'être mentionnées. 

VARENNES-SUR-ALLIER – NOTRE-DAME DE LACABANE. 

Conformément aux instructions contenues dans la Circulaire du 25 août dernier, les Maisons provinciales de Varennes et de Notre-Dame de Lacabane ont mis le plus louable empressement à célébrer, dans le courant du mois de septembre, un Triduum solennel d'actions de grâces. La piété et la sainte joie qui ont accompagné ces religieuses manifestations de reconnaissance, tout empreintes d'un caractère intime et familial, ont laissé dans les deux communautés les plus douces et les plus salutaires impressions. 

SAINT-GENIS-LAVAL. 

A la Maison-Mère, un premier Te Deum solennel a été chanté le 22 octobre au salut qui a suivi les vêpres. Il y a eu ce jour-là grand'messe, et la chapelle, pavoisée d'oriflammes symboliques, était ornée comme aux plus grandes fêtes.

Le panégyrique du Vénérable a été prononcé par M. l'abbé Vachet, missionnaire diocésain qui a choisi pour texte de son discours ces paroles du prophète Joël : « Fils de Sion, réjouissez-vous dans le Seigneur votre Dieu, qui vous a donné un docteur de justice ». L'orateur s'est appliqué spécialement à montrer ce que fut le Vénérable Champagnat au point de vue humain, au point de vue surnaturel et chrétien, au point devue social.

A cette fête avaient été conviés Messieurs les Membres du Tribunal constitué pour procéder aux informations qui onteu lieu dans le diocèse de Lyon, concernant la Cause du Vénérable ; et à cette invitation ont répondu M. Coupat, chanoine, curé-archiprêtre de Saint-Genis-Laval; M. Deville, docteur en théologie et en droit canon ; M. le chanoine Comte, secrétaire de l’Archevêché ; M. Pagnon, chancelier de l'Archevêché ; M. Buy, pénitencier de la Primatiale ; M. le chanoine Vindry, curé archiprêtre de la Rédemption, à Lyon ; et M. Ardaine, curé de Sainte-Croix.

Le dimanche 8 novembre, dans la chapelle de la Maison-Mère, un second Te Deum solennel a été chanté à l'issue de la messe ; et, dans un discours remarquable, le R. P. Mulsant, de la Société de Marie, supérieur du collège de Saint-Chamond, a fait l'éloge du Vénérable, dans lequel il a montré le vrai et parfait Mariste, tout pénétré de l'esprit de la Sainte Vierge et fidèle imitateur de ses vertus.

La solennité de cette fête a été rehaussée par la présence de S. Gr. Mgr Redwood, archevêque de Wellington (Nouvelle-Zélande), accompagné du T. R. P. Martin, supérieur général de la Société de Marie et des RR. PP. Depoix, Assistant, et Montfat, ancien Assistant.

Le pensionnat Saint-Joseph et la paroisse de Saint-Genis-Laval ont eu également leur salut solennel d'actions de grâces. 

NOTRE-DAME DE L'HERMITAGE. 

A la Maison provinciale de l'Hermitage, où reposent les précieux restes de notre Vénérable, les Frères ont eu aussi à cœur de témoigner à Dieu, avec toute la solennité possible, leur reconnaissance par un Triduum qui a commencé le 17 octobre, et dont l'Echo de Fourvière a rendu compte en ces termes :

« Le voyageur qui s'éloigne de Saint-Chamond en se dirigeant vers les plus hauts sommets du Pilat, arrive bientôt dans un frais vallon arrosé par les eaux limpides du Gier. Une gracieuse chapelle romane se dresse devant lui, coupant la vallée et forçant le chemin à remonter le long des rochers et des arbres de la colline. Cette chapelle abrite les restes vénérés du Fondateur de l'Institut des Petits Frères de Marie.

« La semaine dernière, elle avait revêtu sa parure des grands jours. Des guirlandes aux couleurs variées pendaient des voûtes, et venaient de chaque côté des vitraux se dissimuler dans les écussons au chiffre de Marie. Des faisceaux de drapeaux ornaient les murs : drapeaux de l’Eglise et de la France, pavillons des principales nations qui possèdent des Etablissements de Frères Maristes. Le sanctuaire surtout était resplendissant de lumières et de fleurs artistement disposées autour de la Vierge de l'Hermitage qui domine le chœur.

« Un Triduum solennel avait lieu en actions de grâces de l'Introduction de la cause de béatification du Vénérable Champagnat. Le 17 octobre, fête de la bienheureuse Marguerite-Marie, délicatement rappelée par les guirlandes de blanches marguerites au vert feuillage qui couraient le long des tribunes, les Juvénistes de La Valla vinrent, après les Frères de la Maison provinciale, inaugurer, par une communion générale, ces pieuses solennités. Ces enfants chantèrent ensuite la grand'messe avec la perfection qu'ils avaient apportée déjà aux morceaux si justement admirés, le jour du Te Deum à l'église Saint-Pierre de Saint-Chamond.

« Chaque matin, une  courte allocution était adressée aux fidèles par l'un des Pères aumôniers. Le soir, trois orateurs devaient successivement se faire entendre.

« Le samedi, à 3 heures, M. l'abbé Relave, curé de Sury, fit l'éloge de l'humble vicaire de La Valla, et montra comme vertu caractéristique du Vénérable, sa profonde abnégation pratiquée dans sa vocation sacerdotale, qu'il suivit en dépit de tous les obstacles parce qu'on lui avait dit : Dieu le veut ! et dans sa fondation religieuse, qu'il était prêt à abandonner si Dieu n'avait plus voulu de lui pour la continuer.

« Le lendemain, le R. P. Groffier, de la Compagnie de Jésus, vint exalter le modeste religieux si visiblement béni de Dieu dans l'éducation qu'il reçut au sein de sa famille, dans sa vocation au sacerdoce, dans son ministère sacerdotal, dans sa coopération à l'organisation de la Société de Marie, dont il fut un des premiers membres et dans la création de son nouvel Institut.

« Enfin le troisième jour, le R. P. Mulsant, supérieur du collège de Saint-Chamond, avec tout son cœur de prêtre, de Mariste et d'éducateur chrétien, devant un magnifique auditoire de plus de quarante prêtres, de jeunes élèves et de fidèles, salua dans le Vénérable, le vrai Mariste pénétré de l'esprit de la très sainte Vierge, esprit d'humilité, d'abnégation, d'intime union avec Dieu, d'ardente charité envers le prochain, esprit si admirablement exposé par le T. R. P. Colin, dans les Constitutions de la Société de Marie.

« Le dimanche, toutes les messes avaient été dites avec le calice et l'ornement du Vénérable, religieusement conservés par ses pieux enfants de l'Hermitage. Les Vêpres furent chantées avec entrain et avec foi par la maîtrise paroissiale de Saint-Martin. La chorale d'lzieux, toujours digne de sa réputation, se fit entendre au salut. Cet honneur fut réservé le lendemain aux élèves du florissant pensionnat dirigé par les Frères à Saint-Etienne Valbenoîte.

« Ces jeunes gens étaient heureux de donner, par leur présence, plus d'éclat à ce Triduum, et de glorifier le fondateur de cet Institut auquel ils doivent le bonheur de plus en plus rare à notre époque, d'être élevés dans la connaissance de leurs devoirs religieux et dans la pratique des vertus chrétiennes. La veille, à la même heure, était arrivée une députation du collège de Sainte-Marie. Ces deux journées furent véritablement celles de la concorde et de l'union : union des élèves de deux congrégations venus de Valbenoîte et de Saint-Chamond ; union des Pères et des Frères Maristes avec les membres du clergé séculier, venus en grand nombre, sous la direction de M. l'Archiprêtre de Saint-Pierre et du vénéré Curé de Notre-Dame, assister au banquet de clôture.

« Les fêtes du Triduum sont terminées. Elles ont eu un éclat incomparable, dû à la fois, à l'heureuse initiative du cher Frère Directeur, au zèle de ses collaborateurs et aux sympathies qui les entourent. Les Frères de l'Hermitage, encouragés par leurs succès aux derniers examens, et pleins de confiance en la protection toute paternelle de leur Vénérable, ont repris leur vie de travail, de recueillement et de silence. Puissent, comme le souhaitait le chanoine Bouvard, leurs ferventes prières obtenir du ciel, par l'intercession de leur vénéré Père, de nouveaux miracles qui permettront de suivre activement cette cause si chère à Léon XIII, à tous les Maristes, à tout le clergé de Lyon, à tous les amis de l'Institut! Daigne Notre-Dame de Fourvière, si souvent invoquée par le P. Champagnat, hâter le jour béni où nous pourrons le saluer, avec toute l'Eglise, du titre de Bienheureux. » 

La VALLA. 

A La Valla leTriduum n'a pas été célébré avec moins de pompe et de ferveur qu'à l'Hermitage. Voici, en effet, ce qu'on lit dans la Semaine religieuse du diocèse de Lyon, du 20 novembre 1896 :

« La Valla. – La semaine du 1ier au 8 novembre a été une heureuse semaine pour les habitants de La Valla. Malgré le beau temps qui les invitait à rentrer leurs récoltes, on voyait chaque jour ces braves chrétiens accourir en habits de fête et remplir leur belle et vaste église. Ils venaient aux exercices d'un Triduum en l'honneur du Vénérable Père Champagnat, leur vicaire autrefois, qui leur a donné les prémices de son sacerdoce, les prémices aussi de sa Congrégation des Petits Frères de Marie. Ils venaient remercier Dieu d'avoir honoré, celui dont, malgré plus d'un demi-siècle écoulé, le souvenir est encore vivant ici dans tous les cœurs. Chaque matin, dans l'église admirablement ornée, grâce ait zèle du clergé, au dévouement de nos Frères du Juvénat, ils assistaient à la messe, aux magnifiques cérémonies de la liturgie lyonnaise, rehaussée encore par la présence de nombreux prêtres accourus à la suite du vénérable chanoine Blanc, de Notre-Dame, qui a bien voulu présider une partie de nos fêtes. Chaque soir, aux mille feux d'une brillante illumination, ils venaient entendre tour à tour M. Chipier, aumônier à Trèves, M. Chovet, curé de Rontalon, et M. Boiron, curé de Saint-Paul, à Lyon, célébrer, chacun à un point de vue différent, mais tous avec l'éloquence du cœur, les vertus de notre Vénérable, et répéter une des leçons que celui-ci donnait, il y a quelque soixante-dix ans, à nos pères. Matin et soir, les chants étaient exécutés par les enfants du Juvénat, de manière à étonner par leur perfection les connaisseurs qui se trouvaient dans l'assistance. » 

MARLHES. 

On lit dans la Semaine Religieuse du diocèse de Lyon, du 20 novembre 1896 :

« Le 12 novembre dernier, notre catholique population célébrait, avec le plus grand éclat, une messe avec salut solennel en action de grâces de la vénérabilité de Marcellin-Joseph-Benoît Champagnat, fondateur des Frères Maristes. La belle et vaste église, remplie de fidèles, ornée comme aux plus grandes fêtes, enguirlandée d'oriflammes et de drapeaux de toutes les nations où sont établis les enfants du Vénérable, présentait un coup d’œil vraiment féerique. Le chœur était occupé par de nombreux Frères des localités voisines qui, malgré le froid assez vif, avaient en à cœur d'assister à cette belle cérémonie.

« Des artistes du pensionnat de Valbenoîte et de Notre-Dame de l'Hermitage ont ravi l'auditoire par d'admirables solos et d'excellents morceaux de musique. Après l'évangile, M. le Curé de Marlhes est monté en chaire et a tracé brièvement la vie et les travaux du Vénérable Champagnat. Il a représenté après 1789 les enfants de nos campagnes laissés dans la plus complète ignorance et demandant du pain, non le pain matériel mais le pain substantiel de l'instruction religieuse.

« Dieu prend un enfant de Marlhes, du village appelé le Rozet, pour être le distributeur de ses dons et fonder l'Institut des Petits Frères de Marie qui donnent à plus de cent mille enfants, de toutes les nations, le pain d'une solide instruction religieuse.

« Après la bénédiction du Saint Sacrement, la foule s'est retirée lentement, murmurant, du fond du cœur, une fervente prière pour appeler à bref délai, la béatification de celui dont, à justetitre, elle est si fière. » 

BEAUCAMPS. 

Dans les premiers jours du mois d'octobre, un Triduum d'actions de grâces a été célébré solennellement dans la chapelle de la Maison provinciale de Beaucamps. Une allocution y a été prononcée par le R. P. Braun, de la Compagnie de Jésus, qui a pris pour texte ces paroles: « Si le grain de froment ne tombe en terre et ne meurt, il restera seul; mais s'il meurt, il portera beaucoup de fruits» (S. Jean, XII, 24-25). L'orateur a montré que, dans cette sentence profonde, Notre-Seigneur, divin froment des élus, n'avait pas voulu parler de lui seul, mais encore de tous ceux qui auraient la noble ambition de l'aider dans son œuvre rédemptrice. Là est l'explication des douloureuses épreuves par lesquelles a passé le Vénérable Marcellin Champagnat.

