Circulaires 191

Théophane

1898-05-24

Circulaire du 24 mai 1898 : Fixation des Retraites. - Cause du Vénérable Champa­gnat, lettre de Mgr Moreau, nouveaux  panégyriques. -  Un sermon de charité. - Indulgence sabbatine. - Clôture des Exercices du noviciat de 6 mois. -  Nou­velles des Etablissements et des Missions : Castelnau­dary,Vich, Douvaine, Burgos, Makrikeui, Stoke, Pékin, Quibdo, Apia. - Les Œuvres de jeunesse. - Visites de Supérieurs généraux à la Maison-Mère. - Nominations. Avis. - Décès.

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51.04.01.1898.2

 V. J. M. J.

Saint-Genis-Laval, le 24 mai 1898, tête de Notre-Dame Auxiliatrice.

    Mes Très Chers Frères,

Chaque année le bon Dieu puise dans les trésors de sa miséricorde, et met à la disposition de chacun de nous l'insigne bienfait de la retraite. Pensons dès à présent à en profiter avec la reconnaissance que demande une telle grâce, avec la crainte d'en abuser, avec la confiance que doivent nous inspirer la bonté divine, les mérites infinis de Jésus-Christ et la maternelle assistance de Marie.

Voici dans quel ordre se feront nos retraites de cette année

1° Saint-Genis-Laval, du 22 au 29 juin, pour les membres du Régime et de l'Administration.

2° Sydney, en juin.

3° Saint-Athanase-d'Iberville (Canada) du 17 au 24 juillet.

4° Dumfries (Ecosse), du 21 au 28 juillet.

5° Alger, du 2 au 9 août.

6° Mataró (Espagne), du 2 au 9 août.

7°  Beaucamps, du 23 au 30 août.

8° Notre-Dame de l'Hermitage, du 30 août au 6 septembre.

9° Aubenas, du 4 au 11 septembre.

10° Saint-Genis-Laval, du 11 au 18 septembre.

11° Saint-Paul-Trois-Châteaux, du 13 au 20 septembre.

12° Notre-Dame de Lacabane, du 18 au 25 septembre.

Les Grands Exercices auront lieu du 23 août au 20 septembre, à la Côte-Saint-André et à Bourg-de-Péage, pour les Frères admis à la profession.

Dans les Missions, nos Frères feront leur retraite aux époques ordinaires : les Frères de Chine, de Turquie, de Colombie et de Syrie, en juillet ; ceux des Seychelles et de l'Afrique du Sud, en décembre; les Frères de la Nouvelle-Zélande, de la Nouvelle-Calédonie et de l'Océanie, en janvier.

Pour obtenir la grâce d'une bonne et fervente retraite et pour nous disposer à bien célébrer la grande fête de l'Assomption, nous réciterons pendant les neuf jours qui la précèdent, trois Ave Maria après la méditation ; pendant l'octave, le Veni Creator Spiritus, suivide l'oraison et d'un Ave Maria, au commencement de la prière du soir. 

CAUSE DE BÉATIFICATION DU VÉNÉRABLE MARCELLIN CHAMPAGNAT 

I

J'ai la satisfaction de vous annoncer que, depuis la circulaire du 25 décembre 1897, le Tribunal chargé du premier procès apostolique dans la cause de la Béatification du Vénérable Marcellin Champagnat, a continué sa mission par l'audition des témoins.

L'intérêt qu'il prend à cette cause nous est une assurance qu'il la conduira à bonne fin. Mais, de notre côté, n'oublions pas que la piété filiale dont nous devons faire preuve à l'égard de notre Vénérable Fondateur, autant que le zèle de la gloire de Dieu, nous fait un devoir de continuer à aider par nos prières à l'heureuse issue de ce procès.

Il faut, de plus, que nous demandions nous-mêmes et que nous engagions lei; autres à demander à Dieu, par l'intercession de notre Vénérable Père, qu'il veuille bien manifester de plus en plus, par de nouveaux signes, le crédit dont jouit au ciel son humble serviteur, et hâter le jour de sa béatification. A cette fin, invoquons la Très Sainte Vierge, saint Joseph et le bienheureux Pierre Chanel.

Si des guérisons miraculeuses ou d'autres faveurs extraordinaires étaient obtenues par l'intercession du Vénérable, nous prions les Frères qui en auraient connaissance de nous en envoyer la relation. 

II 

LETTRE DE MGR  MOREAU

ÉVÊQUE DE SAINT-HYACINTHE (Canada). 

                                                         Saint-Hyacinthe, le 14 février 1898. 

   Très Révérend et cher Frère,

« Je me réjouis beaucoup d'apprendre que vous avez mis la main à la cause de Béatification de votre Vénérable Fondateur, à laquelle je porte un intérêt des plus vifs, tant pour la gloire de cet admirable serviteur de Dieu, que pour la prospérité spirituelle et temporelle de la grande œuvre qu'il a léguée à la France, et à tous les pays du monde, pourrais-je ajouter.

« Le diocèse de Saint-Hyacinthe a accueilli avec bonheur, il y a treize ans, les enfants du Vénérable Champagnat, et il se félicite, tous les jours, de les posséder comme religieux et comme instituteurs de la jeunesse. Leur conduite est très édifiante, et leur dévouement pour la fonction si méritoire de l'enseignement ne subit aucune altération. C'est dire qu'ils reçoivent une excellente formation religieuse, et qu'ils sont fidèles à se maintenir dans l'esprit qui fait les véritables religieux. Evidemment, du haut du ciel, leur Vénérable Père veille sur eux d'une façon toute paternelle, et leur obtient des grâces de prédilection pour qu'ils persévèrent dans leur sainte vocation et fassent l'honneur et là joie de la sainte Eglise.

« Une autre preuve de l'assistance toute spéciale de leur bien-aimé Fondateur, c'est la prospérité de leur juvénat et de leur noviciat du Canada. Les vocations y abondent, et la grande majorité de ces jeunes gens demeure fidèle à l'appel du Seigneur pour cet Institut ; ce dont je bénis et remercie constamment le ciel, qui nous prépare dans sa bonté de nombreux, dévoués et solides sujets pour répondre aux multiples besoins qui se font sentir en Amérique, relativement au personnel voulu pour l'enseignement de la jeunesse. Il y a un vaste champ ouvert au zèle et au dévouement des enfants du Vénérable Champagnat; j'ai pleine confiance qu'ils seront toujours, sous tout rapport, à la hauteur de la mission qui leur est confiée, et que leurs travaux seront couronnés des plus heureux succès.

« Avec mes vœux bien sincères de prospérité dans l'accomplissement de la sainte mission qui vous est dévolue, je demeure, mon Très Révérend Frère, votre tout affectueusement dévoué en Notre-Seigneur.

 † L. T., évêque de Saint-Hyacinthe. » 

III 

NOUVEAUX PANÉGYRIQUES. 

Depuis la publication du Recueil de Panégyriques dont j'aime à croire que toutes nos maisons sont en possession, d'autres panégyriques ont été prononcés en divers lieux en l'honneur de notre Vénérable Fondateur. Nous nous proposons de les faire imprimer en supplément. Ceux d'entre vous qui seraient en mesure d'en recueillir de nouveaux sont priés de nous les faire parvenir.

Nous devons, à ce sujet, mentionner ici spécialement l'établissement dirigé par nos Frères à Auboranges, paroisse de Promasens (Suisse).

Voici ce que nous écrit M. l'abbé Hély, vicaire : 

                                                                   Promasens, le 6 mars 1898.

« Très Révérend Frère,

« J'avais préparé un résumé des discours du R. P. Morel, missionnaire de Saint-François de Sales, à l'occasion du Triduum en l'honneur du Vénérable Père Champagnat, et je pensais vous envoyer le tout pour en faire l'usage que vous jugeriez. Mais le Révérend Père m'ayant remis, sur ma demande, les notes prises par lui pour ses trois admirables instructions, je vous les envoie.

 « Quant à la fête en elle-même, elle a été aussi belle que nous pouvions la faire. La commune d'Auboranges s'y est associée par son assistance aussi considérable que le permettait l'exiguïté de notre chapelle, et par de nombreuses communions.

« Ces fêtes nous ont fait du bien et ont laissé dans nos meurs un souvenir durable, et des impressions puissantes qui porteront leurs fruits, je l'espère. Car il n'est pas possible que du haut du ciel, notre Vénérable ne fasse pas ici pour son oeuvre, si nécessaire, ce qu'il a fait pour la France et pour d'autres pays. Déjà nous avons à le remercier… Nous avons bien des obstacles encore à surmonter, des épreuves à subir ; mais, comme lui, appuyés invinciblement sur la divine Providence, aidés par la bonne Mère, et confiants dans la puissance de notre Vénérable Père, nous arriverons au but que nous poursuivons, à établir en Suisse, l’œuvre admirable des Petits Frères de Marie. Il y a nécessité absolue d'un côté, et, de l'autre, confiance sans bornes ; et la gloire de Dieu y est engagée… » 

IV

 UN SERMON DE CHARITÉ. 

On lit dans l'Écho de Fourvière du 30 avril 1898 :

« Le dimanche 24 avril, a eu lieu, dans la chapelle de l'Institution Sainte-Marie, à Saint-Chamond, un sermon de charité en faveur de l’œuvre des Juvénats des Petits Frères de Marie. Outre les élèves du collège, une assistance nombreuse et distinguée se pressait dans la chapelle trop étroite pour entendre Mgr Dadolle, qui avait bien voulu, dans son zèle infatigable pour l'enseignement chrétien, et malgré ses occupations multiples, apporter à cette oeuvre le concours de son éloquente parole. Le savant recteur des Facultés catholiques  a pris pour texte ces paroles de l'Evangile « Vessis quidem multa, operarii autem pauci: La moisson est abondante, mais les ouvriers sont rares. »

Dans une pensée de foi et de patriotisme, appliquant cette parole à notre Pays, il a montré comment Dieu, qui a fait les nations guérissables, a pris soin, dans notre belle patrie française, de cette moisson des âmes. Déroulant sous les yeux de ses auditeurs une page d'histoire, il leur a montré avec une rare élévation de pensées et dans un noble langage, comment la Providence, après avoir suscité Jeanne d'Arc, à l'heure du péril venu du dehors, a suscité, depuis deux siècles, pour combattre les ravages du péril plus intime et plus grave de la libre-pensée, des lignées d'apôtres voués spécialement à l'enseignement de la jeunesse.

Après la tourmente révolutionnaire, la France eut l'insigne honneur de voir éclore et se développer sur son sol toute une floraison nouvelle d'ordres religieux parmi lesquels se place celui que le V. P. Champagnat lui-même, prêtre mariste, a placé sous le vocable et la protection de la Mère du ciel.

On sait que la cause du R. P. Champagnat, déjà introduite à Rome, donne à ses disciples l'espérance fondée de le voir bientôt sur les autels. L'orateur a rappelé que cette existence, pleine d'admirables vertus, a eu pour théâtre le pays même où il parle, et cette vallée du Gier où se trouve l'humble berceau d'un Institut qui, né d'hier, est répandu dans 102 diocèses. » (Parmi ce nombre, le seul diocèse de Lyon compte 120 écoles.) 

INDULGENCE SABBATINE 

L'indulgence sabbatine, publiée par le Pape Jean XXII, approuvée et confirmée par plusieurs de ses successeurs, assure l'assistance et le secours accordés par la Très Sainte Vierge, le samedi après leur mort, aux religieux et aux confrères qui auront pris le saint scapulaire de la bienheureuse Vierge Marie du Mont-Carmel. Pour jouir, le samedi après la mort, de la prompte délivrance du Purgatoire et participer au privilège de la Bulle sabbatine il faut porter pieusement ce saint scapulaire et de plus :

1° Garder la chasteté propre à son état ;

2° Réciter chaque jour le Petit Office de la sainte Vierge.

Par un décret spécial, en date du 16 mars 1898, le Rme Père Louis-Marie Galli, Prieur général des Carmes, usant des pouvoirs concédés par le Saint-Siège, a accordé aux membres de notre Congrégation qui ont actuellement, ou qui, à l'avenir, auront reçu régulièrement le scapulaire du Mont-Carmel, le privilège de l'Indulgence sabbatine, en récitant chaque jour, outre les prières en usage, dites selon la Règle, trois fois le Salve Regina, en l'honneur de la bienheureuse Vierge Marie. » (Cette condition des trois Salve ne regarde pas ceux qui récitent journellement l'Office de la Sainte Vierge). 

CLOTURE DES EXERCICES DU NOVICIAT DE SIX MOIS. 

Par la circulaire du 25 décembre 1897, je vous ai annoncé, M. T. C. F., l'inauguration du second noviciat de six mois. Aujourd'hui, je vous dois de vous parler de la manière dont ont été suivis les saints exercices qui en composaient le programme. Vingt-sept Frères y ont pris part, avec l'aide du R. P. Petit, de la Compagnie de Jésus, comme instructeur, et sous la direction du cher Frère Michaélis, Visiteur de la province de Saint-Paul-Trois-Châteaux. Dès les premiers jours, ils se sont mis à l’œuvre avec une bonne volonté, une ardeur et un courage qui ne se sont jamais démentis. Ils ont donné, pendant ces six mois, des exemples de piété et de vertu dont ceux qui en ont été les témoins aimeront à conserver le sou­venir. Aussi peut-on dire qu'ils ont fait de la maison de retraite Sainte-Marie vraiment la maison de Dieu, un lieu saint et digne d'attirer les regards de complai­sance des habitants du ciel.

  Cette générosité et cette application constante à profiter des grâces précieuses mises à leur dispositionet à s'avancer dans la vertu, ont valu à ces chers Frères de bien douces consolations, en même temps que des forces et des secours puissants pour les combats à venir.

Au surplus, ils vont vous dire eux-mêmes l'estime qu'ils ont faite de la faveur qui leur a été accordée, et les dis­positions avec lesquelles ils ont accompli le saint travail qui leur a été demandé.

