Circulaires 358

Charles-Raphaël

1963-12-08

CE QUE NOUS DEVONS EXCLURE DE L'INSTITUT :
4° Pas d'oisiveté . A - La loi du travail : loi de Dieu, loi de notre nature, loi spéciale de notre vie religieuse. B - Notre vie de travail. C - Le maintien de nos traditions de travail
5° Pas de rapports irréguliers avec les séculiers. A - Nos rapports avec le monde sont nécessaires, mais ne doivent pas être trop fréquents. B - Sorties, visites, entretiens. Nous borner à ce qui est utile. Sorties et visites doivent être régulières. C - Eviter les liaisons dangereuses. D - De la correspondance.
6° Pas de fondations imprudentes.A - Causes ordinaires des nouvelles fondations. B - Inconvénients et dangers des fondations imprudentes. C - Double leçon du Bx Fondateur : audace et prudence.
Conclusion générale
Vœux pour 1964 : participation au Concile, amour de l'Institut, esprit de famille .
Textes et références : Prière pour le Concile - Pauvreté - Fidélité - Adaptation
Elections
Liste des défunts

358

 V.J.M.J.

 Fête de l’Immaculée Conception de la B. V. Marie

Rome, le 8 décembre 1963 

Conservation et accroissement de l'Institut 

     MES BIEN CHERS FRÈRES,

 Dans la Circulaire du 24 mai dernier, nous avons commencé une analyse du chapitre IX de la deuxième partie de nos Constitutions. Ce chapitre, disions-nous, énumère dix-huit moyens de favoriser la prospérité de notre famille religieuse : six moyens « négatifs », c'est-à-dire des choses qu'il ne faut pas faire ou qu'il ne faut pas laisser faire ; ensuite, douze moyens «positifs ». Ayant étudié déjà les trois premiers moyens négatifs, il nous reste aujourd'hui à mettre en relief la valeur et l'opportunité des trois autres.

Dans notre Institut, il ne faut :

 4. Pas d'oisiveté.

5. Pas de rapports irréguliers avec le monde.

6. Pas de fondations imprudentes. 

4° Pas d’oisiveté.

 On s'appliquera :

« A défendre tous les Frères contre l'oisiveté et le désœuvrement, donnant à chacun une occupation déterminée et l'obligeant à rendre compte, soit au Frère Directeur, soit au Frère Provincial, de son travail et de l'emploi de son temps ».

Pour commencer, envisageons une objection que plusieurs Frères formuleront sans doute à la simple lecture de ce paragraphe. « De nos jours, les périls de l'oisiveté et les dangers du désœuvrement ne sont guère à craindre chez nous. Dans la bousculade de nos multiples occupations, nous sommes continuellement tiraillés entre les exigences de notre vie religieuse et les devoirs de notre apostolat. Un peu partout, ne constate-t-on pas un surmenage habituel dans nos communautés ? Vraiment, chez nous il n'y a pas de place pour des oisifs ! ».

Notons d'abord que le surmenage n'a lieu que pendant l'année scolaire. Le reste du temps, par réaction, certains peuvent être tentés de se laisser aller à une sorte de « farniente » qui serait d'autant plus dangereux qu'il succéderait brusquement à une vie très active. Nous parlerons plus loin de ce danger, à l'occasion des congés, des vacances, des loisirs en général.

De plus, même pendant les « temps forts » des classes, le surmenage ne doit jamais être considéré comme normal, car il aboutit presque toujours à du mauvais travail. On doit pouvoir l'éviter, du moins dans la plupart des cas, par une sage répartition des emplois, par une bonne méthode de travail, et surtout par une volonté ferme de hiérarchiser nos multiples occupations. Les hommes qui travaillent vraiment beaucoup sont souvent très calmes, parce qu'ils s'efforcent de dominer leurs occupations et qu'ils ne se laissent pas dominer par elles.

On n'insistera jamais trop sur la nécessité de l'esprit de travail dans la vie religieuse, tout particulièrement pour nos jeunes. Ils sont exposés à perdre du temps parce qu'ils manquent de méthode et d'expérience. Mais il ne faut pas perdre de vue que le travail est nécessaire à tout âge et dans toutes les situations.

Nous nous proposons de faire quelques considérations sur cette « loi » du travail dans notre vie de Frères Maristes. Nous verrons ensuite quels sont les devoirs que cette loi entraîne pour nous. Enfin, nous dirons de quelle manière on peut assurer cette fidélité de tous à la loi du travail.

 A. LOI DU TRAVAIL.

 L'obligation du travail doit nous apparaître comme une loi de Dieu, une loi de la nature humaine, une loi de notre vie religieuse.

 1. Le travail est une loi de Dieu.

 Lorsque Dieu eut créé l'homme, Il « l'établit dans le jardin d'Eden pour le cultiver et le garder » (Gn. II, 15). Après la chute, l'obligation du travail subsiste pour l'homme, mais elle exige des efforts et donne lieu à des peines et à des souffrances : « Maudit soit le sol à cause de toi ! A force de peines tu en tireras subsistance tous les jours de ta vie… A la sueur de ton front, tu mangeras ton pain » (Gn. III. 17 et 19).

Saint Paul nous rappelle vigoureusement nette loi du travail : « …Si quelqu'un ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus. Or nous entendons dire qu'il en est parmi vous qui vivent dans l'oisiveté, ne travaillant pas du tout mais se mêlant de tout. Ceux-là, nous les invitons et engageons dans le Seigneur Jésus-Christ à travailler tranquilles et à manger le pain qu'ils auront eux-mêmes gagné » (2 Thess. III, 10-12).

Lui-même a toujours donné l'exemple, tout comme son divin Maître. Il le rappelle à ses disciples pour les encourager et pour les exhorter : « Nous nous épuisons à travailler de nos mains » (I Cor. IV, 12). Et encore : « …Nous ne sommes pas restés oisifs parmi vous, nous ne nous sommes jamais fait donner par personne le pain que nous mangions, mais de nuit comme de jour, nous étions au travail, dans le labeur et la fatigue, pour n'être à la charge d'aucun de vous » (2 Thess. III, 7-9).

Le travail s'impose donc bien à nous comme une prescription divine. Nous arrive-t-il de faire un examen sérieux sur cette obligation ? Par exemple, est-ce que nous considérons vraiment tout gaspillage de temps comme une faute proprement dite ?

Aimons à méditer sur la valeur du temps, sur la meilleure manière de sanctifier les heures qui nous sont offertes par Dieu. Redisons-nous souvent que toute vie humaine est sérieuse, qu'elle est « à sens unique », qu'on n'y revient jamais en arrière. D'autre part, nous savons qu'elle est courte :

 «Vois, d'un empan tu as fait mes jours,

et ma durée un néant devant toi ;

rien qu'un souffle, tout homme qui se dresse,

 rien qu'une ombre, l'humain qui marche ».

(Ps. 39, 6-7)

Il nous appartient de rendre notre vie à la fois bonne, heureuse et féconde. C'est pour cela que Dieu nous a donné du temps. Il nous en donne encore aujourd'hui. Mais jusqu'à quand ? Du temps qui nous a été « confié », il nous faudra rendre compte, comme nous en avertit très clairement la parabole des talents. Suis-je prêt à rendre compte, à Dieu même, de l'emploi de mon temps ? Suis-je prêt maintenant ?

Cet examen loyal devra aussi porter sur la qualité de notre travail. Un peu partout, on se plaint d'une baisse de la conscience professionnelle, dans tous les métiers, dans toutes les professions. Mais si l'on prétend travailler « pour Dieu », on doit avoir à cœur de Lui offrir un travail bien fait, un travail dans lequel on a mis toute son âme.

A ce point de vue, peu de vocations sont aussi exigeantes que la nôtre. Comme enseignants et comme éducateurs chrétiens, nous devons avoir horreur de tout travail négligé, inachevé, mal fait. Ce doit être une des préoccupations des formateurs de nos jeunes de leur communiquer l'amour du travail sérieux, le goût du travail bien fait.

 2. Le travail est une loi de notre nature.

 Si l'homme doit accepter le travail comme un devoir imposé par Dieu, sa nature même l'oblige à ne jamais rester inactif. Sa santé physique et morale, l'épanouissement de toutes ses facultés, sa joie et son bonheur exigent qu'il s'adonne à un travail en rapport avec ses forces.

Proverbes, maximes et sentences abondent dans les diverses langues, pour enseigner à tous la nécessité absolue du travail, ou pour mettre en garde contre les terribles conséquences de l'oisiveté : « L'oisiveté est la rouille de l'âme. – Une vie oisive est une mort anticipée. – L'homme oisif tue le temps, le temps tue l'homme oisif ».

A ses premiers Frères, le Bienheureux M. Champagnat rappelait souvent cette vérité d'expérience. « Le travail est indispensable pour conserver la santé du corps et la pureté de l'âme. En effet, tout se perfectionne par l'activité, tout dépérit par l'inaction. L'eau immobile croupit, le fer inactif se rouille, la terre inculte se couvre de mauvaises herbes, le bâtiment inhabité se détériore. C'est le mouvement, c'est l'usage qui font de toutes ces choses des instruments utiles ou des sources de bienfaits » (Vie, p. 467).

Dans les arts comme dans les sports, on insiste sur la nécessité d'un entraînement régulier et constant. Les « aptitudes » s'acquièrent lentement, laborieusement, mais elles ne seront jamais définitivement acquises. Celui qui néglige de les maintenir par un exercice régulier, par un entraînement suffisant, constatera vite qu'elles tendent à s'atrophier. On connaît la boutade d'un pianiste : « Quand je n'ai pas joué pendant huit jours, je m'en rends compte. Mais quand je n'ai pas joué pendant quinze jours, mes auditeurs aussi s'en rendent compte ». Dans un article récent un auteur note plaisamment, à l'usage des éducateurs : « Il faut périodiquement repasser son permis de conduire les enfants ».