Une autre allocution a été prononcée par le R. Père Rasset, Assistant de la Congrégation des Prêtres du Cœur de Jésus, qui a commenté ces paroles du psaume LVIII, 10 : « Je garderai toute ma force pour vous servir. » « Le Vénérable Champagnat, a dit l'orateur, a fait servir toutes ses forces et les a employées pour l'amour de Dieu jusqu'à l'héroïsme, en concentrant sa vie dans l'humilité par la simplicité, et dans l'abnégation par la vie commune. 

SAINT-PAUL-TROIS-CHATEAUX. 

Le 8 novembre a été le jour choisi pour le chant solennel du Te Deum d'actions de grâces à Saint-Paul-Trois-Châteaux. C'était la fête des Saintes Reliques. Par une de ces harmonies profondes du culte catholique, la liturgie sacrée de cette solennité semblait composée tout exprès pour l'exaltation de celui dont il était question de célébrer la vénérabilité. Dans l'introït de la messe on lisait ces paroles de nos saints livres : Les tribulations des justes sont nombreuses, mais le Seigneur les délivrera de toutes : le Seigneur garde tous leurs os, pas un d'eux ne sera brisé. (Ps., XXXIII, 20, 21). Et dans l'Epître: Leurs biens se perpétuent avec leur race; leurs descendants sont un héritage saint, et leur postérité se conserve dans l'alliance de Dieu (Sag.- Eccl., XLIV., 11, 12).

A l'heure des vêpres de cette belle fête, toute la communauté de la Maison provinciale et les fidèles de la paroisse de Saint-Paul étaient réunis dans la vieille cathédrale, dont les murs noircis, tout drapés de bannières, festonnés de guirlandes et resplendissants de l'éclat des lustres illuminés, avaient pris un air de rajeunissement et de fête inaccoutumé. Et, précieux souvenir, la louange allait s'élever de cette même chaire du haut de laquelle, soixante ans auparavant, le Vénérable Père Champagnat, dans une de ces intuitions dont l'Esprit divin favorise souvent les saints, avait prédit l'étonnante prospérité du couvent de Saint-Paul.

M. le chanoine Claudon, vicaire général de Valence, avait accepté, avec bienveillance, de présider la cérémonie; et M. le chanoine Bouloumoy, avait bien voulu se rendre à la prière qui lui avait été faite de prononcer le panégyrique.

« Mon Père, j'ai glorifié votre nom » : tel fut le texte de son discours. Dans son exorde, l'orateur a montré que tout saint peut adresser à Dieu cette parole ; mais que, parmi eux, il en est qui, non contents de le glorifier par leur vie héroïque, ont perpétué leurs vertus et conséquemment leurs hommages par une œuvre de salut. De ce nombre est le Vénérable Champagnat, dont l'orateur a déroulé la vie, envisagée sous les deux aspects indiqués au commencement de son discours.

L'assistance était nombreuse et, bien que ce fût un dimanche, quinze prêtres sont venus rehausser cette solennité quia produit dans les cœurs les plus suaves et les plus salutaires impressions. 

AUBENAS. 

Notre Maison provinciale d'Aubenas (noviciat et pensionnat) a eu son Triduum solennel les 13, 14, et 15 décembre. Trois prédicateurs de choix ont bien voulu apporter à ces fêtes le concours de leur parole et prononcer le panégyrique du Vénérable.

Le premier jour, M. l'abbé Pubilier, curé de Vals, a pris pour sujet de son discours la Mission providentielle du vénérable Marcellin Champagnat. Dans un intéressant parallèle entre le Bienheureux de La Salle et notre vénérable Père il a montré comment ces deux serviteurs de Dieu, poursuivant le même but, se complètent en quelque sorte l'un l'autre.

Le second jour, M. l'abbé Roure, chanoine-archiprêtre de Privas, a tiré de riches et d'excellentes pensées de ces mots Petits Frères, qui rappellent si bien la fondation de l’œuvre du Vénérable Père Champagnat par l'humilité et la fraternité dans la charité.

Le troisième jour, M. le chanoine Battendier a développé avec beaucoup d'éloquence et une grande richesse d'élocution les belles et substantielles pensées contenues dans ces trois mots appliqués au Vénérable l'Appelé, l'Apôtre, le Saint.

M. l'abbé Fargier, aumônier de la Maison, a pris aussi une très large part à tout ce qui pouvait contribuer à embellir ces manifestations, notamment par deux belles allocutions et par la composition (paroles et musique) d'une cantate en l'honneur du Vénérable Père Champagnat, exécutée au pied de la statue, en dehors.

Enfin, ajoutons que la communauté a été tout heureuse de voir la cérémonie de clôture présidée, par M. l'abbé Couvert, vicaire général. 

SAINT-ETIENNE-VALBENOITE. 

Le Mémorial de la Loire, dans ses numéros des 8 et 10 décembre, a consacré deux articles au Triduum qui a été célébré tant à la paroisse qu'au pensionnat de Valbenoîte. Nous en extrayons ce qui suit :

« A l'occasion du Triduum d'actions de grâces du décret de vénérabilité de Marcellin Champagnat, la paroisse de Valbenoîte vient d'avoir une journée de fêtes exceptionnellement brillantes. Dimanche, en effet, l'église paroissiale, élégamment décorée de verdure et de drapeaux, s'est vue trop étroite pour contenir la foule sympathique qui venait participer aux fêtes.

« A 10 heures, la chorale du pensionnat Sainte-Marie, dirigé par les Frères Maristes, a chanté la Messe de Jeanne d'Arc. On n'aurait pu interpréter l’œuvre de Gounod mieux que ne l'ont fait ces 150 choristes.

« Le soir, à 2 h. 1/2, au salut solennel, chanté avec un égal talent par les élèves du pensionnat, une assistance plus nombreuse encore se pressait pour entendre le panégyrique du Vénérable, prononcé par le R. P. Mulsant, supérieur du collège des Pères Maristes, à Saint-Chamond. Pendant trois quarts d'heure l'auditoire a été sous le charme de l'éloquence entraînante et persuasive de l'orateur. Commencements modestes de l'Institut des Frères, vertus d'humilité, d'abnégation, de zèle et de dévouement de son Fondateur, le P. Mulsant n'a rien oublié de ce qui pouvait dépeindre la belle âme du Vénérable Champagnat. La péroraison surtout a été vibrante et propre à inspirer à tous les sentiments de la plus vive admiration pour le Vénérable, et de la plus entière confiance en l'avenir de son œuvre

« La seconde journée du Triduum (à la paroisse) a revêtu le caractère d'une fête de famille. A 10 heures, grand'messe et salut solennel. Aux novices et juvénistes de l'Hermitage et de La Valla, qui avaient bien voulu se charger de l'exécution des chants, aux élèves du pensionnat de Valbenoîte, réunis là au grand complet, venaient s'adjoindre les nombreuses députations des écoles de la ville. Un telle assistance devait plaire au Vénérable Champagnat, ce grand bienfaiteur et ami de l'enfance.

« Le soir, à 5 heures, panégyrique du Vénérable, par M. l'abbé Bourchany, professeur aux Facultés catholiques de Lyon. Jamais on ne dessina en traits plus heureux la physionomie du Père Champagnat, aussi bien que le caractère de son œuvre fondée sans apparence de succès, vraie folie aux yeux de la sagesse humaine, mais qui, venant à la suite de la folie de la croix, « allait opérer dans l'Eglise un miracle de plus. »

« Mardi 8 décembre, dernière journée (au pensionnat) la fête s'ouvre par la messe de communion. Réception de nouveaux congréganistes de la Sainte Vierge et de saint Joseph.

 « Journée superbe. Un gai soleil enveloppe d'une teinte dorée les inscriptions, les guirlandes et les multiples trophées de drapeaux. A 10 heures, dans la chapelle du pensionnat, Messe de Jeanne d'Arc.

« A 5 h. 1/2, le panégyrique du Vénérable Père Champagnat a été prononcé par le R. P. Rousseau, S. J. Le panégyriste a parlé très heureusement de la délicatesse maternelle de Marie, qui choisit l'heure même de ses grandes fêter, de Fourvière pour associer à sa gloire un enfant du diocèse de Lyon. » 

SAINT-CHAMOND. 

On lit dans la Semaine Religieuse du 25 décembre (diocèse de Lyon)

« Saint-Chamond. – Une fête de famille. – C'est bien le nom qu'il convient de donner à la pieuse solennité qui réunissait, mardi dernier, à l'Institution Sainte-Marie, les Pères de la Société de Marie et de nombreux Frères Maristes. Un évêque d'Océanie, mariste lui aussi, Mgr Vidal, avait accepté de grand cœur la présidence de cette journée consacrée à la glorification du Vénérable Champagnat.

« La messe pontificale a été chantée par les élèves du collège dans la chapelle gracieusement ornée de guirlandes de verdure et de drapeaux aux couleurs de l'Eglise et de la France. Au banquet fraternel, offert par le R. P. Mulsant, supérieur, étaient venus s'associer aux côtés de Monseigneur, le R. P. Descamp, de la Compagnie de Jésus, le T. R. Frère Théophane, Supérieur général de l'Institut des Petits Frères de Marie, avec le cher Frère Assistant de la province de l'Hermitage, le cher Frère Procureur général, les Frères directeurs du noviciat, du pensionnat de Valbenoîte, et de l'externat de Saint-Etienne, etc. Le vaste réfectoire était magnifiquement décoré. On remarquait surtout les écussons portant les armoiries du vénéré primat des Gaules, et des missionnaires de la Société de Marie.

« Au dessert, le R. P. Descamp et Monseigneur exprimèrent tour à tour leur joie de célébrer ensemble l'introduction d'une cause si chère à tout le diocèse et à tous les religieux. Ils rappelèrent les liens si étroits qui unissent les deux Congrégations des Pères et des Frères Maristes, qui unissent aussi les Maristes et les Jésuites, dont les devises se complètent si heureusement Ad majorem Dei gloriam et Dei Genetricis honorem. Tout à Jésus par Marie ; tout à Marie pour Jésus.

« Au salut du soir, les Frères des environs étaient venus en grand nombre. Le R. P. Descamp présente alors à son jeune auditoire le Vénérable Champagnat comme modèle : 1° dans sa sanctification personnelle par la pratique des trois vertus caractéristiques de sa vie: la simplicité, l'obéissance et la pureté ; 2° dans l'exercice de l'apostolat, par le zèle qu'il déploya au début de sa fondation religieuse. L'orateur termine par un conseil très pratique. Un jeune homme doit savoir de bonne heure orienter sa vie vers un but précis; il doit s'appliquer de bonne heure à faire quelque chose. Que de bien se ferait dans le monde si tant d'hommes indécis, oisifs ou occupés à des futilités, voulaient travailler sérieusement à la gloire de Dieu, à l'édification du prochain, à leur sanctification personnelle » 

NEUVILLE. – CHARLIEU, ETC. 

Au pensionnat de Neuville, un salut solennel a été célébré le 21 novembre. Le R. P. Georges Têtu, de la Congrégation du Très-Saint-Sacrement, y a prononcé un panégyrique dans lequel il a développé ce texte du Cantique des cantiques : « Pose-moi comme un sceau sur ton cœur… parce que l'amour est fort comme la mort. »

Dans son discours, l'orateur s'est attaché d'une manière heureuse à faire admirer dans la vie du Vénérable Champagnat l'amour de Jésus-Christ, l'amour de la très sainte Vierge Marie et l'amour des âmes consumant son grand cœur, et nous donnant le secret des œuvres merveilleuses qu'il a entreprises et menées à bonne fin.

Le pensionnat de Charlieu a eu son Triduum solennel au mois de novembre. C'est à l'église paroissiale que les fêtes ont eu lieu. Les fidèles se sont joints en foule au clergé, aux Frères et à leurs élèves, et des panégyriques se sont fait entendre, à la grande édification des assistants, de sorte que rien n'a manqué à la solennité de ces fêtes.

Dans beaucoup de paroisses du diocèse de Lyon, où nous avons des Frères, le clergé et les fidèles ont pris part aux prières d'actions de grâces, à la grande satisfaction des Frères, et, du haut de la chaire, des allocutions ont été prononcées à la louange du Vénérable. Parmi ces paroisses, nous pouvons citer celles de Sury-le-Comtal, de Lorette, de l'Arbresle, de Denicé, d'lzieux, de Saint-Paul-en-Jarez, etc. … 

GLASGOW. – DUMFRIES. 

Le dimanche, 6 décembre, dans l'église Saint-Mungo, à Glasgow, a été chanté un salut solennel d'actions de grâces, qu'a présidé Mgr Maguire, évêque auxiliaire de Glasgow, ancien élève des Frères de Saint-Mungo.

La vaste église, desservie par les Pères Passionnistes était entièrement remplie jusque dans les passages. Les Frères des différentes écoles de la ville occupaient des  places réservées en face du maître-autel ; et, dans l'auditoire, on remarquait beaucoup d'anciens élèves des Frères, venus de toutes les parties de la cité.

Après la récitation du chapelet, le T. R. P. Wilfrid, supérieur des Passionnistes, prononça un éloquent panégyrique sur ce texte de l'Ecclésiastique : Louons maintenant ces hommes pleins de gloire qui sont nos pères, et dont nous sommes la race (Ecc.,XLVI, 1).