  Voici, en effet, en quels termes, leurs sentiments et leurs impressions nous ont été exprimés par l'un d'eux, le 3 avril dernier, jour de la clôture :

                  « TRÈS RÉVÉREND FRÈRE SUPÉRIEUR GÉNÉRAL,

Avant de quitter cette délicieuse retraite de la maison Sainte-Marie, nous ne saurions résister à l'impérieux besoin que nous éprouvons de vous adresser l'hommage respectueux de notre filiale gratitude. Ja­mais nous ne pourrons oublier l'insigne honneur d'avoir été les premiers appelés à ces salutaires exercices du  second noviciat. Chacun de nous, après avoir rendu à Dieu des actions de grâces pour cette nouvelle faveur ajoutée au don inappréciable de la vocation religieuse, se sent pressé de vous remercier, très Révérend Frère Supérieur, vous et les membres du Régime qui vous ont aidé dans le choix des premiers novices

Nous n'oserions dire que, selon le désir exprimé dans votre paternelle allocution du premier jour, nous nous sommes rendus dignes d'être proposés pour modèles à nos successeurs ; mais ce que nous pouvons affirmer, c'est que nous avons été les hommes de bonne volonté que vous demandiez; c'est que nous avons trouvé dans le travail de ces six mois bénis, un aliment substantiel et pour l'intelligence et pour le cœur, et qu'en ce moment, toutes remplies d'impérissables souvenirs, nos âmes emportent les plus saintes espérances pour notre avenir personnel et pour celui de notre chère Congrégation…

Vous avez compris, très Révérend Frère Supérieur, combien était opportune l'institution de ce second noviciat, en raison de l'accroissement de notre famille religieuse, qui, dans ces dix dernières années, a vu presque doubler le nombre de ses enfants. Maintenant que ses membres sont dispersés sur tous les continents et dans des régions de nationalité, de langue et de mœurs différentes ; maintenant qu'elle a besoin d'une nourriture plus fortifiante, d'une union et d'une homogénéité plus parfaite, et de cet ensemble de qualités qui constituent l’esprit de corps, vous lui assurez ces précieux avantages en réunissant ainsi, pour une même formation, dans une commune charité, les principaux Frères de toutes les provinces et de tous les pays..

Ici se pose une question à laquelle nous avons à répondre : Qu'a été pour nous ce second noviciat ?

Si nous y répondions d'une manière générale, avec les simples données de la philosophie chrétienne, nous dirions : Il a été pour la plupart d'entre nous un repos, une halte bienfaisante au sommet des deux versants de la vie, d'où nous avons considéré, devant Dieu, le chemin parcouru, pour lui adresser notre prière reconnaissante, et mesuré du regard les dangers de la descente pour lui demander sa divine assistance. Nous dirons que, pour tous, il a été une oasis pleine de fraîcheur au milieu des sables brûlants et desséchés du désert, où nous avons bu, à longs traits, les eaux salutaires de la grâce, où nous avons repris courage et renouvelé nos provisions pour parfaire notre course. Mais, religieux maristes, notre réponse doit concorder avec le programme qui nous était donné. « Ce second noviciat, disent nos Constitutions, servira aux Frères s'instruire plus parfaitement de leurs devoirs, à se retremper dans la piété et à se former aux vertus solides.

De votre côté, vous ajoutiez dans votre exhortation du début: « Vous y puiserez, M. T. C. F., l'esprit de Jésus-Christ et sa divine sagesse, l'esprit de Marie, l'esprit du V. P. Champagnat, afin de pouvoir, comme saint Paul, opposer cet esprit à l'esprit du monde, et annoncer les richesses incompréhensibles du Cœur de Jésus.»

Or, nous le proclamons avec une satisfaction toute particulière, c'est bien ce que nous y avons cherché, c'est bien ce que nous y avons trouvé… Nous avons cherché l'aliment de l'esprit par l'étude, et celui du cœur par la prière….

Etudier et prier pendant six mois ! quelles délices pour une âme religieuse ! Quelle abondante moisson pour le ciel ! – Qu'avons-nous étudié ? Sans doute la doctrine catholique, les dogmes sublimes de notre sainte foi ; mais aussi, mais surtout ces livres admirables, ces trésors de science ascétique que nous ont laissés le R. F. Louis-Marie et le T. C. F. Jean-Baptiste, et que nous connaissions trop peu… A ceux qu'étonnerait cet aveu de notre ignorance, malgré les lectures faites dans nos établissements, nous disons : Lire en courant, au milieu des préoccupations et des distractions ordinaires, ce n'est point lire d'une manière vraiment fructueuse ; ce n'est point étudier, c'est parcourir comme le voyageur parcourt un paysage, quand un train l'emporte à toute vitesse : il voit, sans doute ; il n'a pas le temps de regarder. Ici, plus heureux et mieux avisés, nous avons lu la plume à la main : c'est la méthode recommandée par le savant évêque d'Orléans, qui la proclame indispensable aux plus humbles comme aux plus grands succès.

 D'autre part, n'étant pas religieux seulement, mais religieux enseignants, nous avons étudié, aussi nos devoirs professionnels ; nous avons échangé nos vues sur cette oeuvre si chrétienne de l'éducation, pour laquelle nous avons été établis ; nous nous sommes mutuellement excités au zèle pour cet apostolat de l'enfance, apostolat si important qu'il a mérité les plus chaleureux encouragements de l'Eglise, ses plus particulières bénédictions, et dont l'éminent Cardinal Manning n'a pas craint de dire : « Une larme d'enfant non essuyée crie à Dieu plus haut que le sang répandu à terre. » Nos ouvrages sur cette matière et les exemples de nos premiers Frères ont amplement fourni les matériaux nécessaires à cette étude.

Mais hâtons-nous de le confesser, si le noviciat s'est adressé à nos intelligences et nous a mieux fait connaître nos devoirs, il devait surtout, selon l'expression si juste de notre directeur spirituel, être l'école du cœur. Connaître ses devoirs, c'est bien, sans doute; les aimer, porter la volonté à les remplir, c'est mieux. La volonté ! c'est par elle qu'on est homme, vraiment homme… Cette force de volonté, cette sincère détermination pour le bien, nous l'avons trouvée dans nos fréquents entretiens avec Jésus, dans ces tendres épanchements de l'oraison et de la communion, où, pour nous assujettir à l'irrésistible loi de son amour, le bon Maître nous a dit, comme à sa confidente de Paray-le-Monial : « Viens, je veux te faire lire dans le livre d'or, dans le livre de mon Cœur. » Nous l'avons trouvée, cette force de volonté dans ces fervents chemins de croix, où le divin Modèle nous a montré la pratique du saint renoncement dans ces prières plus fréquentes et plus ferventes à Marie, notre première Protectrice et notre grande Ressource ; nous l'avons puisée encore dans le souvenir réconfortant de nos chers aînés, dans cette humble maison de La Valla, vers laquelle souvent nous ont reportés nos études.

Nous avons placé nos cœurs près des leurs ; nous avons enflammé nos âmes, surtout, au contact de l'âme toute brûlante du Vénérable Fondateur. Nous l'avons suivi dans cette vie si pénible du début, au milieu de ces grandes épreuves où sa vertu s'est élevée à la hauteur de son inébranlable confiance en Dieu. Notre sublime mission nous est apparue plus belle encore en présence des exemples de son zèle tout apostolique, de sa soif insatiable des âmes…

Oui, c'est bien là, au foyer de ses premiers jours, qu'un petit Frère de Marie doit venir rallumer ses généreuses ardeurs !…. Pour nous, que de douces et vivifiantes impressions nous a laissées cette excursion au pays natal !… Que de fois aussi, en feuilletant le Recueil des Panégyriques, nous avons senti le tressaillement de l'enthousiasme et, dans un élan de religieuse admiration et de filial amour, nous nous sommes pris à invoquer notre Vénérable Père ! ….

 Nous aimons à citer ici, comme rendant nos sentiments et nos vœux, ce passage du discours de M. le chanoine Battendier, l'un des panégyristes :

Quand le voyageur chrétien visite Rome, il s'arrête à chaque pas devant les merveilles sans rivales que l'art a prodiguées dans la ville éternelle ; mais lorsque, à quelques pas de la campagne romaine, il entre dans ces galeries souterraines qui furent les catacombes, qu'il en suit les longues lignes, avec leurs galeries de tombeaux, qu'il foule ce sol que foulèrent les premiers chrétiens et les martyrs, pour une heure, il oublie la terre ; et nulle des émotions qu'il éprouvait tout à l'heure devant les splendeurs  de la Rome des arts, ne vaut celle qui l'étreint lorsqu'il respire cet air et baise cette terre imprégnée encore des larmes et du sang des premiers disciples de Jésus. Quelles que soient les destinées des  fils du Vénérable Champagnat, qu'ils viennent, au moins une fois dans leur vie, baiser le sol, respirer l'air de cette petite maison de La Valla qui fut leur berceau ! Qu'ils y reviennent souvent par la pensée, le souvenir et le cœur, retrouver ce vivifiant parfum des temps héroïques, qui sera toujours leur sauvegarde et leur force ! ….

Le général Charette disait à ses officiers, un matin de combat : « Allez d'où je viens, Messieurs, allez au confessionnal faire provision de courage pour la journée. » Belle parole dans la bouche de ce brave et loyal soldat.Allez à La Valla, allez à nos premiers Frères, dirons-nous à ceux que notre conduite plus régulière, plus mariste, pourra étonner, allez à La Valla, c'est-à-dire, lisez, fouillez, méditez comme nous cette vie héroïque, ces obscurs labeurs du Vénérable Père et de ses premiers disciples : le courage de ces vaillants des premiers âges vous entraînera à leur suite dans le royal chemin du sacrifice.

 Mais nous nous arrêtons, d'autant qu'à nous entendre, il semblerait que nous n'avons eu que des victoires à enregistrer pendant cette période de notre noviciat. D'aucuns, en nous écoutant, pourraient même penser que nous montrons à plaisir le beau côté de la médaille. Eh bien ! soyons sincères ; oui, avouons-le, à ces roses il y a des épines : toutes en ont ici-bas. Dans ce travail, auquel nous n'étions plus habitués, la nature n'a pas eu toujours tout ce qu'elle réclamait; il a fallu réduire le vieil homme, lui livrer parfois de durs et crucifiants combats : « La vertu ne va pas sans efforts ; elle est comme l'auréole qui illumine le front du vainqueur. » Chaque jour, donc, jaloux de réaliser notre programme, nous avons dû donner force coups de ciseau. Qui s'en plaint aujourd'hui ? Personne, non, personne ; chacun s'applaudit du succès obtenu, et, vaillant soldat, rêve aux combats du lendemain.

Au souvenir de tant de bienfaits, nous voudrions vous exprimer à nouveau les sentiments de reconnaissance qui débordent de nos cœurs ; mais, on l'a dit, la reconnaissance comme l'amour dont elle dérive, n'a qu'un mot qu'elle répète toujours sans se fatiguer jamais. Donc, encore une fois : Merci Très Révérend Frère Supérieur, merci en notre nom merci au nom de notre chère Congrégation, à laquelle va profiter cette heureuse création.

Ce Mot MERCI, que nous voudrions redire sans cesse, nous vous promettons de le traduire en un souvenir quotidien auprès de la bonne Mère, en un de ces Ave Maria tout neufs, comme disait plaisamment Mgr de Ségur pour marquer la ferveur avec laquelle on les récite, qui sont toujours exaucés, afin que Dieu vous conserve longtemps encore à votre famille religieuse, et qu'il vous soit donné de voir poser sur la tête du Vénérable Champagnat l'immortelle couronne des Bienheureux…

Dans ces sentiments, Très Révérend Frère Supérieur, vos enfants vous prient de vouloir bien les bénir, et d'agréer qu'ils laissent échapper de leur cœur ce triple cride l'amour reconnaissant : « Vive notre Vénérable Fondateur ! Vive le Révérend Frère Théophane ! Vivent  nos bons et vénérés Supérieurs »

F. ADORATOR. F. ANSELMUS. F. ANTHELMUS. F. AUGUSTALIS. F. BASILE. F. CLARENCE. F. CLÉMENT. F. CONSTANCIEN. F. DIOGÈNE. F. FRONT. F. GARNIER. F. JOVIEN. F. JULES-HENRI. F. LOUIS-ARMAND. F. LOUIS-PHILEMON. F. MARIE-ALBERT. F. MARIE-CHARLES. F. MARIE-JOACHIM. F. MAXIME. F. NICETUS. F. NIMIEN. F. OLIVÉRIUS. F. PIERRE-PASCAL. F. PRISCILLIEN. F. SÉLEZE. F. SILVÉRUS. F. SISOES. 

A des sentiments si religieux, si nobles, si généreux, nous ne pouvions répondre qu'en priant Dieu de bénir les personnes et les pieuses résolutions de ceux qui nous les exprimaient, et en nous unissant à leurs actions de grâces et à leurs louanges envers la bonté divine, pour le bien opéré durant ce noviciat si heureusement inauguré.

Avant de se séparer, les heureux et fervents novices ont eu aussi à cœur de témoigner leur reconnaissance au Révérend Père Petit, leur docte et pieux directeur spirituel, et au cher Frère Michaélis qui, faisant les fonctions de maître des novices, avait mis généreusement à leur service, sa science, son dévouement, son savoir faire, tous les dons qu'il a reçus du ciel.

Et pour mémorial de ce noviciat béni, il a été distribué à chacun des Frères qui y ont pris part, une image du Vénérable Père Champagnat, au dos de laquelle se trouve, entre autres choses, ce qui suit : 

DIEU

TOUJOURS EN VUE COMME NOTRE FIN DERNIÈRE.

JÊSUS-CHRIST

TOUJOURS COMME MODÈLE.

MARIE

TOUJOURS EN AIDE.

JOSEPH

LES ANGES ET LES SAINTS COMME PROTECTEURS.

MOI

TOUJOURS EN SACRIFICE, PAR AMOUR POUR DIEU ET LES AMES. 

 

NOUVELLES DES ÉTABLISSEMENTS ET DES MISSIONS 

PRISE D'HABIT A CASTELNAUDARY. 

Le 22 février 1898, notre noviciat naissant de Castelnaudary a eu l'insigne honneur de voir Mgr Billiard, évêque de Carcassonne, présider la première vêture faite dans cette maison, nous donnant en cette occasion une preuve bien sensible de dévouement à notre Congrégation et un encouragement qui nous est cher.

Dès huit heures du matin. Sa Grandeur arrivait accompagnée de M. le chanoine Cantegril, vicaire général, de MM. les Curés de Castelnaudary et d'un nombreux clergé, et recevait les respectueux hommages de tout le personnel de la maison : Frères, postulants, juvénistes et élèves. Tous étaient heureux de saluer et de posséder leur premier pasteur, tous étaient charmés de sa paternelle bonté.

A neuf heures eut lieu la touchante cérémonie de la prise d'habit, au début de laquelle Sa Grandeur adressa aux dix heureux postulants qui y étaient admis, une pathétique allocution que nous regrettons de ne. pouvoir reproduire en son entier.