Mais c'est surtout au point de vue moral qu'une vie de travail s'impose rigoureusement à l'homme. Une maxime bien connue résume en quelque sorte l'expérience des siècles : « L'oisiveté est la mère de tous les vices ». Le religieux n'est pas à l'abri de ces dangers. Notre Bienheureux Père le répétait à ses Frères : « Un religieux adonné à l'oisiveté est exposé aux plus grandes chutes et même à se perdre. Ainsi l'arbre stérile est coupé et jeté au feu, pour cela seul qu'il est stérile ; ainsi le serviteur oisif est chassé quoiqu'on ne lui trouve d'autres crimes que sa lâcheté et sa paresse » (Vie, p. 469).

Enfin, si le travail aimé et fidèlement exécuté procure à l'homme le contentement, la joie et la paix intérieure, l'oisiveté n'engendre finalement que mécontentement, ennui et tristesse. Le jugement suivant du Bienheureux Père l'exprime avec une telle force qu'on y perçoit immédiatement son opposition radicale à toute forme d'oisiveté : « Il n'y a pas d'hommes qui soient plus à plaindre et qui mènent une plus triste existence que ceux qui restent dans l'oisiveté. De tels hommes n'ont sur la terre que des satisfactions tout animales ; ils ignorent complètement le bonheur de la vertu ; leur vie est moins une vie d'homme qu'une existence de brute » (Vie, p. 468).

 3. Le travail est aussi une loi spéciale de notre vie religieuse.

 a) Tout d'abord, le religieux s'est engagé à suivre le Christ d'aussi près que possible. Or, dans la vie de Notre-Seigneur, tout prêche l'amour du travail. Pendant la plus grande partie de sa vie, il s'est livré à des occupations manuelles dans l'humble atelier de Nazareth. Sur le labeur immense de ses années de prédication, l'Evangile nous renseigne suffisamment. A son service spécial, le Christ veut des travailleurs, des hommes tout disposés à mettre en valeur les talents qu'ils ont reçus de Lui.

D'autre part, le religieux, qui a fait vœu de pauvreté, doit se considérer comme un vrai pauvre, disposé à peiner tout le long du jour pour « gagner son pain ». L'amour du repos, la recherche habituelle de ses aises, une vie toute bourgeoise sont entièrement opposés à la pauvreté religieuse.

De même, la vie commune, un élément essentiel de notre vie mariste, nous oblige à prendre résolument notre part des travaux de la communauté. En premier lieu, chacun doit s'efforcer de bien remplir la tâche qui lui a été officiellement confiée. De plus, comme le dit l'article 192 de nos Règles Communes, les Frères « seront heureux de prêter leur concours pour les petits travaux qui se présentent dans toute maison : entretien, améliorations, réparations, etc. … ». Cette disponibilité permanente pour intervenir utilement dans la bonne marche de la communauté est une des meilleures preuves d'un authentique esprit de famille.

b) La fermeté dans la lutte contre toutes les formes d'oisiveté est nécessaire pour avancer dans le chemin de la perfection. C'est l'enseignement constant des maîtres de la vie spirituelle. Par contre, la nonchalance dans le travail et les petites concessions à la paresse conduisent rapidement vers la médiocrité dans la vie religieuse.

Notre Bienheureux Père l'avait bien noté : « Le Frère qui n'aime pas le travail et à qui les livres sont à charge, est plus imparfait après dix, vingt et trente ans de religion que le premier jour qu'il y est venu. Son esprit est moins capable de réflexion ; ses sentiments et ses goûts sont plus sensuels, son âme a moins de force et d'énergie pour résister aux tentations et pratiquer les vertus » (Vie, p. 468).

Rêver ou rêvasser tout le long du jour, rechercher les conversations inutiles, se plaire dans des réunions distrayantes avec les gens du monde, tout cela ne constitue pas seulement une perte de temps, mais est à l'origine de bien des fautes, fait perdre peu à peu le goût des choses spirituelles, diminue rapidement l'amour de sa famille religieuse, peut provoquer la perte de la vocation. Le Bienheureux Fondateur le déclarait avec force : « A mon avis, l'oisiveté est le plus grand ennemi de la vie religieuse et les fautes de ce genre sont celles qui font le plus de mal aux jeunes Frères » (Vie, p. 470). Et aux moins jeunes également !

Par contre, quel magnifique témoignage de vertu solide et constante ont donné et donnent encore tant de Frères anciens, qui ayant droit à une retraite paisible, n'entendent pas rester inactifs tant qu'ils peuvent encore « servir » ! Partout où l'obéissance les envoie, ils s'ingénient à trouver quelque travail utile à leur communauté. Leur exemple entraîne souvent les jeunes, qui les admirent et les aiment…

c) Dans ce domaine du travail, les Frères Maristes se doivent d'imiter les exemples de leur Père et Fondateur. Il a réussi à mener de front ses devoirs de prêtre, de religieux, de supérieur, et même de bâtisseur et d'administrateur. Ses amis et ses confrères dans le sacerdoce l'engageaient souvent à ménager ses forces. Mais il avait une mission à remplir, et il voulait s'en acquitter aussi parfaitement que possible. Il s'est donc tué au travail.

Et pourtant, lui qui avait toujours eu la passion du travail, qui avait veillé avec une sollicitude tellement paternelle sur ses Frères pour les préserver du démon de l'oisiveté, exprima un regret étonnant sur son lit de mort : « J'ai à me reprocher, disait-il avec douleur, de n'avoir pas assez fait travailler les Frères ; surveillez-les bien sur ce point, tenez-les constamment occupés, car il n'y a pas de vice qui nuise plus aux religieux que la paresse » (Vie, p. 474).

 B. VIE DE TRAVAIL.

 Il y a la loi commune qui prescrit à tous d'être constamment au travail, comme nous venons de le rappeler. Mais il y a une grande variété de devoirs particuliers, selon les âges, les aptitudes innées ou acquises, les situations diverses, les besoins des communautés et des écoles, toutes les indications providentielles. Il appartient surtout aux Supérieurs de veiller à ce que leurs Frères aient des occupations bien définies et qu'ils les remplissent de leur mieux.

a) Une bonne organisation du travail et une sage répartition des emplois doivent être un des soucis dominants du Frère Provincial pour l'ensemble de la Province et de chaque Frère Directeur pour sa communauté. Dès qu'il y a négligence sur ce point fondamental. des ennuis et des difficultés de tout genre viennent rapidement compliquer l'œuvre commune.

Faute de plan général bien étudié, les tâches particulières sont mal distribuées. On n'a pas assez tenu compte de la compétence professionnelle de chacun, de son sens de l'autorité, de sa résistance physique ou morale, de ces multiples facteurs de succès que des organisateurs sérieux ne peuvent jamais négliger.

D'autre part, quand il n'y a pas de plan d'ensemble, connu de tous, bien des efforts généreux finissent par rester stériles. Sans qu'il y ait mauvaise volonté, il se produira facilement des malentendus, des heurts parfois de réels conflits entre les membres du corps professoral ou entre les Frères de la communauté. Les études en souffrent. L'éducation des élèves peut être compromise. L'esprit de famille tend à se détériorer.

Plus que jamais la collaboration doit être étroite entre les Frères d'une communauté, entre tous les Frères d'une Province. Un personnel, apparemment trop peu nombreux, peut suffire quand chacun est vraiment à sa place et que tous savent ce qu'on attend d'eux.

La bonne répartition du travail facilite l'entrain général. augmente la joie et la bonne humeur chez tous, favorise grandement l'esprit de famille dans une communauté. Par là, chacun résiste mieux à la fatigue, à l'énervement, au découragement, et constate avec plaisir que sa puissance de travail est bien plus grande qu'il ne le croyait lui-même. Les communautés où l'on se plaint habituellement de surmenage ne sont pas toujours celles qui ont l'horaire le plus chargé…

Que chaque Frère Directeur, aidé éventuellement de ses conseillers, prenne à cœur de préparer l'année scolaire par une organisation du travail sérieusement étudiée, et toujours bien à temps. En particulier, qu'on tienne compte de l'expérience acquise par chaque Frère. Il est normal que les débutants dans l'enseignement soient ménagés raisonnablement : certaines leçons peuvent leur imposer une préparation longue et astreignante. Un simple calcul d'heures de classe ne peut mesurer l'effort requis de chaque membre de la communauté. D'autre part, dans la mesure du possible, il convient de mettre en valeur les aptitudes spéciales des Frères, de respecter même leurs goûts et préférences. C'est en bon père de famille qu'un supérieur doit faire la répartition des tâches particulières.

b) Tous ceux qui ont à intervenir dans la formation de nos Frères doivent s'efforcer de leur apprendre à bien employer leur temps « libre », à ne jamais le gaspiller. Certains jeunes sont perpétuellement en mouvement ; ils paraissent très actifs ; en fait, ils n'aboutissent à aucun résultat sérieux parce qu'ils dispersent leurs efforts. Dans notre famille religieuse, l'oisiveté est rarement apparente ; quand elle existe, elle se présente habituellement sous des formes larvées. Tel Frère paraît absorbé par son travail, mais une rêverie prolongée remplace trop souvent l'étude sérieuse. Tel autre veut tout apprendre à la fois ; il touche à tout, s'intéresse à tout, encombre inutilement sa mémoire ; plus tard, il constatera avec amertume qu'il n'a réussi en rien.