« Deux motifs également louables, dit le prédicateur, nous réunissent ici ce soir. C'est d'abord pour remercier Dieu des grâces répandues sur le vénérable Marcellin Champagnat… C'est ensuite pour nous réjouir avec nos amis, les bons Frères Maristes et les féliciter de l'honneur rendu par l'Eglise à leur vénérable Fondateur dont la gloire retombe sur eux, selon la parole de l'Esprit-Saint : « Dieu a rendu le père vénérable aux enfants ; le fils tire sa gloire de l'honneur de son père… » (Ecc., 111, 3 et 13). Et l'orateur a raconté ce qui, dans la vie du Vénérable Champagnat, l'a rendu grand aux yeux de Dieu ; il a exalté le bien que font ses disciples dans l’œuvre qu'il a fondée, et il a montré dans sa vie et dans son œuvre l'action de la Providence.

A la Maison provinciale de Dumfries, la Messe et le Salut d'actions de grâces ont été célébrés en famille, dans la chapelle, vers la fin du mois de septembre. 

ESPAGNE. 

Les détails nous manquent pour rendre suffisamment compte de ce qui s'est fait en Espagne; mais nous savons que, là aussi, les Frères, leurs élèves, les parents de ceux-ci, l'épiscopat et le clergé se sont portés avec beaucoup d'empressement et d'édification à toutes les fêtes d'actions de grâces quiont été célébrées, et que plusieurs voix ont loué du haut de la chaire les vertus et les mérites du Vénérable Marcellin Champagnat. 

ROME. 

Le 30 novembre, un salut d'actions de grâces a été chanté dans la chapelle de notre maison de Rome. La cérémonie, on le pense bien, n'avait pas le caractère grandiose de celles qui se célèbrent dans nos cathédrales; mais c'était à Rome, et ce nom qui rappelle tant de grandeurs diverses, éveillait dans les cœurs le désir et l'espérance d'entendre un jour retentir sous les voûtes de Saint-Pierre le Te Deum des fêtes de béatification. En attendant, on était heureux de célébrer modestement, en famille, dans la ville éternelle, la vénérabilité du pieux Fondateur d'un Institut que les papes Pie IX et Léon XIII ont béni, et que tant de hauts personnages à Rome honorent de leur bienveillance.

Oui, c'était un spectacle touchant pour le Supérieur de cet Institut et pour son Assistant, présents à la cérémonie, de voir les enfants réunis à la chapelle prêter une oreille attentive à la voix du panégyriste, et de les entendre chanter avec une douce harmonie des hymnes d'actions de grâces.

Le Révérend Père barnabite qui avait bien voulu accepter de prononcer le panégyrique du Vénérable Marcellin Champagnat, s'acquitta de sa tâche de manière à intéresser son jeune auditoire, à qui il le montra comme prédestiné par Dieu pour contribuer à réparer les ruines faites dans les âmes par la Révolution française. Il le présenta comme un modèle pour ses condisciples par sa piété, sa candeur, son obéissance, ensuite comme un prêtre selon le cœur de Dieu, comme un apôtre plein de zèle, comme un ami, un bienfaiteur des enfants ; enfin, il le fit voir comme un homme de Dieu, un saint, fondant son œuvre sur l'humilité, la pauvreté, la contradiction et la souffrance.

Après avoir montré le Vénérable Champagnat comme un modèle à imiter, l'orateur exhorta ses auditeurs à l'invoquer comme un protecteur. 

CONSTANTINOPLE. 

M. Lobry, Préfet apostolique et Supérieur de la Mission, qui a pour nos Frères les bontés et les attentions d'un père, a voulu que la Vénérabilité de notre saint Fondateur fût solennisée au collège Saint-Benoît comme dans un établissement tout mariste.

Le 26 décembre était le jour fixé pour le salut solennel que devait présider Son Excellence Mgr Bonetti. A 2 heures, les élèves étaient réunis à l'église de Saint-Benoît et remplissaient la grande nef. Tous avaient été convoqués – catholiques, orthodoxes, grégoriens, juifs, musulmans, etc., tous avaient répondu à l'appel.

Lorsque, au son de l'orgue, Monseigneur se fut rendu processionnellement à sa place avec tout le clergé, M. Cazot, directeur du collège, monta en chaire et prononça avec beaucoup d'éloquence un panégyrique qui fut religieusement écouté. Les chants exécutés par les élèves ont été rendus de manière à faire naître dans l'âme les plus religieux sentiments et à laisser les plus suaves impressions.

M. Lobry a voulu que la fête fût complète. Il a donc invité les Frères au dîner présidé par Monseigneur; il a accordé aux élèves une promenade dans l'après-midi et un jour de congé en plus à la nouvelle année. 

SCUTARI (Turquie d'Asie). 

Extrait d'une lettre du cher frère Acyndinus, Visiteur :

Je pense vous être agréable, Très Révérend Frère Supérieur, en vous envoyant quelques mots sur le salut solennel donné à Scutari, par son Excellence Mgr Bonetti, délégué du Saint-Siège.

Vraiment je n'aurais osé espérer une telle faveur tout paraissait y mettre obstacle : la distance, la traversée du Bosphore, le mauvais temps possible, l'âge et les infirmités du prélat ; mais la bonté de notre digne Archevêque et son dévouement pour les Petits Frères. ont surmonté toutes les difficultés.

Le Vénérable, qui ne voulait pas être en retard, nous a obtenu une journée exceptionnellement belle, au milieu d'une semaine toute pluvieuse.

Depuis longtemps, Monseigneur voulait voir les enfants, et il a profité de cette occasion. Presque tous se sont rendus à notre appel le jeudi 26 novembre, et, par leur nombre et leur bonne tenue, ont causé à son Excellence une agréable surprise.

La petite séance a commencé par un chant de circonstance, puis un compliment a été lu et un bouquet présenté. Monseigneur a remercié et a témoigné sa grande satisfaction de tout ce qu'il voyait et entendait Il a recommandé aux élèves de bien profiter des leçons que les enfants du Vénérable Marcellin Champagnat leur donnent avec un dévouement égal à leur modestie.

Sa Grandeur a béni tous les élèves, catholiques et autres ; et aussitôt après a eu lieu la bénédiction d'une statue du Sacré-Cœur, dressée sur un beau piédestal, au milieu de la cour, statue enrichie d'une indulgence de 80 jours.

A 2 heures a eu lieu le salut solennel, auquel on remarquait, parmi le clergé présent, M. Droitecourt, assistant de M. Lobry; M. Cazot, directeur du collège Saint-Benoît, le R. P. André, de la Société de Jésus, et le R. P. Alfred, provincial des Assomptionnistes. Nous avons exécuté à peu près les mêmes chants qu'à la cérémonie qui a eu lieu à la cathédrale de Lyon. Avant l'exposition du Saint Sacrement, M. Cazot, notre prédicateur de la dernière retraite, nous a ravis par le discours qu'il a prononcé sur le Vénérable Champagnat. Il nous a montré, parmi toutes ses vertus, cette foi inébranlable et cette constance à toute épreuve qui l'ont caractérisé et l'ont rendu capable de si grandes choses. « Je ne connais rien de si beau, a-t-il dit, que cette unité parfaite de toute sa vie, cette persévérance à faire toujours la volonté de Dieu une fois qu'elle lui était connue. » Et M. Cazot nous a montré le Vénérable Marcellin, enfant, élève, puis aux pieds de Marie à Fourvière, ensuite vicaire à La Valla, plus tard bâtissant lui-même la maison de l'Hermitage, formant ses Frères, luttant contre toutes les difficultés, enfin, après avoir fondé un bel Institut, laissant, dans son testament spirituel, un monument de sa foi et de sa constance, aussi bien que de son amour immense pour ses Frères.

Ce n'a pas été sans une bien douce émotion que nous avons entendu le panégyrique de notre bien-aimé Fondateur. La joie et le bonheur étaient peints sur tous les visages; en un mot, ç'a été une fête, une journée inoubliable. 

AMERIQUE DU NORD. 

L'Amérique a rivalisé avec l'ancien continent. On sait que, parmi ces peuples nouveaux, l'Eglise jouit généralement d'une liberté qui lui assure la sécurité nécessaire au développement de ses œuvres civilisatrices et bienfaisantes. Aussi, a-t-il suffi de quelques années à nos Frères établis au Canada et en Colombie pour s'y multiplier, y développer leurs écoles et y faire un bien grandement apprécié. Le clergé et les fidèles ont donc été heureux de s'associer aux Frères dans cette circonstance, et de saisir l'occasion de leur manifester leurs sympathies et leur reconnaissance.

Voici, à ce sujet, ce que S. G. Monseigneur Moreau, évêque de Saint-Hyacinthe (Canada), écrivait à son clergé, dans une lettre pastorale en date du 15 octobre 1896, laquelle contient le Décret du 9 août, autorisant l'introduction de la Cause de Vénérable Marcellin Champagnat :

« L'Institut des Petits Frères de Marie, dont le diocèse est un des centres provinciaux et possède plusieurs établissements, vient d'être l'objet d'une insigne faveur. Par un décret, en date du 9 août dernier, Sa Sainteté Léon XIII a permis l'introduction de la cause de béatification et de canonisation du fondateur de cette pieuse congrégation, le Vénérable Marcellin-Joseph-Benoît Champagnat.  Comme de nombreux enfants de ce grand serviteur de Dieu sont au milieu de nous et exercent sous nos yeux leur méritoire et fécond apostolat, vous aimerez sans doute à connaître les principaux traits de la vie du prêtre admirable qui fut leur père. Le décret apostolique que je vous transmets vous fera admirer les héroïques vertus du Vénérable Champagnat et les travaux surhumains qu'il s'est imposés pour établir l’œuvre qui, aujourd'hui, par ses 5.000 membres, donne l'enseignement de la foi à plus de 100.000 enfants.

« Nous devons nous associer à l'allégresse que nos chers instituteurs diocésains éprouvent de cet heureux événement. Unissons-nous aussi à leurs prières, pour demander qu'à leur bien-aimé père et fondateur soient bientôt  décernés les honneurs des saints autels. »

Des messes et des saluts d'actions de grâces ont, donc été célébrés solennellement dans l'Amérique du Nord, comme dans l'Amérique du Sud, au Canada, aux Etats-Unis et en Colombie. 

NOUVELLE-CALÉDONIE. 

Nos chers Frères de la Nouvelle-Calédonie, comme ceux des autres pays, ont mis tout leur empressement et tout leur cœur à fêter la Vénérabilité du Père Champagnat. Nous sommes heureux d'en donner pour preuve la lettre que nous écrit le cher Frère Antonino, directeur de Bourail :

Mon Très Révérend Frère Supérieur,

« C'est hier, 4 novembre, à 8 heures, que nous avons eu le bonheur de célébrer notre grande fête d'actions de grâces pour l'Introduction de la Cause de béatification et de canonisation de notre Vénérable Fondateur.

« L'église revêtue de sa parure des fêtes de première classe, les nombreux fidèles qui s'y étaient réunis sur l'invitation qui leur avait été faite, la messe chantée comme aux grandes solennités, tout donnait à notre fête un cachet exceptionnel de pompe et de grandeur. Il n'est pas jusqu'aux femmes du couvent (asile des femmes condamnées) qui, sur mon invitation, étaient venues en grand nombre, ne contribuassent à l'édification par leur bonne tenue et même leur recueillement.

« Après l'évangile, le célébrant a lu le Décret, suivi d'une allocution adressée spécialement aux écoles. Un copieux pain bénit a été distribué à la nombreuse assistance, usage très rare, presque inconnu à Bourail. A l'issue de la Messe, le chant du Te Deum a été rendu avec âme et piété; c'était vraiment l'expression de la reconnaissance dont les Frères surtout sentaient le besoin.

« Oh ! quelle belle journée, Mon Très Révérend Frère, pour le pauvre peuple bouraillais ! Quelle belle journée surtout pour nous ! Que j'étais heureux d'avoir fait quelque chose pour notre Vénérable Fondateur dans un pays comme celui de Bourail ! Que de fois j'ai dit, ces consolantes paroles : « Vénérable Père Champagnat, priez pour moi, priez pour mes enfants, pour tous les vôtres, et pour tous ceux qui sont ici présents pour vous honorer. »

« Le R. P. Daniel a été charmant pour rendre la solennité aussi brillante que possible ; il en a été de même du R. P. Chaboissier. Ce jour-là je les ai invités à dîner tous les deux, ainsi que M. le commandant Pennel et quelques frères de Néméara. (On ne pouvait pas faire moins en pareille circonstance). Nous avions un bon lapin auquel les convives firent honneur, ainsi qu'aux petits accessoires qui l'accompagnaient. Tout s'est très bien passé. En somme très belle journée dont nous garderons un précieux souvenir.

« Le matin, avant de nous rendre à l'église, j'avais dit à tous nos enfants : « Vous savez que nous n'avons plus d'eau dans nos caisses ; je vous recommande d'en demander au Vénérable Marcellin Champagnat. » Le soir nous avons eu un grain qui a rempli la moitié de nos caisses, et il y avait quatre mois qu'il n'avait pas plu à Bourail.

«Maintenant, Mon Très Révérend Frère, je vous dirai que j'ai promis quelques images de notre Vénérable Fondateur à ceux que j'ai invités. Si vous vouliez bien donner l'ordre de m'en envoyer deux ou trois cents, vous me feriez grand plaisir…. » 

CHINE. – PÉKIN. 

