Circulaires 330

LĂ©onida

1950-05-24

Convocation à la retraite, 333. - Fruit à retirer de la retraite : Mieux nous acquitter du devoir de donner le bon, exemple, 337. - Importance de l'exemple en général, 338. - Son importance particulière dans les communautés, 341. - Frères obligés plus spécialement au bon exemple, 348. - Conduite à tenir en face du mauvais exemple, 353, - Devoir d'éviter le respect humain, 355. - Agrégation de l'Institut à l'Union Missionnaire du Clergé, 364. - Visite de délégation en Océanie, 372. - Visite de délégation à la Province d'Italie, 380. - Visite à nos Frères du Proche-Orient, 387. - Nos Frères persécutés, 398. - Document de Rome, 399. - Élections, 401. - Liste des défunts, 402.

330

V. J. M. J.

 Saint-Genis-Laval, le 24 mai 1950.

        Fête de Notre-Dame Auxiliatrice.

       MES BIEN CHERS FRÈRES,

Comme chaque année, la circulaire du mois de mai a surtout pour objet de vous convier à la retraite annuelle et de vous engager à la bien faire.

Il arrive souvent que les occupations habituelles de l'emploi absorbent le meilleur de notre temps, nous tyrannisent en quelque sorte et nous font facilement perdre de vue les besoins de notre âme. C'est donc une grâce insigne et un vrai bonheur que de pouvoir, pendant quelques jours, nous recueillir pour voir s'il n'y a pas lieu de modifier l'allure de notre marche vers la perfection et vers notre destinée éternelle.

Parfois l'approche de la retraite cause de l'appréhension. C'est qu'au fond on a peur du silence, de la réflexion, de l'examen de sa conduite. On craint de se mettre en face de ses insuffisances et des redressements indispensables qui exigent la lutte toujours pénible Contre soi-même. Rassurons-nous en pensant que la retraite ne nous jette pas dans une solitude déprimante avec nous-mêmes, mais que nous y trouvons le Seigneur pour nous éclairer dans la mesure où nous savons fermer les yeux sur le monde extérieur.

Oui, bannissons toute appréhension, ne redoutons pas les sacrifices que Dieu pourra nous demander et décidons-nous à apporter, à la retraite, les dispositions requises. C'est ainsi que nous nous libérerons des misères : fautes, défauts, négligences qui privent notre âme de bien des grâces et de bien des mérites. Mais, nous ne nous bornerons pas à ce travail négatif et à ce regard sur le passé ; nous nous remettrons sous les yeux l'idéal qui nous enthousiasma aux jours heureux de la prise d'habit ou de la profession et nous reprendrons courageusement la lutte contre les obstacles qui empêchent nos progrès spirituels.

C'est ainsi que la retraite bien faite, réveillant notre foi et notre générosité, nous affranchira de la tiédeur et nous communiquera une ferveur nouvelle pour l'imitation de notre divin Modèle, Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Les renseignements qui nous arrivent chaque année à la suite des retraites mentionnent le sérieux qui les a caractérisées, sérieux traditionnel qui ferait juger sévèrement toute dissipation ou négligence.

Ce résultat est dû à la bonne volonté des retraitants et au zèle des Supérieurs à préparer la retraite et à lui créer un climat favorable : choix du prédicateur, des confesseurs, de la date, du local, horaire, organisation des salles et attribution des places ; distribution des travaux ou services réduction au minimum indispensable du nombre de non retraitants, invités d'ailleurs à s'abstenir de tout ce qui pourrait distraire les confrères ; avis donné et, au besoin réitéré, de régler, avant ou après la retraite, tout ce qui lui est étranger : comptes, vestiaire, correspondance, librairie, etc.

Rien n'est laissé à l'improvisation ou remis à la dernière heure. Les Frères Provinciaux ou leurs délégués ont tout prévu pour favoriser le silence, le recueillement et la prière. Ils veillent à ce qu'aucun Frère, à moins de motifs graves, ne soit privé de la retraite ou la fasse en dehors de la Province, au risque d'ignorer les directives données à tous.

Ils se font un devoir de présider la table, donnant en cela une preuve de leur estime de la vie commune et s'assurant que la nourriture est ; conformément à la Règle, saine, abondante et convenablement préparée, mais commune et ordinaire. L'ordonnance des repas de retraite devrait être telle qu'elle pût servir de modèle aux communautés pour les préserver de tout écart, aussi bien par défaut que par excès.

Autant que l'entrevue de Règle le leur permet, ils président les exercices de piété afin d'exciter à la ferveur, suggérer des intentions et corriger les négligences et la routine.

C'est dire que la sollicitude des Supérieurs s'étend, à l'occasion de la retraite, à tout ce qui concerne le temporel et le spirituel. C'est le temps le plus propice pour rappeler aux Frères, à la lumière des vérités éternelles, la sublimité de leur vocation de religieux et d'apôtres. Mettant à profit les observations recueillies en cours d'année dans leurs visites aux maisons, ils exhortent les retraitants à plus de fidélité à leurs obligations, leur suggérant des résolutions pratiques pour leur conduite personnelle, celle de leur communauté ou de leurs élèves.

On ne peut que louer ces sages mesures, car le succès de la retraite assure pour l'avenir un meilleur rendement spirituel.   

D'ailleurs, les Supérieurs constatent souvent, même avant la fin de la retraite, ses heureux fruits, surtout dans l'entrevue de Règle. A la façon dont leurs conseils et leurs avis sont sollicités ou reçus, ainsi qu'à d'autres indices, ils jugent que la grâce et le travail personnel remuent les âmes et pré-parent des changements favorables.

Ils devront, néanmoins, s'attendre, dans la suite, à des fautes et à des rechutes, même de la part des religieux les mieux disposés. Ils remarqueront, peut-être sans trop tarder, que certaines de leurs consignes, et des résolutions, pourtant bien sincères, ont été oubliées. Ils sauront faire la part de l'inconstance et de la fragilité humaine, et ils éprouveront une grande consolation en voyant que dans l'ensemble, un vent de Pentecôte a balayé bien des misères et a provoqué de nouveaux efforts pour une vie plus fervente. Ils en béniront Dieu et se sentiront un nouveau courage pour porter le poids, parfois écrasant, de leurs responsabilités.

Je souhaite ardemment, mes bien chers Frères, que la bonne volonté que vous apportez, en général, à bien profiter des retraites soit encore plus grande, si possible, en cette Année Sainte. Que ces jours de recueillement soient pour chacun l'occasion de réaliser de son mieux les fins du Jubilé, c'est-à-dire d'expier ses fautes, d'amender sa vie et de prier, selon les intentions du Souverain Pontife, pour tous les besoins de l'Église et de l'humanité.

Pour tenir cette pensée présente à notre esprit pendant toute la retraite, on voudra bien, chaque jour, après la sainte Messe, réciter à haute voix la prière composée par notre Saint-Père le Pape et publiée dans la précédente circulaire, page 260.  

Fruit principal de la retraite,

 Les bienfaits d'une retraite ne s'étendent pas uniquement aux individus qui y prennent part, mais aussi aux Communautés, aux Provinces et à la Congrégation tout entière dont la retraite accroît le niveau général de ferveur. Ceci est dû d'abord à la Communion des Saints qui nous fait participer au bien réalisé par nos confrères et ensuite à notre vie essentiellement communautaire où l'exemple de chacun a une influence considérable sur la conduite des autres.

*

*     *

 Le problème de l'exemple est grave car il est, ou une aide réciproque dans la poursuite de notre sanctification, ou une force d'entraînement vers le relâchement. C'est pourquoi je crois utile de vous proposer, comme fruit principal à retirer des prochaines retraites, la résolution bien sincère de mieux nous acquitter, désormais, de l'obligation de donner le bon exemple.

Donner le bon exemple c'est, suivant le commandement de Notre-Seigneur, faire briller sa lumière devant les hommes ; ne pas le donner, c'est cacher cette lumière sous le boisseau, c'est enfouir ses talents. Notre choix est déjà fait ; mais, pour nous aider à le confirmer et à mieux y adapter notre vie, nous rappellerons brièvement : 

 I. L'importance de l'exemple en général ;

II. Son importance particulière dans les communautés ;

III. Quels sont les Frères plus spécialement obligés à donner le bon exemple ;

IV. La conduite à tenir en face du mauvais exemple ;

 V. Le devoir d'éviter le respect humain

1. Importance de l'exemple en général.

 Dans notre vie spirituelle, il faut distinguer le rôle de la grâce et celui de la volonté. La grâce en est le grand moteur selon la parole même de Notre-Seigneur : « Sans moi vous ne pouvez rien faire. »

Mais la grâce n'entraîne pas fatalement la volonté qui peut toujours choisir librement entre le bien et le mal. Or, dans ce choix il est un facteur externe qui exerce une influence prépondérante, c'est l'exemple.

« De même, dit l'abbé Marmy, que dans le domaine de la connaissance, l'homme n'atteint la vérité qu'en passant par les choses sensibles dont son intelligence se sert comme d'un tremplin, de même dans le domaine de la moralité il n'atteint la perfection de la vertu que s'il trouve, pour l'entraîner, des êtres en chair et en os, plus parfaits et plus vertueux que lui » (Préface du livre Le Saint, le Génie, le Héros).

La force entraînante de l'exemple est universellement reconnue, comme en témoignent les maximes suivantes :

« Dis-moi qui tu hantes et je te dirai qui tu es ». « Les paroles émeuvent, les exemples entraînent ».

« Le chemin des préceptes est long, celui des exemples est court ».

« Les paroles ne persuadent jamais si la conduite et les actes démentent » (Saint Jean Chrysostome).

« Il n'est pas de paroles qui aient l'éloquence de l'exemple : c'est une prédication muette et j'apprécie davantage une once de bon exemple que cent livres de discours » (Saint François de Sales).

« Pas de discours trahis ensuite par la conduite » (Mgr Cardijn, fondateur de la J. 0. C.).

Les éducateurs savent la puissance éducative de l'exemple. Ainsi, les livres de morale mis entre les mains des enfants se composaient autrefois presque exclusivement de récits de faits édifiants. Et que de manuels de lecture et d'histoire, que de revues cherchent à entraîner les jeunes âmes à la suite des hommes de bien en les présentant à leur admiration ! C'est bien là la méthode la plus courte et la mieux appropriée à la faiblesse humaine pour porter à la vertu.

Qui ne connaît l'influence bienfaisante ou néfaste des personnages mis en scène par le théâtre, le cinéma, le roman ? N'est-ce pas parce qu'elle est bien persuadée de l'efficacité de l'exemple que l'Église nous fait connaître dans le détail la vie des saints et les propose à notre imitation ? C'est une pensée identique qui a porté tous les peuples à exalter ceux de leurs enfants qui se sont distingués par la vertu, le savoir ou. des actions d'éclat, leur décernant des honneurs, des récompenses, leur élevant des statues, etc. …

Qui dira le nombre de vocations éveillées par les faits et gestes d'hommes dont l'histoire, la légende ou la tradition ont raconté les aventures, les prouesses, le dévouement, l'héroïsme, la sainteté ! N'a-t-on pas affirmé que l'exemple des anachorètes et des vierges chrétiennes fut plus efficace que les prédications pour vaincre le sensualisme païen ? Il est si naturel aux âmes droites de dire, avec saint Augustin, en présence d'une vie vertueuse : « Pourquoi ne ferais-je pas ce que d'autres ont fait ? » Et les chrétiens de toute condition qui aujourd'hui encore, en divers pays, plutôt que de renier leur foi, préfèrent subir la persécution et même le martyre, où puisent-ils leur force ? Dans la grâce d'abord 'et dans leurs convictions, mais aussi dans l'exemple admirable des martyrs de tous les siècles.

L'influence bonne ou mauvaise de l'exemple entraîne pour tout homme, et particulièrement pour le religieux éducateur, une grande responsabilité. A ce sujet, le Père Ramière écrit : « Le jour où nous sommes entrés dans la société humaine, nous avons été investis du pouvoir de rapprocher ou d'éloigner de Dieu nos semblables » (L'Apostolat de la Prière, Introduction, § 4).

Le Chanoine Paravy dit à son tour : « Nous ne songeons peut-être pas assez à la solidarité morale qui nous lie aux autres hommes et aux lourdes responsabilités qui résultent de notre action sur nos semblables. Nos existences se mêlent ici-bas

nous vivons non seulement notre vie, mais un peu celle des autres que nous contribuons à rendre bonne ou mauvaise, selon la qualité de notre influence. Nous sommes pour plusieurs des instruments de vie ou de mort, d'édification ou de ruine. Il y a autour de nous des êtres qui n'auront jamais de foi, jamais d'espérance, jamais de piété, jamais de Dieu, jamais de Jésus-Christ, si nous ne les leur donnons. Nos actes, nos paroles, nos gestes ont des répercussions incalculables sur les âmes qui vivent dans le rayonnement de notre influence et, par elles, sur un grand nombre d'autres âmes. Lorsque nous irons rendre compte de notre vie, le Souverain Juge ne nous demandera pas seulement : « Qu'as-tu fait ? » mais encore : « Qu'as-tu fait de ton frère ? » et notre frère, ce sont ceux que Dieu a placés sur notre chemin. » 

Il. Importance particulière de l'exemple

dans les communautés.