Que de travaux inutiles dans le programme personnel de l'un ou de l'autre, sans le moindre profit pour l'apostolat ou pour une culture sérieuse ! On a dit : « Il n'y a pas de pire paresse que celle qui consiste à faire des riens ». En effet, elle donne l'illusion qu'on travaille beaucoup, qu'on est même surmené, et ainsi on est porté à rejeter obstinément toute idée de correction ou de redressement dans sa manière de faire.

Nos jeunes Frères se trouvent actuellement devant la possibilité de bénéficier de moyens d'instruction et de culture que leurs aînés ne soupçonnaient même pas : un choix de livres excellents et une grande richesse de moyens audiovisuels. Tous ces moyens doivent être utilisés intelligemment, et donc avec mesure.

Que de temps certains peuvent perdre à des lectures frivoles, ou superficielles, qui tendent à détruire progressivement en eux toute capacité d'attention et de réflexion ! Ils lisent volontiers, et hâtivement, les livres « dont tout le monde parle ». D'autres lisent trop de journaux, de revues de tout genre, et leur mémoire ne retient qu'un flot de nouvelles sans importance.

La radio, la télévision et le cinéma peuvent faire perdre beaucoup de temps, s'il n'y a pas de discrétion et de méthode dans leur utilisation. Il est hors de doute qu'ils peuvent être de précieux moyens d'information, de documentation immédiate, et, par le fait même, de bonne culture générale. Le Chapitre de 1958 l'a clairement exprimé. Mais on peut en abuser facilement, trop facilement même. Il ne faut tout de même pas confondre la simple curiosité avec la volonté de se cultiver, ni la dissipation permanente avec le souci d'une bonne information jointe à une détente agréable. Comme le notait récemment Joseph Folliet : « Sans un humanisme chrétien, les loisirs risquent de n'être qu'une oisiveté et le remplacement de l'esclavage industriel par la tyrannie de la bagatelle ».

Dans une autre direction, il peut y avoir de réelles pertes de temps par une pratique incontrôlée des sports. Nos jeunes ont certainement besoin d'exercices physiques pendant toute la durée de leurs études et encore au-delà. Les jeux et les sports leur sont pratiquement nécessaires. Aujourd'hui, la simple promenade, qui reste quand même une magnifique possibilité de détente et même d'information, est habituellement délaissée. Par contre, on aime les sports, ce qui peut très bien être admis, niais à la condition de ne pas y consacrer un temps qu'on doit au travail. De plus, un excès de sports peut tellement fatiguer le corps que le travail intellectuel en devienne impossible pour des heures. Dans ce cas, il n'est plus question de détente, mais bien d'épuisement physique. Enfin, plusieurs consacrent trop d'heures au sport « passif », en assistant à de longues exhibitions sportives ou en parcourant régulièrement d'interminables chroniques sportives.

c) Une forme de paresse qui peut faire beaucoup de tort à un religieux est celle du lever retardé sans raison sérieuse. Nous ne parlons pas des exceptions motivées par une santé déficiente, par une période de convalescence, par quelque épuisement passager ou chronique. En dehors de ces cas, le lever retardé est habituellement une perte de temps ; de plus, il se transforme facilement en habitude, en véritable sujétion. Les prétextes invoqués sont connus : fatigue, insomnie, sommeil très lourd. Il peut y avoir, de temps en temps, des raisons valables. Mais trop souvent on n'a pas le courage de se lever résolument au premier signal. Et, pour commencer, plusieurs n'ont pas assez de fermeté pour s'imposer le coucher à une heure régulière, en sacrifiant, s'il le faut, telle lecture passionnante, tel film ou telle séance de télévision, dont on peut se passer sans inconvénient. On a dit, avec beaucoup d'humour, de malice et de vérité : « Le comble de la paresse, c'est de n'avoir pas le courage d'aller au lit quand l'heure est venue ». Des « veilles » peuvent être nécessaires ; elles devront toujours être justifiées, et les Supérieurs doivent être vigilants pour que personne n'excède les limites permises. Des veilles trop prolongées altèrent la santé, et peuvent même débiliter le cerveau et la volonté.

 C. MAINTIEN DE NOS TRADITIONS DE TRAVAIL.

 a) Les Supérieurs ont l'obligation de veiller à ce que tous profitent bien de leur temps. Leur vigilance doit être paternelle et discrète, mais elle ne doit jamais manquer, selon la recommandation instante du Bienheureux Fondateur.

Ils doivent guider les jeunes Frères, afin que ceux-ci améliorent progressivement leurs méthodes de travail. Ils doivent les engager, par la parole et par l'exemple, à commencer résolument toute nouvelle occupation, sans se laisser aller à ces perpétuelles hésitations ou indécisions qui font perdre cinq ou dix minutes à chaque changement d'exercice. Si le coutumier de la maison a été bien étudié, il ne comportera pas un trop grand morcellement du temps, qui gênerait ou même empêcherait tout travail de longue haleine. Mais il y aura nécessairement, dans tout horaire de communauté, de courts moments libres, dont quelques Frères ne savent que faire. C'est précisément le secret des vrais travailleurs intellectuels d'avoir su utiliser intelligemment ces « petits bouts de temps » pour faire de grandes choses.

b) Les longues périodes de repos, les jours de congé, les vacances ne doivent jamais aboutir à des formes d'oisiveté. « Loisir n'a jamais signifié inaction… Loisir signifie délassement, divertissement et développement. Que l'un ou l'autre de ces trois D viennent à manquer, le loisir n'est plus complet, car il n'est plus enrichissant : il n'est plus pleinement humain… Ecolier un jour, étudiant toujours : telle est la véritable vocation de l'homme, s'il ne veut pas devenir dans le monde de demain, un bouchon flottant sur l'eau, un jouet entre des mains brutales, un exilé solitaire et ne parlant pas la langue du pays » (cf. revue Ecclesia, septembre 1963, pp. 74-75).

L'article 193 de nos Règles Communes dit : « Le Frère Directeur ne souffrira pas que les Frères, surtout les plus jeunes, restent dans l'oisiveté ; il les occupera utilement, notamment pendant les vacances ». Les articles 283 et 284 précisent : « Dans chaque Province, on prendra les dispositions voulues pour que les Frères ne soient pas exposés à l'oisiveté, à l'isolement, aux rapports irréguliers et à tout autre danger ». – « Là où les circonstances le permettront, on organisera des centres d'études ou cours de vacances, particulièrement pour les jeunes Frères, sur des matières religieuses, profanes ou professionnelles. On veillera à y créer une ambiance favorable à la vie religieuse, à l'étude, au délassement et au bon esprit ».

Ces directives doivent être sérieusement méditées par tous, particulièrement par ceux qui doivent prévoir et organiser l'emploi des vacances. Il faudra toujours un heureux équilibre entre les heures d'étude ou de travail et celles qui seront consacrées à la détente ou au repos. Ce qu'il importe de ne jamais perdre de vue, c'est que l'oisiveté ne doit pas avoir de place dans un règlement de vacances. Psychologie et expérience s'unissent pour le confirmer.

On oublie peut-être trop, du moins dans quelques groupes, les avantages incontestables de certaines occupations manuelles pendant les longues vacances. Elles constituent une excellente détente, après des études souvent épuisantes. Elles contribuent à fortifier le corps tout en reposant l'esprit. Elles permettent d'acquérir des aptitudes professionnelles toujours utiles dans notre vie de famille. Bien des travaux peuvent ainsi être entrepris en communauté ; tout en diminuant les dépenses, ils développent l'esprit de famille.

c) Le Frère Directeur dispose d'un moyen simple et pratique pour se rendre compte du travail qui se fait dans sa communauté : le « compte de conduite dans l'emploi » ou l'entretien fraternel avec tous ses Frères. Cet entretien, qui doit avoir lieu régulièrement et à des intervalles pas trop éloignés, est nécessaire pour plusieurs raisons. En particulier, il permet au Frère Directeur de connaître le programme de travail de chacun, ses difficultés, ses réussites ou ses échecs, ses désirs et ses inquiétudes. C'est par là seulement qu'il pourra intervenir éventuellement « en père de famille ».

Cet entretien avec leur Supérieur est encore plus nécessaire aux jeunes membres de la communauté. Le Frère Directeur doit s'intéresser à leur travail, à leurs efforts, connaître leurs problèmes spéciaux. Il doit les guider, les encourager, leur enseigner à ménager prudemment leurs forces. Il doit s'informer de leurs besoins, leur procurer volontiers les petites choses qui peuvent leur être utiles pour leur classe ou pour leurs études personnelles. Cet entretien, qui doit être vraiment fraternel, les portera tout naturellement à la confiance, à la joie, à l'esprit de famille intensément vécu. On doit le considérer connue irremplaçable.

d) Pour maintenir intactes nos traditions de travail dans l'Institut, nous devrons être vigilants et fermes pour écarter à temps les aspirants enclins à la paresse. Résumant les directives formelles de notre Bienheureux Père, l'article 185 de nos Règles Communes dit : « L'amour du travail est une disposition requise pour être reçu dans l'Institut ; on ne manquera pas d'en instruire les postulants, de les éprouver sur ce point et de renvoyer ceux qui manqueraient de goût ou d'aptitudes pour l'étude ou pour le travail manuel».

Cette probation du travail doit être bien conduite et porter sur un temps suffisant pour qu'on puisse prononcer un jugement motivé. Tel juvéniste ou postulant peut paraître mou ou indolent, alors que ses dispositions sont très bonnes pour notre genre de vie. Cette nonchalance apparente peut tenir à des causes physiologiques qu'il n'est pas trop difficile de déterminer. Un formateur attentif ne peut guère s'y tromper. Avec des soins, des encouragements et de la patience, ce candidat peut s'épanouir progressivement et parfois révéler une âme très forte et très courageuse.