   Nous n'avons garde d'oublier la Chine où nos Frères si dévoués font bénir le nom de Petit Frère de Marie. Nous mentionnerons spécialement la Maison de Cha-la-Eul, qui a  eu son Triduum solennel les 2, 4, et 5 novembre. Le jour de la clôture, les Chers Frères de Cha-la-Eul ont eu la  consolation de recevoir les Chers Frères du Nant'ang qui étaient venus se joindre à eux dans la célébration de cette belle fête et de voir à la messe solennelle dix prêtres et deux frères lazaristes de la Mission, ainsi qu'une douzaine de Sœurs de charité. Mgr Sartou a regretté de ne pouvoir présider cette solennité à cause de sa santé; mais il s'est uni à son clergé et aux Frères par une messe dite en son particulier. Les lettres reçues de Cha-la-Eul nous disent quelle a été la joie, le bonheur de nos Frères, de voir que l'introduction de la cause de notre Vénérable Fondateur avait été l'occasion de cette pieuse manifestation dans la capitale du Céleste Empire. 

AFRIQUE DU SUD. – AUSTRALIE. 

Nos Etablissements de l'Afrique du sud ne sont pas non plus restés en retard pour les prières d'actions de grâces. Des panégyriques ont été prononcés à Johannesburg, par Mgr Gaughran, évêque de Priene, Vicaire apostolique de Kimberly; à Port-Elisabeth, par le R. P. Bader, et à Uitenhage, par le R. P. Rizonelli.

A Sydney, un Triduum solennel a été célébré en octobre, tant au pensionnat Saint-Joseph qu'à la cathédrale Sainte-Marie.

Enfin, ne pouvant entrer dans plus de détails, nous dirons avec la plus grande satisfaction que partout, en France comme à l'étranger, nos Frères, leurs élèves, le clergé, les populations ont fait, à l'occasion de la Vénérabilité de notre saint Fondateur, tout ce qu'il était permis de désirer, et même au-delà de tout ce qu'on pouvait espérer.

Les réflexions qui découlent du caractère de ces fêtes, Mes Très Chers Frères, c'est que, avec les actions de grâces rendues à Dieu, on a voulu y célébrer non seulement l’œuvre du Vénérable Champagnat, son développement remarquable et les résultats obtenus, mais principalement ce qui en a été le principe : la fidélité du Vénérable à correspondre à la grâce, sa soif des âmes, son zèle de la gloire de Dieu ; ce sont toutes ces vertus qui en ont fait un instrument propre à remplir la sublime mission à laquelle la Providence l'avait destiné. Ce que ces solennelles manifestations nous ont surtout montré, c'est une de ces âmes privilégiées qui sont choisies pour se livrer tout entières à l'accomplissement du but final de la création ; c'est l'homme qui a reçu de Dieu le don de l'apostolat, et celui de la fécondité spirituelle qui fait la perpétuité des ordres religieux ; c'est le dévoué et fidèle serviteur de Marie, qui n'entreprenait et ne faisait rien que par Marie et avec Marie ; c'est, en un mot, notre père, en qui nous trouverons toujours une source de vie surnaturelle et de grâces de choix, si nous savons nous conformer à lui par la fidélité à la Règle et à l'esprit de notre sainte vocation.

   Le profit à tirer de tout ce qui a été dit et fait à l'occasion de l'introduction de la cause du Vénérable Père Champagnat, c'est que nous devons nous pénétrer de plus en plus de l'obligation où nous sommes de ressembler à notre père spirituel, pour être dignes et capables de continuer son œuvre. Il ne suffit pas, en effet, que nous nous employions à préserver les jeunes générations d'une éducation athée ; il faut que nous restions à la hauteur de notre mission. Pour cela, nous sommes tenus tous d'écouter, dans le secret de notre cœur, la voix du Vénérable, qui nous crie, ainsi que saint Paul à ses disciples: « Soyez mes imitateurs, comme je le suis de Jésus-Christ. » 

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ENCYCLIQUE DE S. S. LEON XIII

 sur le saint Rosaire.

 La touchante fidélité du Saint-Père à rappeler, tous les ans, au monde catholique, les bienfaits de la dévotion à Marie, est bien faite pour nous porter à admirer son ardente piété et sa grande confiance envers la bienheureuse Vierge, pour nous inspirer à nous-mêmes le plus filial amour envers cette Mère Admirable, et pour exciter notre zèle à en pénétrer tous les cœurs.

Cette année, le Souverain Pontife insiste spécialement sur deux éléments principaux qui assurent à la prière une très grande efficacité : la persévérance à prier et l'union dans la prière. Et, entre autres motifs dont Léon XIII s'inspire, en cette instruction apostolique, se trouve celui de favoriser le mouvement de réconciliation qui se dessine parmi les dissidents.

« Nous comprenons, dit-il, que cette admirable unité ne peut être préparée et réalisée par aucun meilleur moyen que par la vertu des saintes prières. Nous avons présent à l'esprit l'exemple du Christ, qui, dans une prière adressée à son Père, lui demanda que ses disciples fussent un dans la foi et dans la charité. Que sa très Sainte Mère ait fait avec ferveur la même prière, nous en avons une illustre preuve dans l'histoire apostolique. Cette histoire nous représente la première assemblée des Apôtres, implorant et attendant, avec une grande espérance, l'effusion promise de l'Esprit-Saint, et en même temps Marie présente au milieu d'eux et priant spécialement. Tous persévéraient ensemble dans la prière avec Marie, mère de Jésus. » (Act., 1, 14), C'est pourquoi, de même que l'Eglise, à son berceau. s'est justement unie à Marie dans la prière, comme à la promotrice et à la gardienne excellente de l'unité ; de même, dans notre temps, il est très opportun d'agir ainsi dans tout l'univers catholique, surtout durant le mois d'octobre que, depuis longtemps, en raison des temps affligés que traverse l'Eglise, Nous avons voulu dédier et consacrer à la divine Marie, invoquée par le rite solennel du Rosaire.

« Par conséquent, que la dévotion à cette prière redouble partout d'ardeur, surtout en vue d'obtenir la sainte unité. Rien ne peut être plus doux et plus agréable à Marie qui, unie au plus haut point avec le Christ, désire et souhaite grandement que tous les hommes gratifiés du même et unique baptême du Christ, soient aussi unis à lui et entre eux par la même foi et une parfaite charité.

« Que les mystères augustes de cette foi, par le culte du Rosaire, pénètrent plus profondément dans les âmes, en vue de cette très heureuse conséquence que nous imitions ce qu'ils contiennent et que nous obtenions ce qu'ils promettent. »

Efforçons-nous, M. T. C. F., en vue d'être agréables à Notre-Seigneur, de répondre aux intentions de notre Saint-Père le Pape et, dans nos communions, dans nos exercices de piété, notamment dans la récitation du chapelet, continuons de demander à Dieu la réalisation du grand désir que Sa Sainteté a maintes fois exprimé, dans ses Lettres encycliques et ses allocutions, « désir conçu dans le divin Cœur de Jésus », à savoir : la réconciliation avec l'Eglise catholique de toutes les sociétés chrétiennes dissidentes. Recommandons aux élèves de nos écoles de prier à la même fin. 

ENSEIGNEMENT – ËDUCATION 

Un Congrès pédagogique a été tenu à Versailles les 25, 26 et 27 août 1896.  Diverses questions importantes y ont été traitées, spécialement au point de vue de la formation morale de l'enfant, et le compte rendu en a été publié dans le Bulletin de la Société générale d'Education du 15 octobre 1896.

Parmi ces questions, il en est une qui a été l'objet d'un rapport de M. l'abbé Fèvre, prêtre salésien, l'auteur d'un livre, la Piété à l'école libre, dont d'importants extraits vous ont été donnés dans plusieurs Circulaires. Le sujet de ce rapport a pour titre : 

MOYENS DE DÉVELOPPER LA PIÉTÉ CHEZ LES ENFANTS. 

Au risque de me répéter, pour la troisième fois, j'appelle de nouveau votre attention, Mes Très Chers Frères, sur ce sujet si important de la piété, en mettant ici sous vos yeux quelques extraits du rapport fait au Congrès.

Après avoir indiqué et développé comme moyens de cultiver la piété dans l'âme de l'enfant, une doctrine saine, la méthode préventive, l'apostolat, le plain-chant, les cérémonies de l'Église, il s'est exprimé en ces termes :

« Enfin, il y a ce qu'on appelle les pratiques de piété proprement dites. Ces pratiques pieuses peuvent être chez les grandes personnes l'effet de la piété ; chez les enfants elles en sont la cause et l'apprentissage. Les principales sont la messe quotidienne, la communion sacramentelle fréquente, la communion spirituelle, la visite au Saint Sacrement, la bonne tenue à l'église, la prière à haute voix, l'aumône, le culte de la Sainte Vierge.

« 1° La messe quotidienne. – Quand le jeune enfant a un père chrétien ou une mère pieuse qui le conduit chaque jour à la messe, ou bien si la messe est une exercice quotidien de l'école où il se trouve, c'est pour lui un puissant moyen de formation à la piété. Après s'être approché chaque matin de l'autel de Dieu, on se sent porté davantage à penser à Dieu dans la journée, à vivre sous son regard, à travailler pour lui. D'ailleurs, la sainte Victime qui s'immole sur l'autel répand autour d'elle une grâce d'immolation et de prière, c'est-à-dire développe les sentiments d'une vraie et sincère piété.

La communion sacramentelle fréquente. – La messe appelle la communion, puisque communier c'est participer à la manducation de la sainte Victime qui s'immole sur l'autel. Il faut lire ce que Mgr de Ségur a écrit sur la sainte communion comme aliment de piété soit pour les grandes personnes, soit pour les enfants. Il compare l'âme de l'enfant à un jardin et déclare que Jésus dans la communion est le soleil qui échauffe, féconde ce jardin, et fait éclore et s'épanouir les belles fleurs des vertus. Il suppose que l'enfant chrétien peut communier chaque dimanche et fête, quelques-uns, plusieurs fois la semaine. C'était également la doctrine de Dom Bosco, et c'est la pratique de ses enfants. Jésus reçu fréquemment dans la sainte communion est l'aliment, le soutien, le propagateur de la piété des nombreux enfants que les Pères Salésiens élèvent en France comme dans les autres parties du monde.

La communion spirituelle complète la communion sacramentelle et la prépare[1]. Quand M. l'abbé Garnier parle à une réunion d'enfants, il leur fait toujours faire à haute voix, tous ensemble, la communion spirituelle. Les curés, comme les prêtres éducateurs qui suivent cette méthode, déclarent qu'on en retire les plus excellents fruits de piété pour les enfants. Moi-même j'ai été témoin d'une communion spirituelle collective faite à une réunion de la Sainte-Enfance par plus de cent cinquante enfants ; j'avoue en avoir été profondément édifié et touché. Ces enfants, petits et grands, filles et garçons, les mains jointes, les yeux fermés pour la plupart, invitaient le Dieu de l'Eucharistie à venir dans leur âme avec un accent de foi si convaincu, avec une piété si vraie que l'assemblée tout entière était impressionnée jusqu'aux larmes.

La visite du Saint Sacrement. – C'est une pratique générale dans tous les patronages, d'aller, en y arrivant, saluer d'abord Notre-Seigneur à la chapelle. Tous ne le font pas, car cette pieuse pratique est libre ; mais ceux qui le font sont pieux ou le deviennent ; ce sont les meilleurs enfants du patronage, ordinairement les membres de diverses associations. Beaucoup de patronages ont, le dimanche, la pratique du quart d'heure d'adoration ; chacun prend le moment qui lui convient, c'est un exercice facultatif, mais aimé et fécond en fruits de piété. Certains curés invitent les enfants des écoles à venir faire avec eux une petite visite à Notre-Seigneur après la classe du soir, et les enfants viennent volontiers ; on adore le divin Maître, on fait la communion spirituelle, on dit une dizaine de chapelet, et les curés qui nous racontent ces industries de leur zèle, nous disent avec bonheur les fruits de piété qu'en retirent les enfants. C'est l’œuvre des petits ramoneurs, des écoles cléricales, des collèges catholiques pieux, de faire une visite au Saint Sacrement pendant la récréation, ne dût-on séjourner à la chapelle que quelques minutes ; et l'on remarque que cette pratique alimente la vie de la foi et favorise la piété.

La bonne tenue à l'église. – Qu'il me soit permis de mentionner ici un fait qui m'est personnel. En 1885, je me trouvais à Turin et je voulus voir D. Bosco, dont la réputation de saint et d'éducateur avait dépassé les Alpes. Je lui posai à brûle-pourpoint la question suivante « Mon Père, que faut-il faire pour sanctifier les enfants? » Je n'ai jamais oublié la réponse qu'il me donna; elle est encore aussi présente à ma mémoire que le premier jour : « Faites-les bien tenir à l'église », me dit-il sans hésiter. Cette réponse me parut d'abord singulière et je m'attendais à autre chose. J'ai constaté depuis combien elle était sage et vraie. On trouve la même doctrine dans les ouvrages de M. l'abbé Timon-David. « La bonne tenue des jeunes gens à la chapelle est, dit-il, un acte de foi pratique ; leur mauvaise tenue, au contraire, est un acte d'impiété pratique.