 Nous n'avons pas tous mission d'enseigner nos confrères, mais nous avons tous la possibilité et l'obligation de leur donner le bon exemple. Il doit toujours fleurir parmi nous si nous ne voulons pas décevoir ceux qui viennent partager notre genre de vie avec l'espoir de trouver des modèles.

Si l'influence sur notre âme de toute vie de saint est déjà forte, elle le sera davantage encore si ce saint a vécu notre Règle, notre vie, comme le dit si bien le Frère Jean-Baptiste dans son introduction aux Biographies. Et plus encore s'il vit près de nous, dans la même maison, se débattant au milieu des mêmes difficultés, se heurtant aux mêmes Obstacles, souffrant les mêmes incommodités, luttant dans les mêmes conditions que nous, en un mot. Comme la sainteté paraît alors possible, comme on se sent entraîné dans son sillage lumineux

Écoutons le R. P. Colin, Rédemptoriste, nous dire : « Qui ne connaît, au couvent, la grande loi de l'édification ? Édifier ! joli mot, lourd de sens. Édifier ! construire et non pas démolir, développer et non étouffer, élever et non abaisser ! Édifier ses Frères : forme obligatoire et quotidienne de la charité ; les porter à la vertu, à Dieu. Devenir leur collaborateur dans l’œuvre de leur sanctification, dans l'épanouissement mystique du Christ en eux.

« Or, et ceci est grave, par sa vie seule, qu'il y pense ou non, qu'il le veuille ou pas, chaque religieux travaille à sanctifier ses Frères ou à les pervertir.. ; nous édifions ou nous démolissons…

« Édificateurs ceux dont la régularité réagit constamment contre tous les abus et contre les fléchissements d'observance. Rien que le rayonnement de leur vie est la plus convaincante des prédications et la plus entraînante des exhortations. Apostolat du bon exemple… discret, muet, et, par cela même, souverainement efficace ! » (Culte de la Règle, p. 306, 307).

Si les religieux fervents ont une influence très favorable, il est aisé de comprendre, par contraste, quel mal font les religieux qui, négligeant leurs devoirs, plient la Règle à leurs caprices. On les a comparés aux arbres stériles qui non seulement ne portent pas de fruits mais sont, de plus, nuisibles aux autres plantes par leur ombre et par l'infécondité de la terre qu'ils occupent. Leur mauvais exemple est un encouragement à l'inobservance. S'ils n'excitent pas les autres à les imiter, leur conduite est une invitation tacite à le faire. Ils créent ainsi autour d'eux une atmosphère délétère qui intoxique les âmes et les conduit au relâchement et à la tiédeur.

J'emprunte aux Avis, leçons, sentences et instructions du Vénérable Fondateur ce qui suit : « En communauté surtout, on ne peut tomber dans un vice, sans être une occasion de chute pour plusieurs. Un membre gangrené ne tarde pas à porter préjudice aux autres parties de l'organisme ; la tête se ressent de l'incommodité de l'estomac ; une partie du corps, quelque forte qu'elle soit, s'altère ou s'affaiblit par les rapports qu'elle a avec une autre qui est malade ! Un religieux doit donc, avant tout, donner le bon exemple, et éviter tout ce qui pourrait scandaliser le prochain ».

 Pensons sérieusement aux suites funestes de nos actes et craignons que, par notre faute, s'introduisent dans nos communautés des habitudes inspirées par la sensualité ou l'amour-propre plutôt que par une vraie nécessité. Sans tomber dans le scrupule, demandons-nous si l'influence de notre conduite sur celle du prochain n'augmente pas parfois la gravité de nos fautes au point de devoir mentionner cette circonstance en confession.

Proposons-nous donc à tout prix, mes bien chers Frères, d'être pour notre communauté le sel qui conserve l'esprit de la Congrégation, la lumière qui éclaire et guide les autres vers les sommets de la perfection. Soyons les témoins du Christ pour nos Frères, comme nous recommandons à nos élèves de l'être dans le monde, car Dieu nous ayant comblés de bienfaits, nous n'avons pas le droit de nous enfer mer dans une vie religieuse égoïste, de travailler à notre sanctification sans nous préoccuper de ceux qui nous entourent.

Dans sa belle circulaire sur la formation et la conservation des Frères, le R. F. Louis-Marie insiste sur l'obligation pour tous les membres de l'Institut : Supérieurs, Directeurs, Frères Profès et même jeunes Frères, de donner le bon exemple. Il affirme qu'il est comme impossible qu'un sujet animé de bonnes intentions ne se forme pas dans une maison bien réglée. Seuls des sujets sans vocation ou qui abuseraient de la grâce d'une manière énorme pourraient ne pas gagner dans un tel milieu.

C'est qu'en effet, quand la piété, la régularité et la charité règnent dans une communauté, le jeune religieux y trouve appliqués, vécus, les principes qu'on lui a inculqués durant sa formation. Il y conserve plus facilement la ferveur et la délicatesse de conscience. Il y éprouve une joie qui est une sauvegarde contre les attraits de la famille et du monde, rendus particulièrement séduisants et dangereux à cet âge par l'imagination et les passions.

Pour expliquer la défection des jeunes Frères, on s'accorde à signaler surtout, outre les causes entièrement personnelles, une formation insuffisante et le mauvais exemple en communauté. Des progrès sérieux ayant été réalisés pour la formation des sujets, si nous faisons fleurir dans toutes les mai-sons l'observance régulière, nous contribuerons à une meilleure persévérance. Car, est-il une formation capable de maintenir un jeune Frère dans le devoir si, dès son arrivée en communauté, il constate que l'on y fait peu de cas de la Règle et des vœux, que des prières y sont omises ou mal faites, que l'on néglige la direction dont il aurait tant besoin, s'il entend critiquer les Supérieurs, exalter les études au détriment de la piété, s'il est témoin de rapports défendus et de manquements à la pauvreté, s'il observe, de plus, que l'esprit de famille fait défaut, sans parler d'autres exemples déprimants et démolisseurs de la vie religieuse ?

Comment ce jeune Frère inexpérimenté et impressionnable ne serait-il pas exposé à se décourager, tout au moins à se troubler et à perdre le bel élan pour la vertu qu'il avait à sa sortie du Scolasticat ? Pouvait-il soupçonner qu'il y eût des religieux à la conduite si contraire aux enseignements des maîtres qu'il vient de quitter et aux prescriptions de nos saintes Règles ? Ne sera-t-il pas porté à croire qu'il n'a pas à se faire violence dans la mesure qu'on lui a conseillée ? qu'il y a de l'exagération dans l'idéal d'élévation morale présenté au Noviciat ?

Un tel danger peut se rencontrer dans les petites communautés, mais il est plus à redouter dans les grandes. Là, il n'est pas rare que sur le nombre se trouvent des religieux relâchés et, trop souvent, les jeunes Frères se joignent à eux au détriment de leurs aspirations généreuses.

Mais, dira-t-on peut-être, il ne se produit pas de grands scandales dans nos maisons, il n'y a donc pas lieu de s'alarmer ! Il est vrai que les fautes graves et publiques sont rares et inspirent une répulsion instinctive, aussi parlons-nous surtout des fautes fréquentes que l'on excuse facilement, mais qui n'en sapent pas moins la discipline religieuse. N'est-ce pas le cas de rappeler le jugement grave du Vénérable Père Fondateur : « Les religieux tièdes qui plient la Règle à leurs caprices ont une influence terrible et rien ne peut dire le mal qu'ils causent par leurs paroles et par leurs exemples. » (Sa vie, p. 544.)

A la vue de certains religieux irréguliers, tous les jeunes Frères auront-ils la force d'âme d'affirmer avec saint Jean Berchmans « Je n'aurai jamais honte de faire ce que j'ai appris au Noviciat, je resterai fidèle au devoir » ? N'y en aura-t-il pas, au contraire, qui diront, de fait sinon de parole : pourquoi serais-je plus fervent que les autres ? Argument puéril, mais duquel on s'accommode facilement, surtout lorsque l'esprit de foi n'est pas suffisant pour s'opposer aux exigences de la mauvaise nature !

Si cette influence du bon ou du mauvais exemple est grande dans les communautés, elle ne l'est pas moins dans les maisons de formation. Aussi, je ne puis que faire mienne cette observation d'un Frère Provincial dans les avis qu'il laissait à l'occasion de sa visite dans l'une de ces maisons : « Que chacun, conscient de ses responsabilités, se rende compte qu'il évolue constamment sous les yeux inquisiteurs et perspicaces des jeunes gens à l'âge où ils sont très impressionnables. Les mauvaises impressions reçues durant les années de formation s'incrustent souvent pour la vie et ont parfois des répercussions malheureuses qui peuvent compromettre la persévérance. On fait le bien, ou le mal en grand et à longue portée suivant que l'on édifie ou qu'on scandalise… »

L'Évangile nous apprend que Notre-Seigneur est sévère pour les scandaleux en général ; combien plus ne le sera-t-il pas pour ceux qui font tomber ou déchoir les âmes d'élite associées plus étroitement à son oeuvre rédemptrice ! Si l'on doit plaindre les malheureux qui retournent dans le monde et les recommander à la miséricorde divine, il faut plaindre davantage les religieux qui, restés dans le cloître, ont été cause de la sortie de leurs confrères. C'est là une pensée fort grave que nous ne saurions trop méditer.

Rappelons-nous les premiers religieux avec lesquels nous avons vécu et dont la conduite a exercé sur nous une profonde impression. Nul doute que nous ne trouvions, dans ce souvenir, des motifs de rendre grâces à Dieu, soit de nous avoir donné d'excellents modèles à un âge où nous en avions grand besoin, soit de nous avoir préservés d'entraînements funestes.

Ce que nous venons de dire de l'influence de l'exemple sur les jeunes Frères et sur les sujets en formation, ne s'applique-t-il pas aux autres religieux ? Sans doute, en avançant en âge, les Frères sont plus à même de raisonner, de comprendre, de réagir contre les influences fâcheuses. Ils ont pour eux l'expérience et des habitudes acquises, mais n'a-t-on pas besoin à tout âge de modèles qui prouvent, par leur conduite, que les obligations de la vie religieuse ne sont pas au-dessus de nos forces ?

Combien de fois n'a-t-on pas vu des Frères peu édifiants subir une remarquable transformation en changeant de communauté !

Le devoir de nous donner réciproquement le bon exemple est clairement exprimé dans l'article 432 des Règles Communes : « Les Frères s'efforceront de s'édifier et de se porter au bien par leurs paroles, par leur application au travail, par leur dévouement, par leur régularité, par la pratique continuelle de l'humilité, du recueillement et de la charité fraternelle. »

Selon le mot expressif du Père Plus (Le Christ dans nos Frères), « chacun est collaborateur de Dieu ou de Satan ». Réfléchissons donc aux répercussions incalculables que nos actes peuvent avoir pour le bien et hélas ! pour le mal. Soyons le levain jeté dans la masse qui fermente et fait monter les âmes. Que notre vie surnaturelle soit débordante et d'une ardeur qui rayonne ! 

III. Quels sont les Frères plus spécialement

obligés à donner le bon exemple.

 L'obligation de donner le bon exemple incombe à tous les membres d'une communauté, quels que soient leur âge ou leur emploi. Tous doivent, comme le veut saint Paul, « rechercher ce qui contribue à la paix et à l'édification mutuelle » (Rom., XIV, 19), « être en toutes choses des modèles de bonnes oeuvres, dans la doctrine, dans l'intégrité, dans la gravité » (Tite, II, 7).

Mais cette obligation s'impose plus spécialement aux Frères anciens, aux Frères stables, aux plus instruits et surtout aux Supérieurs. En effet, ils ont reçu plus que les autres en âge, en talents ou en dignité ; à eux s'applique, par conséquent, ce principe : « Il sera beaucoup demandé à celui qui aura beaucoup reçu. » « Plus un homme avance en âge et en dignité, dit le Père Bouchage, plus il doit craindre de scandaliser ses Frères. Celui dont le talent, la charge ou le succès font une sorte d'oracle domestique est bien coupable s'il scandalise le mal qu'il fait va loin et se répare difficilement.» (Pratique des Vertus, vol. 1, p. 546).

D'ailleurs, quelle impression pénible n'éprouve-t-on pas à la vue de religieux d'un âge avancé ou de Frères stables qui se traînent dans une regrettable médiocrité ! à la vue de maîtres distingués par le savoir professionnel, mais incapables de générosité en face du devoir ! Le prestige de leur talent aurait pu en faire des guides sûrs, mais, ayant pris la voie large de l'inobservance, ils perdent avec eux ceux qui les suivent.

Quant aux Supérieurs à tous les degrés, la loyauté ne leur impose-t-elle pas l'obligation rigoureuse de faire les premiers, ce qu'ils exigent des autres ?