Mais si après plusieurs années de formation, un candidat continue de manifester de la répugnance pour tout ce qui demande des efforts, s'il ne participe pas volontiers aux petites corvées communes, s'il n'y a pas assez de progrès à ce double point de vue, il faut l'inviter à partir. C'est ainsi qu'a toujours agi notre Bienheureux Fondateur : « Une disposition essentielle qu'il demandait des postulants était l'amour du travail ; la première épreuve à laquelle il les soumettait, était celle du travail manuel. II renvoyait sans ménagement quiconque ne pouvait la supporter et était reconnu craindre la peine ou, comme il disait, avoir mal aux coudes » (Vie, p. 466).

 Petite conclusion.

 Pour que notre Institut vive et prospère, nous (levons veiller à entretenir chez nous cette noble et sainte passion du travail qui remonte à notre Bienheureux Père. « Chacun doit accomplir les tâches que la Providence lui a confiées, avec zèle et pleine conscience de ses responsabilités.

En même temps, il doit se posséder afin de conserver l'esprit de prière et de piété auquel tout le reste est subordonné. Quand « la nuit vient, où nul ne peut travailler » (Jn. IX, 4), il suffit alors de porter patiemment sa croix et, par la prière et le sacrifice, de féconder le labeur des autres. Dieu nous permet et nous demande ainsi d'œuvrer jusqu'à notre mort » (Cum Ecclesia, p. 507, Éditions Gottmer). 

5° Pas de rapports irréguliers avec les séculiers.

 On s'appliquera :

« A surveiller avec soin les rapports des Frères avec les séculiers, pour empêcher qu'ils ne soient trop fréquents et qu'il n'y ait pas des sorties, des visites, des entretiens inutiles et irréguliers, des liaisons dangereuses : c'est pourquoi un Frère ne sortira pas seul sans une vraie nécessité et sans permission ; de plus, les Frères n'écriront à personne, excepté au Saint-Siège, au Cardinal Protecteur, à l'Evêque diocésain, au Frère Supérieur Général, aux Frères Assistants Généraux, au Frère Procureur Général près le Saint-Siège et à leur Frère Provincial, sans la permission du Frère Directeur ; ce dernier cachette toutes les lettres, après en avoir pris connaissance, s'il le juge opportun, et les envoie à la poste ; il a droit aussi de décacheter toutes les lettres adressées aux Frères, excepté celles qui leur sont écrites par le Saint-Siège, le Cardinal Protecteur, l'Evêque, etc. …, comme ci-dessus. Le Frère Directeur devra garder le secret des lettres qu'ils aura lues ».

Ce long paragraphe nous met en garde contre plusieurs dangers étroitement apparentés : d'abord, d'une façon générale, contre les rapports « trop » fréquents avec le monde ; puis, d'une manière plus précise, contre les sorties, les visites et les entretiens irréguliers ; enfin, contre les liaisons dangereuses. Il rappelle également, en les adaptant à notre Institut, les lois générales qui concernent la correspondance des religieux.

 A. RAPPORTS AVEC LE MONDE : NÉCESSAIRES, MAIS LIMITES.

 1° Notre genre d'apostolat nous met fréquemment en contact avec les séculiers.

 Du vivant de notre Bienheureux Fondateur, dans les modestes écoles de ce temps-là, les Frères n'étaient pas complètement séparés du monde. Tout d'abord, ils avaient leurs élèves, parfois tous les enfants de la localité. Ils participaient activement à la vie paroissiale. Ils étaient en rapport avec les autorités civiles… Le Bienheureux Père a dû intervenir plus d'une fois pour que certains de ses religieux gardent la juste mesure dans leurs relations avec les gens du monde.

Mais, en général, les Frères vivaient plus isolés que de nos jours. Ils n'avaient pas de professeurs civils avec eux ; seuls, ils étaient responsables de la bonne marche de leur école. Les visites des parents d'élèves, par suite de la nature de ces premières écoles, étaient très rares. On ne parlait pas encore de nos œuvres parascolaires ou postscolaires. En dehors du temps de la classe, les Frères pouvaient vivre tranquillement leur vie de communauté.

La situation actuelle est fort différente. Des transformations formidables dans les structures sociales et politiques ont provoqué une organisation scolaire et apostolique qui exige de nous, en plus d'une meilleure préparation à notre mission, de nouvelles raisons de rester étroitement en contact avec ceux du « dehors».

Aucune école chrétienne ne peut s'isoler. Elle doit s'insérer dans le plan d'ensemble de la paroisse, du diocèse, du pays, du Inonde catholique même. Elle doit collaborer activement avec les autres écoles. Tous les éducateurs doivent assister à des groupements, à des réunions, à des conférences, à des congrès multiples. L'Eglise les y invite chaleureusement, leur donne des directives à ce sujet.

Souvent aussi, nos Frères font leurs études en commun avec les jeunes gens du monde : dans des écoles normales, des écoles techniques, à l'Université. Ils n'y font pas « bande à part » : ils assistent à des discussions, à des carrefours, à des séances, à de nombreuses conférences.

Dans la plupart de nos Provinces, le nombre des professeurs civils augmente rapidement dans nos écoles. Leur présence est souvent devenue nécessaire si l'on veut suivre le rythme d'accroissement de la population scolaire, parfois même tout simplement pour pouvoir maintenir telle ou telle école. Dans bien des cas, on se voit obligé, tout en prenant les dispositions opportunes, à recourir à du personnel féminin.

Le même phénomène se présente dans notre vie de communauté. Jadis, tous les « services » intérieurs étaient assurés par des Frères, les Frères employés comme on disait couramment. Nous voyons tous que leur nombre a diminué, qu'il n'est plus du tout en rapport avec les exigences de presque toutes nos maisons, de nos pensionnats surtout. Par voie de conséquence, il arrive qu'un nombre toujours croissant de « personnes de service » se rencontre dans nos maisons ; ces personnes vivent plus ou moins dans l'intimité de notre famille religieuse.

On insiste aujourd'hui, très fortement et avec raison, sur la nécessité de contacts réguliers entre les parents et les maîtres, pour que l'éducation des jeunes se fasse dans les meilleures conditions possibles. Les complications singulières de la vie moderne exigent ces relations. Très souvent, la réussite des élèves dans leurs études et leur bonne formation humaine et chrétienne dépendent de cette entente, de cette communion de vues entre les parents et les maîtres.

Nous avons déjà signalé ailleurs l'utilité, voire la nécessité pour chacune de nos écoles de rester étroitement en contact avec ses anciens élèves. Les capitulants de 1958 avaient fait leur la conclusion suivante : « Les Frères trouveront, dans les comités des Amicales des Anciens Elèves, des auxiliaires précieux pour obtenir des renseignements, des conseils, des suggestions, des appuis et des collaborations pour la bonne marche des écoles, surtout pour ce qui regarde l'extérieur. Ils auront tout intérêt à les consulter en temps opportun, à les traiter avec toutes sortes d'égards comme les meilleurs amis des Frères et à les associer le plus possible à l'œuvre de l'éducation » (cf. Circulaire du Chapitre, p. 291).

D'autre part, l'Eglise nous presse de favoriser de toutes nos forces l'Action Catholique sous les formes approuvées dans le diocèse, et de préparer nos élèves à devenir progressivement des militants compétents et zélés. Nos Règles précisent nos devoirs à ce sujet : « L'éducation serait incomplète si elle se contentait d'assurer le bien personnel des élèves ; elle doit, en outre, les préparer à exercer, sur leur temps, une influence salutaire pour le rendre meilleur. Les Frères attacheront donc une grande importance aux directives pontificales concernant l'Action Catholique. Ils en étudieront avec soin l'esprit, l'organisation, les méthodes et le fonctionnement pour les appliquer, dès les classes élémentaires, à ce genre d'apostolat (R.C., art. 180). Ce devoir apostolique entraîne l'obligation de participer à certains cours de formation, à suivre la marche des diverses organisations d'Action Catholique, à maintenir un contact suffisant avec les dirigeants…

Si nous avons insisté sur l'utilité ou même sur la nécessité de ces contacts fréquents avec le « dehors », c'est pour prévenir, dès le début, des objections qu'on rencontre encore quelquefois : « Les temps ont changé. Un Frère éducateur ne peut plus vivre enfermé dans sa communauté. Les barrières d'autrefois n'ont plus de raison d'être. Nos Constitutions et nos Règles semblent ignorer l'évolution du monde… ». Aucun éducateur averti n'ignore qu'il devra toujours s'adapter le mieux possible aux réalités concrètes de son temps. Mais tout religieux qui prend au sérieux sa vie de « consacré au Christ », sait aussi que sa vocation l'oblige à limiter sagement ses relations avec le monde. Certaines objections sont parfois d'un simplisme déconcertant.

 2° Nous devrons toujours éviter les rapports « trop» fréquents.

 La mise en garde de nos Constitutions porte précisément sur l'excès, le « trop », le manque de prudentes limites dans les relations avec le dehors. C'est que les relations avec les séculiers, même quand elles ont leur justification et qu'elles sont conformes à l'obéissance, présentent des dangers réels pour les religieux, et cela à tous les âges de la vie. On peut et l'on doit se préparer à ces dangers. La période de formation de nos jeunes Frères doit les disposer à affronter résolument et victorieusement toutes les difficultés de leur futur apostolat. Mais l'une des meilleures protections sera toujours de limiter au « nécessaire » les contacts que nous devons avoir avec le monde.