Monseigneur dit qu'en se rendant à l'invitation qui lui a été faite de venir présider la première vêture dans cette maison de Castelnaudary, il a voulu témoigner l'intérêt bienveillant qu'il porte à notre Congrégation. Il appelle l'attention des postulants sur ce à quoi ils s'engagent en se revêtant de l'habit religieux, signe extérieur qui doit leur rappeler à eux-mêmes et montrer au monde qu'ils sont entrés dans la vie étroite du renoncement et des conseils évangéliques. L'esprit qui doit désormais les animer, c'est l'esprit des parfaits obéissants, de manière que, selon l'expression de saint Bernard, ils puissent être appelés des fils d'obéissance…

L'obéissance que Dieu attend d'eux doit être surnaturelle dans son principe, universelle dans son étendue, absolue dans son exécution.

L'obéissance chrétienne et religieuse n'est pas un sentiment humain, mais une disposition inspirée dans l'âme par la grâce de Dieu, qui la porte à soumettre sa volonté à des supérieurs, hommes comme les autres, mais revêtus de l'autorité divine. Les calices de verre ou de plomb dont on se servait dans les temps de la primitive Eglise, pour conserver les saintes espèces de l'Eucharistie, contenaient le corps et le sang de Jésus-Christ comme les calices d'or aujourd'hui destinés au même usage. Ainsi en est-il de l'obéissance. Quelle que soit la personne qui exerce l'autorité, cette vertu est toujours également méritoire. Elle ne veut ni restriction, ni choix, ni exclusion, car alors ce ne serait plus l'ordre, l'harmonie dans les maisons religieuses, mais le désordre et la ruine. Si notre pauvre nature trouve cette vertu difficile, prenons exemple sur notre divin Modèle qui s'est fait obéissant jusqu'à la mort, et qui, sur la croix, jetant un regard sur le passé, a pu dire : «Tout est consommé. »

« Soyez des fils d'obéissance, dit Sa Grandeur en terminant, et vous triompherez de vos passions et de tous vos ennemis; car il est dit de l'homme obéissant qu'il racontera ses victoires. »

La vêture terminée, Monseigneur a donné le sacrement de confirmation à vingt juvénistes et à six pensionnaires. Après la cérémonie, les nouveaux Frères sont allés offrir leurs hommages à Sa Grandeur, qui leur a donné une bénédiction spéciale en faisant des vœux pour que les Petits Frères de Marie se multiplient dans son diocèse.

Dans l'après-midi, une petite séance récréative fut offerte à Monseigneur, qui en exprima sa satisfaction et accorda un grand congrès Un Salut solennel, présidé par Sa Grandeur, clôtura cette belle journée ; et, vers quatre heures, après avoir béni une fois encore la communauté et les élèves, réunis sous le péristyle, le vénérable prélat quitta la maison, laissant profondément gravé dans tous les cœurs le souvenir de sa paternelle bienveillance et de sa touchante bonté. 

NOTICE SUR L'ÉTABLISSEMENT DE CASTELNAUDARY. 

Castelnaudary est une jolie ville de 7 à 8.000 habi­tants, située dans une plaine fertile ; elle est desservie par plusieurs lignes de chemins de fer et par le canal du Midi ; son commerce ne le cède en rien aux villes plus importantes de la même région ; son climat est salubre, et la température y est bienfaisante.

Au nord de la ville, sur une étendue de plus d'un hectare, aux lieu et place du collège actuel, s'élevait autrefois une habitation illustrée par le séjour qu'y firent plusieurs pieux et saints personnages, parmi lesquels se placent au premier rang les de Soubiran, une des plus anciennes familles du Languedoc.

Le Bienheureux Elzéar de Soubiran, qui vivait au XIV° siècle, appartenait à cette famille, où la vertu était comme héréditaire. Un autre de ses membres, Sophie de Soubiran, guérie miraculeusement d'une grave maladie, entra dans la Congrégation des Enfants de Marie, que M. l'abbé Dulignon avait fondée et établie dans le local dont il vient d'être parlé, lequel alors était connu sous le nom de Bon-Secours. C'était un asile de paix, d'innocence, de prière, contre lequel le démon devait exercer sa rage.

L'esprit du mal excita la haine dans le cœur de quelques jeunes libertins, irrités du zèle du saint prêtre. Ils l'assaillirent un jour et le blessèrent mortellement, en l'accablant sous un amas de décombres. Deux mains charitables le relevèrent, mais les meurtrissures et les contusions qu'il avait reçues le conduisirent au tombeau en peu de jours.

Avant de mourir, l'abbé Dulignon fit appeler l'oncle de Sophie, M. de Soubiran, chanoine et vicaire général de Carcassonne. Il l'invita à se charger de son œuvre. L'offre fut acceptée, et le vicaire général, dont la démission avait été agréée par son évêque, se dévoua complètement à la direction de cette oeuvre si excellente.

Le dimanche, à deux heures, le digne Directeur faisait une instruction à ses congréganistes, qui, ensuite, se dispersaient pour aller assister aux vêpres dans les paroisses de la ville. Elles revenaient ensuite au nombre de plus de cinq cents passer la soirée au Bon-Secours. Sophie de Soubiran était, sous la direction de son oncle, l'âme de ces réunions. Souvent, dans la semaine, elle venait passer quelques heures au Bon-Secours.

Dans ses entretiens avec Dieu, elle se sentit inspirée du désir d'établir le Béguinage. A cet effet, et d'après les conseils de son oncle, Sophie alla en Belgique pour s'instruire des règles de l'Ordre, et faire son noviciat. A son retour, elle se fixa définitivement au Bon-Secours, sous la direction de son oncle, et gagna quelques-unes de ses compagnes à son nouveau genre de vie.

Le grain de sénevé se développa rapidement et bientôt Mlle de Soubiran, devenue Sœur Thérèse, se vit dans la nécessité d'entreprendre une nouvelle construction pour suffire aux besoins de la communauté naissante. Elle en posa la première pierre sur une médaille de l'Immaculée Conception. Les Sœurs vendirent leurs biens de famille, et s'imposèrent de rudes sacrifices. Dès 3 heures du matin, elles se levaient pour préparer le travail des ouvriers, porter les pierres, le sable, etc.

Une fois la maison achevée, les bonnes Sœurs réunirent plusieurs orphelins et s'efforcèrent de leur inculquer, avec l'amour du travail, les connaissances et les vertus qui font les âmes chrétiennes.

Cette charité plut au Bon Maître, qui voulut leur faire part du calice de sa passion. Un jour, sans que l'on sût comment, le feu prit à l'édifice et le réduisit en cendres. Des faits surprenants se produisirent durant cet incendie. Une Sœur et des orphelins sont sauvés contre toute espérance. Deux enfants et un homme qui voulaient les tirer d'un danger imminent, tombent du toit et ne se font aucun mal. Pendant ce temps, Sœur Thérèse était au pied du Saint Sacrement, priant avec ferveur et résignation. Cette rude épreuve ne la découragea pas. Elle se remit à l’œuvre, la maison fut reconstruite et Dieu continua à y être servi avec ferveur.

Pour témoigner sa reconnaissance à la Bonne Mère, Sœur Thérèse décida que toutes ses filles porteraient le nom de Marie, que Marie serait la première supérieure.

La fondatrice des Béguines en France mourut en odeur de sainteté.

Peu après le décès de leur fondatrice, les Béguines quittèrent Castelnaudary, et un prêtre fit l'acquisition de leur maison et de ses dépendances pour y établir un collège. Plusieurs constructions y furent ajoutées de manière à former un cloître régulier d'une superficie, cours et bâtiments compris, de plus d'un hectare. Le jardin a une étendue à peu près égale.

Quelque temps après, ces immeubles devinrent la propriété d'une Société civile, qui confia aux Pères de la Congrégation du Saint-Esprit la direction du collège de Saint-François de Sales. Plusieurs motifs ayant obligé les Pères à l'abandonner, notre Institut y installa, en 1897, un noviciat, un juvénat et un pensionnat. 

II 

VICH (Espagne).

                       Fête solennelle au Noviciat des Frères Maristes. 

Le 3 février dernier, une fête aussi émouvante que pleine d'intérêt avait lieu, sous la présidence de notre bien-aimé Prélat, au noviciat des Frères Maristes, établi au couvent du « Carmen ».

Dès la veille, une vive allégresse brillait sur le front des Frères et des Novices, car ils devaient, ce jour-là, recevoir la visite des Premiers Supérieurs de la Congrégation, T. R. F. Théophane, Supérieur général, C. Frère Bérillus, Assistant, et C. F. Paul-Marie, Vicaire provincial.

A la réception qui leur fut faite, il était aisé de voir la tendresse toute filiale dont les humbles religieux maristes entourent leurs vénérés Supérieurs, car ils les reçurent au milieu d'une véritable explosion de démonstrations affectueuses, d'applaudissements et de vivats. Ils les accompagnèrent ensuite à la chapelle, magnifiquement parée, où fut chanté un Magnificat solennel en action de grâces de leur heureuse arrivée, et la journée se termina dans le bonheur et la gaîté, en pensant aux joies pures et douces que promettait le lendemain.

Le 3, à 7 heures du matin, Monseigneur faisait son entrée au Couvent, devant la porte duquel on avait élevé pour la circonstance un magnifique arc de triomphe. Après avoir reçu les hommages des Supérieurs et de la communauté, il se prépara à célébrer la messe de communion générale, au cours de laquelle furent chantés quelques motets du choix le plus heureux.

Avant la communion, Monseigneur adressa aux Frères quelques paroles d'édification pour les exhorter à s'approcher toujours de la Table sacrée avec tout le respect et la révérence que demande une action si sainte.

A 9 heures du matin eut lieu l'Office solennel, pendant lequel fut exécutée, avec une remarquable perfection, la messe bien connue de J. B. Prado. Il fut suivi d'un moment de récréation jusqu'à 11 heures, où devait avoir lieu la cérémonie propre de la journée : celle de la vêture.

Dix-neuf postulants, sérieusement préparés par les soins et le zèle du R. P. Garcia, missionnaire du Cœur Immaculé de Marie, reçurent de Sa Grandeur le saint habit de la Congrégation des Petits Frères de Marier. C'était plaisir de voir avec quelle joie ces chers enfants se disposaient à quitter les livrées du monde pour revêtir l'humble habit qui les enrôlait d'une façon toute spéciale dans la sainte milice du roi Jésus. Les sentiments de ferveur et de générosité avec lesquels ils prononcèrent leur consécration à Dieu et à la Sainte Vierge, pénétrèrent d'une religieuse émotion tous ceux qui en furent les heureux témoins.

Avant la cérémonie, Monseigneur prononça un chaleureux discours, où il laissa déborder à flots les trésors de bonté et de paternelle affection que son cœur renferme pour ces humbles ouvriers de la vigne du Seigneur.

Le soir, dans une joute intellectuelle que Sa Grandeur voulut bien honorer de sa présence, les novices lui donnèrent, par la justesse et l'à-propos de leurs questions et de leurs réponses, l'occasion d'admirer la connaissance approfondie qu'ils ont des moindres détails de la vie de leur pieux fondateur, le Vénérable Champagnat.

  Enfin, pour répondre à une adresse qui lui fut lue par un des Novices, Sa Grandeur prononça une troisième allocution, et les Frères purent se convaincre une fois de plus que son affection paternelle à leur égard est vraiment inépuisable. Ils garderont précieusement dans leurs cœurs les paroles de leur vénéré Prélat, et elles seront pour eux un puissant encouragement dans les difficultés qu'ils pourront rencontrer dans le cours de leur vie religieuse. Quant à nous, s'il nous est permis maintenant d'exprimer notre impression personnelle, nous dirons simplement qu'il ne peut guère y avoir ici­ bas de bonheur plus grand que celui qu'ont goûté en ce jour les Frères de Marie. Ils ont senti toute la vérité de l’oracle divin : « Celui qui aura laissé toutes choses à cause de mon nom, recevra le centuple en ce monde et la vie éternelle en l'autre. »

(Extrait du Boletin oficial de la diocesis de Vich.) 

              Allocution prononcée par Monseigneur l'Evêque avant la vêture.

« Mes chers Enfants,

Suivant la même pensée que je vous ai exposée ce matin pour vous préparer à recevoir dignement Notre-Seigneur Jésus-Christ, et vous disposer par là à revêtir avec fruit et ferveur le saint habit religieux, je vous répéterai les paroles de Notre-Seigneur : « Sans moi, vous ne pouvez rien. »

 Si Dieu l'eût voulu, il aurait pu créer directement et immédiatement toutes les choses qui procèdent des causes secondes, aussi bien dans l'ordre de la nature que dans celui de la grâce. Mais il ne l'a pas jugé ainsi ; et, sans vouloir scruter ses desseins impénétrables, observons qu'il l'a fait pour sa plus grande gloire et pour des fins dignes de sa sagesse.

Celui qui a créé le ciel et la terre, l'air et les eaux, Celui qui les maintient dans leur intégrité et leur activité, qui leur communique la vertu de continuer sans relâche leur action bienfaisante et leur efficacité, aurait pu alors produire les effets que produisent maintenant ces éléments sur les diverses créatures. Dieu, qui a tout créé d'un seul signe de sa puissance, qui a doté l'homme de l'intelligence et de la volonté, qui le soutient, augmente et conserve en lui ces dons de son amour de telle manière que si, pour un seul instant, il détournait de nous son divin visage, nous retomberions dans le néant, au dire du Roi-Prophète, Dieu, dis-je, aurait pu, dès leur naissance, produire dans les hommes les fruits, d'intelligence, de vertu, de sainteté que, moyennant le secours continuel de sa grâce, il produit avec le travail et la coopération de ses créatures préférées. Mais il ne l'a pas fait ; et, par cette manière d'agir, il honore grandement les hommes, parce qu'ils ont ainsi la faculté de se convertir en de nobles instruments de sa puissance. Dieu en est glorifié, puisqu'il a accompli, par le moyen de créatures si faibles, des oeuvres si supérieures. Il en est satisfait, parce que le grand amour qu'il porte à l'humanité le fait se complaire dans ces actions merveilleuses réalisées par des créatures qui sont l'ouvrage de ses mains, et qu'ainsi se convertit de justice la couronne de gloire que, par faveur, il aurait accordée à l'homme, ainsi que nous l'enseigne l'Apôtre saint Paul.