L'aumône. – On sait que Frédéric Ozanam et ses cinq compagnons voulurent mettre leur piété sous la sauvegarde de la charité pour le prochain et fondèrent les conférences de Saint-Vincent-de-Paul. Dans les patronages on établit même parmi les écoliers, la petite conférence de Saint-Vincent-de-Paul, et les petits anges de la charité qui vont chaque semaine visiter une famille pauvre, mettent ainsi leur piété sous la sauvegarde de l'aumône[2]. Qui de vous n'a pas vu dans les familles chrétiennes un père, une mère, confier à un tout petit enfant l'aumône que réclamait à la porte un mendiant de passage, et l'enfant la porter timidement, avec une émotion mystérieuse, la remettre dans la main du pauvre ? Les parents chrétiens comprennent d'instinct que l'aumône est une grâce et une bénédiction pour les enfants, une protection pour leur innocence, et un gage de leur persévérance dans l'amour de Dieu et du prochain, c'est-à-dire, un aliment sûr pour leur piété.

Les lectures pieuses. – Dire que les lectures pieuses sont un moyen de développer la piété, c'est presque une tautologie, puisque ces lectures sont précisément une semence de vie surnaturelle. Ces lectures comprennent, en premier lieu, l'Evangile et les récits de l'Ancien Testament, appropriés à l'enfance ; puis les actes des martyrs, la vie des Saints, la biographie d'enfants pieux, les petits traités spirituels, parmi lesquels ceux de Mgr de Ségur tiennent une place d'honneur. Qu'on fasse, chaque jour, en classe, une lecture de ce genre ; qu'on la fasse au moins durant le carême, le mois de Marie, le mois du Saint Enfant-Jésus, et l'on verra bientôt le niveau de la piété monter dans nos écoles, parce que l'atmosphère en deviendra plus surnaturelle.

Le culte de la Sainte Vierge. – Est-il besoin de dire que le culte de la Sainte Vierge est un moyen d'attirer les enfants à Dieu, de les former à son amour et à son service? Saint Bernard l'affirme et la sainte Eglise le répète après lui : « Il nous fallait une mère pour nous. conduire au divin Père, c'était un besoin naturel de notre cœur. Dieu nous l'a donnée, cette mère bénie, en la personne de l'auguste Mère de Notre-Seigneur Jésus-Christ. » Aussi, on peut dire de Marie ce que saint Epiphane dit de l'humanité sainte du Sauveur : « Elle est une amorce qui attire les âmes à Dieu, et cela est vrai surtout pour les petits enfants. »

Il faut développer dans nos écoles la dévotion à la Sainte Vierge, si naturelle à l'enfant baptisé[3]; car l'enfant chrétien aime la médaille, le chapelet; le scapulaire, les cantiques à la Sainte Vierge : tout cela lui rappelle sa mère et incline son cœur vers la douce Reine de la pureté, et nous savons qu'il est écrit : « Bienheureux les cœurs purs, car ils verront Dieu ». Or, aimer Dieu, c'est être pieux de cette piété pratique qui fait courir dans la voie des saints commandements. 

L'EDUCATION DE LA VOLONTÉ. 

Telle est la question qui a été l'objet d'un autre rapport fait au même Congrès par M. l'abbé Francis, du clergé de Paris.

« En ce moment, nous nous trouvons, dit l'honorable rapporteur, en présence d'un affaiblissement général des caractères. Cherchons donc le meilleur moyen de remédier à cet état de choses et de donner à nos élèves du caractère, de la volonté.

« La fermeté de volonté s'acquiert, comme la science, comme la mémoire, et même comme la souplesse dans les exercices physiques, par des exercices gradués et de l'entraînement.

« J'aime les patronages et les œuvres de persévérance, parce que ces œuvres éloignent des occasions du mal, rapprochent des occasions du bien, et donnent un peu la contagion du bon exemple ; mais si ces œuvres facilitent le bien, elles ne donnent pas de la volonté à ceux qui n'en ont pas….

« Pour faire aimer le devoir, qui emporte toujours avec soi quelques sacrifices, on cherche à inspirer de la piété à l'enfant. Le rendre pieux, c'est lui faire aimer Dieu, lui faire aimer le devoir, et l'habituer déjà à recourir aux moyens surnaturels de la prière et des sacrements, pour affermir sa volonté chancelante. Je me souviens encore des avis de piété que l'on nous donnait, tous les matins, à l'école des Frères, après la prière ; nous y faisions de réelles provisions de sagesse pour la journée ; et quand, aux périodes d'examen, le pauvre Frère, bousculé par les programmes, sautait l'avis de piété pour regagner du temps, nous étions d'une indiscipline qui lui faisait perdre le double du temps qu'il avait cru gagner[4].

« Vous allez me dire : « Eh bien ! voilà, c'est tout trouvé. Avec de l'instruction religieuse solide et de la piété, vous aurez de la volonté. »

« Mais tout ceci n'est que la préparation, la base pour construire, ce n'est pas encore l'édifice…. Il faut apprendre à l'enfant qu'il n'a pas seulement du cerveau, mais qu'il a du cœur, de la volonté, et que ce cœur, cette volonté sont faits pour vouloir, pour commander ce qui est bien et pour repousser énergiquement ce qui est mal. Puis lui donner l'estime du caractère, de la volonté ferme; lui faire sentir combien l'homme se diminue, se dégrade quand il manque d'énergie, quand il est l'esclave de ses caprices, l'esclave de la mode, du qu'en dira-t-on, du premier beau parleur venu. Faire ressortir, au contraire, quel beau spectacle est celui d'un homme attaché au devoir et qui brave tout pour le suivre ; quelle grande et belle chose qu'une volonté forte. Le monde entier peut se liguer contre un homme de caractère : intimidations, menaces, tortures seront impuissantes et incapables de briser une seule volonté humaine.

« Ce sont les lâches, les dégradés, qui se conduisent par routine, qui agissent pour faire comme tout le monde. L'homme digne de ce nom, l'homme de caractère agit pour faire son devoir.

« L'homme de caractère ne doit jamais compter sur les autres, il ne doit compter que sur lui-même. Dieu lui a donné, dans les ressources de son intelligence et de sa volonté, tout ce qu'il lui faut pour se frayer tout seul son chemin dans la vie et vaincre tous les obstacles. Aussi, pendant que l'homme sans ressort, sans caractère, végète dans le même coin, dans la même situation inférieure, l'homme d'énergique volonté a droit d'aspirer à tous les succès, et il y arrive fatalement avec le temps.

« Honte à l'enfant qui attend qu'on le serve, et qui, jusqu'à un âge avancé, se résigne, par apathie, à voir ses parents remplir souvent à son égard des fonctions de domestiques. Dès le plus jeune âge, il faut apprendre à se servir soi-même, afin de savoir ne compter que sur soi-même à l'âge de la virilité et de l'action.

« Assez de chrétiens hésitants et timorés qui ne savent pas se faire leur place dans la vie, et restent toujours à l'état de bons enfants qui ne jouent aucun rôle et qui ne comptent pour personne. Il faut que les enfants chrétiens fassent honneur à leur foi, qu'ils aient de l'initiative, qu'ils sachent jouer des coudes, pour employer un mot vulgaire, et conquérir partout la premier rang.

« Il est vrai de dire que pour arriver aux résultats que nous avons en vue, il faudrait modifier légèrement notre discipline scolaire.

« On estime un maître, en France, lorsqu'il donne un enseignement clair et qu'il sait, à ce point, imposer la régularité et l'ordre à sa classe que, par crainte de répression, les élèves sont attentifs et appliqués.

« J'estime la fermeté dans un maître comme la première des qualités ; mais néanmoins je vous déclare, et c'est l'avis d'un grand nombre, que la discipline de la crainte est détestable : elle détruit la volonté chez les élèves, parce qu'elle empêche toute initiative, toute spontanéité, alors qu'il faut, au contraire, encourager, solliciter l'initiative individuelle, la spontanéité, parce que ce sont les premiers indices de la volonté.

« La discipline de la crainte fait les élèves hypocrites, les routiniers, les gens à caractère effacé ; en un mot, c'est elle qui nous a donné cette génération anémiée de bureaucrates et de contribuables dociles, disposés à se laisser gruger et persécuter.

« Ce n'est pas à dire qu'il faille montrer une bonté voisine de la faiblesse. S'il faut éviter, à tout prix, la crainte servile, il faut, à tout prix aussi, montrer une fermeté calme et raisonnée, surtout pour diriger les enfants remuants qu'une volonté naturellement plus énergique rend particulièrement difficiles à leurs débuts.

« La vérité est qu'il faut faire régner dans l'école l'esprit de famille. Le maître doit être naturellement comme le second père des enfants, et, comme tel, avoir leur confiance et s'intéresser à tous les détails intimes de leur vie d'enfants. C'est par cette ouverture franche et libre de leur âme, comme elle a lieu facilement à cet âge, qu'il jaugera la force de leur volonté, qu'il appréciera les obstacles que le tempérament de l'enfant, ses défauts naturels, les circonstances d'un milieu spécial lui donneront à surmonter.

« Connaissant, d'une part, la dose de volonté du sujet, d'autre part, les différentes circonstances ou les différents défauts sur lesquels sa volonté est appelée à s'exercer, il choisira la difficulté ou le défaut sur lequel l'enfant a le plus de chance de se vaincre ; il le prendra à part et lui dira : « Mon enfant, vous voulez devenir un homme de caractère, un homme de devoir; vous ne savez comment vous y prendre, parce que vous vous trouvez trop de défauts. Eh bien ! commençons par le commencement, comme lorsque vous apprenez b a ba. Promettez-moi, aujourd'hui, de faire tel effort pendant un jour, pendant une semaine. Laissez tout le reste de côté, n'y pensez pas, cela viendra plus tard. Commençons seulement par ce petit effort-là. Je vous demanderai bientôt si vous m'avez tenu parole. Si vous y avez manqué, nous recommencerons; ce sera une preuve que vous en aviez besoin. »

« Et, je vous le promets, neuf fois sur dix, l'enfant tiendra parole, il goûtera la satisfaction du devoir accompli, il s'estimera lui-même; peu à peu, vous demanderez un effort plus considérable, et comme les entraîneurs, vous serez étonnés, au bout de quelques années, des transformations morales accomplies chez votre élève. Et je vous parle là d'une chose. possible, puisque je l'ai vu pratiquer, et que j'ai obtenu ainsi souvent un mois de fidélité à la parole donnée, chez des sujets réputés incorrigiblement mauvais par leurs parents et leurs instituteurs.

« Inutile de faire ressortir combien ce travail de la volonté relève, ennoblit cette tâche pénible et ingrate de l'éducation, combien elle attache le maître à l'élève et l'élève au maître.

« Avec l'encombrement actuel des programmes, bien souvent vous vous êtes trouvés déclassés et vous vous êtes mésestimés, en pensant que vous étiez réduits, malgré vous, au rôle secondaire de maîtres de grammaire ou d'arithmétique. Ce n'est pas pour cela, certes, que vous vous êtes voués, sacrifiés à l'enseignement. Aux heures de découragement, le salut est là ; et c'est en travaillant avec amour la volonté, le cœur de vos élèves, que vous goûterez pleinement le bonheur et la vraie raison d'être de votre sublime vocation. » 

VOYAGE A ROME – AUDIENCE PONTIFICALE 

A l'occasion de l'introduction de la Cause du Vénérable Fondateur, il m'a paru, M. T. C. F., que j'avais le devoir d'aller déposer aux pieds de Sa Sainteté le Pape Léon XIII, l'hommage de la religieuse reconnaissance, du dévouement le plus absolu et de l'inviolable affection de tout l'Institut pour la personne sacrée du Vicaire de Jésus-Christ. C'était encore, dans ma pensée, donner satisfaction à un besoin intime et impérieux de notre cœur à tous.

Ce voyage à la ville éternelle, que j'ai fait en compagnie du cher Frère Norbert, Assistant, est une des consolations les plus réelles de ma vie. Je me suis senti tout rajeuni à la pensée d'aller contempler le Père commun de la grande famille chrétienne, de baiser ses pieds et ses mains, de participer à la magnanimité de son âme et à la fermeté inébranlable de sa foi.

Ai-je besoin de vous le dire, M. T. C. F., soit pendant le voyage qui nous a permis de voir bon nombre de nos Frères du Midi, soit au milieu des merveilles de la ville de Rome, nous n'avons eu d'autres préoccupations que celle d'être agréables à celui qui représente sur cette terre, la douceur et la force de Jésus-Christ, l'immortel Léon XIII.

Nous l'avons vu dans la majesté de sa vieillesse. Tel il se présentait à mes regards éblouis, en 1886, en 1890, en 1892, en 1893, année du Jubilé épiscopal de Sa Sainteté Léon XIII, tel il nous est apparu dans l'audience qui nous a été accordée. C'est toujours la même grandeur unie à la même simplicité. Lorsqu'on l'approche, on sent une vertu surnaturelle qui s'échappe de sa personne; quand on l'écoute, on est subjugué; quand on le contemple avec la majesté et la bonté de son regard, on se demande si la Providence n'opère pas en sa faveur un continuel miracle de rajeunissement. Lorsqu'on l'a vu et qu'on repasse dans son esprit les diverses phases d'une vie si éprouvée, on est tenté, paraphrasant les paroles du centenier, de s'écrier : Vraiment celui-là est le Vicaire du Fils de Dieu.