La tradition religieuse et l'expérience de tous les temps, aujourd'hui comme hier, justifient amplement la nécessité de cette vigilance et de cette réserve. L'article 474 de nos Règles nous rappelle cette doctrine : « Les entretiens avec les séculiers sont un grand écueil de la vie religieuse ; c'est par ces rapports trop fréquents que l'esprit religieux sort des communautés, que celui du monde y pénètre et introduit les abus et le relâchement ».

Psychologiquement, cela se comprend facilement. Les « gens du monde » ont leurs habitudes de vie, leurs conceptions, souvent assez différentes de celles que suppose la vie religieuse. Même s'ils sont chrétiens, ils conçoivent les problèmes ordinaires de leur vie « en séculiers », ce que nous ne pouvons pas leur reprocher. La pauvreté, l'obéissance, les exigences de la vie commune ou de la vie régulière, telles qu'on les formule et qu'on doit les vivre dans un état de vie « parfaite », ne leur sont pas toujours compréhensibles ; en tout cas, ils ne sont pas obligés de s'y conformer pour les mêmes raisons et de la même façon que le religieux.

Celui qui est « trop » souvent en contact avec les séculiers tend peu à peu à prendre leur esprit. Généralement, ce glissement est d'abord lent, presque imperceptible. Mais il s'accentue vite, parfois très vite. On n'est plus satisfait de certaines exigences de la vie religieuse. On n'est plus si heureux dans sa communauté. On recherche toujours davantage la compagnie des gens du monde, sous n'importe quel prétexte ; on finit par s'y sentir bien à l'aise… Au point de départ de presque tous ces glissements, il y a eu de la « bonne volonté ». On n'avait pas du tout l'intention d'aller trop loin dans cette voie, certainement pas aussi loin que l'abandon de la vie religieuse…

Prévenir vaut toujours mieux que guérir. Il appartient à chaque religieux de prendre ses propres responsabilités et de respecter les règles de prudence dont la signification profonde ne peut lui échapper.

Il appartient aux Supérieurs responsables, à tous les degrés, de bien marquer les limites des contacts que les Frères doivent ou peuvent avoir avec les séculiers, de les justifier clairement, de les rappeler quand cela paraît opportun, et de tenir fermement à ce qu'elles soient respectées. Il y va du bien de chacun de leurs Frères. Il y va également de l'honneur de tout le corps : communauté, Province. Institut, Eglise.

 B. SORTIES, VISITES, ENTRETIENS.

 Jusqu'ici il n'a été question de nos rapports avec le monde que d'une façon très générale : ils ne doivent pas être trop fréquents. Le texte des Constitutions note expressément que nous devons éviter les sorties, les visites et les entretiens « inutiles ou irréguliers ».

 a) Nous borner à ce qui est utile.

 Nous avons de multiples raisons de sortir de notre maison religieuse : par devoir professionnel, pour suivre des cours, pour un congé ou pour la simple promenade. En fait, nous sommes de plus en plus mêlés à la vie du monde qui nous entoure. Mais si chacun d'entre nous se limitait à ce qui est de son devoir ou qui est vraiment de convenance, un grand nombre de « sorties » disparaîtrait du programme de plusieurs communautés. Le public nous en estimerait davantage ; l'école marcherait probablement mieux ; les études personnelles de chaque Frère seraient régulièrement continuées ; la vie de famille y gagnerait notablement.

Il y a des visites qui s'imposent. L'article 475 des Règles indique la norme à suivre : « Les Frères n'auront avec les personnes du dehors que les rapports exigés par l'œuvre ou l'emploi dont ils ont la charge. Ils se contenteront de voir, quand ce sera nécessaire ou convenable, les autorités et les bienfaiteurs ».

Pour les visites dites de convenance, il faut établir, dans chaque communauté, une ligne de conduite à la fois prudente et ferme. Si l'on n'y prend garde, on se voit vite pris dans un engrenage de complications qu'on n'avait pas prévues. On provoque des comparaisons, on excite de la jalousie, on suscite bien des mécontentements dans les familles qui nous connaissent. « Pourquoi les Frères vont-ils chez un tel et ne viennent-ils jamais chez nous ? ». De là peuvent naître des cloutes sur la justice et l'impartialité des « éducateurs ». Certaines insinuations peuvent aller plus loin encore. Ces observations valent également pour les visites que les séculiers font aux Frères, si l'on ne veille pas à temps pour les borner à ce qui convient.

Un religieux s'illusionne parfois sur les sentiments que ses fréquentes visites peuvent faire naître. L'auteur de l'Imitation de Jésus-Christ l'avait bien observé pour son temps : « On estime souvent un inconnu sur sa réputation, mais on s'en dégoûte dès qu'on l'a vu. Nous nous persuadons quelquefois que notre compagnie plaît à ceux que nous voyons ; et à peine peuvent-ils nous supporter à cause des défauts qu'ils découvrent en nous » (L. I, ch. 8).

Par contre, dans telle maison ou les Frères sortent rarement, ils ont été eux-mêmes surpris et profondément émus, à l'occasion de quelque épreuve dans la communauté, de constater de quelle- sympathie ils jouissaient dans le pays. Le rayonnement des Frères est assez souvent d'autant plus efficace qu'ils font eux-mêmes plus d'efforts pour ne pas attirer l'attention du monde sur leur personne…

Si quelque visite a sa raison d'être, il convient de ne pas la prolonger par des entretiens inutiles. Les hommes d'affaires, les grands travailleurs savent défendre leur temps. Parfois, une pancarte bien placée recommande aux visiteurs d'être brefs. Partout les temps de visite sont limités : Time is money ! Nous avons encore plus de raisons de défendre notre temps. Nous devons le réserver à nos élèves, à nos Frères, à notre sanctification personnelle. Nous devons le consacrer totalement à Dieu.

Qu'on nous permette de citer quelques notes d'un jeune officier, grand blessé de la guerre de 1914, immobilisé à l'hôpital militaire pendant plusieurs années et s'efforçant quand même de ne pas gaspiller son temps : « Examen de conscience. Méditation. – Aujourd'hui tu as perdu quarante minutes avec ce conteur "de jolis riens". Il fallait brusquer la conversation, la couper d'un sourire ou d'un mot aimable avec ce geste de la main, ce petit geste espagnol qui ajourne sans blesser : "Adiós ! Adiós !… ". Tu ne dois pas être à la merci de "l'imprévu", à la merci des "circonstances". ces échappatoires des âmes serves. Attention au scrupule de la charité, une des roueries de Belzébuth. La charité ne se galvaude pas. Elle a sa hiérarchie et tu ne dois jamais sacrifier les grands devoirs aux petits devoirs. Ta vie sera courte, il la faut pleine » (J. d'Arnoux, Paroles d'un revenant, 247-248).

 b) Sorties et visites doivent être régulières.

 La régularité suppose d'abord la permission. Celle-ci peut être générale pour toutes les sorties exigées par nos devoirs particuliers : études à faire, courses d'un Frère économe, etc. … En dehors de ces cas, il faut habituellement une permission spéciale. « Un Frère ne sortira pas sans permission du Frère Directeur » (art. 408 des Règles Communes). Cette obligation concerne même le Frère Directeur, sous une forme quelque peu différente : « Si le Frère Directeur est obligé de sortir, il désignera au Frère Sous-Directeur ou à celui qui préside en son absence, le lieu où il va et le Frère qu'il prend pour l'accompagner » (R. C., art. 409).

La permission régulière donne au religieux le mérite dé l'obéissance ainsi que les grâces et la protection divines dont il aura besoin.

Normalement, une visite régulière exclut l'isolement : « Sauf empêchement sérieux, il devra être accompagné par un confrère » (R. C., art. 408). « Le Frère Directeur indiquera.., le Frère qu'il prend pour l'accompagner» (R. C., art. 409). Assez souvent, un Frère ne peut pas compter sur un compagnon quand il doit sortir, par exemple, pour suivre des cours, pour des courses urgentes, pour une visite au médecin, etc. … Mais la règle du compagnon sera toujours une précieuse sauvegarde pour les promenades, les congés, les visites de convenance dans les familles des élèves… Ironiser là-dessus peut être facile à quelque esprit superficiel, mais ce genre d'ironie ne plaide pas en faveur de celui qui se le permet. Une règle doit toujours être saisie dans l'esprit qui l'a inspirée.

Ajoutons que les visites doivent se faire aux moments les plus indiqués. Dans une maison religieuse bien organisée, comme dans le monde d'ailleurs, il y a un temps pour les heures de parloir et pour les visites, comme il y a un temps pour la prière, le travail et les devoirs professionnels.

 C. LIAISONS DANGEREUSES.

 Les prescriptions dont nous venons de parler, et qu'on retrouve sous des formes variées dans toutes les familles religieuses, ont avant tout un aspect positif : maintenir, dans chacune de nos maisons, un climat favorable au recueillement, à la vie intérieure, au travail sérieux, à l'esprit de famille. Mais elles visent aussi à nous protéger contre des liaisons qui pourraient compromettre notre vertu et même notre vocation.

C'est une illusion, malheureusement assez répandue, de croire qu'on est personnellement à l'abri de tout danger moral, parce qu'on est cultivé, parce qu'on connaît suffisamment la vanité du monde, parce qu'on peut compter sur une volonté bien aguerrie. « Que les faibles, pense-t-on, se tiennent sur leurs gardes, cela se comprend. Mais un homme fort et averti, qui est d'ailleurs animé des meilleures intentions, n'a jamais rien à craindre dans ses relations avec les gens du monde ».

L'article 476 des Règles nous recommande fort sagement : « Ils seront polis envers tout le monde et se montreront respectueux et prévenants pour toutes les personnes avec lesquelles ils auront à traiter ; mais ils ne se lieront d'intimité et n'auront de familiarité avec aucune ».