« Je ne pense pas, dit saint Grégoire le Grand, qu'une étoffe prenne à la teinture une nouvelle couleur, ni un vase, l'odeur du parfum versé, aussi facilement que les inférieurs n'adoptent la façon de se comporter de leur Supérieur. » Observation consolante pour tout Supérieur qui édifie ses Frères par le bon exemple ! observation inquiétante pour celui qui néglige ce devoir.

Se référant plus spécialement aux Supérieurs de communauté, les Règles du Gouvernement à l'article 427 disent : « Le Frère Directeur est l'âme de la maison, le modèle sur lequel les autres se forment ; s'il ne donne pas le bon exemple et ne pratique pas le premier ce qu'il demande, ses paroles sont sans effet, et il peut se croire avec raison responsable devant Dieu de la plupart des fautes que commettent ses Frères. Il doit donc, d'abord, travailler à sa propre sanctification et vivre de telle sorte que sa conduite soit la règle vivante où chacun puisse lire ce qu'il doit faire pour être un bon religieux. »

Le Frère Directeur doit être un animateur qui fait l'esprit de ses Frères comme un chef fait l'esprit de ses soldats. S'il profitait de sa situation pour se mettre à l'aise avec la discipline, on pourrait lui appliquer les anathèmes de Jésus aux Pharisiens : « Ils sont assis sur la chaire de Moïse…, mais ils disent et ne font pas… Malheur à vous, scribes et Pharisiens hypocrites !..» (Matth., XXIII, 2, 3, 13).

La conduite d'un Supérieur doit être telle qu'il puisse dire, toutes proportions gardées, comme Notre-Seigneur : « Je vous ai donné l'exemple afin que vous fassiez comme j'ai fait » et, avec saint Paul : « Soyez mes imitateurs comme je le suis de Jésus-Christ » (I Cor., IV, 16). Il doit, pour cela, sauf impossibilité occasionnelle, toujours marcher à la tête de ses Frères, présider tous les exercices, être le premier à la prière, à l'étude, en récréation, partout où se réunit la communauté ; le premier aussi à garder le silence, à pratiquer la modestie, la pauvreté et les autres vertus religieuses. Cette fidélité sera pour ses Frères un puissant encouragement et lui-même en retirera un surcroît d'autorité, car comment oserait-il corriger les irrégularités qu'il se permettrait lui-même ? quel crédit auraient ses avis ?

« L'autorité ne paraît forte de son droit, dit à ce propos saint Augustin, que lorsque ceux qui l'exercent ne vivent pas autrement qu'ils ne commandent », et le Cardinal Mercier ajoute : «L'homme qui veut agir sur ses semblables doit, par un effort intense de volonté, gravir lui-même les sommets où l'appelle le devoir et alors, par ce magnétisme que l'on appelle si bien l'ascendant de l'autorité, passer une impulsion à ceux qui, d'en bas regardent, et les aider à monter. »

Dans un de ses sermons, Bourdaloue prend pour texte l'adage rappelé par l'Évangile : « Médecin, guéris-toi toi-même » (Luc, iv, 23) et il s'applique à faire voir à ses auditeurs que c'est d'abord le zèle que l'on a pour soi, le soin que l’on apporte à se corriger et à se perfectionner qui autorise le zèle déployé en faveur des autres.

L'exemple des Supérieurs est d'une telle importance que les Constitutions en font un des principaux moyens de conservation de l'Institut : « L'expérience de tous les siècles a prouvé que les désordres des instituts religieux ont ordinairement leur source dans les défauts des Supérieurs » (Art. 207, 60).

Le Bon Supérieur consacre un chapitre aux conséquences du bon et du mauvais exemple des Frères Directeurs. Rappelons ce passage : «Le saint Directeur fait de sa communauté une pépinière de saints. Il suffit d'un charbon allumé pour embraser toute la masse. Donnez à une communauté de religieux lâches et irréguliers un Directeur zélé, ardent, fidèle à toutes les pratiques de la vertu, exact observateur des Règles, il échauffera bientôt ses inférieurs et leur communiquera par son exemple la flamme dont il brûle.

« Au contraire, un Directeur qui aurait tous les talents, mais dont la conduite laisserait à désirer, n'aura jamais sur ses inférieurs cette autorité morale qui fait aimer la vertu et en rend la pratique facile. Si vous voulez que vos inférieurs s'occupent sérieusement de leur perfection et observent leur Règle, travaillez vous-même, sans relâche, à votre avancement spirituel et soyez d'une parfaite régularité, car, « malheur, dit saint Joseph Calasanz, à tout Supérieur qui détruit par ses exemples ce qu'il édifie par ses paroles ».

Le Supérieur tient la place de Jésus-Christ ; il doit donc, à l'exemple du divin Sauveur, être une lumière qui éclaire et qui échauffe ceux qu'il dirige. Il faut qu'il se conduise en toutes choses de manière que sa vie soit pour ses Frères une Règle vivante, un Évangile où chacun puisse lire la manière dont il doit se comporter, pour se conformer aux maximes de Jésus-Christ, vivre selon son esprit et devenir un parfait religieux » (p. 129).

Ajoutons que lorsqu'un Supérieur donne le bon exemple en tout, il émane de lui une force qui entraîne, une influence qui le dispense souvent d'avertir et de reprendre.

Il est aisé de comprendre à quelle rude épreuve sont soumis les religieux qui ont des Supérieurs déréglés. Dans un songe célèbre, le Vénérable Fondateur les voyait sous les traits d'hommes habillés moitié Frères moitié soldats qui, à coups de pierres, assommaient les jeunes Frères. Il en concluait que la persévérance des sujets dépend, en grande partie, de la conduite des Frères Directeurs. Que ces derniers n'oublient donc jamais que s'ils peuvent se décharger de maints travaux sur leurs auxiliaires, ils ne peuvent se décharger sur personne du grave devoir du bon exemple. S'ils ne s'acquittent pas exactement de ce devoir, il leur manque, quelles que soient leurs aptitudes, une qualité indispensable pour remplir comme il convient l'importante mission que Dieu et les Supérieurs leur ont confiée.

Dieu merci, après avoir visité beaucoup de nos maisons en diverses Provinces, je suis heureux de rendre hommage à la plupart de nos Frères Directeurs qui comprennent de mieux en mieux leur grave devoir d'être pour leurs Frères des guides et des entraîneurs dans les voies de la perfection. Puissent ces exhortations et ces encouragements conduire à de nouveaux progrès ! Nos communautés en deviendront encore plus belles et plus agréables à Dieu. 

IV. Conduite à tenir en face du mauvais exemple.

 Le mauvais exemple, le scandale est un malheur pour celui qui le donne et, nous venons de le voir, il peut le devenir également pour les autres ; aussi ne saurions-nous trop insister sur la mise eu. pratique des conseils suivants qui aideront à en réduire les funestes effets.

Si nous sommes Supérieurs, ne restons pas indifférents à la vue des fautes ; avertissons, reprenons avec charité et au besoin, avec fermeté. Nous dérober à ce devoir serait rendre plus difficile l'amendement des coupables, favoriser la propagation du mal et porter devant Dieu la responsabilité des fautes commises. Rappelons ici que, comme remède à certaines fautes particulièrement dangereuses pour la discipline religieuse, les deux derniers Chapitres Généraux ont prescrit le recours aux monitions prévues par le Droit canonique (Canons 656 à 662) et par les Constitutions (art. 107).

Si nous ne sommes pas en charge, donnons, quand c'est opportun, un bon conseil ; au besoin, faisons connaître aux Supérieurs les manquements et, en certaines circonstances où la nature des faites l'exige, disons tout haut notre réprobation.

Si les irrégularités sont le fait du Frère Directeur lui-même, c'est surtout au Frère Sous-Directeur à l'avertir, conformément à l'article 324 des Règles Communes mais, comme dit saint Thomas, parlant des observations éventuelles d'un inférieur à un Supérieur, il doit le faire avec humilité, modestie, respect et discrétion.

En face de toute inobservance un peu grave, recourons à la prière afin que Notre-Seigneur ramène les religieux irréguliers à une plus grande fidélité à leurs obligations.

Appliquons-nous, de plus, à contrebalancer par une plus grande régularité les pernicieux effets du mauvais exemple, car les communautés s'enlisent dans la médiocrité quand on n'y trouve pas des religieux décidés à faire tout leur devoir pour neutraliser l'action des tièdes.

D'autre part, ne voyons pas le mal où il n'est pas et n'exagérons pas celui qui est réellement commis. Abstenons-nous de juger sur de simples apparences ou sur des preuves insuffisantes ; excusons les intentions si nous ne pouvons nier les faits. A s'écarter de ces principes, on s'expose à bien des fautes contraires à la charité.

En face de fautes évidentes, tout en pratiquant l'avertissement ou la correction, imitons les âmes charitables qui relèvent facilement des traits édifiants même chez les religieux négligents et, à plus forte raison, chez les membres fervents de la communauté.

Au lieu d'accabler les coupables et de nous croire meilleurs qu'eux, humilions-nous devant Dieu, reconnaissant que, sans son assistance, nous commettrions des fautes plus graves que celles où nous voyons tomber le prochain. « Frères, dit saint Paul, lors même qu'un homme se serait laissé surprendre à quelque faute, vous qui êtes spirituels, redressez-le avec un esprit de douceur, prenant garde à vous-mêmes, de peur que vous ne tombiez aussi en tentation (Gal., VI, 1).

Ne nous lions pas d'intimité avec les confrères dont la compagnie pourrait nous être une occasion de fautes ; honorons-les comme des frères, servons les, ail besoin, avec promptitude et dévouement, mais sans subordonner notre conduite à la leur.

Affligeons-nous des manquements dont nous sommes témoins sans que notre zèle pour l'observance en soit refroidi ni notre piété ébranlée ; regardons-les comme des épreuves pour notre fidélité, comme des occasions de témoigner à Dieu notre attachement inviolable. Sachons dire avec saint Jean-François Régis : « Je ne suis pas venu en religion pour observer la Règle comme je vois tel ou tel de mes confrères l'observer, mais bien comme j'ai promis à Dieu de le faire au jour de ma profession.

En résumé, opposons-nous au mauvais exemple, prudemment mais fortement : avec charité, mais avec un saint mépris pour tout respect humain.

Ce dernier point, pour son importance, mérite d'être exposé avec quelques détails. 

V. Devoir d'éviter le respect humain.

 Le respect humain constitue une véritable démission du devoir de donner le bon exemple. Celui qui cède au respect humain craint de s'affirmer, de faire autrement que tout le monde ; il a peur du qu'en dira-t-on, d'un mot, d'un regard, d'un sourire d'improbation.

Ce défaut est l'ennemi de la sincérité et de la loyauté. Il nous fait jouer un rôle qui n'est pas le nôtre, nous fait prendre de faux airs et empêche le plein développement de notre personnalité. Il se caractérise par un grand désir d'être agréable à autrui, accompagné d'une crainte exagérée de lui déplaire. Ceux qui en sont atteints oublient que, si faire plaisir au prochain est chose louable, ce ne doit jamais être en manquant au devoir. Ils oublient également que celui qui n'obéit qu'à sa conscience finit par s'imposer au respect de tous.

Ce défaut existe-t-il dans nos communautés ? Parmi ceux qui se sont réunis pour mieux servir Notre-Seigneur, y en a-t-il qui s'écartent des prescriptions de la Règle parce qu'ils attachent trop d'importance aux jugements des hommes ?

Il nous faut reconnaître, bien que cela paraisse étrange, que le respect humain pénètre dans les meilleures communautés. Il y revêt des formes moins grossières que dans le monde, mais pourtant réelles. En voici des exemples.

On garderait le silence, mais qu'en penseront ceux qui tiennent ce point de Règle pour une minutie ?

On prierait avec soin, veillant sur la tenue, suivant dans son livre ; mais ne dira-t-on pas que c'est affectation de piété ?

On témoignerait une grande docilité au Frère Directeur, c'est un devoir élémentaire ; mais ne sera-t-on pas accusé de rechercher sa faveur ?

On parle à un Supérieur avec respect ; mais, s'il est absent, ne prend-on pas, pour faire comme les autres, une attitude fort différente ? En sa présence on partage son opinion ; devant les confrères, surtout devant tel ou tel, on adopte celle qui leur agrée.

Dans son for interne on condamne telle façon d'agir, tel abus, mais par complaisance on semble approuver.

Pour se conformer à l'esprit de la Règle ; on pratiquerait certaines mortifications, mais on craint de voir sa conduite taxée d'exagération.

Telle conversation n'est pas charitable, on pourrait adroitement la porter sur un autre sujet, mais on craint de passer pour scrupuleux.

On est invité à faire une visite, une dépense non autorisée, ou tout autre acte irrégulier. On voit clairement que l'on devrait refuser, mais on n'en a pas le courage.

On éprouve une sincère sympathie pour la vertu d'un religieux, mais on ne le fréquente guère, on le critique même pour faire comme d'autres, au lieu de rendre à sa vertu l'hommage qu'elle mérite.