Je n'essaierai pas, M. T. C. F., de vous dire la tendresse de l'accueil qui nous a été fait : ce sont de ces choses dont on ne se souvient que pour s'humilier et remercier Dieu. Mais ce que je ne puis vous laisser ignorer, c'est l'affection de Léon XIII pour vous. Il nous a écoutés lui parlant de vos besoins, de vos épreuves et de votre dévouement ; il s'est réjoui et attendri quand nous luiavons fait connaître le nombre de nos écoles et de nos élèves, et la prospérité toujours croissante de nos œuvres. Il nous a bénits avec une effusion dont nous sommes encore tout émus.

Force et longanimité, simplicité et grandeur : voilà Léon XIII. C'est l'homme providentiellement réservé à notre époque si tourmentée. Il est l'ange des consolations et des espérances. Dans sa solitude du Vatican, devenue un jardin des Oliviers, il ne cesse de jeter vers le ciel une clameur puissante. Tout nous donne l'espoir qu'il sera entendu et qu'il en surgira le triomphe de l'Eglise.

Ce sont là les espérances que nous vous rapportons de Rome, avec les bénédictions du Pontife suprême, et celles que nous avons demandées au tombeau de saints Apôtres, où vous étiez tous présents à notre esprit : Frères et élèves, parents et bienfaiteurs.

Mais laissez-moi vous raconter avec quelques détails l'audience dont le Saint-Père a daigné nous accorder la faveur.

C'était le 26 novembre. Nous sommes au rendez-vous à midi. Quelques minutes après, le Maître des chambres nous fait signe d'avancer et il nous annonce en ces termes : Ce sont les Petits Frères de Marie. « Les Petits Frères de Marie, répète le Saint-Père. Avancez, avancez. » Nous faisons les génuflexions d'usage et nous baisons sa mule.

– Où est votre Maison-Mère?

– A Lyon, Très Saint Père.

– Bien, bien.

– Humblement prosterné, je suis heureux de déposer aux pieds de Votre Sainteté l'hommage de ma profonde vénération, et de vous dire, Très Saint Père, la joie qui inonde le cœur des Petits Frères de Marie, et le bonheur avec lequel ils ont appris que Votre Sainteté avait daigné signer le Décret de l'Introduction de la cause de notre bien-aimé Fondateur, le Vénérable Marcellin Champagnat.

– Ah ! oui, le Père Champagnat. Eh bien ! maintenant qu'il est Vénérable, il faut bien le prier et faire tout ce qui dépendra de vous pour que bientôt votre Vénérable Fondateur soit élevé aux honneurs des autels, et même, si le bon Dieu le veut, à la sanctification, à la canonisation.

L'année prochaine nous aurons la canonisation du Bienheureux Pierre Fourrier, un Français aussi, et celle également du Bienheureux Zacharie, barnabite. Il y a longtemps qu'ils attendent, puisqu'ils vivaient du temps de saint François de Sales et de saint Vincent de Paul. On attendait des miracles qui ne venaient pas, et c'est pour cela que leur cause, était arrêtée. Maintenant que deux miracles ont été constatés, la cause de ces deux Bienheureux suivra son cours.

– Combien y a-t-il de temps que votre Congrégation existe ?

– Très Saint Père, elle a commencé en 1817.

– Combien avez-vous, de maisons ? combien de Frères ?

– Très Saint Père, nous avons sept cents maisons, six mille Frères et novices répandus dans cent diocèses, en France en Espagne, en Angleterre, en Belgique, en Amérique (nord et sud, en Australie, en Océanie, en Afrique et jusqu'en Chine.

– Oh ! 700 maisons et 6.000 Frères tous animés d'un bon esprit ! Mais c'est prodigieux ! car vous n'êtes, on peut le dire, que d'hier. En avez-vous en Allemagne ?

– Très Saint Père, nous avons une maison en Danemark où nos Frères font beaucoup de bien.

– Et en Italie ?

– Très Saint Père, mus avons une maison à Rome, et une vingtaine de Frères italiens.

(S'adressant au C. F. Marie Urbain, directeur de notre maison de Rome, qui nous accompagnait) : – Etes-vous Italien, vous ?

-Très Saint Père, je suis d'origine française, mais naturalisé Italien.

– Bien, bien.

– Vos noviciats, sont-ils nombreux ?

– Très Saint Père, nous en avons treize, tant en France que dans les autres parties du monde.

– Je suis heureux d'avoir ces renseignements, et je me réjouis de voir que votre Congrégation, qui n'a que quelques années d'existence, est déjà répandue dans toutes les parties du monde. Je demande au Seigneur de conserver parmi vos Frères le bon esprit qui les anime, et de les multiplier encore davantage pour combattre le bon combat, et propager le règne de Jésus-Christ.

– Comme témoignage de notre filiale affection et de notre vive reconnaissance, je vous prie, Très Saint Père, de daigner agréer la modeste offrande que voici. C'est peu, bien peu en comparaison de ce que nous serions heureux de pouvoir offrir à Votre Sainteté ; mais les temps que nous traversons sont difficiles : les lois fiscales, le service militaire et autres entraves nous mettent dans toutes sortes d'embarras et dans un état continuel de lutte.

– J'accepte avec bonheur et reconnaissance l'offrande que vous voulez bien me faire, et je demande au bon Dieu que vous ne soyez pas entravés dans la belle mission que vous remplissez avec tant de zèle et d'abnégation. Croissez et multipliez-vous.

– J'ose maintenant vous supplier, Très Saint Père, de daigner me bénir moi-même, tous les Frères Assistants, tous les membres de la Congrégation des Petits Frères de Marie, les novices, les juvénistes, les cent mille enfants de nos écoles, nos bienfaiteurs, nos parents, bénir sur tout nos Frères soldats (au nombre de 220), qui courent de si grands dangers.

– Ah ! la loi militaire et celle de l'école neutre sont des lois funestes ; elles n'ont été faites que dans le but de détruire la religion…

Oui, oui, de tout cœur, je vous bénis, vous, Supérieur Général d'une si nombreuse Congrégation, tous vos Frères Assistants, tous les membres de votre Congrégation, tous vos novices, juvénistes, parents, bienfaiteurs, et surtout vos Frères soldats… »

Et le Saint-Père nous ayant présenté son anneau pastoral à baiser, nous répéta plusieurs fois : « Merci, croissez et multipliez. »

Telle est, M. T. C. F., la faveur inoubliable qui nous a été accordée le 26 novembre. Et, pour mettre le comble à notre bonheur, la Providence a voulu que nous ayons pu voir une seconde fois le Pape au Consistoire publie qui a eu lieu le 3 décembre, et auquel il nous a été permis d'assister. Dans ce Consistoire, le Saint-Père a remis le chapeau cardinalice aux nouveaux cardinaux, au nombre de sept. Plus de trois mille personnes, parmi lesquelles se trouvaient les ambassadeurs, la noblesse romaine, les pèlerins tyroliens, avec leurs pittoresques costumes, étaient présents à cette imposante cérémonie et ont acclamé, avec tous les assistants, le Souverain Pontife, à son entrée et à sa sortie, par les vivats les plus chaleureux et les plus enthousiastes.

Après avoir présenté au Pape l'hommage de notre profonde et filiale vénération, nous avions à Rome d'autres devoirs à remplir, à l'égard de son Eminence le cardinal Parrochi, le Protecteur de notre Congrégation. Il nous a accueillis avec sa bonté habituelle, nous a bénis et beaucoup encouragés, nous assurant que NN. SS. les Evêques sont satisfaits du bien que font nos Frères.

Son Eminence n'a aucune observation à nous faire et nous redit que nous sommes dans la bonne voie et que nous n'avons qu'à continuer. Quels précieux encouragementsdans ces paroles tombées des lèvres d'un Prince de l'Eglise, de notre Cardinal Protecteur !

Nous avons eu aussi à remercier Son Eminence le cardinal Masella, qui a pris tout particulièrement à cœur la cause de notre Vénérable Fondateur. Dans nos autres visites aux différents dignitaires de l'Eglise, nous avons reçu partout un accueil bien propre à ouvrir nos cœurs à la joie et à la reconnaissance. Il serait bien long, M. T. C. F., d'entrer dans les détails, qu'il vous suffise de savoir que notre Congrégation a la sympathie de nos protecteurs à Rome. Tout cela est bien capable d'exciter notre zèle pour la gloire de Dieu, de nous attacher de plus en plus à l'infaillible Pontife qui gouverne l'Eglise. 

VISITES ÉPISCOPALES A LA MAISON-MÈRE 

I

 MGR C0ULLIE,  ARCHEVÊQUE DE LYON. 

                     Bénédiction de la chapelle du Pensionnat Saint-Joseph. 

Le 26 juin 1896 a été pour notre Pensionnat Saint-Joseph et pour notre Maison-Mère, un jour de fête dont le souvenir est à conserver dans les annales de notre Institut.

Depuis longtemps, les Frères et les élèves du Pensionnat Saint-Joseph appelaient de tous leurs vœux l'érection d'une chapelle plus spacieuse et plus convenable que celle qui leur servait provisoirement. Ce désir s'est enfin réalisé et, le 26 juin, Sa Grandeur Mgr l'Archevêque de Lyon, se rendant gracieusement à notre invitation, vint bénir et consacrer au culte la nouvelle chapelle, destinée à être la demeure du Dieu qui a dit : « Mes délices sont d'être avec les enfants des hommes. »

La bénédiction fut suivie de la célébration du saint Sacrifice et de la Confirmation donnée à environ soixante élèves du pensionnat et à une quarantaine de juvénistes.

La cérémonie terminée, Sa Grandeur fut reçue dans grande salle où étaient réunis les élèves et leurs parents. Après l'exécution d'un chant de circonstance en son honneur, un élève lui adressa avec beaucoup d'aisance et de grâce un compliment où, après avoir dit le bonheur et la joie de ses condisciples, et offert au vénéré Prélat leurs respectueux hommages, il exprima cette pensée que ses augustes mains avaient ce jour-là consacré deux sortes de temples : les âmes devenues par la Confirmation les temples vivants de l'Esprit-Saint, et le temple matériel où venait d'être offert le divin Sacrifice.

Monseigneur répondit à ce compliment en quelques mots très affectueux, félicitant les élèves du précieux avantage qu'ils avaient d'appartenir à des parents chrétiens, de l'éducation religieuse qu'ils recevaient, et les exhortant à en profiter, à se conduire en bons écoliers, et à conserver la pureté de leur cœur devenu le tabernacle du Dieu de l'Eucharistie et le temple de l'Esprit-Saint.

A la suite du dîner à la Maison-Mère, Sa Grandeur se rendit à la salle où la Communauté réunie l'attendait. Les juvénistes exécutèrent un chant de circonstance suivi d'un compliment de bienvenue.

Dans sa réponse, Monseigneur exprima sa satisfaction de se trouver au milieu de la Communauté des Petits Frères de Marie de Saint-Genis-Laval; il dit combien il était touché de l'accueil et de la démonstration toute filiale dont il était l'objet. Il ajouta qu'il était heureux de compter les Petits Frères de Marie si nombreux dans son diocèse, et de recevoir partout de bons témoignages du concours dévoué qu'ils donnent à son clergé. Monseigneur recommanda à leur zèle les patronages et les autres œuvres instituées pour la persévérance de la jeunesse dans le bien ; il conseilla beaucoup la communion fréquente comme un puissant moyen d'assurer le succès dans l’œuvre de l'éducation, et comme répondant au désir et à la doctrine de Notre-Seigneur, « le premier et le plus grand des théologiens ».

Sa Grandeur nous quitta en nous laissant sous le charme de sa douceur, de son aménité, de sa bonté toute paternelle. 

Il

 MGR UDRIZIER, ÉVÊQUE DES SEYCHELLES. 

Par sa visite du 14 juin, le bon et vénéré Evêque des Seychelles, Mgr Udrizier, un véritable ami des Petits Frères de Marie, apportait, avec ses bénédictions, la joie au sein de notre Communauté de Saint-Genis-Laval, C'était le dimanche après l'octave de la Fête-Dieu, jour de la seconde procession du Saint Sacrement. Sa Grandeur, après avoir chanté la grand'messe et fait retentir sa puissante voix sous les voûtes de notre chapelle, a bien voulu rehausser la solennité de notre procession en y portant le Saint Sacrement. Après midi, les fidèles de la paroisse se félicitaient, à leur tour, de voir leur procession présidée par le pieux Evêque. 

MGR LASSERRE, ÉVÊQUE D'ADEN. 

Le 20 septembre, notre Communauté de la Maison-Mère était toute à la joie de recevoir la visite de Mgr Lasserre, évêque d'Aden, où nos Frères ont reçu tant de marques de sa bienveillance et de sa bonté. Sa Grandeur voulut bien, à la messe de 5 h. ½, distribuer de sa main la sainte communion à toute la Communauté. Après dîner, elle reçut les hommages de la Communauté réunie dans la salle ordinaire.