Ici également le glissement progressif reste à craindre. Les visites trop nombreuses, souvent irrégulières au surplus, les entretiens trop prolongés conduisent tout naturellement à l'intimité, à un certain laisser-aller, à une familiarité excessive.

Ne percions pas de vue que les règles ci-dessus reposent sur une connaissance approfondie de la nature humaine et sur une expérience séculaire. Le chrétien, même quand il tend vers la perfection évangélique ou qu'il est revêtu de la dignité du sacerdoce, reste un homme, faible, fragile, toujours exposé à tomber, un homme qui doit compter sur le secours de Dieu, mais en respectant lui-même les lois de la prudence naturelle et surnaturelle.

L'avertissement de Notre-Seigneur à Simon-Pierre vaut pour tous : « …l'esprit est ardent, mais la chair est faible » (Mc. 14, 38). Et saint Paul dit énergiquement : « …que celui qui se flatte d'être debout prenne garde de tomber » (I Co. 10, 12).

La responsabilité des Supérieurs, à tous les degrés de la hiérarchie, est particulièrement engagée en tout ce qui concerne les relations de leurs Frères avec les séculiers. Un Supérieur qui aime vraiment les « siens » essaie de prévoir les situations dans lesquelles il va les placer en vertu de leur obédience. Il s'efforce de les suivre dans l'accomplissement de leur tâche, de les guider et de les conseiller, toujours discrètement, paternellement. S'il estime qu'il doit intervenir pour éviter qu'un Frère ne commette une imprudence, il n'hésite pas à le faire, sans attendre trop longtemps. A l'occasion, il sera ferme pour refuser quelque permission ou pour rappeler au devoir. La véritable affection n'admet pas de lâche condescedance.

 I). CONTROLE DE LA CORRESPONDANCE PAR LE SUPERIEUR.

 Il s'agit ici d'une question assez délicate, et assez souvent mal comprise. A bien des esprits modernes, pareille possibilité de contrôle apparaît comme un anachronisme, comme une sorte de surveillance à la fois mesquine, vexatoire et humiliante. Elle leur semble opposée à la cordialité et à la simplicité qui doivent régler nos relations fraternelles en communauté. Ils la trouvent incompatible avec la confiance mutuelle que suppose notre esprit de famille.

Cependant, le fait que ce contrôle existe dans toute forme de vie religieuse devrait les faire réfléchir. Comme le note le Père Creusen : « Les Constitutions de tous les Instituts religieux imposent à leurs membres de n'envoyer et de ne recevoir aucune lettre sans une autorisation générale ou spéciale. La plupart reconnaissent aux Supérieurs le droit de lire la correspondance de leurs inférieurs » (Religieux et Religieuses, éd. 1960, p. 234).

Tâchons de préciser brièvement comment il faut entendre ce droit de contrôle du Supérieur, et dans quel esprit il convient de l'exercer.

En premier lieu, ce droit n'est pas illimité. Pour écarter tout malentendu, le texte de nos Constitutions rappelle toutes les restrictions que le Code canonique apporte à l'exercice de ce droit (canon 611).

Ensuite, il y a la manière d'exercer ce droit de regard. Le Frère Directeur en usera « avec modération et charité, et d'une manière égale pour tous », note le Petit Traité de I'Etat religieux à l'usage des Frères des Ecoles Chrétiennes (p. 115). Dans les petites communautés, les choses se passent très simplement ; sauf des exceptions plutôt rares, les lettres reçues y sont un peu pour tous… Il n'en va pas ainsi dans une communauté nombreuse, où le Frère Directeur est moins intimement en contact avec chacun de ses Frères.

Si le Supérieur ne doit pas, chaque fois, exercer son droit de contrôle, s'il convient même qu'il n'y recoure pas habituellement, il ne peut pas délibérément renoncer à ce droit. Comme le remarque le Petit Traité déjà cité : « A négliger systématiquement tout contrôle de la correspondance de ses inférieurs, il pourrait encourir une sérieuse responsabilité » (p. 115).

C'est la charité fraternelle et la prudence paternelle qui doivent guider tout supérieur dans les occasions où il croit devoir prendre connaissance d'une lettre. C'est parce qu'il aime les « siens » qu'il éprouve parfois des inquiétudes sérieuses à leur sujet. « Ce Frère vient de rédiger sa lettre dans un moment de colère, dans une crise de tristesse et d'abattement. Faut-il la laisser partir ? ». L'adresse d'une lettre peut étonner à bon droit le Supérieur. Et cette adresse revient peut-être trop souvent…

En des périodes où le climat politique est particulièrement délicat ou troublé, comme dans les guerres ou les révolutions, ce peut être un devoir grave pour le Supérieur de veiller à ce que personne ne compromette la paix, ou même la vie des autres, par quelque lettre imprudente ou tout simplement maladroite.

S'il y a lieu d'intervenir, que le Supérieur soit toujours d'une franchise et d'une loyauté totale. Qu'il n'hésite pas, le cas échéant, à parler cordialement au Frère lui-même, qu'il lui expose salis détour les raisons qui l'ont poussé à retenir ou à contrôler une lettre. Un entretien tout fraternel, en même temps qu'il justifie la conduite du Supérieur et qu'il écarte tout malentendu, contribue grandement à prévenir le danger de certaines imprudences dans les lettres. Ce droit de regard s'explique et se justifie beaucoup plus par la pratique que par la théorie.

« Il est à peine besoin d'ajouter que le Supérieur est rigoureusement tenu au secret sur le contenu des lettres. Il suivra, en cette matière, les règles ordinaires relatives au secret professionnel » (Creusen, livre cité, p. 235).

Peut-être n'est-il pas inutile de rappeler ici que les Supérieurs, quelle que soit leur charge, ont eux aussi droit à cette « discrétion » de la part de leurs correspondants. L'article 365 des Règles Communes précise cette forme de discrétion : « …les Frères ne communiqueront à personne les lettres écrites à leurs Supérieurs quand même elles ne contiendraient rien de confidentiel. Ils feront de même pour celles qu'ils recevront des Supérieurs, à moins qu'elles ne contiennent des choses qui regardent tous les Frères de la maison ou que celui qui écrit n'ait manifesté l'intention qu'elles soient communiquées ». L'article fait nettement la distinction, entre les lettres de nouvelles qui sont de nature à intéresser tous les membres (le la communauté, et les autres qui sont habituellement d'un caractère plutôt intime et confidentiel. La discrétion se rapporte évidemment à cette deuxième catégorie.

Malheureusement, quelques Frères semblent oublier complètement leur devoir à ce sujet. Soit par légèreté, soit par humeur ou dépit, ils citent et publient l'un ou l'autre passage de la communication qu'ils ont reçue d'un de leurs Supérieurs. Parfois même, on isole une phrase, et celle-ci, sortie de son contexte, trahit complètement la pensée de celui qui l'a écrite. Il faut espérer que cette déformation de la pensée du Supérieur n'est pas intentionnelle…

Ces indiscrétions, quel qu'en soit le point de départ, sont très pénibles pour n'importe quel Supérieur ; en effet, lui-même ne peut pas rectifier publiquement les fausses interprétations de sa pensée, car il reste lié par le secret professionnel. De plus, ces indélicatesses, bien qu'elles soient le plus souvent irréfléchies, tendent à diminuer la franchise cordiale dans les relations ultérieures. 

6° Pas de fondations imprudentes.

 Les responsables veilleront :

« A ne pas se rendre trop faciles pour fonder de nouvelles maisons, se laissant aller à un désir immodéré de s'étendre et s'exposant ainsi à employer des sujets qui ne sont pas suffisamment formés, soit pour la vertu, soit pour la science ».

Cette « mise en garde » est plus actuelle qu'autrefois. Nous ne savons pas dans quelle mesure nos Frères ont cédé jadis «à un désir immodéré de s'étendre ». Mais nous constatons facilement que bien d'autres raisons pourraient nous entraîner aujourd'hui à multiplier nos communautés et nos écoles, comme nous le dirons plus loin.

Nous verrons brièvement :

1. Les causes habituelles de nos nouvelles fondations.

2. Les inconvénients et même les dangers des imprudences dans ce domaine.

3. La double leçon de notre Bx. Fondateur : sainte audace et ferme prudence.

 A. Causes des nouvelles fondations.

 1) Excluons tout d'abord ce désir immodéré de s'étendre que signalent nos Constitutions. A notre époque, il supposerait chez les Supérieurs une ignorance inadmissible de leurs devoirs en même temps qu'un oubli impardonnable de leurs responsabilités.

Mais quelque chose de cette ambition démesurée pourrait subsister chez nous. Dans tel secteur de l'Institut, nos Frères peuvent appréhender que d'autres religieux enseignants viennent s'établir dans leur voisinage, en quelque sorte « sur leur terrain ». Pour prévenir ce « danger », ils seraient tout disposés à accepter encore une école, alors que leurs moyens ne le leur permettraient en aucune façon. Sauf dans les régions peu peuplées et où la population scolaire ne permet guère à plusieurs familles religieuses de vivre et de prospérer, il faut plutôt craindre l'isolement. Le travail ne manquera à personne. La présence dans la même région de plusieurs Congrégations permet souvent une meilleure répartition des tâches, rend donc l'apostolat plus aisé et plus efficace. Elle peut être un excellent stimulant pour tous les religieux enseignants, surtout par la confrontation des idées et des expériences. Soyons partout et toujours disposés à accueillir fraternellement tous les « ouvriers » apostoliques, à les aider de toutes nos forces, à collaborer franchement avec tous, sans distinction.