N'est-ce pas encore au respect humain qu'il faut attribuer parfois l'omission de la prière de l'heure, du Laudetur en se saluant, l'absence de toute pensée surnaturelle dans certaines lettres . ?

On pourrait allonger l'énumération d'exemples de ce défaut. Rares sont les hommes qui ne lui paient pas tribut un jour ou l'autre. Ainsi le Bienheureux Claude de la Colombière s'accuse d'avoir donné dans ce travers quand il écrit : « J'ai reconnu que je n'avais pas étouffé cette vaine crainte des hommes, je veux dire le respect humain.» Mais il combat cette tendance par une résolution généreuse : «Toute la terre dût-elle se révolter contre moi, se moquer de moi, me plaindre, me blâmer, il faut faire tout ce que Dieu m'inspire pour sa plus grande gloire. Je l'ai promis et j'espère l'observer pour la plus grande gloire de Dieu. Ce n'est pas auprès des hommes que je veux faire fortune » (Vie, par GUITTON, p. 193 et 257).

Comment expliquer la pénétration du respect humain dans les communautés ?

Parfois les jeunes religieux cèdent au respect humain par timidité ou par inexpérience ; mais les causes les plus ordinaires sont les suivantes :

Le manque de foi et d'esprit religieux qui porte à plaire aux hommes plutôt qu'à Dieu.

L'orgueil qui appréhende la froideur, le mécontentement ou les critiques des confrères.

La lâcheté qui recule devant l'effort nécessaire pour surmonter les oppositions et les contradictions.

Ces causes du respect humain sont mises en évidence. dans ce passage de l'Evangile de saint Jean parlant de ceux qui suivirent Notre-Seigneur : « Même parmi les chefs, beaucoup crurent en lui, mais, à cause des Pharisiens, ils ne l'avouaient pas, de peur d'être exclus des synagogues ; ainsi ils préférèrent la gloire qui vient des hommes à la gloire due à Dieu » (Ch. XII, 42, 43).

Les hommes étant jaloux de leur indépendance, on conçoit difficilement que, au mépris de leur conscience, ils adoptent aisément l'opinion changeante et souvent erronée des confrères les moins édifiants. La vie de communauté exige qu'on ne rejette pas sans motif suffisant l'opinion des con-frères ; on doit en tenir compte mais uniquement dans la mesure où elle ne s'oppose pas au devoir.

L'important n'est pas de penser comme les autres et d'agir comme eux, mais de penser et d'agir comme le veulent Notre-Seigneur, la Règle, les Supérieurs qui l'interprètent. .

Dans Histoire d'une âme, sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus raconte comment, peu après sa prise d'habit elle est saluée, à quelques instants d'intervalle, par deux religieuses dont l'une vante « sa bonne mine » et l'autre lui trouve une « mine qui fait trembler». « Je n'avais que seize ans, ajoute la sainte, mais cette petite aventure me donna une expérience telle que depuis je ne comptai pour rien l'opinion si variable des créatures. » (Ch. XII, p. 235.) Partageons sa manière de voir sous peine de devenir les jouets, les esclaves de l'opinion.

Si parfois nous hésitons entre le devoir et l'approbation des religieux tièdes, rappelons-nous ce texte de saint Paul : « Est-ce la faveur des hommes ou celle de Dieu que je recherche ? Mon dessein est-il de complaire aux hommes ? Si je plaisais encore aux hommes, je ne serais pas serviteur du Christ » (Gal., 1, 10).

Il est honteux de commettre des actions coupables, mais non d'accomplir son devoir. Les critiques ne doivent pas nous préoccuper. Craignons moins d'en être l'objet que de les mériter, car en être l'objet dépend des dispositions du prochain, tandis qu'il ne dépend que de nous de ne pas y donner lieu. Il est d'ailleurs des cas où les critiques nous honorent davantage que les approbations ; et saint Augustin nous prévient que « ceux qui veulent progresser et devenir parfaits doivent nécessairement passer par l'épreuve de la contradiction et de la critique ».        

Admirons avec quelle force s'exprime le Pape Pie XII, dans son message de Noël 1946, devant la perspective des incompréhensions ou oppositions que peuvent susciter ses paroles :. « La possibilité de commentaires erronés ou malveillants ne pourrait nous fermer la bouche. Nous nous estimerions indignes de notre charge, de la croix que le Seigneur a posé sur nos faibles épaules, Nous croirions trahir les âmes qui attendent de nous la lumière et la vérité et une direction sûre si, pour éviter les interprétations malignes, Nous hésitions, dans une heure si critique, à faire ce qui dépend de Nous pour réveiller les consciences assoupies et les rappeler aux devoirs qui s'imposent aux soldats du Christ. Aucun droit de veto, de quelque côté qu'il vienne, ne saurait prévaloir contre le précepte du Christ : « Allez et enseignez… ».

Tout en aimant la paix, écrit l'auteur du Culte de la Règle, éviter un pas d'histoires trembleur et coupable. Une estime exagérée de la paix, de la conciliation est bien dangereuse, elle laisse introduire les abus, le relâchement chez les faibles et favorise les exigences arbitraires et injustifiées des caractères impérieux et violents. Cette excessive tolérance mutuelle devrait être appelée de son vrai nom, complicité tacite… Le scandale vînt-il même de haut, qu'il faudrait encore ne point céder…

« Seul contre tous ! Du moins aura-t-on pour soi ce qui suffit : sa conscience et Dieu » (p. 198 et suiv.).

L'audace des méchants dans le monde vient, a-t-on dit, de la faibles des bons. Ne se produit-il pas un phénomène semblable dans nos communautés ? Les irrégularités ne s'y multiplient-elles pas trop souvent à cause de la pusillanimité de ceux qui devraient s'y opposer, soit par un blâme à l'adresse des coupables, soit surtout et toujours par une conduite exemplaire qui les rappelle au devoir ?

On peut résumer ainsi les funestes effets du respect humain :

Il contrarie l'action de la grâce qui sollicite dans le sens du devoir. Il rend donc infidèle aux inspirations de l'Esprit-Saint et s'oppose ainsi à la tendance à la perfection, loi fondamentale de la vie religieuse.

Il peut donner lieu à de nombreuses fautes, car sous son influence, non seulement on ne fait pas le bien qu'on voudrait, mais on fait souvent le mal qu'on ne voudrait pas, à l'imitation de Pilate qui, voulant sauver Notre-Seigneur, finit par le livrer à ses ennemis.

Il met dans une telle indécision qu'il ôte tout enthousiasme pour la vertu. « Celui qui craint trop les hommes, dit saint Ignace, ne fera jamais rien de grand pour le service de Dieu. »

Le respect humain est une forme d'hypocrisie puisqu'il porte à agir contrairement à ses propres sentiments. Mais si l'hypocrite qui emprunte les dehors de la vertu ne fait de tort qu'à lui-même, ce lui qui prend les dehors du relâchement nuit, en outre, à ses imitateurs.

Il est contraire à la simplicité caractéristique du Petit Frère de Marie, car cette vertu « élève l'âme au-dessus des considérations humaines… Celui qui en est animé accomplit son devoir, observe la Règle et se soumet à l'obéissance, sans se mettre en peine de ce que l'on pensera ou de ce que l'on dira » (R. C., art. 192, 193).

Fuyons donc le respect humain. Combattons tout désir excessif de l'approbation d'autrui. Mettons-nous sans crainte en désaccord avec ceux qui s'écartent du devoir. Sans prendre des airs de réformateurs, mais silencieusement, humblement, fermement, gardons la Règle. Pensons au jugement de Dieu, autrement important que celui des hommes ; redisons avec saint Paul : « Je me mets fort peu, en peine d'être jugé par vous, ou par un tribunal humain… Celui qui me juge, c'est le Seigneur… qui mettra en lumière les choses cachées dans les ténèbres et qui manifestera les desseins des cœurs et alors chacun recevra de Dieu la louange qui lui sera due » (I Cor., v, 3-5).

Quand la crainte des hommes nous envahit, rappelons-nous les graves paroles de Notre-Seigneur : « Celui qui m'aura confessé devant les hommes, moi aussi, je le confesserai devant mon Père qui est dans les cieux ; et quiconque m'aura renié devant les hommes, moi aussi, je le renierai devant mon Père qui est dans les cieux » (Matt., x, 32, 33).

Ce souvenir des jugements de Dieu à opposer aux jugements des hommes rendait saint Jean Chrysostome indifférent à la persécution, à la confiscation des biens, à l'exil et même à la mort dont le menaçaient ses ennemis. Saint Augustin pouvait dire de son côté : « Pensez ce que vous voudrez d'Augustin, la seule chose que je désire, veuille et recherche, c'est que ma conscience ne m'accuse pas devant Dieu de n'avoir pas fait tout mon devoir ».

Sainte Thérèse s'étant proposé la réforme du Carmel soulève des tempêtes. C'est un blâme universel.. Orgueil, hypocrisie, désir de dominer dans la religion en s'y distinguant par des coups d'éclat, tels sont les griefs dont on la charge ; partout on. s'oppose à ses desseins. Loin de se déconcerter, elle croit voir, dans cette opposition des hommes, un gage certain du secours de Dieu. Tout ce qu'elle craint, c'est de craindre quelque chose, lorsqu'il s'agit de soutenir les intérêts de. Dieu » (Chaignon).

« Je crains plutôt d'être infidèle à Dieu que d'être méprisé d'os hommes» répondait notre Vénérable Fondateur à ceux qui trouvaient ses entreprises trop hardies et craignaient qu'il devînt la risée du public. (Sa vie, p. 339.)

Appliquons-nous à acquérir les sentiments des saints. Soyons pour tous, par notre exemple, des guides et des entraîneurs. Quant à la crainte servile des hommes, opposons-lui la crainte de Dieu qui est le commencement de la sagesse.

Combien fervente serait notre Congrégation si chacun ce nous méritait ce double témoignage rendu au vénéré Frère François dans le procès apostolique ! L'un a trait à sa vie exemplaire : « J'affirme qu'il a pratiqué les vertus religieuses, toute sa vie, d'une façon héroïque, car il n'était pas homme à prêcher sans pratiquer. » Le second montre son mépris du respect humain : « Je sais que le serviteur de Dieu ne s'inquiétait pas de ce que l'on disait de lui, il se contentait du témoignage de sa conscience. »  

Agrégation de l'Institut

à l'Union Missionnaire du Clergé.

(U. M. C.)

 Comme on le sait généralement, il existe une Union Missionnaire du Clergé, dont le but est d'associer les prêtres à l'Apostolat de l'Église dans les Missions.

Elle est dirigée par le Secrétaire de la Sacrée Congrégation de la Propagande assisté d'un Conseil central international avec lequel collaborent des Conseils nationaux ou diocésains.

Cette pieuse Union approuvée en 1916 par le Pape Benoît XV s'est répandue depuis dans le monde entier.

En vue d'augmenter son action, en y associant de nouveaux membres, la Sacrée Congrégation de la Propagande a obtenu du Souverain Pontife de pouvoir y agréger les Instituts de religieux non prêtres, moyennant une modification de ses statuts primitifs. 

Voici ce DÉCRET :

Certains Supérieurs Généraux de Congrégations laïques ayant exprimé à notre Conseil de Propagande le désir d'agréger leur Institut à l'Union Missionnaire du Clergé, il nous a paru bon, pour être plus utiles à la cause missionnaire, de rédiger des Statuts adaptés à cette fin.

Le soussigné, Secrétaire de la Sacrée Congrégation, présenta ces Statuts à Notre Saint-Père le Pape Pie XII en l'audience du 14 juillet de la présente année, et le Souverain Pontife daigna les agréer, les approuver, les confirmer. Puis il concéda certaines Indulgences annexées à ces Statuts et ordonna l'entrée en vigueur du présent Décret. 

Donné à Rome, du Palais de la S. C. de la Propagande, le 14 juillet 1949.

 

P. Cardinal FUMASONI BIONDI,

   Préfet.

 Celsus CONSTANTINI,

Archevêque titulaire de Théodosia,

   Secrétaire.  

Sur une invitation venue de Rome, le Conseil Général examiné l'opportunité de faire agréger notre Institut à l'U.M.C.

Et de fait, les Statuts de la pieuse Union Missionnaire n'ajoutent aucune obligation spéciale pour nous. D'autre part, notre Congrégation est missionnaire depuis l'envoi que fit notre Vénérable Fondateur de plusieurs Frères en Océanie, en 1836. Dans la suite, elle a fondé et maintient encore de nombreuses écoles dans les terres païennes, de sorte qu'elle accomplit, et bien au-delà, les conditions que doivent remplir les membres de l'U.M.C.

C'est pourquoi nous avons envoyé à la Sacrée Congrégation de la Propagande la demande suivante : 

    INSTITUT

     DES

PETITS FRÈRES DE MARIE

   MAISON-MÈRE 

            Saint-Genis-Laval, le 25 janvier 195(

A Son Excellence Monseigneur Felice BERETTA,

     Secrétaire International de l' U.M.C

EXCELLENCE,

« Le Supérieur Général de l'Institut des Petits Frères de Marie et les Membres de son Conseil, dans leur réunion du 25 janvier 1950, ont pris connaissance du Décret de la S. C. de la Propagande en date du 14 juillet 1949.