En réponse au compliment de bienvenue qui lui avait été adressé, Monseigneur nous dit combien il était touché de l'accueil qu'il recevait, et nous entretint familièrement des pays qu'il avait évangélisés, notamment de l'Abyssinie, où il avait connu Ménélik, devenu célèbre par ses récentes victoires. Entre autres anecdotes concernant ce souverain, il nous dit qu'un juif désirant embrasser le christianisme, et ne sachant quel parti prendre entre la religion catholique romaine et la religion schismatique pratiquée dans les Etats de Ménélik, consulta un ministre de cette dernière religion, attaché à l'entourage du Négus, et en reçut cette réponse : « Si vous recherchez les faveurs du prince, et les avantages terrestres, embrassez ma religion ; mais si c'est le ciel que vous avez en vue, adressez-vous à un prêtre catholique. » 

IV

 MGR GRAVEL, ÉVÊQUE DE NICOLET (CANADA). 

Le dimanche 29 septembre, Mgr Gravel, un des quatre évêques députés par le clergé canadien pour le représenter aux fêtes de Reims, a bien voulu profiter de cette occasion pour venir donner aux Frères de la maison de Saint-Genis, un témoignage de sa bienveillante sympathie.

Non seulement la Communauté a reçu avec bonheur et reconnaissance le Prélat qui est un ami dévoué de l'Institut, mais encore elle a recueilli de sa précieuse visite de bonnes et encourageantes paroles, prononcées à la chapelle par Sa Grandeur, paroles qui étaient le développement de ce texte de nos saints Evangiles : « Ne craignez pas, petit troupeau ; car il a plu à votre Père céleste de vous donner son royaume ». (S. Lue, XII, 32.) 

VISITE DE MGR BROYER, VICAIRE APOSTOLIQUE

DES NAVIGATEURS A N. D. DE L'HERMITAGE. 

Mgr Broyer, dont la consécration épiscopale a eu lieu dans la basilique de Notre-Dame de Fourvière, le dimanche 25 octobre, a honoré de sa visite la maison provinciale de Notre-Dame de l'Hermitage, à la date du 9 novembre.

Sa Grandeur était accompagnée du R. P. Mondon, son maître des cérémonies, et du R. P. Gay, ancien supérieur du collège de Saint-Chamond. A son entrée dans la chapelle, un chœur entonna le Benedictus qui venit in nomine Domini. Toute la Communauté se réunit en suite dans la salle des exercices où, après un chant de bienvenue, un Frère salua en la personne de Monseigneur l'intrépide zouave de Charette, le saint religieux mariste, le frère en religion du Vénérable Fondateur de l'Institut, le vaillant missionnaire d'Océanie, enfin le premier vicaire apostolique des Navigateurs.

Mgr Broyer s'empara tout de suite de son auditoire dans une charmante causerie, au cours de laquelle il rappela le souvenir du Vénérable Champagnat et des Petits Frères de Marie qui dirigent à Apia une école qui compte plus de quatre-vingts élèves, parmi lesquels se trouvent quatre juvénistes indigènes, pieux et intelligents.

Longtemps les Frères de l'Hermitage garderont le souvenir de la modestie, de la bonté, de l'aimable simplicité de Mgr Broyer. 

NOMINATIONS DANS LES MISSIONS. 

Ont été nommés VISITEURS :

1° Le C. F. ACYNDINUS, pour les Etablissements du District de Constantinople.

2° Le C. F. JULES-ANDRÉ, en remplacement du C. F. Elie-François, décédé, pour les Etablissements du District de Pékin. 

ORIENT. 

                                                     1° Retraites. 

Le C. F. Adon, Assistant, s'est embarqué à Marseille, sur le Congo, le 2 juillet dernier, avec les CC. FF. Léon-Pétrus, Joseph-Paulin et Louis-Delphin. Il est allé visiter nos Frères d'Orient et présider leurs retraites.

Celle de Samsoun s'est ouverte le 15 juillet et a été prêchée par le R. P. Polycarpe.

Celle de Constantinople, qui réunissait les Frères du collège Saint-Benoît, Scutari, de Makri-Keuï et de Bébeck, a commencé le 30 juillet et a eu pour prédicateur M. Cazot, directeur du collège Saint-Benoît.

Les chers Frères retraitants ont suivi le règlement ordinaire de nos retraites et ont apporté à ces saints exercices une grande bonne volonté et une ferveur soutenue, malgré une chaleur excessive qui, à Constantinople,atteignait 38° centigrades.

A la suite de la retraite qui a eu lieu au collège Saint-Benoît, le C. F. Joseph-Martial a prononcé les trois vœux perpétuels de religion, et les CC. FF. Léon-Pétrus, Louis-Delphin et Pierre-Louis ont émis le vœu d'obéissance.

La prospérité de nos écoles d'Orient, comme de celles de Chine, est' pour nous un motif de remercier Dieu des bénédictions qu'il répand sur ces missions. 

                                2° Œuvre de la Sainte-Enfance. 

Je crois devoir communiquer la lettre suivante du Directeur général de I'Œuvre de la Sainte-Enfance

« Mon Très Honoré Frère,

« Permettez-moi, au début de cette année scolaire, de venir, au nom du Conseil central de la Sainte Enfance, vous recommander d'une manière toute spéciale cette Œuvre dont les recettes semblent rester stationnaires, alors que le nombre et le besoin des Missions que nous avons à secourir augmentent sans cesse.

« La plaie de l'infanticide continue à désoler aujourd'hui la Chine, et elle sévit en Afrique aussi bien que l'esclavagisme; les lettres des missionnaires en font foi, et les archives d'anthropologie criminelle, que l'on ne saurait taxer d'une sympathie exagérée pour les œuvres de propagande catholique, publiaient, il y a quelques semaines, un rapport du Dr Matignon, attaché à la légation de France en Chine, qui affirme que l'infanticide est passé dans les mœurs.

 « De plus, des terres jusqu'ici fermées à la Prédication de l'Evangile s'ouvrent chaque jour, à l’action de nos missionnaires, dont le premier soin, en y arrivant, est de recueillir et d'élever les enfants.

« Vous penserez avec moi qu'en présence de tant et de si grands besoins, qui sont, pour ainsi dire tout particulièrement à la charge de notre Œuvre, c'est surtout la jeunesse chrétienne que nous devons appeler à notre secours ; puisqu'en l'invitant à rester ou à entrer dans une association qui est pour elle une école de piété et de charité, nous ne faisons que nous conformer à l'intention même de l'Eglise, qui a donné à la Sainte-Enfance l'institution canonique, précisément pour qu'il existât à côté des autres œuvres qui s'adressent plus spécialement à la charité des adultes, une œuvre dont l'objet et les moyens d'action fussent complètement à la portée des enfants.

« D'ailleurs cette Œuvre, aussi utile à la jeunesse chrétienne que nécessaire aux petits infidèles, est facile à établir, car elle plait aux enfants et les intéresse. Ainsi que vous le verrez dans le manuel dont je vous fais, aujourd'hui même, envoyer un exemplaire, le Conseil central met à la disposition des directeurs locaux et en particulier des personnes chargées de notre association dans les collèges et pensionnats catholiques, pour leurs jeunes associés, des Annales qui sont comme une correspondance établie entre l'enfance chrétienne et l'enfance infidèle, et des objets de propagande, médailles et images, que les enfants sont si heureux de recevoir.

« Soyez persuadé, Mon Très Honoré Frère, que j'accueillerai avec le plus grand empressement les demandes qu'il vous plaira de m'adresser concernant ces divers objets de propagande, dont la distribution ne peut que profiter en définitive à notre Œuvre et à ses petits protégés, les enfants des pays infidèles à la malheureuse situation desquels nous croyons de notre devoir de vous prier d'intéresser de plus en plus vos jeunes élèves.

« Comme j'avais l'honneur de vous le dire en commençant, le niveau de nos recettes annuelles semble, depuis quelque temps, frappé d'immobilité et tendrait plutôt à baisser, tandis que les demandes de secours qui nous viennent des pays infidèles ne cessent de se multiplier chaque année, si bien que l'équilibre menace de plus en plus de se rompre entre les besoins des Missions et les ressources que nous pouvons leur procurer. Le Conseil central n'a donc pas pensé pouvoir attendre plus longtemps pour adresser ce nouvel et très pressant appel à la jeunesse chrétienne, par l'intermédiaire de ses maîtres et maîtresses si dévoués, afin de provoquer dans ses rangs un redoublement de générosité en faveur de notre œuvre, qui est aussi la sienne.

Veuillez agréer, mon Très Honoré Frère, l'hommage de mes sentiments respectueux.

                                                           Le Directeur général,

                  M…. 

FONDATIONS EN 1896. 

L'Institut a pu fonder, dans l'année, les Etablissements suivants :

En France : La Pacaudière (Loire), Saint-Maurice-sur-Dargoire (Rhône), Le Russey (Doubs), Delle (territoire de Belfort), Notre-Dame du Laus (Hautes-Alpes), Menton (Alpes-Maritimes), Buxy (Saône-et-Loire), Clignancourt, à Paris, Allassac (Corrèze), Martel (Lot), Saïda (Algérie).

A l'étranger : Igualada (Espagne), Bébeck (Turquie), Westmead (Parramatta, Australie), orphelinat. 

ÉTABLISSEMENTS SUPPRIMÉS EN 1896. 

Ecouis (Eure), Lisbonne (Portugal), Loix (Ile de Ré). 

ENSEIGNEMENT AGRICOLE. 

Je vous ai déjà exprimé, M. T. C. F., le désir de voir introduire des notions d'agriculture dans les programmes d'enseignement de nos écoles. J'ai vu avec satisfaction qu'on y a répondu dans un certain nombre d'Établissements, et que l'on a obtenu déjà des résultats et des encouragements dont on a lieu de se féliciter; mais ce n'est pas assez : il faut que les essais et les efforts tentés jusqu'ici s'étendent et se généralisent. Il importe d'enrayer la désertion des campagnes, de retenir au sol natal les enfants qui fréquentent nos classes, et de les préserver des dangers et des maux dont ils seraient, la plupart, les tristes victimes dans les grandes villes et les -usines. Un de ces moyens, c'est de leur inspirer le goût et l'amour de l'agriculture, de leur en faire connaître les avantages et les bienfaits, en donnant à notre enseignement une couleur agricole. Il me semble que nous ferions en cela quelque chose d'agréable à Dieu, et de véritablement utile à la patrie.

C'est pourquoi, Mes Très Chers Frères, je me sens vivement porté à faire un nouvel appel à la bonne volonté de tous et à vous communiquer la lettre que je viens de recevoir du président de l'Union du Sud-Est des Syndicats agricoles.

Lyon, le 29 décembre 1893.

« Monsieur le Supérieur,

« Je me permets d'appeler toute votre sollicitude sur les avantages considérables qui pourraient résulter de l'introduction dans vos programmes d'enseignement d'un cours élémentaire d'agriculture pratique. Il ne vous échappera pas que si la majorité de vos écoles sont au milieu de populations rurales, il y a toutes raisons de donner aux enfants qui les fréquentent, une éducation propre à leur faire connaître et aimer la profession de leurs parents.

« En est-il ainsi actuellement ? Je le sais, les programmes à l'usage des écoles primaires font bien mention de semblables cours ; mais, en pratique, rien ou presque rien n'est enseigné, aussi bien dans les écoles du gouvernement que dans les écoles libres. Ceci est profondément regrettable et je crois très absolument que la faveur dont l'enseignement libre jouit près de nos populations serait considérablement augmentée si, rompant avec le passé, on se décidait à y donner sa véritable place à l'instruction agricole.

« Assurément, je ne demande pas que l'on transforme nos écoles primaires en écoles d'agriculture mais il me semble qu'il serait possible de consacrer deux heures par semaine à l'étude des éléments de l'agriculture, ce qui servirait en même temps à l'instruction générale des enfants. Le tout se pourrait aisément compléter par des visites ou promenades instructives dont les éléments ne manqueraient pas dans nos campagnes.

« Les parents seraient heureux de voir leurs fils s'instruire de leur profession; ils en tireraient souvent profit et qui sait même si, avec l'aide de Dieu, le bien matériel n'aiderait pas au bien moral? Mais est-il besoin de vous dire toutes ces choses que votre zèle pour le bien vous fait sûrement comprendre ? Mon but est différent, je veux simplement vous engager à ne pas trop tarder à vous engager dans cette voie et vous assurer, dans le cas où vous décideriez d'y marcher, du concours de nos associations professionnelles, les Syndicats agricoles.

« Volontiers, si la chose peut vous aider, nous vous fournirons, le moment venu, des examinateurs capables d'accorder des diplômes de capacité dont la valeur ne tarderait pas à s'affirmer. Des médailles pourraient être distribuées aux lauréats de concours entre les écoles et même aux Directeurs d'écoles ayant montré le plus de zèle dans cette nouvelle branche de l'enseignement.