Celui qui est bien pénétré de ces vérités, sera humble et priera avec ferveur le Père des lumières de qui procède tout don parfait. Il espérera tout de Dieu ; mais en même temps il emploiera toute son énergie et tout son être comme s'il ne devait compter que sur lui seul. Humilité et activité, telles sont les deux grandes vertus qui doivent vous accompagner durant toute votre vie.

Puisque l'homme n'est que l'instrument du Seigneur, puisque la valeur et la perfection des actions d'une créature intelligente sont en raison directe du degré de perfectionnement de l'instrument employé, ainsi que le témoignent les progrès merveilleux faits de nos jours dans les sciences, les arts et l'industrie, l'homme doit profiter de tous les moyens qui font de lui un instrument parfait de la divine Providence, afin d'assurer, dans la mesure de ses forces, les fruits de grâce et de vie tenus en réserve par Dieu, pour la gloire et le salut du monde, pour l'achèvement complet des oeuvres de la création et de la rédemption, pour la glorification finale de la Très Sainte Trinité et pour celle de l'homme.

Et maintenant, mes chers enfants, quelles oeuvres devez-vous réaliser, après celle de votre sanctification personnelle, dans la mission que Dieu vous destine, et que Vous commencez en revêtant le saint habit religieux après avoir quitté les livrées du monde ? Instruire et éduquer, former les cœurs et les intelligences. Donc plus vous serez parfaits en connaissance et en vertus, plus vous pourrez enrichir vos élèves de ces mêmes avantages ; car personne ne donne ce qu'il n'a pas ; et, dans l'ordre habituel de sa sage Providence, Dieu ne se sert que d'instruments en rapport avec les fins qu'il se propose. Les temps que nous traversons, et dans lesquels abondent l'ignorance, l'erreur, le péché, exigent une plus grande perfection, si l'on veut assurer le triomphe du bien et de la vertu ; de même que, achevant la comparaison commencée, le perfectionnement des machines est de nécessité absolue pour ceux qui veulent soutenir avec succès la concurrence dans la lutte pour la vie.

Perfectionnez-vous donc dans les connaissances intellectuelles qui rendront vos travaux plus fructueux ; perfectionnez-vous surtout dans toutes les vertus chrétiennes : chasteté, humilité, patience, amour de, Dieu et du prochain. Alors, n'en doutez pas, rues chers enfants, vous serez, comme J'est déjà, grâce à Dieu, l'Institut auquel vous aspirez et qui vous attend les bras ouverts, les instruments de la divine Providence, choisis pour être la lumière du monde et le sel de la terre. » 

III 

ORPHELINAT DE DOUVAINE (Haute-Savoie). 

Une Petite revue mensuelle, l'Ange de l'Orphelin, du mois d'avril 1898, a consacré l'article suivant à l'installation de trois de nos Frères à l'orphelinat de  Douvaine, dont un prêtre zélé, connu sous le nom de Père Joseph, est le fondateur et le supérieur.

« Nous possédons, en France, un Institut modeste et laborieux, grand par les oeuvres ; ce sont les Petits Frères de Marie dont la Maison-Mère est à Saint-Genis-Laval (Rhône). Cet Institut a été fondé au commencement de ce siècle, par le Vénérable Père Marcellin Champagnat, et c'est merveille de le voir, cinquante ans seulement après la mort du Serviteur de Dieu, couvrir, pour ainsi dire, le monde entier de ses écoles, de ses juvénats, de ses noviciats, et compter plus de 6.000 membres qui donnent l'enseignement de la foi à plus de cent mille enfants.

Après avoir frappé à plusieurs portes, inutilement, nous nous adressâmes à ces excellents religieux qui ont compris que si l'enfant, non orphelin, est digne de leur sollicitude, à plus forte raison celui qui n'a ni père, ni mère, ni foyer ! J'ai hâte d'ajouter que nous devons ce signalé bienfait, après Dieu, à l'appui de l'archevêché de Lyon, au concours puissant de Mgr Bonnardet, vicaire général. Aussi, lorsque nous annonçâmes à son Em. Mgr Coullié, cardinal-archevêque, que la cause était gagnée, il voulut bien nous adresser ses cordiales félicitations : « Vous m'annoncez une bonne et très bonne nouvelle : les Petits Frères de Marie sont des meilleurs pour l'enseignement de l'enfance, et la bonne édification des vertus religieuses qu'ils répandent partout. J'en augure pour votre oeuvre de Douvaine une nouvelle garantie de prospérité. » Et son Eminence nous bénit à nouveau avec une paternelle affection.

Donc, le mardi 15 mars, trois Frères Maristes étaient installés dans l'orphelinat de Saint-François de Sales, au milieu des acclamations joyeuses de la grande famille des petits orphelins qui les reçurent à l'entrée de la maison, et crièrent à l'envi: « Vivent les bons Frères, vivent les chers Frères ! » Nos nouveaux maîtres, le Révérend Frère Fulbert, directeur, en particulier, furent très émus. Tous nous leur fîmes cortège à la chapelle, où le chant du Veni Creator appela sur leur belle et féconde mission les plus saintes bénédictions de Dieu.

Qu'ils soient les bienvenus, et puisse leur concours dévoué nous consoler des épreuves très amères que nous venons de traverser, et répondre à la magnanime générosité de nos amis récompensés, eux aussi, par ce nouvel élément de succès, en échange de leurs fidèles aumônes ».

                    J. JOSEPH 

IV 

BURGOS (Espagne). 

Nous donnons ici la reproduction d'une lettre de S. G. Mgr l'Archevêque de Burgos, laquelle a été publiée dans la Semaine religieuse de Burgos.

« Ce n'est pas la première fois que, pressé par la plus profonde conviction, nous rendons aux Frères Maristes des éloges bien mérités.

Par le plus grand bienfait de Dieu, nous possédons dans la capitale de notre diocèse un des vingt collèges que les Petits Frères de Marie comptent en Espagne ; et à ce collège, ils ont annexé un de leurs deux Juvénats ou noviciats préparatoires espagnols, oeuvre qui sert de base au magnifique monument de l'enseignement chrétien.

Fondé au commencement de ce siècle par un vénérable prêtre dont la cause de béatification se poursuit activement, approuvé par le Saint-Siège, béni par l'Episcopat, loué par les personnes les plus compétentes en matière d'enseignement, très visiblement protégé par Dieu et comptant déjà plusieurs milliers de sujets et de nombreuses centaines de collèges, l'Institut des Maristes peut être fier de ses Frères de Burgos ; car ils n'épargnent ni travaux, ni sacrifices pour remplir, à la pleine satisfaction de tous, la mission aussi difficile qu'importante qu'ils se sont imposée ; et cela au plus grand avantage de la religion et de la société, ainsi qu'à celui des familles chrétiennes qui confient leurs enfants à des éducateurs de la jeunesse aussi intelligents, aussi experts et aussi remplis de sollicitude.

Avant la fin de cette année, nous voulons avoir la satisfaction de rendre publique notre haute estime pour l'inappréciable bienfait que nous procure l'enseignement des Frères Maristes, auxquels nous souhaitons que le Seigneur continue ses faveurs pour le bien spirituel et temporel de notre bien-aimé diocèse. 

MAKRIKEUY (Turquie). 

Extrait du journal le Stamboul, de Constantinople, du 10 janvier 1898 :

                        Une école française à Makrikeuy.

Hier, dimanche, les élèves de l'institution de Notre-Dame du Rosaire, à Makrikeuy, offraient à leurs familles une séance littéraire.

Maintenant qu'ils sont installés dans un local qui leur permet de recevoir des visites, les Frères Maristes ont voulu convier les parents à venir juger par eux-mêmes des résultats obtenus.

Mgr Bonetti, délégué, du Saint-Siège, avait bien voulu honorer de sa présence cette fête de famille.

Le chargé d'affaires de France s'était fait représenter par M. Cuinet, drogman. Le R. P. Marengo, curé de Saint-Pierre, y représentait lui-même l'Ordre des Dominicains ; il avait sa place marquée à cette fête. Car l'Ecole est un peu son œuvre ; elle trouva d'abord un asile à la cure de Makrikeuy,. avant d'avoir son existence indépendante et d'être logée dans la maison spacieuse qu'elle occupe aujourd'hui.

D'autres amis de l’œuvre avaient trouvé place à côté de Mgr Bonetti, dans une vaste salle qui s'est trouvée trop petite pour contenir les invités. Sur une estrade improvisée, toute pavoisée de drapeaux français et ottomans et tendue d'étoffes tricolores, les élèves étaient disposés sur un double rang. Eux seuls devaient faire les frais de cette petite représentation. Hâtons-nous d'ajouter qu'ils s'en sont tirés à ravir.

Tout d'abord, l'un d'eux, le jeune Térenzio, qui devait débiter l'Exilé de Lamennais, a ouvert la séance par un petit compliment fort bien tourné, à l'adresse de Monseigneur. Il a commencé par s'excuser sur la simplicité du programme.

Mais toutes choses, a-t-il dit, ont un commencement et ce n'est point pour faire parade de notre savoir que nous avons préparé cette séance. C'est pour nous exercer dans l'étude de la belle langue française et arriver à la parler plus correctement. Nos bons Frères, qui ne négligent rien pour notre instruction, n'auraient eu garde de négliger un moyen si propre à atteindre ce but.

Sans doute, il est bon d'étudier le français dans les livres, de le lire et de l'écrire correctement, mais combien il est préférable de le parler et de le parler avec l'accent qui le caractérise ! C'est à quoi nous travaillons sous l'habile direction de nos maîtres.

Nous ne prétendons pas être arrivés à la perfection, loin de là, mais nous sommes sur la voie, et votre présence ici, Monseigneur et Messieurs, nous est un puissant encouragement pour atteindre un but si désirable. »

Cette petite déclaration, simple et modeste, avait déjà fort bien prévenu l'auditoire. L'expression du sentiment sur lequel il a voulu s'arrêter a paru plus charmante encore :

« J'ai parlé de travaux scolaires, de résultats, d'heureux avenir, avantages qui se résument dans ce mot : Ecole française et par conséquent chrétienne. Mais à qui les devons-nous, ces avantages ? A qui la devons-nous cette école qui nous les assure ? A qui devons-nous ces maîtres que nous chérissons parce qu'ils se dévouent à leurs élèves, sinon à vous, Messieurs les fondateurs, agissant de concert avec le R. P. curé de Makrikeuy, et à la France, dont nous saluons avec bonheur les représentants ici présents, à vous, enfin, Monseigneur qui inspirez toutes les oeuvres écloses autour de vous. »

Nous voudrions pouvoir rendre compte en détail des divers numéros de ce programme. Il y avait là des enfants de toute religion, de toute nationalité, qui ont su dire ou réciter des poésies, des saynètes, des romances, des narrations, des morceaux de tout genre, avec un rare sang-froid et une sûreté de mémoire qui trahissent l'habileté de leurs maîtres et l'excellence de leur instruction française.

Citons, parmi les morceaux qui ont eu le plus de succès : Pauvre petite fleur, ballade dite avec un véritable sentiment poétique par le petit Nahabédian ; l'Hiver, narration, et Souvenir de 1870, poésie du poète canadien Fréchette, récités par le jeune O. Eram, un riverain de Makrikeuy, qui vous a des intonations de gamin de Paris ; une petite fable divertissante mise en valeur par le débit intelligent du jeune Marcopoulo ; une scène dialoguée où nous avons pu voir plusieurs élèves de la 2ième classe, et où un jeune Ottoman en costume de marin s'est fait particulièrement remarquer ; signalons encore un débit par J. Commeno, une narration par Della-Tolla, et enfin une scène comique où le jeune Th. Zagoridès a révélé de sérieuses dispositions pour le barreau. Il nous a prouvé par a + b, que la ligne droite, si elle est le plus court, n'est pas toujours le plus intelligent chemin d'un endroit à un autre. Il nous a même prouvé un tas d'autres choses non moins indiscutables, qui ont eu le mérite d'amuser l'auditoire.

  Il s'amusait si bien, l'auditoire, qu'il a fallu lui répéter le dernier morceau, et que tout le monde regrettait de voir finir cette jolie séance.

Mgr Bonetti l'a dignement close par une petite allocution aux enfants. Il a trouvé pour les féliciter, pour remercier les maîtres et tous les ouvriers de cette belle oeuvre, des paroles venues du cœur.

C'est bien à lui, qui a tant fondé d'Ecoles, qui, au cours de son long apostolat en Orient, a tant fait pour la jeunesse et pour l'instruction, c'est bien à lui qu'il appartenait de consacrer par sa présence les succès de cette nouvelle institution française.

  L'école de Makrikeuy existe ; elle est entre bonnes mains. On peut tout attendre, pour elle, de l'avenir. 

VI 

VISITE OFFICIELLE A L'ORPHELINAT DE STOKE. 

Nous extrayons d'un journal de Nouvelle-Zélande le compte rendu suivant :

« M. W.-C. Walker, ministre de l'Instruction publique en Nouvelle-Zélande, accompagné de son secrétaire, M. Emilius Smith, de M. Trask, maire de Stoke, de MM. Graham et Mac-Kenzie, membres de la Législature, a visité l'orphelinat agricole de Stoke, dirigé par les Frères Maristes.

« En l'absence du Frère Lœtus, directeur, les honorables visiteurs furent cordialement reçus par le C. F. Damien, par les enfants, rangés en ordre de revue, et par la fanfare, qui joua une marche triomphale.

Après une courte inspection des terrains attachés à l'orphelinat, et quelques légers rafraîchissements, eut lieu, dans une des salles de classe, une magnifique réunion. Divers chants furent très bien exécutés, sous la direction des Frères, et des discours prononcés par chacun des honorables visiteurs.

Le R. P. Mahoney, curé de Nelson, et fondateur de l'orphelinat, parla le premier. Il dit aux élèves qu'ils devaient s'estimer très honorés de la visite du Ministre, qui veille sur leurs intérêts, les prend sous sa protection et possède dans les bureaux de son ministère un dossier spécial sur chacun d'eux. Le R. Père se plut à reconnaître que les orphelins étaient élevés de manière à devenir de bons et utiles citoyens, qu'il était content et fier de savoir qu'après leur sortie de l'orphelinat, ils se souvenaient et parlaient avec affection et reconnaissance de leurs anciens maîtres et des soins qu'ils avaient reçus. Plusieurs fois il a rencontré à Wellington des élèves de l'institution, qui étaient tout heureux de se faire connaître ; et, parmi eux, beaucoup occupent d'honnêtes et bonnes situations.