« Après en avoir délibéré, ils ont pensé que, pour répondre pleinement aux directives pontificales au sujet des Missions, pour exciter l'esprit missionnaire parmi les Frères et leurs élèves et bénéficier des faveurs spirituelles accordées à l'Union Missionnaire du Clergé, ils devaient solliciter auprès de Votre Excellence l'agrégation collective de leur Congrégation à l'Union Missionnaire du Clergé.

« Dans la confiance que leur humble demande sera exaucée, le Frère Supérieur Général et les Membres de son Conseil prient

Votre Excellence

d'agréer l'expression de leurs sentiments de respect et de gratitude. »

                                   Frère LÉONIDA, Supérieur Général.  

Voici la réponse bienveillante que nous avons reçue quelques jours plus tard :

Rome, le 31 janvier 1950.

UNION MISSIONNAIRE

  DU CLERGÉ

 Secrétariat

International

 Num. 41/50 Prot.

                      TRÈS RÉVÉREND FRÈRE SUPÉRIEUR GÉNÉRAL,

DE L'INSTITUT DES PETITS FRÈRES DE MARIE.

J'ai reçu avec beaucoup de plaisir votre très aimable lettre du 25 janvier 1950. C'est avec un titre d'honneur que j'inscris, le second, votre si méritant Institut, l'agrégeant à l'Union Missionnaire du Clergé, selon le Décret de la Sacrée Congrégation de la Propaganda Fide du 14 juillet 1949, prot. n. 2649/49. Je vous ferai parvenir, aussitôt qu'il sera prêt, le Diplôme d'agrégation.

Je suis heureux de saisir cette occasion de vous remercier de votre généreux empressement et me recommande vivement à vos prières.

                      Felice BERETTA,

Secrétaire Général

de l'Union Missionnaire du Clergé. 

Notre Institut est donc agrégé à la pieuse Union Missionnaire du Clergé et participera aux indulgences et faveurs spirituelles dont le Saint-Père l'a enrichie.

Il nous reste à remplir les obligations résultant de cette agrégation. Mais, comme nous sommes un Institut missionnaire qui les observe dans leur ensemble depuis longtemps, il suffit de donner, par des Statuts appropriés, une forme précise à nos engagements. C'est pourquoi nous formerons, à notre tour, une Association qui portera le nom d'Union Missionnaire « Vénérable Marcellin Champagnat » et qui sera comme un secteur de la grande U. M. C. 

Projet de Statuts de l'Union Missionnaire

« Vénérable Marcellin Champagnat. »

 1. But. – Le but de l'Union Missionnaire «Vénérable Marcellin Champagnat » est de promouvoir parmi ses membres l'esprit missionnaire et d'intéresser nos élèves à tout ce qui regarde les missions en pays infidèle.

2. Membres. – L'Union Missionnaire « Vénérable Marcellin Champagnat » est formée par l'ensemble de l'Institut des Petits Frères de Marie, y compris les Novices, Postulants et Juvénistes.

3. Patrons. – L'Union choisit comme Patrons la Bienheureuse Vierge Marie sous le titre de Reine des Apôtres, saint François Xavier et sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus.

4. Siège. – Le Siège central de l'Union est fixé à la Maison-Mère de l'Institut et son Président est le Révérend Frère Supérieur Général.

5. Activités. – L'Union Missionnaire « Vénérable Marcellin Champagnat » propose à ses membres les activités suivantes :

a) Prier fervemment et fréquemment pour demander à Dieu de bénir les travaux des Missionnaires et d'augmenter le nombre des ouvriers apostoliques ;

b) S'intéresser à tout ce qui regarde l'évangélisation des pays infidèles : son histoire, ses oeuvres, ses effectifs, son champ d'action, ses progrès, ses nécessités et les moyens d'y remédier ;

c) Susciter des vocations missionnaires parmi nos élèves soit pour tous les Instituts en général, soit pour le nôtre en particulier ;

d) Intéresser nos élèves à l’œuvre d'évangélisation des païens par des lectures, conférences, catéchismes, exhortations, etc. … ;

e) Susciter parmi eux des offrandes destinées soit aux Œuvres Pontificales Missionnaires, soit à nos propres Missions ;

f) Donner une certaine solennité aux fêtes de saint François Xavier et de sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus, demandant par leur intercession de zélés Missionnaires. Prendre part à l'Octave de Prières pour l'Union des Eglises, du 18 au 25 janvier ; au Dimanche des Missions qui se célèbre le dimanche qui précède la fête du Christ-Roi et à la Journée des Malades, le dimanche de la Pentecôte.

6. Direction. – L'Union Missionnaire « Vénérable Marcellin Champagnat » est dirigée par le Révérend Frère Supérieur Général de l'Institut, aidé de deux Membres de son Conseil. Ils forment ensemble la Commission des Missions, chargée d'activer dans les Provinces l'organisation et la marche de l'Union, de centraliser les collectes et de les répartir entre nos Missions nécessiteuses, de se tenir au courant des documents pouvant intéresser les Frères aux Missions, de rester en contact avec les Centres des Œuvres Pontificales. Chaque Frère Provincial nommera un Frère ou une Commission pour des fonctions analogues dans sa Province.

7. Indulgences. – Les Membres de l'Union Missionnaire « Vénérable Marcellin Champagnat » peuvent gagner :

a) Une indulgence plénière aux conditions ordinaires, aux fêtes de l'Épiphanie, des Saints Apôtres, de saint Michel Archange et de saint François Xavier ; de plus une fois le mois, au choix de l'associé et à l'article de la mort, étant observé ce qui doit l'être ;

b) Une indulgence partielle de cent jours pour n'importe quelle oeuvre de piété accomplie en faveur des Missions. 

Observation. – Cette pieuse Union, comme nous l'avons dit, n'ajoute pratiquement rien à nos oeuvres ordinaires, déjà en usage. Elle n'impose donc aucune obligation de conscience. Elle se borne à exhorter ses membres à pratiquer les activités indiquées plus haut pour avoir part aux faveurs spirituelles accordées à l'Union Missionnaire du Clergé.

*

*     *

 Je pense qu'il est inutile, mes bien chers Frères, de vous exhorter longuement à nous associer de tout cœur à l'Œuvre d'évangélisation des pays encore païens. Un bon nombre d'entre nous ont fait le sacrifice de leur patrie pour aller se joindre, en terres infidèles, aux prêtres et religieux qui les évangélisent. De belles Œuvres, pénibles, sans doute, mais fécondes sont entre leurs mains. Des centaines de baptêmes viennent, chaque année récompenser leur zèle. Bien plus, ils suscitent sur place des vocations sacerdotales et religieuses qui grossissent les rangs des ouvriers apostoliques.

Ceux qui restent dans leur patrie peuvent, eux aussi, participer au travail de nos confrères partis pour les missions. Ils peuvent prier et recueillir des aumônes comme l'indiquent les Statuts.

Nous prions tous, j'en suis sûr, et le Calendrier religieux nous le rappelle fréquemment, pour nos Frères missionnaires et la conversion des infidèles.

Quant aux collectes pour les Œuvres Pontificales Missionnaires et pour nos propres Missions, elles sont en bonne situation dans toutes nos Provinces. De plus, nous avons à Grugliasco l'Œuvre Saint-François-Xavier qui représente, par les frais que couvre l'Institut, une belle contribution au budget des Missions. Au sujet des collectes il faut bien préciser aux élèves, dans chaque cas, si c'est en faveur des Œuvres Pontificales Missionnaires ou en faveur de nos Missions et donner aux fonds ainsi recueillis la destination indiquée.

La constitution de la présente Union Missionnaire «Vénérable Marcellin Champagnat » sera pour nous l'occasion de faire mieux encore à l'avenir et de participer plus activement que par le passé, s'il est possible, à l'extension du règne de Notre-Seigneur.  

Visite de délégation en Océanie,

                    MON RÉVÉREND FRÈRE SUPÉRIEUR,

 Me voici de retour après une absence de dix-huit mois consacrés à visiter nos trois Provinces d'Océanie. Je dois remercier le bon Dieu et la Très Sainte Vierge de m'avoir protégé tout spécialement dans mes longs voyages en bateau, en train et en avion. Ma santé s'est maintenue bonne et j'ai eu bien des consolations, soit à cause du bon esprit qui règne dans les Communautés que j'ai visitées, soit à cause de la prospérité croissante de nos oeuvres en Océanie. Je suis heureux de vous donner ici un bref aperçu de la situation actuelle de ce lointain secteur de notre Institut. 

Australie.

 L'Australie a une superficie qui est environ les trois quarts de celle de l'Europe. Jusqu'en 1947 nous n'y avions qu'une Province, d'ailleurs très florissante ; mais sa vaste étendue en rendait bien difficile la bonne administration. C'est pourquoi la division en deux Provinces fut décidée. L'une, celle de New South Wales (Nouvelle Galles du Sud), dont la ville principale est Sydney, occupe surtout la partie orientale de la grande île. L'autre, celle de Victoria, comprend surtout la partie méridionale et occidentale du continent australien et compte des localités importantes, comme Melbourne, Adélaïde, Perth, etc.

Cette division s'est faite en tenant compte surtout des conditions géographiques ; et bien que la nouvelle Province de Victoria ait des effectifs plus réduits que celle de New South Wales, elle a cependant devant elle un bel avenir, semble-t-il, au point de vue recrutement et expansion territoriale.

Écoles. — a) La Province de New South Wales a une trentaine d'établissements dont la moitié sont situés à Sydney ou dans les environs.

Dans la plupart de ces écoles on donne l'enseignement secondaire, soit du premier degré jusqu'à l'intermediate school, soit du second degré qui donne entrée à l'Université.

St. Benedict's et St. Patrick's de Sydney ont une section technique du bois et des métaux, ce qui leur attire beaucoup d'élèves, même de paroisses assez éloignées.

Le travail du bois existe aussi dans plusieurs autres écoles. On peut ainsi garder les élèves pendant toute leur scolarité dans un milieu catholique, plus favorable pour la conservation de leur foi et de leur vertu que celui des écoles techniques officielles.

Campbelltown est une école d'agriculture qui compte des élèves venant des plus lointaines régions du New South Wales et même du Victoria.

New Norcia est un pensionnat situé dans l'Ouest de l'Australie, à 100 milles environ de Perth) bien à l'intérieur du pays. Cet isolement des grands centres est fort apprécié des parents, parce qu'il favorise chez leurs enfants le goût de la vie champêtre.

Westmead est un orphelinat appartenant à la Société de Saint-Vincent-de-Paul, mais administré par nos Frères. Il y a environ trois cents internes. On leur donne des cours primaires et secondaires jusqu'à un certain âge, après quoi on leur enseigne des métiers ou on les oriente vers diverses carrières. Il y a là aussi une imprimerie moderne avec les machines les plus récentes. Les élèves sont, en outre, initiés à la taillerie, à la cordonnerie et à la reliure. L'établissement a une excellente réputation en Nouvelle Galles du Sud.

b) La jeune Province, de Victoria a une vingtaine d'écoles dont deux : Camberwell (externat) et Griffith sont de fondation toute récente. La plupart de ces écoles donnent l'enseignement primaire et secondaire. Thebarton et Bendigo y ajoutent l'enseignement technique pour le travail du bois et du fer.

Mount Gambier, situé dans une région agricole et d'élevage, oriente ses élèves vers les travaux des champs.

A Broken Hill, important centre minier, les Frères, sous un climat débilitant et dans un milieu peu favorable, font preuve d'un grand dévouement et réalisent beaucoup de bien.

Éducation et enseignement. — Dans toutes ces écoles la formation religieuse, morale et sociale des élèves est le souci constant de nos Frères. Les pratiques de piété sont en honneur partout. Dans les grands pensionnats, comme St. Joseph's College de Sydney, Hunter's Hill, Ashgrove, Campbelltown, Cairns, Eagle Heights, etc. … , des centaines d'élèves s'approchent tous les matins de la Sainte Table. Cependant, il est parfois bien difficile d'avoir un aumônier attitré pour le service religieux.

Il y a dans tous ces collèges des associations religieuses diverses bien organisées : Congrégation de la Sainte-Vierge, Chevaliers-du-Saint-Sacrement, Société du Saint-Nom-de-Jésus, Conférences de Saint-Vincent-de-Paul, etc. L'esprit religieux des élèves fait honneur à leurs maîtres.

Les prêtres des paroisses, ainsi que les évêques des diocèses où l'Institut est établi sont très satisfaits du labeur de nos Frères. J'ai reçu partout à cet égard des témoignages de vive reconnaissance de toutes les autorités religieuses et civiles, notamment de Son Ém. le Cardinal Gilroy, archevêque de Sydney, notre ancien élève.

Ces éloges sont bien mérités. Du point de vue religieux, le travail des Frères est conduit avec beaucoup de sagesse et de succès. L'organisation des études et le dévouement du personnel enseignant assurent la bonne marche des établissements et les succès aux examens à la fin de l'année scolaire.