« Ce que nous vous demandons, Monsieur le Supérieur, a été réalisé autre part : vous savez certainement les excellents résultats obtenus par les Frères de Ploërmel. Je ne sache pas que votre puissant Institut soit moins bien organisé, et du reste, déjà tout près de nous, dans l'Ardèche, une tentative a été faite dans ce sens ; mais il faudrait mieux, il faudrait un mot d'ordre parti de la Maison-Mère, encourageant, invitant même tous les Directeurs de vos écoles à instituer partout où la chose sera possible, un cours élémentaire d'agriculture pratique ; et, de notre côté, partout où il y a l'un de nos 127 Syndicats de l'Union du Sud-Est, nous ferons notre possible pour les aider, et là où il n'y en a pas, la Providence en peut faire naître ; mais, en attendant, nous ferons de notre mieux pour favoriser leurs efforts, car nous estimons qu'il en doit résulter un grand bien pour notre cher pays.

« Veuillez agréer, Monsieur le Supérieur, l'assurance de ma considération la plus distinguée.

                                                                     Le Président,

                                                                  Emile DUPORT. » 

NOTA. – Nos chers Frères Provinciaux et Visiteurs sont priés de mentionner dans leurs rapports ce qui aura été fait relativement à l'objet de cette lettre.

On trouvera dans les Procures un Manuel agricole qui paraît répondre au but proposé. 

DÉPARTS DES FRÈRES MISSIONNAIRES EN 1896. 

Le 8 février, de Southampton pour l'Afrique du Sud, accompagnés du F. Nectaire, qui retourne à la Mission après une année de, repos en France :

F. Guinier, F. Marie-Théodorit, F. Marie-Gélase, F. Blidan, F. Attalas, F. Vidal-Joseph.

Le 22 février, du Havre pour New York : F. Charles-Marie, F. Marie-Gualbert.

Le 29 février, de Sydney pour Mahé, Seychelles F. Hugli.

Le 22 avril, de Sydney pour Aden : F. Joseph-Abdias.

Le 26 avril, de Marseille pour Nouméa F. Louis-Josué, F. François-André.

Le 13 juin, du Havre pour New York F. Marie-Félicien, F. Léon-Xavier.

Le 2 juillet, de Marseille pour Constantinople : F. Joseph-Paulin, F. Léon-Pétrus, F. Louis-Delphin.

Le 10 septembre, de Marseille pour Constantinople F. Alphontius, F. Alfrideus, F. Flavien-Etienne.

Le 10 septembre, de Marseille pour Beyrouth, Syrie F. François-Joseph, F. Marie-Anastase, F. Avit, F. Joseph-Damase, F. Jean-Licinius.

Le 13 septembre, de Marseille pour Shanghai, Chine: F. Joseph-Julien, F. Eustate.

Le 23 octobre, de Londres pour Uitenhage : accompagné du F. Paul-de-la-Croix, venu de Sydney en février 1893: F. Maurillus, F. Luidprand, F. Ludwig, F. Henry-James, F. Ange-Aloïs, F. Adelarius.

Nous voyons avec bonheur se multiplier, parmi les Frères, les preuves d'un généreux élan vers l’œuvre si apostolique et si recommandable des Missions ; et nous invitons ceux qui s'y sentent appelés à nous adresser par écrit leur demande motivée. 

RECOMMANDATIONS IMPORTANTES 

I. – J'appelle la plus sérieuse attention sur l'avis contenu dans la circulaire du 18 janvier 1884 concernant la vente du biphosphate de chaux et de l'eau d'arquebuse. Pour ne s'y être pas conformé, un Frère Directeur s'est vu tout dernièrement dresser un procès-verbal qui lui vaudra une amende de 500 francs, plus les frais. 

II. -Tous les Frères sont instamment invités à propager les ouvrages suivants :

1° Vie du Vénérable P. Champagnat, en plusieurs éditions ;

2° Les Panégyriques et le Portrait du Vénérable

Marie enseignée à la jeunesse, ouvrage dont un éminent religieux a dit que « c'est toute une somme théologique et patrologique sur Notre-Dame ». 

III. – Je rappelle que la Maison Royer et Cie, n'est nullement fondée à se prévaloir d'aucune autorisation de notre part pour traiter avec nos Frères.

 

Nos DÉFUNTS.

 F. MARIE-BONAVENTURE, Obéissant, décédé à N.-D. de l'Hermitage (Loire), le 16 juin 1896.

F. JÉRÉMIE, Profès, décédé, à Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme), le 27 juin 1896.

F. VANDELIN, Novice, décédé à Beaucamps (Nord), le 8 juillet 1896.

F. IMITHÉRIUS, Obéissant, décédé à La Voulte (Ardèche), le 16 juillet 1896.

F. PIERRE-FERNAND, Obéissant, décédé à Saint-Genis-Laval (Rhône), le 29 juillet 1896.

F. CHRYSOGONE, Obéissant, décédé à Saint-Genis-Laval (Rhône), le29 juillet 1896.

F. EUDORE-JOSEPH, Obéissant, décédé à Notre-Dame de l'Hermitage (Loire), le I- août 1896.

F. GUILLERMO, Novice, décédé à Serina (Espagne), le 1ieraoût 1896.

F. APOLINAR, Obéissant, décédé à Canet de Mar (Espagne), le 7 août 1896.

LOPEZ Thomas, Juvéniste, décédé à Orbanejo (Espagne), le 12 août 1896.

   MINAIRE Jean-Marie, Juvéniste, décédé à Jonzieux (Loire), le 14 août 1896.

   DANIEL Fernandez, Postulant, décédé à Canet de Mar (Espagne), le 15 août 1876.

  DE LA FUENTE Hippolyte, Juvéniste, décédé à Burgos (Espagne), le 23 août 1896.

F. CLÉONICE, Profès, décédé à Royan-les-Bains (Charente-­Inférieure), le 27 août 1896.

F. JULES-RAPHAEL, Obéissant, décédé à Pékin Nant'ang (Chine), le 2 septembre 1896.

F. ANGÉLO, Profès, décédé à Vich (Espagne), le 7 septembre 1896.

F. TOMMASI, Obéissant, décédé à Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme), le 13 septembre 1896.

F. GERMAN, Profès, décédé à Lyon (Rhône), le 25 septembre 1896.

F. MARIE-FLORIEN, Novice, décédé à Saint-Athanase d'Iberville (Canada), le 28 septembre 1896.

F. LIVINUS, Stable, décédé à Beaucamps (Nord), le 6 octobre 1896.

F. ELADIUS, Profès, décédé à Beaucamps (Nord), le 18 octobre 1896.

F. AMÉTUIS, Profès, décédé à La Blachère (Ardèche), le 19 octobre 1896.

F. LUCHESIUS, Profès, décédé à Robiac (Gard), le 27 octobre 1896.

F. SOPHONIE, Profès, décédé à Boën (Loire), le 28 octobre, 1896.

F. RUFIN, Stable, décédé à Saint-Genis-Laval (Rhône), le 30 octobre 1896.

    ACHIN Joseph, Juvéniste, décédé à Serres (Hautes-Alpes), le 30 octobre 1896).

F. FRANÇOIS DE BORGIA, Obéissant, décédé à N.-D. de l'Hermitage (Loire), le 31 octobre 1896.

   BÉRAUD François, Juvéniste, décédé à Saint-Jean-le-Puy (Loire), le 10 novembre 1896.

F. HENRI-DOROTHÉE, Obéissant, décédé à Aubenas (Ardèche), le 19 novembre 1896.

F. AZARIAS, Stable, décédé à Manduel (Gard), le 27 novembre 1896.

F. ALPHONSE, Obéissant, décédé à Saint-Genis-Laval, (Rhône), le 2 décembre 1896.

F. VIATOR, Profès, décédé à Charolles (Saône-et-Loire), le 4 décembre 1896.

F. FIDENCE, Profès, décédé à Notre-Dame de l'Hermitage (Loire), le 8 décembre 1896).

 F. SILAIN, Profès, décédé à Lacabane (Corrèze), le 9 décembre 1896.

F. EUPHRASIUS, Obéissant, décédé à Saint-Maurice-de-Roche (Hte-Loire), le 10 décembre 1896.

   DURMELAT Joachim, Juvéniste, décédé à Lyon (Rhône), le 12 décembre 1896.

F. BASILIDE, Profès, décédé à Notre-Dame de l'Hermitage (Loire), le 16 décembre 1896.

F. POLYEUCTE, Stable, décédé à La Machine (Nièvre); le 18 décembre 18.96.

F. LEON-CASIMIR, Obéissant, décédé à N.-D. de l'Hermitage (Loire), le 18 décembre 1896.

F. AMYGDIUS, Profès, décédé à Paris, Plaisance, rue Pernéty, le 22 décembre 1896.

F. MARIE-JUBIN, Stable, décédé à Charly (Rhône), le 1ier janvier 1897.

 

Cette longue liste nous dit assez, M. T. C. F., dans quelle mesure la mort a fait son œuvre parmi nous, pendant la dernière moitié de l'année écoulée. Mais ne nous contentons pas d'un aperçu rapide sur ce nécrologe; pensons à cette sentence inscrite sur la porte de nos cimetières : Aujourd'hui à nous, demain à vous, et tenons-nous toujours prêts. Souvenons-nous de nos chers défunts pour nous acquitter envers eux des prières et des messes prescrites par la Règle, et de tout ce que la charité nous impose le devoir de faire pour leur soulagement et leur délivrance.

La bonne confraternité religieuse qui existe entre notre Institut et la Congrégation de la Sainte-Famille de Belley, me porte à recommander à vos pieux suffrages le TRÈS REVEREND FRÈRE AMÉDÉE, Supérieur général de cette Congrégation, décédé le 30 novembre dernier, à l'âge de 75 ans, après trente et un ans de Généralat.

Il avait succédé au Fondateur, le F. Gabriel, en 1865. Sa douceur, sa bonté, sa régularité, son jugement sûr, son esprit droit et ferme, en faisaient un supérieur général éminent. Sans rien changer d'essentiel à l’œuvre du Fondateur, le F. Amédée sut la compléter, l'étendre et en perfectionner toutes les parties. Pendant que d'une main il étendait sa Congrégation, l'implantait à Tours, à Sens, à Montmartre, à Notre-Dame-des-Victoires, et dans plusieurs paroisses du massif de la Grande Chartreuse, de l'autre, il révisait les Constitutions et les Règles. Il aborda même, vers la fin de sa carrière, le noble et patriotique apostolat des missions lointaines.

Il consacra ses dernières années à composer un «Mois » en l'honneur de la Sainte Famille, dont le patronage et le nom couvraient son Institut. Dieu le laissa achever son œuvre, et quand il eut livré à l'imprimeur les derniers feuillets, il glaça la main qui venait d'écrire ces Méditations si pieuses et si riches de doctrine.

Au moment où s'achève l'impression de cette circulaire, j'apprends que le T. H. F. JOSEPH, Supérieur général de l'Institut des Frères des Écoles chrétiennes, est pieusement décédé le 1ier janvier, à Arcachon, où il s'était rendu pour essayer de rétablir sa santé.

Le F. Joseph (Joseph-Marie Josserand), né à Saint-Etienne, le 30 mars 1823, était entré à l'âge de 13 ans au petit noviciat, à Paris. Il débuta dans l'enseignement à Paris même, où devait s'écouler toute sa carrière, et où il s'acquit une réputation remarquable comme éducateur et homme d’œuvres. La haute estime dont il jouissait lui valut d'être appelé, en 1881, par le Gouvernement, à siéger dans le Conseil supérieur de l'Instruction publique.

Assistant du Supérieur général à partir de 1874, il fut élu, en 1884, Supérieur général de son Institut en remplacement du F. Irlide.

Grandes furent les vertus de toute sa vie, la sûreté de son jugement, l'élévation de son esprit, la bonté de son cœur et les éminentes qualités qu'il montra dans son gouvernement. Je me plais à mentionner ici combien il s'est toujours distingué par sa bienveillance et sa cordialité dans tous les rapports que nous avons eus avec lui. On aime à se rappeler à la Maison-Mère la visite qu'il y fit après son élection au Généralat, visite toute empreinte de fraternelle expansion, qui a laissé dans les cœurs les plus douces impressions. Nous joindrons nos regrets à ceux de tous les Frères de son Institut et nous prierons pour le repos de son âme.

Heureux tous ceux qui, à l'exemple du T. R. F. Amédée et du T. H. F. Joseph, ne craignent pas de s'immoler pour Dieu et meurent de la mort des justes !

La présente circulaire sera lue en communauté, aussitôt après sa réception, à l'heure ordinaire de la lecture spirituelle, et une seconde fois au réfectoire, dans les Maisons de noviciat.

Recevez la nouvelle assurance du tendre et religieux attachement avec lequel je suis, en Jésus, Marie, Joseph,

Mes Très Chers Frères,

Votre très humble et très dévoué serviteur.

     F. Théophane.

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[1]L'acte pour la communion spirituelle est compris dans les prières qui doivent terminer la classe du matin (Guide des écoles p. 142).

[2]Pour les enfants de nos écoles, il y a les œuvres de la Propagation de la Foi, de la Sainte-Enfance, et autres auxquelles on peut les faire participer.

[3]Les instructions de notre Vénérable Fondateur et nos Règles font aux Frères un devoir de propager cette dévotion. C'est pour leur faciliter cette tâche qu'a été composé le livre, Marie enseignée à la jeunesse, grandement apprécié par les ecclésiastiques qui le connaissent.

[4]Ce souvenir et cet aveu sont une preuve de l'importance que nos Frères doivent attacher aux Réflexions qui doivent suivre la prière du matin (Guide des Ecoles, p. 142).

 

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