M. Walker fut acclamé par des applaudissements prolongés, quand il se leva pour parler. En quelques mots aimables et pleins de cordialité, il complimenta les Frères sur le travail important auquel ils se dévouent, et les enfants sur leur joyeuse et bonne mine. Il ajouta que la réputation de l'Établissement était excellente, et que le département avait toute confiance dans les Frères et le R. P. Mahoney.

MM. Mac-Kenzie et Graham parlèrent de l'intérêt que l'Etat et la ville prennent à l'institution. Ils disent aux élèves que, quoique la plupart d'entre eux fussent orphelins, ils avaient un père commun dans le R. Père Mahoney, et leur donnèrent plusieurs bons conseils qui furent bien reçus.

M. Trask, laissant parler son cœur, dit qu'il n'avait rien à ajouter aux remarques déjà faites. La visite avait été si précipitamment décidée qu'il n'avait pas eu le temps de leur apporter sa contribution habituelle d'amusements ; mais il ajouta qu'ils ne perdraient rien pour attendre (Applaudissements). Pour le moment, il priait M. le Ministre d'obtenir des chers Frères un congé complet en l'honneur de la visite, ce qui fut accordé et reçu au milieu de claquements de mains prolongés.

M. Emilius Smith complimenta les élèves sur leur chant et leur excellente fanfare. Il les engagea à cultiver ces arts à cause de leur bienfaisante influence sur le caractère et sur les relations avec leurs semblables après leur sortie de l'orphelinat.

Les élèves sortirent pour prendre le repas du soir; et les visiteurs, ayant vu le muséum de l'Établissement, les dortoirs, les salles de classes, etc., signèrent le livre des visites, consignant leur haute appréciation du bon travail accompli par les Frères, et leur estime de la valeur sociale de l'institution. » 

VII 

PÉKIN. 

                                                Lettre de Mgr Favier. 

Pékin, le 25 janvier 1898.

Mon Très Honoré Frère,

Votre bonne lettre du 30 novembre est venue m'offrir des félicitations pour mon élévation à l'Episcopat. Je vous en remercie, mais je vous serais reconnaissant de changer ces « félicitations » contre de bonnes prières pour ce pauvre vieux missionnaire qui, à 60 ans, va porter un nouveau fardeau ! Faites-moi la charité de me recommander aux prières de votre chère Congrégation que j'aime, comme vous le savez, de tout mon cœur.

J'espère que je serai assez heureux pour « asseoir » définitivement à Pékin nos excellents Frères de Marie dont les talents, les vertus et les bons exemples ont subi l'épreuve de sept années.

En attendant, je vous prie dé me croire,

Mon Très Révérend Frère,

Votre très humble et tout dévoué serviteur en J. M. J.

Alph. FAVIER, v. a 

VIII 

QUIBDÓ (Colombie). 

Vers la fin de l'année 1895, sur la demande de Son Excellence le gouverneur du Cauca, quatre Frères partaient de Popayán pour se rendre à Quibdó, où ils arrivèrent après trois semaines d'un voyage des plus pénibles et des plus féconds en curieux épisodes.

Le C. F. Joseph-Célestin, qui, en avril 1897, a fait le même voyage pour aller visiter les Frères, a passé, lui aussi, par des péripéties dont ils nous a donné une relation pleine d'intérêt. Ne pouvant la reproduire ici en son entier, nous en extrayons ce qui suit :

« Quibdó, capitale de l'Atrato, l'une des dix-neuf provinces du département du Cauca, est une petite ville admirablement située pour être le centre du commerce entre l'Atrato, le San Juan et le sud du département de l'Antioquia. Elle est à 400 kilomètres de la mer des Antilles, à 750 kilomètres de Carthagène d'où les bateaux à vapeur peuvent s'y rendre en remontant le cours majestueux de l'Atrato. A peu de distance de la ville commencent d'immenses forêts qui renferment dans leur sein des bois très précieux pour l'ébénisterie et la construction.

« La température moyenne de Quibdó est d'environ 30 degrés centigrades. Son climat est très humide par suite de pluies torrentielles presque journalières. Sa population, d'environ 3.000 habitants, est formée de blancs et de nègres dans la proportion approximative de 1 à 3. Les blancs se livrent particulièrement au commerce ; les noirs, au canotage, à la pêche, à l'agriculture et à l'extraction de l'or.

« Sous le rapport religieux, les Quibdosénos sont assez arriérés, par suite de l'absence presque complète de prêtres pendant de longues années, par suite aussi de la marche irrégulière des écoles. Les Révérends Pères Capucins qui sont établis à Quibdó depuis cinq ans, et ont la charge de toutes les paroisses de l'Atrato, et en partie de celle du San Juan, ont eu beaucoup de difficultés à surmonter pour mettre en honneur, parmi ces populations, les pratiques de notre sainte religion. Malgré tout, ils continuent avec zèle, avec esprit de sacrifice, leur oeuvre de civilisation chrétienne. Déjà on remarque dans l'Atrato une grande amélioration sous le rapport religieux, et surtout au point de vue des bonnes mœurs.

« L'école chrétienne des Frères est là aussi pour rendre plus fécond le travail des Révérends Pères. En moins d'un an et demi, les 140 enfants qui la fréquentent ont fait de tels progrès sous le rapport intellectuel, moral et religieux, que les ennemis mêmes des soutanes s'en montrent émerveillés. De nouveaux élèves des pays circonvoisins s'annoncent pour l'année prochaine. Il y a lieu d'espérer que cette école produira des fruits abondants de civilisation et de salut. Il est regrettable seulement que les Frères de Quibdó soient si isolés et par là même, dans de grandes difficultés pour communiquer avec les autres Établissements de l'intérieur.

« Il serait superflu de dire que, dans le Choco, comme partout ailleurs en Colombie, les Indiens ne se mêlent ni aux blancs ni aux nègres. Ils vivent isolés sur le bord des rivières, loin de toute agglomération. De temps en temps ils vont à Quibdó pour faire leur provision de sel et acheter leurs munitions de chasse. Ils peuvent se passer de tout le reste : pour nourriture, le sancocho (espèce de soupe de bananes) leur suffit ; et pour vêtement ils se contentent de la pampanilla, tout ce qu'il y a de plus simple, de plus rudimentaire. Ils vont à Quibdó de préférence pendant la semaine sainte et la semaine de Pâques. Je m'y trouvais précisément à cette époque, ce qui me fournit l'occasion de les examiner de près. Pauvres gens ! c'est à vous faire peur et pitié par leur affublement, le tatouage et le bariolage de leur peau, par leur ignorance, leur idiotisme.

« Enivrés par l'eau-de-vie que les blancs leur avaient fait boire, ils parcouraient les rues, titubant, se traînant les uns les autres, jetant des cris incohérents et sauvages. Quelle mission pour les Capucins que celle d'avoir à civiliser, à améliorer ces pauvres Indiens qui n'ont de chrétien que le nom, qui vivent dans une ignorance absolue, qui ne peuvent ou ne veulent rien apprendre.

« En disant qu'ils vont à Quibdó aux fêtes de Pâques, je ne veux pas dire que c'est la piété qui motive leur voyage. Ils y vont par curiosité, pour voir les cérémonies religieuses, les processions, et prendre part aux divertissements profanes par lesquels les blancs les attirent dans un but de spéculation.

« Parmi les réjouissances publiques du saint jour de Pâques, il en est une tout à fait singulière. Les blancs représentent un juif par un mannequin gigantesque, qu'ils emplissent de chiffons, de fusées, de serpenteaux et autres engins explosifs. Le mannequin est exposé au milieu de la place publique, et au moment convenu on y met le feu. Aussitôt les objets explosifs qu'il renferme éclatent coup sur coup et le font sauter dans tous les sens. Pendant ce temps les Indiens dansent, gambadent chantent, crient, beuglent. Puis, avant que le simulacre de juif soit entièrement consumé par le feu, ils s'élancent sur lui, lui enlèvent la coiffure, lui arrachent les habits, l'écartèlent, le mettent en pièces en proférant cette malédiction : « Judio malvado por qué mataste al Cristo? Véte à los infiernos ; maldito seas para siempre. Méchant juif, pourquoi as-tu tué le Christ? Va-t'en aux enfers ; sois maudit pour toujours. »

Tel est le pays où nos Frères avaient à exercer leur zèle et leur dévouement. A leur arrivée, sans s'effrayer des difficultés, ils se mirent à l’œuvre avec une ardeur et un courage tout apostoliques. Dieu bénit leurs travaux et leurs généreux efforts, ainsi que l'attestent les deux lettres que nous reproduisons ici. 

V. J. M. J.

                                                                      Quibdó, le 2 juillet 1897. 

       «  MON TRÈS REVÉREND FRÈRE SUPÉRIEUR,

Je suis tout heureux de répondre à vos désirs, par rapport à ce qui peut intéresser notre chère Congrégation dans cette région lointaine. La présente réjouira votre cœur paternel, je n'en doute pas. Son contenu vous montrera, à la fois, la gloire de Dieu s'étendant par le moyen de bien faibles instruments, et la maternelle protection de Marie se manifestant sur I'Œuvre  confiée à ses Petits Frères à Quibdó.

« Selon que je vous l'ai écrit dans une autre lettre, à notre arrivée ici nous avons trouvé les enfants fort abandonnés. La terre qui nous était échue présentait un aspect désespérant pour les pauvres ouvriers chargés de la défricher. Il ne fallait cependant passe décourager : puisque le divin Pasteur, le Dispensateur de tout bien, le souverain Maître de tous les cœurs, nous appelait à ce travail, il devait certainement nous donner son assistance. Nous la lui avons demandée par Marie Immaculée, que nous avons établie la première Directrice de notre école. Après Dieu, c'est à Marie que nous devons de voir sitôt les enfants presque entièrement transformés, et les familles contentes, malgré l'esprit d'indifférence, d'irréligion et même d'opposition qui domine dans cette population.

« Le 27 mai a été vraiment un jour de bonheur pour nous et de triomphe pour la religion. D'accord avec les Révérends Pères Capucins, curés et missionnaires de Quibdó et de tout le Choco, nous avions fixé à ce jour de la fête solennelle de l'Ascension, la première communion de dix de nos élèves. Je n'ai pas besoin de vous dire, mon Très Révérend Frère Supérieur,. que nous avons entouré de toute la pompe possible cette importante et sainte cérémonie. Déjà, à partir du mois de septembre, nous avions eu à cœur de préparer les enfants à ce grand acte ; tous les jours de vacances j'avais fait un catéchisme spécial à cette fin. Les exercices du mois de Marie avaient été dirigés au même but et n'avaient pas peu contribué aux bonnes dispositions des jeunes convives ; enfin, une bonne retraite de quatre jours, prêchée par les bons Pères avait achevé leur préparation. Aussi combien ces enfants paraissaient heureux ! Les élèves qui avaient déjà communié les ont accompagnés à la sainte Table. Des chants pieux, exécutés sous la direction du C. F. Léonard, ont précédé et suivi le divin banquet. Vers les quatre heures eut lieu le renouvellement des promesses du Baptême, cérémonie qui a produit beaucoup d'impression sur l'assistance. Enfin, cette belle et touchante fête s'est terminée par l'imposition du saint scapulaire à 60 de nos élèves.

« Que pouvait-on attendre de plus de ces pauvres enfants qui, deux ans auparavant, ne connaissaient pas le chemin de l'église, parce que personne ne pouvait leur dire qu'on est plus heureux de servir Dieu, et qu'il est des plaisirs plus purs et plus vrais que les plaisirs des sens.

« Oui, mon Très Révérend Frère Supérieur, l'éducation chrétienne de la jeunesse fait entrevoir des jours meilleurs pour cette population abandonnée. Les Révérends Pères, par leur zèle soutenu et la sainteté de leur vie, ont fait beaucoup déjà ; mais, comme la vieille chair a pris son pli, les meilleures espérances reposent sur l'enfance. Les Frères peuvent faire ici beaucoup de bien avec l'aide de Dieu et la protection de Marie.

« Afin de travailler plus efficacement et d'assurer, autant que possible, les fruits de nos travaux, je rêve depuis longtemps une association de jeunes gens qui, excités par un motif apparent d'étude et de récréations agréables, se réuniraient les dimanches et les fêtes et trouveraient ainsi la facilité d'accomplir leurs devoirs religieux ; sans quoi nos élèves, à leur sortie de l'école, oublieront pour la plupart qu'ils ont une âme à sauver. J'ai soumis le projet au cher Frère Visiteur, qui m'a encouragé à faire un essai. Déjà 16 de la 1ière classe ont accepté la proposition. Après les examens qui vont avoir lieu dans quelques jours, j'enverrai une députation solliciter le concours des pères de famille pour l'achat d'une petite bibliothèque composée d'ouvrages choisis.

« Nous mettrons l'association sous la protection spéciale de saint Joseph, sous le nom de Circulo de San José. Votre approbation, mon Révérend Frère, ne nous fera pas défaut, je l'espère.

« Les excellents confrères que vous m'avez donnés rivalisent de zèle dans l'accomplissement de leurs devoirs, surtout les professeurs; ils sont toujours disposés aux plus généreux sacrifices. Le C. F. Léonard et le C. F. Jorge ne jouissent pas d'une bonne santé, particulièrement depuis quatre mois ; ils se sont vus à la veille d'abandonner le poste, et, dans cette vue, le C. F. Visiteur nous avait autorisés à aller passer nos vacances à Cali. Bien qu'il nous eût été très agréable de revoir nos confrères de l'intérieur, nous fûmes arrêtés par la considération de la forte dépense, de la perte de temps, et surtout de la privation de la messe et de la communion pendant un mois et demi qu'aurait duré le voyage. A la suite d'une petite amélioration de santé nous avons résolu d'un commun accord de passer encore une année à Quibdó. Si rien ne vient changer nos plans nous ferons notre retraite du 8 au 15 août. Le reste du temps, comme l'année dernière nous l'emploierons à étudier et à donner des leçons trois fois par semaine à tous les enfants qui voudront y assister, afin d'empêcher l'ouverture d'autres écoles, où nos élèves iraient perdre le peu de religion et de morale qu'ils possèdent.

« D'ailleurs cela nous distraira un peu, attendu qu'ici nous ne pouvons pas faire de promenades, ni longues, ni courtes. Nous nous voyons ainsi réduits à notre logis les 365 jours de l'année, ce qui certainement n'offre rien d'agréable à la nature. Pour supporter un tel état, nous avons grandement besoin de l'aide d'en haut.