Les anciens élèves, groupés partout en Amicales, restent très attachés .aux Frères. Il existe une Fédération Sportive des Anciens Élèves des Collèges Maristes d'Australie. Des rencontres fréquentes pour des compétitions de football, de lawn-tennis, de cricket, etc., contribuent à créer des liens d'amitié entre les divers groupements.

Maisons de formation et recrutement. – La maison provinciale de New South Wales est à Mittagong où se trouve également le Noviciat avec 20 Novices et 16 Postulants. A 500 mètres de là, le Juvénat abrite actuellement près de 90 Juvénistes.

La Province de Victoria a son Juvénat à Macedon. A mon passage, les Juvénistes, au nombre d'une trentaine, ont fait une retraite de trois jours. J'ai été profondément édifié de leur piété et de leur recueillement.

Il n'y a encore qu'un seul Noviciat et un seul Scolasticat pour les deux Provinces. Dès que les circonstances le permettront, chaque Province aura chez elle ses divers centres de formation.

Les Scolastiques de Camberwell font leur pratique d'enseignement dans nos écoles voisines de East Brunswick et Hawthorn. Les examens d'enseignement pratique ont lieu devant les inspecteurs des écoles officielles ; ceux-ci ne ménagent pas leurs félicitations aux jeunes Frères pour leur excellent travail et leurs premiers succès dans l'enseignement.

Les Frères rivalisent d'enthousiasme et' de zèle pour faire surgir de nombreuses vocations parmi leurs élèves. La presque totalité des aspirants de nos maisons de formation des deux Provinces viennent de nos écoles, qui fournissent de plus un bon contingent de recrues pour les Séminaires diocésains et pour diverses familles religieuses.

Missions. – La Province de New South Wales s'est chargée de la Mission des Iles Salomon. Avant la dernière guerre mondiale nous y avions deux maisons. L'invasion japonaise a coûté la vie à trois de nos Frères, et les deux écoles ont dû être fermées. On vient de les rouvrir et on s'y occupe aussi du recrutement. Déjà deux naturels des îles Salomon sont entrés au Juvénat de Mittagong où ils seront bientôt rejoints par d'autres recrues en perspective. 

Province de la Nouvelle-Zélande.

 La Province comprend trois secteurs : Nouvelle-Zélande, îles Fidji et îles Samoa.

En Nouvelle-Zélande, nos établissements sont en pleine prospérité. On y donne généralement l'enseignement primaire et secondaire. Le Sacred Heart College de Auckland et Greymouth donnent, en outre, l'enseignement technique et commercial. Depuis sa fondation, le Sacred Heart College a recruté parmi ses élèves plus de cinquante prêtres.

A Auckland Northcote il y a une école pour soixante Maoris envoyés par les différentes Missions, des Pères de Mill Hill. Ceux-ci prennent entièrement à leur charge les indigènes, sauf pour la classe confiée à nos Frères dont le travail est fort apprécié.

Nous avons aux îles Fidji six écoles dont trois à Suva qui est le centre principal. L'une d'elles, St. Francis Xavier's, qui est purement secondaire, a obtenu les meilleurs résultats du pays aux examens de fin d'année scolaire.

Les trois écoles hors de Suva sont exclusivement pour indigènes.

Aux îles Samoa, il y a quatre écoles dont deux situées à Apia. On ne saurait trop louer le dévouement des Frères qui y exercent leur apostolat au milieu de grandes difficultés et sous un climat très débilitant.

Les naturels sont très attachés aux pratiques religieuses. Les dimanches et jours de fête, ils feraient honte à bien des Blancs par leur assiduité aux offices de la paroisse, malgré les intempéries et de longues distances à parcourir à pied pour se rendre à l'église. Si au cours de leur vie ils négligent parfois leurs devoirs religieux, ils ne veulent pas, du moins, mourir sans recevoir les derniers Sacrements.

Dans ce milieu particulièrement difficile, les Missionnaires apprécient hautement la collaboration qu'apportent les Frères à l'évangélisation du pays par la formation chrétienne de la jeunesse.

On regrette que nos Frères ne soient pas plus nombreux dans ces trois secteurs de la Province de Nouvelle-Zélande. Cependant les maisons de formation voient augmenter leur effectif. C'est ainsi qu'au Juvénat de Tuakau il y a une cinquantaine d'aspirants, dont un Indien et un Maori.

En résumé, on peut dire que dans nos trois Provinces d'Océanie l'œuvre mariste est en progrès.

La protection de notre Ressource Ordinaire qui n'a jamais fait défaut, et le puissant crédit auprès de Dieu des Frères qui, depuis bientôt cent vingt ans, ont fécondé de leurs sueurs et même de leur sang ces terres lointaines, laissent espérer un avenir toujours plus prospère.

Frère CLEMENT, A.G. 

STATISTIQUE DES TROIS PROVINCES D'OCÉANIE

AU 1ierJANVIER 1950. 

 

 

New South

Wales

Victoria

Nouvelle

Zélande

Profès perpétuels

Profès temporaires

Scolastiques

Novices

Postulants

Juvénistes

Maisons

Élèves internes

Élèves externes

177

69

9

20

16

84

33

1.390

7.083

 

78

37

6

6

15

30

19

808

2.352

 

118

38

9

9

6

53

19

260

5.300

 

   

Visite de délégation

à la Province d'Italie.

                     MON RÉVÉREND FRÈRE SUPÉRIEUR,

 Je suis heureux de vous donner le compte rendu de ma visite de délégation à la Province d'Italie.

J'ai la satisfaction de pouvoir vous dire que, dans l'ensemble, l'impression recueillie est très bonne. La régularité, le bon esprit et le zèle règnent parmi les Frères ; les oeuvres de formation sont établies sur de bonnes bases et les écoles en pleine prospérité.

Voici quelques détails :

Aperçu historique. – En 1886, du fait de l'accroissement de l'Institut, le besoin d'un contact plus direct avec les Congrégations romaines se faisait de plus en plus sentir. C'est ce qui détermina les Supérieurs à ouvrir une maison à Rome. L'année suivante, on y annexa une école. Telle fut l'origine modeste du district mariste d'Italie dont le développement fut, pour diverses raisons, retardé pendant de longues années.

Lors des événements de 1903 en France, la Province de Saint-Paul-Trois-Châteaux transféra ses maisons de formation à Ventimiglia et à Mondovi. L'arrivée d'un groupe de Frères français donna des espérances pour un meilleur avenir. On accepta la direction d’œuvres de bienfaisance : asiles, orphelinats, etc. ; mais la difficulté d'obtenir les diplômes requis pour l'ouverture d'écoles porta les Supérieurs à diriger' sur d'autres pays, l'Argentine notamment, de nombreuses recrues italiennes.

En 1936, les maisons d'Italie furent érigées en district autonome. Les Frères si méritants venus de France et dont plusieurs occupaient des charges importantes, furent graduellement remplacés et rentrèrent à Saint-Paul-Trois-Châteaux. En con-séquence, les Frères italiens prirent en mains la direction des oeuvres et dressèrent un plan de leur organisation définitive. Tous se . souviennent du rôle important exercé alors par le C. F. Raffaele, premier Visiteur, dont la mort prématurée fut une perte très sensible pour le District.

Ce district a été érigé en Province au dernier Chapitre Général (1946). 

État actuel de la jeune Province.

 a) Maisons de formation. Ventimiglia (Ligurie) – « Villa Santo Stefano ». Maison Provinciale, Noviciat et Scolasticat. Cette année, par suite de la création du Juvénat supérieur, le personnel de cette maison est très réduit : 3 postulants, 11 novices et 12 scolastiques. Ces derniers préparent l'examen de « Magistrale Inferiore », titre officiel qui les autorise à donner l'enseignement primaire.

Mondovi (Piémont) « Villa Secchi ». – Juvénats inférieur et supérieur avec 62 et 36 juvénistes respectivement.

Au Juvénat inférieur on enseigne les trois années du premier cycle des écoles moyennes.

Le Juvénat supérieur prépare les deux premières années de la « Magistrale ».

Fiuggi. – Juvénat inférieur pour la région de Rome, avec 48 juvénistes. Il fut fondé pendant la dernière guerre, par suite de l'impossibilité d'envoyer les recrues de la région à Mondovi. Il fonctionne dans une maison appartenant aux RR. Pères Missionnaires de la Consolata de Turin ; ceux-ci, avec un grand désintéressement, la mirent à notre disposition avec tout son mobilier, moyennant un loyer insignifiant. Le local étant très réduit et devant bientôt retourner à ses propriétaires, le Conseil Provincial a pris ses mesures pour assurer l'existence et la prospérité de ce juvénat.

Et aujourd'hui, à Manziana, riante localité située sur la voie ferrée Rome-Viterbe, on est sur le point d'achever la construction d'un édifice ad hoc qui permettra de recevoir 70 ou 80 juvénistes.

b) Les écoles. Rome, « Collegio San Leone Magno ». – Fondé en 1887. Très modeste dans ses débuts, il figure aujourd'hui parmi les collèges les mieux réputés de la Ville Éternelle, avec près d'un millier d'élèves divisés en : enseignement primaire (cinq années), cycle inférieur d'enseignement secondaire (trois années) et le cycle supérieur avec ses deux branches : « Liceo Classico » et « Liceo Scientifico » (cinq années). Les études sont équiparées à celles des établissements officiels.

Des travaux sont en cours pour améliorer les diverses installations, et des démarches ont été entreprises pour doter le collège d'un terrain de sport en dehors de la ville.

L’œuvre des Scouts catholiques, celles des Élèves-Catéchistes et des Conférences de Saint-Vincent-de-Paul méritent une mention spéciale pour leur bon fonctionnement.

Gênes. – Nous avons deux écoles dans cette ville

a) « Istituto San Giuseppe » (Via Casaregis). – Fondé en 1905 dans le but principal d'avoir un pied-à-terre dans ce port où s'embarquaient fréquemment des Frères pour l'étranger. Ceci explique qu'on n'ait pas donné l'importance voulue au choix du local scolaire : imprévoyance dont on souffre encore aujourd'hui des conséquences. Malgré cela, l'école prospéra et devint bientôt un centre fort apprécié des élèves, des anciens élèves et des familles. A tel point que, lorsqu'on a essayé de transférer l’œuvre à l'autre école, les réclamations des parents nous ont contraints à conserver les deux centres.

Aujourd'hui, « San Giuseppe » de Via Casaregis compte 330 élèves des classes primaires et moyennes.

b) « Istituto San Giuseppe » (Via Panigalli). – Appelé aussi « Lido » parce qu'il est situé près de la mer, dans une belle et vaste propriété. Le local actuel ne permet pas de recevoir plus de 420 élèves. Il y a les cours primaires et le « Liceo Scientifico » complet. On attend, avec une impatience justifiée : une chapelle plus vaste, une « palestra » (salle de gymnastique exigée par les règlements scolaires) et quelques classes en plus.

Nous espérons que saint Joseph, dont la dévotion est traditionnelle dans les deux écoles qui portent son nom, continuera ses largesses accoutumées à l'égard de ses protégés.

Viterbe. « Collegio Cardinal Ragonesi ». – A la demande du Cardinal La Fontaine, natif de Viterbe et Promoteur de la Foi dans la cause de notre Vénérable Fondateur, on se chargea en 1913 de la direction du collège épiscopal, alors peu prospère et qui avait pour but principal d'offrir un internat aux élèves des environs qui fréquentaient les écoles de l'État.

En 1926, grâce à la munificence du Cardinal Ragonesi et à une forte contribution de l'Administration Générale de la Congrégation, on a pu élever le bel édifice actuel.

L'école a aujourd'hui 220 élèves, dont 90 internes environ.

Giugliano. (Instituto Principe Umberto I », près de Naples. En 1931, les Frères acceptèrent la direction d'un petit Asile pour orphelins. On y ajouta bientôt une école qui, en peu d'années, a pris un développement inespéré, car elle enregistre actuelle-ment le beau chiffre de 500 élèves, y compris les 25 orphelins de l'Asile. C'est le seul centre scolaire religieux de la région et il exerce une influence peu commune dans son rayon d'action. On désire lui conserver son caractère d'école populaire, et on pense y établir un patronage pour accueillir les nombreux enfants qui, laissés à eux-mêmes, courent les rues de la ville.

L'école et ses dépendances n'étant pas la propriété de l'Institut, on vient de faire l'acquisition d'un beau terrain avec la perspective d'y transférer l’œuvre. 

Quelques aspects généraux de la Province.

 La Province donne l'impression d'être bien lancée. Le plan prévu pour son développement est bien conçu. : deux juvénats inférieurs et un juvénat supérieur, tous les trois séparés ; postulat à 17 ans, après avoir suivi cinq des huit cours d'enseignement secondaire ; deux années de scolasticat inférieur pour l'obtention du diplôme de maître d'école, puis un scolasticat universitaire à fonder prochainement à Milan pour y suivre les cours de l' « Università Cattolica del Sacro Cuore ».