2) Certaines fondations nouvelles peuvent s'imposer aux Supérieurs. Il est normal qu'une Province voie ses effectifs augmenter. Grâce à Dieu, cette situation favorable existe en plusieurs secteurs de l'Institut. Les responsables doivent préparer l'avenir, prévoir à temps les fondations qui semblent le plus indiquées, soit du point de vue apostolique, soit pour le recrutement de bonnes vocations. Ils doivent même avoir un plan général, bien étudié, et qui porte assez loin… Les fondations « improvisées » ont été souvent une source d'amères déceptions pour ceux qui devaient continuer des œuvres entreprises un peu au hasard. Parfois même, la suppression a suivi de trop près la fondation. D'autres œuvres ont continué tant bien que mal, avec une administration difficile, un apostolat peu fructueux et un recrutement parfois nul. Ajoutons qu'il convient toujours de penser à une sage répartition des nouvelles fondations. Trop groupées, elles peuvent gêner beaucoup dans la suite, par exemple quand l'heure arrive de diviser la Province. Trop dispersées, elles compliquent inutilement le gouvernement des communautés et la direction générale des écoles.

Comme il a été dit dans une autre Circulaire, les petites écoles d'autrefois ne peuvent pas être maintenues partout. Par contre, une nouvelle école mieux située, plus centrale, mieux organisée, peut être nécessaire pour toute une région. Malgré la peine qu'on éprouve à fermer telle ou telle école, devenue chère à des générations de Frères, on doit quelquefois s'y résigner afin de pouvoir fonder un centre scolaire mieux adapté aux besoins actuels. En pareil cas, on ne peut parler de contradiction riiez les responsables, fermant d'un côté et ouvrant de l'autre : il s'agit plutôt d'un simple transfert d'école.

Bien des fois aussi les Supérieurs se préoccupent de trouver un meilleur recrutement aux maisons de formation de la Province, ou de procurer aux œuvres déjà existantes des ressources absolument nécessaires. Nul ne peut s'étonner qu'ils acceptent parfois une fondation qui leur semble opportune, bien qu'ils se rendent parfaitement compte des risques qu'ils assument.

Dans tous les cas que nous venons de citer, c'est un réel souci apostolique qui doit animer les supérieurs responsables d'une nouvelle fondation. Il importe de ne jamais le perdre de vue.

a) A tous ces motifs de « fonder » qui tiennent à la vie même de notre famille religieuse, il faut ajouter les « appels » insistants des autorités ecclésiastiques ou même civiles, ainsi que les invitations pressantes de nos bienfaiteurs, de nos anciens élèves ou de nos meilleurs amis.

Que de fois les Frères Provinciaux ou les membres du Conseil Général se sont trouvés dans un cruel embarras, quand il fallait tenir tête à une véritable offensive déclenchée pour leur arracher la fondation d'une nouvelle école ! On recourait aux arguments à base de sentiment, on faisait appel à la reconnaissance : « Vous nous devez ce geste de compréhension, cette preuve d'amitié » ! Parfois, on plaçait les pauvres supérieurs devant leur conscience : « Dieu vous demandera compte des âmes qui se perdront chez nous parce que vous n'aurez pas accepté cette école » !

Les deux sessions du Concile ont amené à la maison généralice un assez grand nombre de visiteurs illustres, dont plusieurs étaient animés, comme le déclarait plaisamment l'un d'entre eux, d'une double intention : la première, celle de saluer les chers Frères Maristes ; la seconde, la principale, celle d'obtenir gain de cause pour une ouverture d'école…

En pareil cas, il importe de rester calme, de se défendre contre l'influence débilitante du sentiment, de ne pas se laisser impressionner par cet appel véhément à la conscience. La raison, l'expérience du passé, parfois une sérieuse information nous indiqueront le chemin à suivre.

4) Il convient de faire une rapide allusion à ce qu'on pourrait appeler les fondations « larvées » ou non-apparentes. Pendant les dernières années, plusieurs écoles ont connu un développement rapide, excessif même, semblable à celui de certaines villes. C'est en partie un hommage rendu aux qualités professionnelles de nos éducateurs ; en partie aussi le résultat de l'accroissement extraordinaire de la population scolaire dans presque tous les pays. Telle école qui, pendant un demi-siècle. n'avait jamais dépassé les quatre cents élèves, a vu sa population monter rapidement à plus de mille. Or, les effectifs de la Province étaient restés stationnaires.

Apparemment, la Province n'a pas fait de fondations nouvelles ; en fait, c'est comme s'il y en avait eu plusieurs. Cette situation, qui tend à se généraliser dans l'Institut, doit être suivie de près par les supérieurs. Les inconvénients et dangers des fondations proprement dites se retrouvent également dans le cas des écoles qui grandissent trop vite.

 B. Inconvénients et dangers des fondations imprudentes.

 1. En premier lieu, comme le signale le texte des Constitutions, il y a la tendance à vouloir employer des Frères insuffisamment formés. Les œuvres appellent ; il y a partout des postes vacants ; l'année scolaire va commencer. On retire rapidement quelque jeune Frère du scolasticat ou des études universitaires. On réparera plus tard. Mais plus tard, ce sera exactement la même chose…

Ou bien on confie à de tout jeunes enseignants des tâches qui dépassent manifestement leurs forces. A des Frères adultes, on demande quelquefois des efforts qui nuisent à la qualité de leur travail, à la valeur et à l'efficacité de leur apostolat, parfois même au sérieux et à la profondeur de leur vie religieuse.

Bien entendu, nous devons soigneusement démarquer la théorie et la pratique, l'idéal et la réalité. On l'a dit et redit : « On n'est jamais complètement formé pour commencer sa carrière, tout particulièrement dans l'enseignement » ! L'expérience, le métier, la maîtrise dans une profession s'acquièrent dans l'action et par l'action. A entendre les exigences de formation préalable que posent des «rêveurs », on ne commencerait jamais.

Mais il reste certain que tout débutant dans notre vie devrait avoir une compétence suffisante « avant » de commencer sa mission. L'honneur de l'Eglise l'exige, car nous la représentons. Les élèves et les parents ont le droit d'y compter. Le rayonnement de notre Institut en dépend.

Ce paragraphe 6 demande également que les Frères soient suffisamment formés « pour la vertu ». Celle-ci ne peut évidemment se mesurer ou se chiffrer. On ne peut pas même, du dehors, la constater avec certitude. Mais ici, il est seulement question d'une période de formation assez longue, d'un entraînement assez prolongé aux vertus que notre vie active requiert normalement de nous. Cette «    maturité » suffisante peut être appréciée par les supérieurs et par les formateurs. Qu'on veuille toujours tenir compte des indications sages et bien pratiques que nous donne le chapitre XXVI des Règles sur la formation des Frères. Mieux vaut habituellement que les âmes attendent quelque peu que de leur envoyer des éducateurs évidemment inférieurs à leur tâche.

Dans le passé, plus particulièrement dans les débuts de l'Institut, il y a eu de splendides exceptions à ce sujet : une période de formation très limitée et un succès apostolique remarquable ! Il y en aura sans doute encore. Quand Dieu nous appelle manifestement à une mission déterminée, Il nous donne largement toutes les grâces nécessaires pour la remplir fidèlement. Il ne nous appartient pas de déterminer nous-mêmes ces appels providentiels. En règle générale, tous doivent peiner pour se préparer et attendre patiemment que l'heure de l'action sonne pour eux…

2. Un autre inconvénient des fondations qui ne correspondent pas au personnel d'une Province, c'est l'engagement d'un trop grand nombre de professeurs civils.

En général, nous sommes heureux de pouvoir compter sur leur aide. Sans eux, beaucoup de nos écoles auraient disparu depuis longtemps. Il devient de plus en plus normal de faire appel à leur collaboration. Mais il importe de garder une juste mesure dans ce domaine, une mesure qui varie d'ailleurs selon les conditions d'existence et de fonctionnement de nos diverses écoles.

En certains endroits, les inconvénients .d'un personnel civil trop nombreux apparaissent déjà manifestement : quand le traitement de ces professeurs n'est pas assuré par le gouvernement ou, du moins, par un comité, les communautés restent sans ressources suffisantes ; les corvées spéciales retombent, en grande partie, sur les seuls Frères, surtout dans les grands internats ; plusieurs Frères se voient obligés d'occuper des emplois où les possibilités apostoliques sont très réduites ; des contacts trop fréquents avec les civils peuvent nuire à la vie religieuse de la communauté ; l'unité de vues n'est pas toujours suffisante dans un corps professoral ainsi constitué, sans que personne soit de mauvaise volonté.

Il y a encore une autre conséquence regrettable, sur laquelle il convient d'attirer l'attention. Quand le rôle des Frères eux-mêmes est vraiment trop effacé dans la marche d'une école, il devient très difficile d'y trouver des vocations pour notre famille religieuse. Les élèves et leurs parents n'arrivent plus à comprendre et à estimer la vie d'un Frère enseignant. En effet, cette vie se présente à eux beaucoup plus par son aspect apostolique que par son caractère strictement religieux. Or, dans les conditions que nous venons de signaler, la signification apostolique de notre vie n'apparaît plus que très faiblement. On voit le danger de pareille situation.

Encore une fois, nous excluons en ce moment toute allusion à des difficultés dans les rapports entre les Frères et leurs aides civils. Très souvent d'ailleurs, ceux-ci sont non seulement les collaborateurs des Frères, mais leurs amis et leurs soutiens. Il convient de leur rendre un juste hommage. Mais dans la constitution du corps professoral comme dans la distribution des tâches, il importe de ne jamais perdre de vue la voie royale du juste milieu.