« Avant de terminer cette monotone et longue lettre, je vous prie, mon Très Révérend Frère Supérieur, de nous prêter le secours de vos bonnes prières et de nous recommander à celles de tous nos Frères de France, afin que l'action de la grâce agisse plus efficacement sur nous. J'ai aussi à vous demander pour notre petite communauté la permission de faire un jour de retraite après chaque trimestre : cela nous retrempera dans la ferveur de la retraite annuelle, et nous aidera à accomplir avec une fidélité toujours croissante nos devoirs de religieux missionnaires. Enfin, je vous conjure, en mon nom et en celui de mes dignes confrères, de nous donner votre paternelle bénédiction ; et j'ai la satisfaction de vous dire que je ne vous oublie pas un seul jour dans mes prières et dans mes communions.

« Je suis avec un profond respect, etc.

« Frère MANUEL. » 

Malheureusement nos courageux missionnaires avaient trop présumé de leurs forces. La fièvre paludéenne qui depuis plusieurs mois minait la santé de trois d'entre eux, les obligea tous à quitter Quibdó au mois de septembre 1897. Mais pendant qu'il était retiré à Cali le C. F. Directeur, comme le Bienheureux Jean de Brito, l'un des apôtres des Indes, entendait une voix intérieure qui le rappelait à Quibdó. Favorisé d'une bonne santé, il se remit en route pour reprendre son apostolat, et trois nouveaux Frères se joignirent vail­lamment à lui.

La lettre qui suit va nous dire comment ils furent reçus. 

                                                                                  Quibdo, le 27 mars 1898. 

     « Mon Très Révérend Frère Supérieur,

« Du milieu des solitudes du Chocó, je vous adresse avec le plus grand plaisir un respectueux et affectueux salut. Grâce à Dieu, à Marie et à votre bienveillance paternelle, me voilà de nouveau sur ce champ des saints combats que j'ai abandonné avec tant de peine, il y a six mois, pour soustraire deux de mes Frères à une mort presque certaine. Cette fois, la communauté parait se composer de membres robustes, qui, favorisés par les bonnes conditions de logement que nous offre la maison des Pères Capucins, résisteront beaucoup mieux, je l'espère, au climat destructeur de ce pays.

« Notre voyage de Cali à Quibdó, qui a duré dix-huit jours, n'a été qu'une suite de bénédictions du Ciel. Ce n'est pas qu'il nous ait offert beaucoup d'agréments ; non, au contraire, rien ne nous a manqué de ce qui peut rendre un voyage désagréable et pénible : ni la faim, ni la soif, ni les fatigues, ni les insomnies, ni les incommodités de toute nature, ni les périls pendant une navigation de onze jours en pirogue, ni le désagrément de se faire porter sur le dos de nègres qui n'ont rien d'attrayant, ni les contretemps de toutes sortes mais grâce à Dieu, nous n'avons eu à subir aucun accident fâcheux, ni aucun malaise notable.

« Notre arrivée à Quibdó a été un vrai triomphe. Les Révérends Pères Capucins, qui avaient été instruits de notre approche, quelques heures avant notre apparition, n'eurent rien de plus pressé que d'équiper leur petit bateau pour venir à notre rencontre, et la nouvelle de notre arrivée se répandit dans tout le pays. A 7 h. ½ du soir, le clocher et la maison des Pères étaient brillamment illuminés ; grand nombre de gens occupaient les balcons, et les enfants étaient assemblés sur la plage de l'Atrato. Lorsque, à 8 heures, notre embarcation apparut à l'embouchure du Quito, en face du pays, les cloches commencèrent à nous saluer par un joyeux carillon ; bientôt s'y mêlèrent les détonations de pétards et les acclamations de la foule. L'enthousiasme croissait à mesure que nous approchions, les cris de « Vivan los Hermanos Maristas» retentissaient de toutes parts.

« A peine eûmes-nous mis pied à terre que nos élèves, depuis si longtemps orphelins, nous assaillirent pour nous serrer la main. Puis, en parcourant les rues, ils ne cessaient de répéter leurs joyeux vivats. Ils furent même assez malicieux pour se rendre en foule et faire une petite démonstration (pas méchante toutefois) sous les fenêtres de l'ancien maître d'école, qui avait repris ses fonctions depuis un mois.

« Je n'ai pas besoin de vous dire, mon Très Révérend Frère Supérieur, que si les parents et les enfants nous ont désirés et se sont réjouis de nous posséder de nouveau, personne n'a surpassé les bons Pères Capucins dans la manière aimable dont nous avons été accueillis. Ils nous ont manifesté, en public et en particulier, les plus touchantes sympathies pour nous et notre Congrégation. Ils semblent n'avoir plus rien à désirer depuis qu'ils nous ont auprès d'eux et associés à leurs efforts pour l'évangélisation de ce peuple. Il y a déjà un mois que nous mangeons à leur table, à cause du retard dans les travaux qui doivent rendre notre habitation tout à fait indépendante, et je n'ai pu obtenir de contribuer à l'achat des provisions ; ils multiplient les procédés aimables et charitables à notre égard jusqu'au point de me couvrir de confusion. Que le bon Dieu daigne bénir et récompenser ces dignes enfants de saint François.

« Notre école fonctionne depuis le 9 du courant, avec cent vingt enfants inscrits. Les longues vacances nous en ont fait perdre quelques-uns ; mais j'espère qu'ils seront bientôt remplacés par des nouveaux.

« Mon Très Révérend Frère Supérieur, je vous ai déjà fait part d'un projet qui me préoccupe depuis notre établissement à Quibdó : la formation d'une société de jeunes gens, sous le titre de « Circulo de San José», destinée à conserver dans les pratiques de notre sainte religion, les élèves qui sortent de notre école. (lci le bon Frère Directeur nous fait part des moyens que son zèle lui suggère pour arriver à se procurer des ressources en vue de créer l'Association projetée.)

« Le 15 août prochain sera, je l'espère, une fête bien solennelle pour notre petite communauté ; car, en plus de la fête patronale de notre Institut, nous célébrerons la profession du cher Frère Polyme, mon sous-directeur, et l'émission du vœu d'obéissance des deux jeunes Frères Romulus et Rosendo. Les bienfaits du ciel nous accablent ; je vous en prie, mon Révérend Frère, remerciez bien le bon Dieu et la bonne Mère pour vos enfants de Quibdó et daignez les bénir. Tous vous saluent très respectueusement et bien affectueusement.

« Je suis avec un profond respect, etc.

« Frère MANUEL. » 

IX 

OCÉANIE. 

                      Lettre du Cher Frère Philippe, directeur à Apia. 

                                                                                          Apia, le 23 février 1898.

Mon Très Cher Frère Assistant,

« Nous venons de recevoir la belle Circulaire du Révérend Frère Supérieur général. Comme nous la lisons avec avidité et bonheur ! Rien ne nous cause de plus grande joie que ce qui nous arrive de Saint-Genis, de nos chers et vénérés Supérieurs. Les bonnes nouvelles de nos Frères établis en Chine et en Amérique nous ont fait un immense plaisir. J’espère qu'un jour nous aurons aussi la visite de notre bon Frère Supérieur Général, ou au moins de son représentant, notre Cher Frère Assistant. En réalité, ce n'est qu'à Samoa ou à Fidji que vous pourrez vous faire une juste idée de la vie de missionnaire.

Nous avons lu les Panégyriques du V. P. Champagnat. Cette lecture nous a tenus constamment dans l'admiration et nous a fait le plus grand bien. Plus que jamais nous aimerons notre Vénérable Père et nous nous efforcerons de l'imiter pour mériter sa protection…

Selon que je vous l'ai promis, mon Cher Frère Assistant, j'ai la satisfaction de vous donner ici la relation du voyage autour de l'île Upolu, dans lequel j'ai eu l'honneur d'accompagner Sa Grandeur Mgr Broyer, peu après son retour de son voyage en France, où il venait de recevoir la consécration épiscopale.

Le 12 août 1897, à 6 heures du matin, trois embarcations abordent devant notre maison. Deux sont pour le collège de Vaca; plusieurs Pères y prennent place, avec un sous-diacre samoan, le P. Xavelio. La troisième appartient à un grand chef protestant, d'un village près d'Apia. Il est venu lui-même avec des jeunes gens pour conduire Monseigneur dans sa tournée épiscopale. C'est dans cette embarcation que s'embarque Sa Grandeur, avec le P. Joane, samoan, le Fr. Philippe et le Fr. Marie-Alfred. Il y a en tout environ soixante personnes. Lorsque tout le monde est placé, Monseigneur dit à haute voix : « Sisi le fua hissons le drapeau », ce qui signifie : Faisons le signe de la Croix: Alors tous se signent à haute voix; et en avant pour la première station Falefa, qui est à 4 ou 5 heures de distance ! Les rameurs entonnent leurs chants cadencés et ne les discontinueront plus jusqu'à leur arrivée. Malgré l'heure matinale, de tous les côtés du port on sort des maisons pour voir' partir la petite flottille, et tirer des coups de chapeau à Monseigneur en guise de coups de canon. Je ne dois pas oublier de mentionner que le drapeau français et le blason de Sa Grandeur ornaient chaque embarcation.

D'Apia à Falefa, la navigation est des plus agréables.Pendant plusieurs heures, tout en prenant part aux joyeuses conversations du bord, j'admire les beautés de la nature, parsemées sur la côte. Mais hélas ! je devais expérimenter qu'il n'y a pas de roses sans épines : une heure avant d'arriver, je fus pris du terrible mal que connaissent ceux qui ont navigué sur mer.

A 10 h. 30, nous apercevons le sémaphore de Falefa signalant notre escadre (Le R. P. Chouvier avait fait attacher quelque chose, comme un mouchoir, à une grande perche plantée sur un petit promontoire. )

A 11 heures, nous sommes en terre ferme. Deo gratias ! Plus de mal de mer!

Le bon Père Chouvier, curé de Falefa, est âgé de près de 70 ans, Il y a bientôt quarante ans, qu'il est à Samoa ou à Falefa. Il ne tarde pas à venir vers nous, accompagné de trois enfants de chœur et de ses paroissiens. au nombre d'environ 400. (Falefa possède la plus grande population catholique de tous les villages d'Upolu.)

Après la cérémonie d'usage, la procession se forme et se rend à l'église du Sacré-Cœur où Monseigneur prononce un beau petit sermon, religieusement écouté, et donne ensuite sa bénédiction.

La première soirée est employée à recevoir les talolos. On appelle ainsi un village, ou seulement un groupe d'hommes, de femmes ou d'enfants qui se réunissent pour apporter une offrande de vivres : cochons[1]vivants ou rôtis, poules, poissons, taros, bananes, etc. C'est une soirée bien amusante ; car à Falefa il y a un fou (le fou du roi) qui préside à tous les talolos et fait l'énumération de ce que chaque personne offre à Monseigneur, en y ajoutant les remarques les plus comiques. A l'exemple du célèbre Triboulet, ce fou jouit du privilège d'insulter tout le monde impunément ; il a de plus celui de prendre pour lui les plus beaux présents.

Toutes les offrandes déposées dans la cour comprennent vingt-cinq cochons rôtis, une centaine de poissons, des milliers de taros, ignames et bananes.

Le fou gambade tout autour pendant quelques minutes et, finalement, fait choix du plus gros cochon et d'un tonneau de bœuf.

On procède ensuite au partage de toutes ces victuailles, Monseigneur reçoit la première et la plus grosse portion, composée d'un gros cochon, d'une demi-douzaine de poules, d'une dizaine de poissons, d'une cinquantaine de taros, etc. Les Pères et les Frères reçoivent aussi leur part séparément, et le reste est partagé entre-les autres personnes présentes. Le banquet a lieu sur place, et les convives ne se retirent que lorsqu'il ne reste absolument plus rien.

Comme il ne convenait pas que Sa Grandeur et sa suite prissent part au banquet sur la pelouse, le Révérend Père Chouvier leur fit les honneurs dans sa maison presbytérale, où des planches placées sur des tonneaux formaient des tables et des chaises répondant au nombre des convives. Les couteaux, les fourchettes et les verres ne répondirent pas précisément aux besoins du moment; mais ceux qui en manquèrent se tirèrent tout de même d'affaire.

Le menu pour 8 personnes consistait en une soupe de pigeons aux taros, 8 pigeons rôtis, 3 homards, 3 poissons, 2 omelettes de 40 oeufs chacune, des taros ou ignames en quantité, une cruche d'eau fraîche. pour boisson, et le café à la fin du dîner.

Le lendemain de notre arrivée, après la messe, Monseigneur administra le sacrement de confirmation à une quarantaine d'adultes, parmi lesquels plusieurs chefs convertis ; et une dizaine d'autres adultes reçurent le sacrement de baptême. Une foule nombreuse assistait à ces imposantes cérémonies. L'église dans laquelle elles eurent lieu est une des plus belles et des plus grandes d'Upolu : elle a environ cent vingt pieds de long sur une trentaine de large ; elle est toute en pierre, avec un superbe clocher. Le roi Mataafa a aidé à sa construction. Un de ses fils est chef du pays et, par son influence, rend de grands services aux missionnaires.

Lors de notre passage à Falefa, on construisait une maison d'école pour les filles. Elle est maintenant terminée, et trois Sœurs indigènes y ont été installées le mois dernier.

Le 14 août, à 3 heures du matin, nous nous remettons en route, encore malheureusement par mer. A peine sommes-nous sortis du port, que le pauvre Frère Philippe sent dans tout son organisme une perturbation dont la cause ne lui est pas inconnue. Pendant plus de quatre heures, ce sont des haut-le-corps, dont le F. Alfred ne fait que rire, mais qui n'en sont pas moins pour moi un purgatoire dont j'ai été bien aise de voir le terme.

A 7 h. ½ on nous débarque à dos de nègre devant la belle église d'Aléipata, paroisse de prédilection de Mgr Broyer, qui y a demeuré de nombreuses années. Aussi lui fait-on une réception on ne peut plus splendide. Ce n'étaient partout que guirlandes et arcs de triomphe. Arrivé à l'église, que l'on avait décorée comme aux plus grandes fêtes, Monseigneur monta en chaire au milieu des larmes de joie de ses chères ouailles; mais à peine a-t-il dit quelques mots, que lui-même se sent ému aussi jusqu'aux larmes et qu'il est obligé de retourner à l'autel, d'où il donne sa bénédiction à ce bon peuple. Ensuite, il dit sa messe, pendant laquelle les indigènes chantèrent plusieurs de leurs plus beaux cantiques. Nous eûmes le bonheur d'y faire la sainte communion, et, après l'action de grâces, nous allâmes, avec Monseigneur, prendre le café au lait au presbytère. (A Samoa, ce n'est pas jour de jeûne, bien que ce soit la veille de l'Assomption : on ne jeûne que les veilles de Noël et de Pâques et les vendredis du carême). Le Révérend Père Estienne, curé d'Aléipata, a à peu près le même âge que Mgr Broyer. Ils étaient tous les deux zouaves pontificaux dans le même régiment, et ils ont pris part à la guerre de 1870, sous le commandement du général Charette.