Le programme d'études religieuses a fait l'objet d'une attention spéciale de la part des Supérieurs de la Province. A partir du Juvénat inférieur, il se compose de dix-neuf années dont quatre consacrées à la philosophie scolastique et huit aux différentes branches de la théologie. Cette dernière est étudiée dans des textes latins, avec le grand avantage de plus de précision dans les connaissances.

Quant aux écoles, avant d'en fonder de nouvelles, il faut assurer la bonne organisation des maisons de formation et le bon fonctionnement des collèges existants. Après cela, on pourra songer à de nouvelles fondations' dans lesquelles les enfants pauvres auront la préférence.

Les vocations, grâce à Dieu, ne manquent pas. On espère atteindre le chiffre de deux cents juvénistes dès que le permettront les ressources de la Province. On travaille à intensifier et à perfectionner le recrutement, surtout dans nos écoles qui ne fournissent pas encore le contingent d'aspirants qu'on est en droit d'attendre. Cela permettra de faire monter encore le pourcentage de persévérance qui est déjà fort appréciable, si on en juge par la période qui s'étend de 1920 à 1940. . 

STATISTIQUE DE LA PROVINCE.

 

Juvénistes …………………………………………….. 146

Postulants …………………………………………………. 3

Novices …………………………………………………… 11

Frères……………………………………………………. 160

 

Personnel de la Province …………………………. 320

Maisons ……………………………………………………. 8

Élèves ………………………………………………… 2.385 

 

Tel est en résumé, Mon Révérend Frère Supérieur, l'état de la jeune Province qui a le bonheur de s'abriter à l'ombre du Vatican.

Je me permets de la recommander à vos prières, afin qu'elle puisse réaliser le plan d'apostolat que Dieu et la « Madonna » lui ont tracé.

Frère SEBASTIANI, A. G. 

 Visite à nos Frères du Proche-Orient.

 En 1910, le R. F. Stratonique consacrait trois mois, de février à mai, à la visite de nos maisons du Proche-Orient. Quarante ans après, avec le C. F. Jean-Émile, A. G., nous avons suivi, dans les grandes lignes, bien qu'en moins de temps, le même itinéraire. L'économie de temps est due, d'une part, à l'auto et à l'avion et, de l'autre, à la disparition de certaines de nos oeuvres par suite, surtout, des deux dernières guerres.

Le Cher Frère Assistant vous donnera sous peu des détails intéressants sur la visite et ses à côtés. Je me bornerai à vous entretenir brièvement de nos oeuvres. L'impression que j'en rapporte est excellente ; aussi je tiens à remercier le Cher Frère Visiteur et tous les Frères des consolations que j'ai éprouvées en me rendant compte personnellement de leur bon esprit et des fruits admirables obtenus par leur zèle et leur dévouement. C'est en toute sincérité que je redis après le vénéré Supérieur Général qui m'a précédé dans ces contrées : « Nos Frères font l’œuvre de Dieu au Liban, en Syrie et en Grèce. » C'est à l'estime et à la reconnaissance qu'ils se sont acquises que nous attribuons, le Cher Frère Assistant et moi, les égards exceptionnels dont nous avons été l'objet de la part des autorités religieuses et civiles, aussi bien que des anciens élèves.

II serait impossible de dire si, dans telle ou telle école, la réception a été plus cordiale et plus enthousiaste qu'ailleurs, les Frères et les élèves s'étant efforcés partout de faire de leur mieux. Qu'ils. en soient à nouveau remerciés. 

Liban.

 L'Institut compte sept maisons au Liban : une procure et six écoles.

La procure est à Beyrouth. Elle sert de résidence au Cher Frère Visiteur et au Cher Frère Économe du District. C'est également un appréciable pied-à-terre pour les Frères venant d'Europe ou s'y rendant, et pour tous ceux qui ont des affaires à traiter dans cette ville qui accapare la majeure partie de l'activité du pays dans tous les domaines. Cette résidence est actuellement en reconstruction.

Quoique les établissements religieux d'enseignement soient nombreux à Beyrouth, nous serions assurés d'une excellente clientèle si nous disposions de personnel pour y ouvrir une école. C'est d'ailleurs ce manque de personnel qui nous a obligés à cesser de collaborer, à partir de 1940, avec les Pères Jésuites dans leur Collège Universitaire, malgré leurs instances réitérées et nos bons désirs d'y faire droit.

Les six écoles sont sur la côte ou à proximité. La plus au Sud est Saïda, port situé à 40 kilomètres de Beyrouth. Au Sud également, mais dans la montagne, à 800 mètres d'altitude, Deir-el-Kamar. Au Nord de Beyrouth se trouvent, par ordre croissant de distances : Jounieh, Gebail, Amchit et Batroun qui est à 60 kilomètres de la capitale. Les maisons sont donc bien groupées et, comme les routes sont en très bon état et les autobus nombreux, la visite en est facilitée d'autant.

Tous les locaux, sauf celui de Deir-el-Kamar, appartiennent à la Congrégation. Quatre écoles ont des internes ; mais tandis que Jounieh est un internat au plein sens du mot, dans les trois autres domine une catégorie d'élèves auxquels on ne fournit que le gîte et le lit, leurs parents les approvisionnant généralement chaque semaine.

Jounieh et Saïda donnent l'enseignement primaire et l'enseignement secondaire complet couronné par les deux baccalauréats : arabe et français. Les succès habituels aux examens, ainsi que la bonne formation donnée aux élèves ont valu une excellente réputation à ces deux établissements qui, malgré des agrandissements successifs, se trouvent à l'étroit. Les Supérieurs de la Province se préoccupent de ce problème, mais il leur sera difficile de le résoudre, à moins que des secours importants ne soient accordés, comme par le passé, par le Gouvernement français.

Les autres écoles se bornent à donner des cours du certificat d'études et du brevet. Elles jouissent également de l'estime des familles qui ont beaucoup insisté, à l'occasion de mon passage, pour que nous établissions les cours complets du baccalauréat. Nous ne pourrions satisfaire leur demande qu'en engageant davantage de professeurs civils, chose impossible pour des écules qui ne couvrent leurs frais que grâce à des secours fort aléatoires.

Si je mentionne ces difficultés d'ordre économique, c'est pour souligner le mérite qu'il y a pour nos Frères du Liban à donner leurs soins à un nombre considérable d'élèves gratuits. Ceux-ci sont tantôt mêlés aux élèves payants, comme à Gebail, Batroun et Amchit, tantôt réunis dans des locaux spéciaux, comme dans les trois autres écoles. Le tableau donné plus loin permet d'apprécier le grand effort réalisé dans ce sens. On verra que les trois quarts des élèves seulement sont payants, et encore les taux des mensualités sont-ils, en général, très modiques, surtout pour les externes. Ceci non seulement attire les bénédictions du Ciel et permet de faire un plus grand bien, mais contribue de plus à nous rendre particulièrement sympathiques aux populations. J'ai trouvé une preuve très touchante de cette sympathie à l'occasion des funérailles du C. F. Charles-Marcel, directeur de Jounieh et ancien Provincial, qui ont eu lieu le 19 mars. Sa Béatitude Mgr Arida, patriarche maronite, a bien voulu venir, malgré son grand âge, donner l'absoute. Les anciens élèves et les amis des Frères, accourus très nombreux, se disputaient l'honneur de porter le cercueil. Ceci, joint à la tristesse profonde qui se reflétait sur les visages et aux discours prononcés sur la tombe, témoigne clairement de la gratitude que s'était acquise notre cher défunt par plus de quarante ans de dévouement en faveur des pauvres comme des riches. En ces dernières années, il s'était particulièrement intéressé aux réfugiés palestiniens qui ont trouvé au Liban la généreuse hospitalité que ce pays a toujours donnée aux malheureux persécutés.

Parmi les élèves de Jounieh, il faut signaler un groupe de petits séminaristes du rite arménien catholique qui, accompagnés de deux prêtres, assistent assidûment aux cours. Quoique bien jeunes pour la plupart, ils portent tous la soutane et se distinguent par leur sérieux et leur application à l'étude. Son Éminence le Cardinal Agadjanian m'a exprimé sa reconnaissance pour le service rendu ainsi à son clergé.

Gebail a supprimé l'internat pour donner asile à un embryon de Juvénat préparatoire, lequel compte actuellement une douzaine d'enfants bien disposés qui ne se joignent aux externes que pour les leçons. Quand ils offrent un minimum de garanties, on les envoie continuer leur formation à Varennes. Je n'insiste pas sur la nécessité de ce recrutement ; c'est, avec l'étude de l'arabe par tous les Frères, un des besoins les plus urgents du District. En effet, si d'une part les ouvriers manquent, de l'autre l'arabe est devenu plus nécessaire qu'autrefois depuis que le Liban a obtenu son indépendance. Cette langue, malgré les difficultés que pré-sente son étude, finit par livrer ses secrets aux efforts soutenus, et sa connaissance confère un surcroît de prestige et devient de plus en plus un indispensable moyen d'apostolat.

Comme il y a toujours des prêtres parmi les professeurs d'arabe que l'on se voit contraint d'engager, on a généralement dans les internats deux messes quotidiennes, ce qui en rend plus facile l'assistance aux maîtres et aux élèves catholiques.

Amchit, comme bien des localités du Liban, se dépeuple. Ses habitants, trouvant le travail de la terre peu. rémunérateur, vont dans les villes ou à l'étranger. Cette émigration se fait fortement sentir à l'école qui, par surcroît, n'a plus l'internat comme autrefois. Mais la maison d'Amchit n'en est pas moins le reliquaire du District. C'est là, en effet, que dorment leur dernier sommeil la plupart des Frères décédés en terre syrienne ou libanaise, et c'est là aussi que les Frères brisés par l'âge ou les infirmités prennent un repos et reçoivent des soins bien mérités.

Cette maison a également le mérite d'avoir servi d'asile à bien des Frères et aspirants venus de Varennes après les lois iniques de 1903. Les souffrances et les privations acceptées alors par tous dans un local fort réduit, de même que les longs et pénibles travaux entrepris pour mettre en valeur un terrain jusqu'alors inculte ont rendu la maison d'Amchit bien chère à tous les Frères du Liban.

Pendant les vacances, les jeunes Frères du District se réunissent à Haragel, petite localité située à 1.200 mètres d'altitude au-dessus de Jounieh. Là, dans une ambiance très paisible et loin des chaleurs du. littoral, ils refont leurs forces tout en se livrant aux études sous la conduite de Frères dévoués. Ainsi Haragel a contribué largement au bon esprit et à une meilleure formation des Frères. 

Syrie.

 Nos écoles du Liban et de Syrie durent fermer leurs portes lors de la première guerre mondiale. Elles les rouvrirent pour la plupart en 1919. La dernière guerre n'a pas amené de fermeture au Liban, mais en Syrie les deux établissements que nous y avions durent, pour diverses raisons, être supprimés en 1945. Ce sont : Alep, qui avait alors 750 élèves, et Damas, qui en comptait environ 850.

Le local de Damas ne nous appartenant pas, et celui d'Alep ayant été vendu peu après la fermeture, on ne pensait pas reprendre avant longtemps deux oeuvres dont la disparition avait été fort sensible pour nous et pour les familles. Mais, cédant aux instances de la population chrétienne alépine et après en avoir obtenu d'une façon providentielle l'autorisation du Gouvernement syrien, on s'est décidé à rouvrir, en octobre dernier, le Collège Champagnat.

Le problème du local a été résolu grâce au Gouvernement français qui a mis à notre disposition une ancienne caserne qu'il nous aide à adapter. L'emplacement est idéal et l'on dispose de plus de six hectares de terrain et, par conséquent, de belles cours.

Pour assurer le bon esprit à l’œuvre renaissante, on n'a établi pour commencer que les cours inférieurs. Bien que la rentrée n'ait eu lieu qu'un mois après celle des établissements similaires, par suite du retard de l'autorisation, l'école compte déjà une centaine d'élèves. Détail 'qui ne manque pas d'intérêt : la plupart de ces enfants sont fils ou parents d'anciens élèves.

*

*    *

 Ayant dû nous rendre à Damas pour saluer les autorités, nous avons, pour nous conformer au programme tracé par le Cher Frère Visiteur et son Conseil, visité Jérusalem où nous sommes restés deux jours.

Là, de même qu'à notre rapide passage à Bethléem, nous avons reçu la plus aimable et la plus généreuse hospitalité chez les Frères des Écoles Chrétiennes. Ils nous ont comblés au-delà de ce que nous pouvions attendre de la communauté d'idéal qui nous unit. Je les en remercie de tout cœur.

Je ne vous ferai pas une description des Lieux Saints. Je vous dirai seulement qu'on ne saurait traduire comme il convient les sentiments que leur vue suscite, en nous rappelant l'amour infini que nous y a témoigné Notre-Seigneur.

Le fait que les orthodoxes et les musulmans retiennent pour eux ou disputent aux catholiques certains de ces lieux vénérés, étonne moins si on se rappelle que le Christ sera toujours un signe de contradiction. Cette pensée aide également à mieux comprendre le partage actuel, que nous souhaitons temporaire, de la Palestine et surtout de Jérusalem entre Juifs et Arabes. Tout cela contribue à rappeler au monde le fait culminant de l'histoire de l'humanité : la Rédemption du genre humain par Notre-Seigneur Jésus-Christ.

J'ajouterai que nul de vous n'a été oublié dans nos prières, et que des messes ont été célébrées au Calvaire et au Saint Sépulcre pour les besoins de l'Institut et aux intentions de tous ses membres. 

         STATISTIQUE DU DISTRICT SYRIE-LIBAN.

 

Frères ………………………………………………… 64

Élèves ……………………………………………. 2.486

 

Internes ……………………………………………. 447

Externes ………………………………………… 2.039

 

Payants ………………………………………….. 1.881

 

Gratuits …………………………………………….. 605

 

Catholiques …………………………………….. 2.287

Orthodoxes, Musulmans, etc. ……………….. 199

 

Grèce.

Après la visite de nos Frères du Liban et de Syrie, j'ai pu passer uelques jours avec nos Frères de Grèce, du 23 mars au 3 avril. Nous avons, dans ce pays, trois communautés : deux à Athènes et une à Patras.

C'est en 1907 que nos Frères furent envoyés comme auxiliaires au Lycée Léonin, dirigé alors par des prêtres du diocèse. Deux ans après, on leur en laissait la direction. Par leurs soins, le nombre des élèves, passait d'une centaine environ à plusieurs centaines en peu d'années et, en 1924 ; le Lycée Léonin pouvait se dédoubler, transportant ses internes à l'extrémité nord de la ville, dans une construction neuve, sur un assez vaste terrain, au quartier Patissia. Il y a donc maintenant le Lycée Léonin Saint-Denis, dans l'immeuble primitif de la rue Sina et le Lycée Léonin Sacré-Cœur dans des bâtiments plus récents. Notons en passant que d'importantes améliorations et réparations bien nécessaires aux locaux de la rue Sina viennent d'être exécutés, grâce à une subvention de la Propagande, dont nous sommes les locataires.

Ces deux collèges ont chacun environ 500 élèves. Ils en ont eu bien davantage jusqu'en 1930, où des lois scolaires ont réservé aux écoles officielles l'enseignement primaire, de sorte que nos deux collèges n'ont que l'enseignement secondaire. Il est vrai qu'on nous a accordé depuis des classes primaires, mais réservées aux seuls catholiques.

Dans les deux collèges une très large part est faite aux pauvres. On peut compter environ un tiers de l'effectif formé par des élèves catholiques gratuits. Ils bénéficient ainsi d'une instruction supérieure qui leur assure pour plus tard de bonnes situations sociales.

Le bien que font nos Frères à leurs élèves orthodoxes, qui sont la majorité, est, de même, considérable, car, sans compter l'instruction religieuse, les prières, les exhortations de tous genres, le seul ,contact de ces élèves avec des maîtres religieux catholiques détruit peu à peu la méfiance et les préjugés qui sont la cause de la séparation séculaire de l'Orient avec Rome.

Les deux communautés d'Athènes ont rivalisé avec celles du Liban pour profiter du passage du Supérieur Général. Je puis ici les féliciter de leur bon esprit, de leur régularité et de leur dévouement.

Pour la première fois on a pu organiser les Grands Exercices, aux dernières vacances, dans la maison de Kolymbithra et des Frères même âgés ont voulu les suivre.

Malheureusement, comme en beaucoup d'endroits, le personnel fait défaut à Athènes. Il faut donc faire face à beaucoup de travail avec peu d'ouvriers, malgré le recours à de nombreux professeurs civils.

Par le fait de la guerre, le recrutement a été suspendu et ce n'est que depuis peu que le juvénat a rouvert ses portes. Il compte une vingtaine d'enfants et en a déjà envoyé huit à Varennes. En raison des lois scolaires, il a dû être joint à un collège officiellement autorisé. Cette autorisation officielle a été enfin accordée, par une loi, au collège de Patissia, après de longues négociations. Nos juvénistes ne sont pas seuls à en profiter, et ceux des Pères Assomptionnistes, des Pères Jésuites, ainsi que les séminaristes du clergé latin comme ceux du clergé grec-catholique viennent se joindre à nos élèves. De sorte que tout l'avenir du clergé et des ordres religieux de Grèce se trouve entre nos mains, à son début.

Le troisième établissement que nous avons en Grèce, celui de Patras, jadis florissant, est sur son déclin. Ce n'est pas par suite du manque de dévouement des Frères, mais à cause de deux circonstances défavorables : les lois scolaires de 1930, qui ne nous avaient laissé, pour la section primaire, que les enfants catholiques, et ensuite la guerre italo-grecque, qui a causé le départ de ceux-ci avec leurs familles italiennes, lesquelles formaient la paroisse catholique presque entière. Il reste environ quarante élèves et il faut prévoir le moment où une communauté, même réduite à deux ou trois Frères, ne pourra plus vivre.

Il va de soi que nos Frères de Grèce ont déjà parmi eux des sujets du pays. Plusieurs ont profité des événements malheureux de l'occupation étrangère pour continuer leurs études. La suspension, à diverses reprises, de leur activité scolaire à cause des réquisitions de locaux, leur a laissé le temps de suivre les cours universitaires et leur travail a été couronné l'an passé par l'obtention de la licence de quatre d'entre eux.

L'avenir semble donc devoir être meilleur que les proches années passées. Daigne la Très Sainte Vierge bénir ce secteur, où tant d'efforts ont été dépensés et donner à nos Frères de Grèce la consolation de voir leurs oeuvres produire tout le bien qu'ils souhaitent. 

Nos Frères persécutés.

 Les nouvelles qui nous parviennent de la Province de Chine sont toujours inquiétantes. Nos Frères continuent vaillamment à faire tout le bien possible dans leurs écoles menacées, mais encore ouvertes. Le nombre des baptêmes d'élèves ne semble pas avoir fléchi. Mais des mesures vexatoires se poursuivent. La dernière signalée est l'obligation de se pourvoir de permis de séjour pour les Frères non Chinois. Et ils ne sont accordés que parcimonieusement, la plupart pour six mois seulement. On l'a refusé à un bon nombre de prêtres et religieux. C'est ainsi un gros nuage à l'horizon. Pendant ce temps de lourdes taxes s'abattent sur bien des établissements.

Il. y a. pourtant amélioration pour ce qui regarde la correspondance et les voyages, du moins à l'intérieur. On a même pu regrouper une partie des juvénistes à la maison provinciale. De plus, une nouvelle série de dix postulants a pu venir de Pékin à Canton, par le train, en une semaine, et de là rejoindre Macao, où le Noviciat reste établi.

Mais, comme à Hong-Kong, on est bien à l'étroit. Des Frères y attendent des visas qui ne viennent pas, pour partir en Malaisie. Par contre, ceux destinés à la nouvelle fondation de Rabaul, en Nouvelle-Bretagne, ont pu y aller et ont dû arriver au début, d'avril. C'est le cinquième établissement fondé depuis un an pour fournir du travail aux Frères Chinois qui ont pu sortir de la Chine communiste. On prépare d'autres fondations, au milieu de nombreuses difficultés.

Il faut continuer à prier pour ces Frères de la Province de Chine et pour leurs Œuvres bien menacées.

Je recommande de même nos Frères de Budapest qui n'ont pas pu jusqu'ici, malgré toutes les démarches possibles, sortir de Hongrie, où toute activité scolaire leur est interdite.  

Documents du Saint-Siège,

Prot. No 1.667/50,

relatif à la rénovation des vœux. 

Très Saint-Père,

Le Procureur Général des Petits Frères de Marie, humblement prosterné aux pieds de Votre Sainteté, expose ce qui suit :

Aux termes de l'art. 37 de nos Constitutions, la profession temporaire est renouvelée chaque année pendant cinq ans, et l'année des vœux s'étend d'une retraite à l'autre.

Mais il arrive que nos jeunes profès temporaires sont envoyés en des pays de l'hémisphère austral après avoir renouvelé leurs vœux aux retraites annuelles, qui, dans nos pays, se font, la plupart, dans les mois de juillet et d'août (saison estivale).

Arrivés à destination ils prennent part aux exercices spirituels qui ont lieu dans les mois de janvier et février (saison estivale de ces contrées) et, à la clôture, ils ont la coutume de renouveler les vœux annuels, à six mois seulement de distance de l'émission précédente.

Cette émission est contraire au canon 577, No 2 ; mais elle devient nécessaire pour résoudre la différence de temps existant d'un hémisphère à l'autre.

C'est pourquoi le Soussigné implore la sanation des irrégularités antérieures et la faculté de confirmer l'usage établi, chez nous, de renouveler la profession temporaire à la clôture de la retraite, même, si pour les raisons exposées ci-dessus, la précédente émission date seulement de six ou sept mois ; restant toujours ferme, cependant, le canon 574.

En vertu des pouvoirs donnés par Notre Saint Père le Pape, la Sacrée Congrégation des Religieux, vu les faits exposés, accorde bénignement au Révérend Frère Supérieur, pour dix ans, que selon son jugement et sa conscience, il concède la faveur implorée. Mention de cette concession étant faite au Livre des Professions, en observant les prescriptions du droit, et sanation. eu outre étant donnée à ce qui l'exige pour le passé.

Nonobstant toutes choses contraires.

Donné à Rome, le 18 avril 1950.

                   Fr. L.-H. PASETTO, Secrétaire.

H. AGOSTINI, ad a studiis.  

Election de Frères Provinciaux.

 Dans la séance du 20 février 1950, le Conseil Général a réélu le C. F. CARMELO, provincial du Pérou, pour une seconde période triennale.

Dans la séance du 5 avril 1950, le C. F. JOANNES-EUGÈNE a été élu provincial de Varennes-Orient, pour une première période.

Dans la séance du 12 avril 1950, le Conseil Général a réélu, pour une troisième période : le C. F. SECUNDINO, provincial de Bética et le C. F. LUIS GONZAGA, provincial de Norte. 

LISTE DES FRÈRES dont nous avons appris le Décès

depuis la Circulaire du 8 décembre 1949.

 

  Noms des Défunts                               Lieux des Décès                         Date des Décès

 

F. Jph-Bonaventura        Stable              Poughkeepsie (États-Unis)           29 janv. 1948

F. Adulphus                     »                       Marseille (France)                          1ierdéc. 1949

F. Marie-Syndine            »                       Aubenas (France)                          14      »          »

F. Kiiian                           »                       Dumfries (Ecosse)                         14      »          »

F. Léon-Isidore               »                       Lagny (France)                               26      »          »

F. Léry                              Profès perp.    Birmingham (Angleterre)               27      »          »

F John-Richard               »                       Maritzburg (Afrique du Sud)          27      »          »

F Stéphanide                  Stable              Guadalajara (Mexique)                  2 janv.  1951,

F Marie-Amance            »                       Sto Paulo (Brésil)                           4       »          »

F. Georiac                       Profès perp.    N.-D. de l'Hermitage (France)      8       »          »

F. Joseph-Vérins            Stable              Montevideo (Uruguay)                   8       »          »

F. Urban-Mary                 »                       Inanda (Afrique du Sud)                 12      »          »

F. Alberto                         »                       Mataró (Espagne)                          12      »          »

F. Eugène-Amédée       Profès perp.    Lyon (France)                                 14      »          »

F. Clotilde                        Stable              Mont-Saint-Guibert (Belgique)      30      »          »

F. Stéphanus-Félix         Profès temp.   Chala (Pékin)                                  5 fév.            »

F. Nicasio                        Stable              Popayán (Colombie)                     17      »          »

F. Paul-Gaspard             »                       N.-D. de L'Hermitage (France)     10 mars        »

F. Odéric                         Profès perp.    Buenos Aires (Argentine)              10      »          »

F. Canut-Joseph             Stable              Porto Alegre (Brésil)                      11      »          »

F. Marie-Philibert            Profès perp.    Iberville (Canada)                           16      »          »

F. Charles-Marcel           Stable              Alep (Syrie)                                     17      »          »

F. Joseph-Cyrille            »                       Cazères (France)                           21      »          »

F. Jean-Hippolyte           Profès perp.    Auckland (Nouvelle-Zélande)        22      »          »

F. Julianus-Joseph         Stable              Aubenas (France)                          26      »          »

F. Mary-Régis                 Profès perp.    Sligo (Irlande)                                 30      »          »

F. José-Constancio        »                       Guaporé (Brésil)                             11 avril          »

F. Ansovin                       Stable              La Havane (Cuba)                          30      »          »

F. Junion                          »                     St Paul-trois-Châteaux (France)   30      »          »

 

La présente circulaire sera lite en communauté à l'heure ordinaire de la lecture spirituelle.

Recevez, mes bien Chers Frères, la nouvelle assurance du religieux attachement avec lequel je suis, en J. M. J.,

Votre très humble et tout dévoué serviteur,

     Frère LEONIDA,  Supérieur Général.

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