Après. le déjeuner, nous accompagnons Monseigneur chez les Sœurs de Notre-Dame des Missions, dont le couvent est à cinq minutes du presbytère. C'est une Française, du diocèse de Lyon (sœur Marie de la Miséricorde), qui est supérieure et fondatrice de ce couvent. Il y a quarante ans qu'elle est à Samoa. Elle a sous sa direction une dizaine de Sœurs samoanes, qui sont chargées d'une école européenne (anglaise) et d'une école indigène. Ces Sœurs réussissent très bien et rendent de grands services dans les Missions.

Après cette visite commencent les talolos comme à Falefa, hormis les grimaces du fou, mais avec accompagnement de danses, divertissement innocent qui fait partie de toutes les fêtes. Le kava se fait et se distribue généralement pendant les danses. Si l'on ne veut pas que cette boisson occasionne des nausées, il est prudent de ne pas regarder comment elle se fabrique ; mais ce qu'on ne peut pas empêcher, c'est l'effet malfaisant qu'elle produit sur les yeux.

Le jour de l'Assomption, il y a eu à Aléipata messe pontificale à laquelle le sous-diacre Xavelio a reçu le diaconat, cérémonie qui a fort impressionné les indigènes. Après la messe la confirmation a été donnée à une vingtaine d'adultes. Ensuite on se rend au presbytère où se fait une distribution solennelle de kava, à laquelle prennent part les chefs du pays. Tous semblent très heureux de converser avec leur bien-aimé Père ; les yeux fixés sur lui, ils ne perdent pas une seule de ses paroles.

Cette belle journée est terminée par un salut solennel.

A Aléipata se trouve un grand chef protestant qui est la terreur du pays. Il a tué de sang-froid son frère sans que personne ait osé le lui reprocher. Le roi ne peut pas s'en emparer; mais il lui a défendu de mettre les pieds à Apia, sous peine d'être jugé et pendu. Cependant il s'est fait l'ami du Père Estienne et il a laissé baptiser ses enfants.

Le 16 août c'est le village d'Amaile pays de Mataafa[2]qui à son tour est en fête. Monseigneur bénit solennellement la nouvelle église. La population toute catholique vient ensuite apporter ses offrandes à Sa Grandeur. Amaile l'emporte en générosité sur les autres villages : 60 cochons rôtis ne forment qu'une partie de son riche tribut ! La famille du roi Mataafa se distingue particulièrement par sa générosité voulant prouver ainsi à Monseigneur sa reconnaissance pour ses efforts tentés en vue d'obtenir le prompt retour du roi Mataafa et de ses proches exilés.

Le 17 août nous quittons Aléipata pour nous rendre à Lotofaga. Sur notre route nous nous arrêtons au petit village de Satitoa où Monseigneur bénit une belle petite église nouvellement construite et y célèbre la première messe.

La cérémonie religieuse est suivie des talolos et des danses selon l'usage. A midi nous partons pour Lotofaga où nous arrivons à 5 h. ½ Il y a là une belle et vaste église construite en pierre, mais non achevée. Le Père Estienne dessert provisoirement cette station. La réception que fait à Monseigneur la bonne population catholique, n'est ni moins chaleureuse, ni moins enthousiaste qu'ailleurs.

En raison de l'exiguïté et de la pauvreté du presbytère, nous avons dû, avec le Père Estienne et le Père Joane, passer la nuit chez le catéchiste, bien qu'il n'eût à nous offrir pour lit que la terre avec une couche de petits cailloux pour matelas.

Le 18, au matin, nous allons recevoir les talolos. Puis viennent les danses qui se prolongent bien avant dans la soirée, et dont nous devons rester jusqu'à la fin les spectateurs, si nous ne voulons pas faire de la peine à ces bons indigènes.

Le soir, à souper, on nous sert un nouveau plat : ce sont des espèces de galettes cuites au four, agréables au palais, mais dont l'odorat délicat s'accommode fort peu, à cause des bananes pourries dont elles sont en partie composées.

Le lendemain, confirmation de 16 adultes ; après quoi nous nous dirigeons sur la station de Faléalili. A 3 heures du soir, nous arrivons à Faléalili, où il n'y a que trois familles catholiques sur 3.000 indigènes que compte le district. La réception n'en est pas moins splendide, grâce au grand nombre de protestants qui veulent être de la fête, ayant à leur tête le grand chef du pays qui a fait préparer et orner sa belle case pour recevoir Monseigneur et sa suite… Lorsque, le soir, Sa Grandeur reçoit les talolos, les protestants se joignent aux catholiques et ne semblent faire avec eux qu'un seul et même troupeau.

Après un somptueux souper, préparé par une famille catholique et servi dans la case du chef, et lorsque la prière du soir, faite en commun, fut terminée, Monseigneur fit demander au grand chef s'il lui serait agréable d'avoir une conférence pour lui et ses gens pendant la veillée. Sur sa réponse affirmative, Sa Grandeur parla jusqu'à minuit devant un nombreux auditoire, et répondit aux questions que les chefs lui adressaient, de manière à les remplir d'étonnement et à leur faire dire que jamais personne ne leur avait si bien parlé, ne les avait si bien éclairés sur l'Eglise catholique. Il faut dire que si Mgr Broyer a le talent de se faire écouter, il a avant tout celui de se faire aimer.

A minuit, la conférence est terminée ; nous allons prendre un peu de repos sur… de petits cailloux ; et, quand paraît le jour, les Révérends Père disent leur messe en se servant de malles pour autels. Ensuite Monseigneur dit la sienne dans la case où l'on a préparé un magnifique autel. L'assistance, composée de catholiques et d'un bon nombre de protestants, y compris le grand chef, y récite la prière du matin et chante des cantiques.

A l'issue de la messe, il y eut trois baptêmes d'enfants de catholiques. Plusieurs protestants désiraient aussi faire baptiser leurs enfants ; mais le sel manquant, on leur dit qu'un missionnaire viendrait une autre fois pour baptiser ceux qui seraient prêts.

La station de Faléalili n'a pas d'église, attendu que les catholiques n'y sont pas assez nombreux ; mais beaucoup de protestants paraissent disposés à se faire catholiques.

Le 20 août, nous nous rendons de Faléalili à Safata, où nous arrivons à 4 heures du soir, au bruit des salves d'artillerie (petites pièces). Monseigneur est reçu sous un bel arc de triomphe et conduit en procession à l'église où il adresse une petite allocution et donne sa bénédiction.

Par suite du manque d'ouvriers évangéliques, Safata est actuellement sans desservant en titre, quoiqu'il y ait une belle église en pierre et que la population soit presque toute catholique. Le chef (un protestant converti), veille à ce que les protestants n'y prennent pas trop d'influence. C'est lui qui a donné à la mission le terrain où l'on a construit l'église et le presbytère, outre un champ immense pour les plantations du missionnaire.

A défaut de prêtre missionnaire, c'est un catéchiste qui préside à Safata aux prières de tous les jours et qui fait le sermon le dimanche.

A notre arrivée à Safata, nous trouvons le C. F. Hilaire et le C. F. Macaire, venus à pied à travers les montagnes, à notre rencontre. Nous devons même au C. F. Macaire la préparation de l'excellent souper qui nous a été servi.

Le village de Safata est renommé pour les moustiques. Malheur à vous si, pendant la nuit, vous n'avez pas soin de bien fixer votre moustiquaire, des légions de moustiques vous assaillent et vous forceront à passer la nuit à la belle étoile, comme cela est arrivé au F. Marie-Alfred.

Le 21 août, après la messe, Frère Hilaire et moi reprenons à pied la route d'Apia, sans attendre la fête. Il nous faut trois heures d'ascension jusqu'à mi-chemin, où se trouve une maison appartenant au chef de Safata. Nous y entrons ; on nous y sert un bon dîner ; ensuite nous nous remettons en route et, après une descente de trois heures, nous arrivons à Apia, bien contents, bien portants et prêts à nous remettre à la besogne.

Monseigneur, les Révérends Pères et le C. F. Macaire sont revenus à pied le lendemain, par le même chemin que nous. Quand au C. F. M.-Alfred, il préféra contourner l'île dans une embarcation. Mais il regretta bientôt de ne nous avoir pas suivis, car, étant seul blanc avec les indigènes, il n'était guère rassuré sur son sort. « Qui sait, se disait-il, s'ils ne vont pas me mener dans quelque endroit isolé et me mettre à la broche ? » A son débarquement à Apia, il était encore tout tremblant. Les braves indigènes, qui s'étaient aperçus de sa frayeur, nous dirent en avoir bien ri. Sous ce rapport, il n'y a rien à craindre à Samoa : les indigènes ne sont pas anthropophages ; on dit qu'ils ne l'ont jamais été.

Maintenant que j'ai terminé le récit de mon voyage, permettez-moi, cher Frère Assistant, d'y ajouter quelques petits détails quipourront vous intéresser.

Il ne vous sera pas indifférent d'apprendre que le diacre Xavelio, dont j'ai parlé plus haut, a été ordonné prêtre le 8 septembre, à Leulumœga, son pays natal, et qu'il est maintenant vicaire à Lotofoga et desservant de Faléalili. Comme le P. Joane, il réussit très bien. Un autre séminariste samoan se prépare aussi aux saints ordres. Quand donc aurons-nous aussi de bons Frères samoans ?

Kelemete, qui aura bientôt deux ans de noviciat, donne de belles espérances. Il fait très bien sa petite classe anglaise ; mais c'est surtout à l'école samoane qu'il rend le plus de services : il y est chargé d'une division de plus de 20 élèves qu'il discipline parfaitement et dont il sait se faire craindre et aimer. Son petit camarade Vito pourra bientôt aussi prendre une division à l'école samoane.

Nous avons actuellement 55 élèves samoans. La nouvelle construction en planches ne laisse rien à désirer : elle a 40 pieds de long sur 22 de large, 16 fenêtres de 5 pieds de haut et 3 portes. Une couche de petits cailloux recouverts de nattes sert de plancher, de sorte qu'on n'y entend aucun bruit de pieds. Nos petits Samoans savent aussi se passer de bancs ils s'assoient par terre pour lire, écrire, calculer, etc. ils ont cependant, pour l'écriture appliquée, des planches fixées aux murs par des charnières. L'école sert également de dortoir. Chaque élève a sa natte qu'il étend d'ans un endroit assigné, dès que la cloche sonne le coucher ; alors chacun se met en position de dormir, après avoir chanté : In manus tuas, Domine, etc.; et le silence se fait jusqu'au son de la cloche du lendemain, qui met tout le monde sur pied en un clin d’œil.

Les élèves assistent à la messe pendant laquelle ils récitent la prière du matin et chantent des cantiques. Après la messe, classe d'une heure (demi-heure de catéchisme et demi-heure d'écriture). Ensuite, chacun va dans sa famille jusqu'à 5 heures du soir, où tous reviennent pour la prière à l'église. A 7 heures, la classe recommence : demi-heure de lecture, demi-heure d'arithmétique et un quart d'heure de chant.

Tous ces enfants sont si sages qu'ils me procurent les plus douces consolations, et que jamais je n'ai besoin de les punir …..

Je suis avec un profond respect, etc.

Frère PHILIPPE. 

LES OEUVRES DE JEUNESSE 

Il n'est aucun d'entre nous, mes très chers Frères, qui, après s'être dévoué pendant plusieurs années pour donner à ses élèves l'éducation intellectuelle et morale, n e désire les voir persévérer, après leur sortie de l'école, dans la pratique de leurs devoirs religieux. Cependant, nous avons trop souvent à gémir sur l'indifférence dont un trop grand nombre donnent l'exemple, particulièrement dans la sanctification du dimanche.

Par quels moyens pouvons-nous contribuer à assurer cette persévérance que nous désirons tant, et à faire des hommes chrétiens après avoir fait des écoliers chrétiens ?Ce sera par des associations qui peuvent être regardées comme le complément nécessaire de l'école chrétienne.

Beaucoup de jeunes gens, même parmi les meilleurs, se laissent gagner par le respect humain et craignent d'être vus lorsqu'ils sont isolés ; groupez-les, ils n'ont plus peur. Par là, on voit combien est puissant le moyen de persévérance que donne l'Association.

  L'Association s'appelle patronage, oeuvre ou Société de persévérance, Congrégation, Cercle catholique. Ces œuvres sont recommandées par Notre Saint-Père le Pape Léon XIII; mais, pour qu'elles répondent à ses intentions, il faut qu'elles aient en premier lieu pour fin d'aider nos anciens élèves à persévérer dans la foi et les habitudes religieuses. Toute oeuvre qui ne vise et n'atteint pas ce but n'est pas une oeuvre de persévé­rance. Ainsi, les orphéons et les musiques avec leurs concours, les séances dramatiques nombreuses et bril­lantes ne constituent pas, quelque honnête qu'en soit l'intention, une oeuvre de persévérance. Ce n'est pas en se bornant à des jeux qu'on fait le bien.

L'association, telle qu'il faut l'entendre, est sous la direction spirituelle du prêtre ; quelquefois même il s'en réserve l'organisation matérielle, et il se borne à demander le concours des Frères des écoles. Si l’Association offre aux jeunes gens des distractions et des délassements honnêtes, elle cherche surtout à atteindre leurs âmes en leur facilitant par diverses industries, la pratique de leurs devoirs de religion, de famille et de société. Dans ces oeuvres de persévérance, le, jeune homme trouve un Directeur de conscience à sa disposition, des conseillers sages et expérimentés prêts à le soutenir, à le consoler, à l'encourager; il rencontre de bons camarades, pensant, croyant, priant comme lui. De plus, il y a là les inappréciables avantages attachés à l'union des esprits et des cœurs, c'est-à-dire force, appui, entraînement au bien, ferveur communicative dans la prière, etc.

Des avantages attachés aux oeuvres de persévérance, il faut conclure, mes très chers Frères, que nous ne pouvons ni ne voulons y rester indifférents.

Le pourquoi des associations étant admis, il s'agit de savoir quelles seront ces associations. Cela dépend de diverses circonstances de temps, de lieu, de personnes. Un prêtre instituteur propose un système que je crois bon de vous faire connaître loi, système qui a pour lui, dit-il, des autorités fort respectables. 

La première association est celle des petits enfants qui n'ont pas encore fait la première communion. On l'appelle l'Association des Saints Anges gardiens ; mais le nom importe peu.

Les réunions sont hebdomadaires. Après une prière qui ne devra pas être longue, mais bien faite, et suivie de l'appel, il y aura une causerie pieuse dans laquelle on racontera un trait d'histoire édifiante, et on rappellera une vérité importante de la religion. On signalera ensuite une pratique du patronage ou de la vie chrétienne, qui sera fortement inculquée et recommandée.

Pour avoir des arbres sains et vigoureux, qui plongent leurs racines dans le sol et bravent les tempêtes, il faut soigner les pépinières. Aussi les directeurs de patronage, les éducateurs des enfants, qui ont conscience de leur mission, ont-ils soin, s'ils sont prêtres, d'arroser fréquemment, par la sainte parole, les jeunes plantes chrétiennes qui leur sont confiées ; par la confession, ils les taillent et les émondent soigneusement ; et ils les mettent le plus qu'ils peuvent en contact avec le divin Soleil de justice par la communion spirituelle, en attendant la communion sacramentelle. Ils savent que ces jeunes âmes sont capables de comprendre la vertu et de la pratiquer jusqu'à l'héroïsme. Aussi pensent-ils à les former à l'esprit de zèle, d'apostolat et de sacrifice.

Voici deux exemples qui prouvent qu'on peut le tenter avec succès.

Dans une mission, un prêtre recommandait aux enfants de prier et, même de se mortifier pour amener leurs pères à la conférence du soir. Or, un enfant de cinq ans était là qui comprit. A dîner, on servit de la soupe au lait que le petit garçon aimait beaucoup. « Merci, papa, je ne veux point de potage. – Pourquoi donc? C'est de la soupe au lait que tu aimes beaucoup. – Merci, papa. » Le père fit des instances. « Eh bien ! j'en mangerai si tu veux me promettre quelque chose. – Quoi ? – Mène-moi ce soir au sermon. – Tu es trop petit, tu seras couché. » Et l'on offre du potage à l'enfant qui s'obstine dans son refus. Le père dut céder et promettre. Alors l'enfant mangea tout joyeux et, le soir, il accompagna son père à la conférence.

Voici ce qui se passait dans une autre paroisse, un dimanche, aux approches de Pâques, dans une pauvre maison de paysans. « Pourquoi donc, Marie, ne manges-tu pas de viande ce soir ? – Merci, maman, je n'ai pas faim. – Es-tu malade ? – Non. – Pourquoi ne manges-tu pas ? » Et la petite Marie garde un silence mystérieux elle avait neuf ans. Alors la mère s'adressant, au père « Sais-tu pourquoi elle ne mange pas ? – Oui, je te le dirai. » – L'enfant offrait un sacrifice à Dieu pour que sa mère fît ses Pâques. Et la mère fit ses Pâques. 

II 

La seconde association est celle des enfants qui ont fait leur première communion : c'est le. moment de la ferveur ; C'est aussi le moment de la tentation.

L'Association a pour patron, ici saint Louis de Gonzague, là saint Tarcisius, le martyr de l'Eucharistie, ailleurs saint Jean Berchmans ; elle a son secrétaire et son président choisis parmi ses membres.

La règle généralement admise dans les patronages, c'est la confession et la communion mensuelles ; mais il est des enfants que la ferveur portera à se confesser et à, communier plus souvent : c'est à leur directeur spirituel à juger de leurs dispositions.

Les réunions se font comme pour l'association des Saints Anges Gardiens, mais elles deviennent déjà plus sérieuses. On y récite une ou deux dizaines de chapelet, puis on fait l'appel ; on lit un chapitre, de la vie du saint Patron ou d'un autre modèle de la jeunesse avec un petit commentaire, car la lecture ne remplace jamais la parole, tandis que la parole peut remplacer avantageusement la lecture.

C'est parmi les sociétaires de Saint-Louis de Gonzague que se recrute la commission d'entrain pour les jeux. Et comme il est prouvé que les enfants chrétiens, nourris de la parole de Dieu et de la sainte communion, et soutenus par la prière, sont capables de pratiquer les vertus chrétiennes, telles que la charité et l'esprit de sacrifice, il ne faut pas craindre de les lancer dans la voie de l'apostolat, en les associant, tant par la prière que par des sacrifices en rapport avec leur condition, aux oeuvres de zèle et de charité : ils y trouveront la préservation, la vigueur spirituelle et le salut. 

III 

La troisième association est celle de Saint-Joseph, pour les jeunes apprentis.

Le moment critique est venu ; l'enfant a quitté l'école pour l'atelier, il ne vient plus au patronage que le dimanche ; les dangers l'entourent, il faut le prémunir, le fortifier : ce sera l’œuvre de l'association de Saint-Joseph.

Son règlement diffère peu de celui de la confrérie de Saint-Louis de Gonzague. La fréquentation des sacrements en est le principal article, mais cet article suffit ; car le jeune homme qui fréquente les sacrements est dans la main de son confesseur qui l'éclaire, le dirige, lui signale les dangers à éviter, les devoirs à remplir, les vertus à pratiquer, et le relève s'il tombe.

Les associations de Saint-Joseph se font comme les précédentes, ­mais il est bon de donner à l'exhortation le caractère d'un cours d'instruction religieuse, où l'apologétique tiendra une large place. Les jeunes apprentis entendent souvent des objections contre la religion, que l'on critique devant eux. Il faut qu'ils connaissent à l'avance ces objections et sachent ce que l'on peut y répondre. Dans certains patronages, on se sert pour cela des réponses aux objections populaires de Mgr de Ségur, ou de celles, plus complètes et plus actuelles, de M. l'abbé Garnier. Alternativement ou dans la même réunion, on lit un chapitre de l'Evangile ou de la vie des saints, car il faut toujours enflammer le cœur et lancer la volonté en même temps qu'on éclaire l'esprit.

Nous pouvons citer ici, comme modèle d'organisation et de fonctionnement, une association fondée et dirigée par un de nos Frères Directeurs, dans un gros bourg du département du Nord. Elle est sous le vocable du Sacré-Cœur et compte 80 à 90 membres tous très assidus aux réunions, tous fidèles à la sainte pratique de la communion du premier vendredi de chaque mois.

Là où l'association ne peut s'organiser sous forme de patronage, il faut tâcher d'y suppléer en agissant auprès des anciens élèves par des entrevues à l'école, pendant l'heure qui précède ou suit les offices du dimanche, par des entretiens familiers mais édifiants, des lectures choisies dans une revue religieuse, parfois la distribution de quelques feuilles ou opuscules de piété, quelques mots dits en particulier à certains jeunes gens auxquels un conseil spécial peut être nécessaire. Cette action doit s'exercer surtout dans le but d'obtenir que ces anciens élèves s'approchent fréquemment des sacrements. 

VISITES DE SUPÉRIEURS GÉNÉRAUX

A LA MAISON-MÈRE 

Dans le courant du mois de mars dernier, notre communauté de la Maison-Mère a eu la satisfaction de recevoir les visites de deux Supérieurs généraux venant de Rome.

Le 20, c'était le Très Révérend Frère Hubert, supérieur général de l'Institut des Frères de Saint-Gabriel, dont la Maison-Mère est à Saint-Laurent-sur-Sèvre (Vendée). Il était accompagné du Cher Frère Martial, Assistant, aujourd'hui son successeur au généralat, par suite de la démission du vénéré Frère Hubert.

Le 24, nous recevions le Très Révérend Frère Abel, Supérieur général de l'Institut des Frères de l'Instruction chrétienne, dont la Maison-Mère est à Ploërmel (Morbihan)[3]. Il a été élu récemment en remplacement du cher et vénéré Frère Cyprien, décédé, dont nous gardons la douce et pieuse mémoire comme celle d'un ami fidèle et dévoué à notre Institut. Le Révérend Frère Abel était accompagné de deux de ses Assistants, le Cher Frère Anatolien et le Cher Frère Alexis-Marie.

Il nous a été bien doux d'échanger avec nos honorables visiteurs des témoignages d'estime, de cordiale confraternité, de religieuse amitié. Ce n'est pas non plus sans profit, et sans nous donner de fraternels et mutuels encouragements, que nous nous sommes entretenus ensemble de choses pouvant contribuer au bien que tous nous devons nous proposer.

La maison provinciale de Notre-Dame de l'Hermitage, s'est fait également une fête de recevoir le Très Révérend Frère Abel et ses Assistants, pour qui ce pèlerinage au tombeau du Vénérable Marcellin Champagnat avait un attrait tout particulier. 

NOMINATIONS 

1. – L'état de santé du Cher Frère Abel, Maître des novices à la Maison-Mère, le mettant dans l'impossibilité de continuer ses fonctions, le Cher Frère Louis-Armand, ancien directeur du Juvénat de Saint-Genis-Laval, a été nommé pour lui succéder à partir du 7 avril dernier.

2. – Le cher Frère Constancien, directeur de l'établissement de Saint-Joseph, à Marseille, est nommé Visiteur des Établissements dirigés par nos Frères dans la ville et la banlieue de Marseille.

3. – Le cher Frère Victor, directeur de Sainte-Marie, Sydney, est nommé Visiteur de nos maisons d’Australie.

4. – Le cher Frère Mark-Joseph, directeur de notre maison de Wellington, est nommé Visiteur de nos maisons de Nouvelle-Zélande.

5. – Le cher Frère Diogène est adjoint, en qualité de Visiteur, au cher Frère Druon, Vicaire provincial de la province du Nord. 

AVIS. 

l. – Les Frères sont invités à apporter, en venant à la retraite, les habits, bas, souliers et autres parties de leur trousseau, qui seraient pour eux hors d'usage et pourraient être utilisés à la maison provinciale.

2. – Nous recommandons aux Frères de s'assurer, avant l'envoi de leurs lettres, qu'elles sont suffisamment affranchies. Souvent nous avons dû payer une surtaxe pour insuffisance d'affranchissement. 

Nos DÉFUNTS. 

 F. JOSEPH-LADISLAS, Novice, décédé à Saint-Hyacinthe (Canada), le 19 décembre 1897.

F. LEONICUS, Profès, décédé à Lacabane (Corrèze), le 23 décembre 1897.

F. HERCULANUS, Profès, décédé à Arles (Bouches-du-Rhône), le 26 décembre 1897.

F. EREMBERT, Profès, décédé à Aubenas (Ardèche), le 26 décembre 1897.

F. ANOBERTUS, Novice, décédé à Aubenas (Ardèche), le 1ierjanvier 1898.

F. PIERRE-EUBERT, Obéissant, décédé à Saint-Genis-Laval (Rhône), le 3 janvier 1898.

COUDEYRAS Jules, Postulant, décédé à Notre-Dame de l'Hermitage (Loire), le 12 janvier 1898.

F. ALDÉRICUS, Profès, décédé à Saint-Genis-Laval (Rhône), le 14 janvier 1898.

F. FLORIAN, Stable, décédé à Aubenas (Ardèche), le 20 janvier 1898.

    AMBLARD Marius, Postulant, décédé à Aubenas (Ardèche), le 21 janvier 1898.

F. OPTACIEN, Profès, décédé à Saint-Genis-Laval, (Rhône), le 30 janvier 1898.

F. CALÉPODE, Profès, décédé à Saint-Genis-Laval (Rhône), le 31 janvier 1898.

F. GEORGES, Profès, décédé à Mayet-de-Montagne (Allier), le 4 février 1898.

F. CÉCILIEN, Profès, décédé à Notre-Dame de l'Her­mitage (Loire), le 14 février 1898.

F. GÉRASIME, Profès, décédé à Saint-Nizier-sous-Charlieu (Loire), le 18 février 1898.

F. UBERT, Profès, décédé à Païta (Nouvelle-Calédonie), le 1ier1898.

     BOUDOU Léon, Postulant, décédé à Lacabane (Corrèze), le 3 mars 1898.

     HÉRARD Charles, Juvéniste, décédé à Digoin (Saône-t-Loire), le 4 mars 1898.

F. CAMILLE DE LELLIS, Profès, décédé à Saint-Henri (Marseille), le 5 mars 1898.

F. OSTIEN, Profès, décédé à Monsols (Rhône), le 12 mars 1898.

F. NICAIRE, Profès, décédé à Saint-Genis-Laval (Rhône), le 21 mars 1898.

F. ABONDANTIUS, Profès, décédé à Saint-Paul-Trois-Châteaux (Drôme), le 24 mars 1898.

F. JOSEPH-ORENs, Novice, décédé à Notre-Dame de l'Hermitage (Loire), le 1ieravril 1898.

F. MARIE-ALFRED, Novice, décédé dans sa famille, à Coucouron (Ardèche), le Il avril 1898.

F. JOSEPH-LÉOPOLD, Obéissant, décédé dans sa famille, à Sablières (Ardèche), le 12 mars 1898.

F. ADRiEN-AUGUSTE, Novice, décédé à Notre-Dame de l'Hermitage (Loire), le 25 avril 1898.

F. HENRi-DESIRE, Profès, décédé à Saint-Genest­-Malifaux (Loire), le Il mai 1898.

F. CHROMACE, Profès décédé à Aubenas (Ardèche), l 12 mai 1898

    LEYMARIE Joseph, Juvéniste, décédé à Lacabane (Corrèze), le 12 mai 1898.

 

En vous donnant cette liste de nos défunts, je vous recommande, comme toujours une parfaite exactitude à leur accorder les suffrages de Règle.

La présente circulaire sera lue en communauté, aussitôt après sa réception, à l'heure ordinaire de la lecture spirituelle, et une seconde fois au réfectoire, dans les maisons du noviciat.

Recevez la nouvelle assurance du tendre et religieux attachement avec lequel je suis, en Jésus, Marie, Joseph, Mes Très Chers Frères,

Votre très humble et très dévoué serviteur,

       Fr. Théophane.

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[1]Je me permets ce terme, car ici ce quadrupède n’est pas réputé moins noble que le bœuf.

[2] : Ancien roi de Samoa, fervent catholique, actuellement exilé aux îles Marshall.

[3] : L’Institut des Frères de l’Instruction chrétienne a été fondée en 1819, par l’abbé Jean-Marie de la Mennais, mort en odeur de sainteté en 1860. Ses pieux disciples espèrent voir bientôt l’Eglise s’occuper de sa Béatification.

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