 C. Double leçon du Bienheureux Fondateur : audace et prudence.

 Ceux qui ont lu, relu, médité attentivement la vie de notre Bienheureux Père ont dû noter comment il a su combiner harmonieusement deux vertus essentielles pour un apostolat fécond : une sainte audace et une remarquable prudence. C'est cette attitude de notre premier guide que nous devons avoir devant les yeux, spécialement devant les graves problèmes que pose aujourd'hui le développement de notre famille religieuse.

 1. Audace apostolique.

 Cet humble vicaire d'un village isolé entreprend, à vingt-sept ans, une œuvre qui semble dépasser toutes ses possibilités. Il n'a rien ; il n'a jamais passé pour un esprit brillant ; il ne peut compter sur aucune aide sérieuse. « C'est de la folie », diront certains autour de lui… Mais il compte résolument sur Dieu. Il dira plus tard à ses Frères : « Quand on a Dieu pour soi, quand on ne compte que sur lui, rien n'est impossible » ! De plus, il est soutenu, tout le long de sa vie, par une confiance filiale et totale en Marie : « Quand toute la terre serait contre nous, nous ne devons rien craindre si la Mère de Dieu est avec nous ».

Cet abandon filial à Dieu et à Notre-Dame ne l'empêchera jamais de travailler de toutes ses forces pour que son œuvre réussisse et prospère. Jamais il ne reculera devant l'effort, le sacrifice. Les paroles suivantes reflètent bien son énergie indomptable : « Toute la terre serait contre moi que je ne reculerais pas. Il me suffit que Dieu veuille la chose et que mes supérieurs l'approuvent ; peu n'importent, après cela, les contradictions des hommes et les difficultés ; je n'y fais aucune attention. S'il fallait s'arrêter toutes les fois que les moyens humains manquent ou qu'une difficulté vient barrer le chemin, on ne ferait jamais rien » (Vie, p. 613).

Nous connaissons les magnifiques réalisations de cette sainte audace. Quand il meurt, après une vie relativement courte, il a déjà posé des bases solides pour une œuvre grandiose et durable.

Nous aussi, nous voyons autour de nous du bien à faire, quelques œuvres à entreprendre pour la gloire de Dieu et le salut des âmes. Mais nous voyons encore mieux, peut-être, les difficultés à vaincre, l'insuffisance de nos moyens. Et nous sommes tentés trop facilement de reculer. Nous perdons de vue que les difficultés peuvent être surmontées à la seule condition de suivre la voie tracée par notre Bienheureux Fondateur : nous efforcer de bien connaître la volonté de Dieu ; compter avant tout sur le secours d'en-haut ; ne jamais craindre l'effort et la peine. Cette ligne de conduite vaut particulièrement quand il est question d'entreprendre une fondation qui paraît difficile.

Qu'il nous soit permis de rappeler que cette sainte audace doit spécialement marquer notre effort missionnaire. Il ne s'agit nullement de nous lancer aveuglément dans des entreprises missionnaires qui dépassent nettement toutes nos possibilités. Mais il ne faut pas nous contenter d'attendre indéfiniment que les chances de succès soient « totales ». Elles ne le seront jamais. Il y aura toujours des risques à assumer, surtout dans les temps actuels. Quand les signes de Dieu ont été suffisamment clairs et que le jugement des autorités régulières a été favorable, il faut savoir « oser » sans se préoccuper des échecs possibles.

Si nous étions tous animés d'un grand élan missionnaire, si toutes nos Provinces étaient fermement décidées à combiner fraternellement leurs « possibilités » dans le domaine des missions, nous pourrions répondre magnifiquement à l'appel de l'Eglise.

La même remarque vaut pour notre apostolat parmi les enfants des classes laborieuses. C'est avec une grande tristesse et de réelles inquiétudes d'âme que nous constatons parfois combien leur part est petite en l'un ou l'autre secteur de l'Institut. Nous savons les raisons qu'on met en avant pour ne pas faire davantage. Elles ne nous paraissent pas toujours convaincantes. Ayons le courage de nous demander loyalement : « Est-ce que notre Bienheureux Père se serait contenté de la part que nous réservons à ces enfants ? ».

 2. Prudence toujours en éveil.

 La sainte audace de notre Bienheureux Fondateur ne fut jamais de la témérité. Bien au contraire, on est frappé, en lisant attentivement sa vie, de la prudence remarquable qu'il a montrée dans toutes les occasions, spécialement dans les plus difficiles. Il savait prévoir et calculer ; agir vigoureusement et rapidement, mais aussi attendre patiemment l'heure favorable ; il savait administrer et gouverner ; il a su former, avec très peu de moyens à sa disposition, d'excellents religieux, de bons instituteurs et catéchistes, des hommes de caractère et de dévouement. Il a su préparer de bons successeurs, qui imiteront fidèlement les exemples de sagesse de leur Père.

Cette prudence, qui ne fut jamais en défaut, devrait inspirer notre conduite chaque fois qu'il est question d'une nouvelle œuvre à entreprendre. En premier lieu, qu'on étudie à fond le point essentiel : celui du personnel disponible. Il ne s'agit pas seulement des Frères sur lesquels on peut compter actuellement, mais aussi de la « relève » qu on prévoit pour l'avenir. Il est rare qu'une école nouvelle en reste aux premières exigences pour le personnel. On commence avec trois classes, et quelques années plus tard, on peut se trouver devant la responsabilité de dix ou de vingt classes. C'est une illusion de vouloir freiner la montée rapide de la population scolaire, surtout dans les missions d'aujourd'hui ou dans les grands centres.

D'autre part, les exigences pour les titres sont plus grandes que jadis. Il faut donc à nos jeunes une formation plus longue, qui est d'ailleurs un très grand bien pour eux. Il faudrait des raisons graves pour l'interrompre ou pour en diminuer la longueur. Cette situation oblige souvent les supérieurs de suspendre l'acceptation d'une école, dont le caractère nettement apostolique leur plaît pourtant beaucoup.

Il faut aussi que les responsables d'une fondation examinent, au préalable, l'horaire de travail qui attend les Frères dans leur nouvelle école. De vagues promesses ne peuvent suffire en pareil cas. La vocation des Frères ne peut être imprudemment compromise. Une détente suffisante, un temps raisonnable pour leur culture personnelle, un temps régulier pour leurs exercices spirituels doivent trouver leur place normale dans l'horaire prévu.

A ce sujet, il faut rappeler ici la nécessité de dresser un contrat, suffisamment détaillé et bien en forme, « avant » l'acceptation définitive de toute nouvelle œuvre. Bien des malentendus regrettables ont trouvé leur origine dans l'absence de pareil contrat, ou dans son manque de précision. Les fondateurs disparaissent, les contrats restent.

Il importe que les supérieurs d'une Province ou d'un District sachent prévoir l'évolution de leur secteur, dans la mesure où cela est humainement possible. Cette prévision doit porter sur plusieurs années et tous les « conseillers » devraient la connaître. Les équipes dirigeantes se succéderont sans doute pendant ce temps. Mais l'esprit de suite exige que chacune tienne compte des plans dressés par la précédente, tout en gardant la marge d'initiative nécessaire. Une estimation objective de la situation actuelle, une grande largeur de vue. une patience à toute épreuve, un esprit de famille qui exclut tout point de vue personnel dans la grave question des fondations (comme aussi, hélas ! des suppressions), ce sont les qualités qu'on voudrait trouver chez tous les responsables.

Notons, pour finir, que cette prudence saura être ferme et constante. Parfois, il nous faudra refuser de très belles œuvres parce que nous manquons actuellement d'un nombre suffisant de Frères formés. Ceux qui nous ont sollicités reviennent ü la charge ; ils font pression sur nous ; d'autres les appuient de leur crédit. Et l'œuvre proposée nous paraît si belle, si apostolique ! En règle générale, il faut maintenir notre refus. Cela vaudra mieux que de nous engager dans une aventure dangereuse à tous points de vue.

Ne perdons jamais de vue deux vérités d'expérience. S'il est relativement facile de commencer une nouvelle œuvre, il est parfois très difficile de la faire vivre et prospérer. En conséquence, il est bien plus sage de ne pas fonder que de s'exposer imprudemment à devoir supprimer à brève échéance.

 Conclusion générale.

 L'article 206 de nos Constitutions ne contient que des « mises en garde ». Il semble donc ne présenter qu'un programme négatif à ceux qui veulent « travailler de toutes leurs forces à la conservation et à l'accroissement du corps entier de l'Institut ». Quelques-uns pourront le trouver plutôt pesant et embarrassant. Mais ne gênerait-il pas la marche à la manière du bouclier qui protégeait le soldat de jadis ?

A l'occasion des « défenses » que l'Eglise impose à ses enfants et qui paraissent un lourd handicap à des chrétiens superficiels, le Père Fernand Lelotte écrit : « Ne penser qu'aux poteaux et oublier la. route, c'est l'attitude de ces chrétiens qui ramènent la morale catholique à un code de restrictions et négligent la voie large qu'elle nous trace ! » (Perspectives, p. 10).

Les moyens « négatifs » que nous venons de commenter n'ont pas d'autre fin. Ils attirent notre attention sur les obstacles et les dangers de la route. Ils nous permettent de prévoir et d'éviter les écarts, les accidents et les chutes. Ils nous tracent une voie large et sûre. A les négliger systématiquement, on prépare la ruine de l'Institut. En y restant fidèles, nous ressemblerons à cet « homme avisé qui a bâti sa maison sur le roc » (cf. Mt. VII, 24).  

VŒUX POUR 1964

 Nous grouperons sous trois titres nos vœux traditionnels à l'occasion du renouvellement de l'année.

 1° Participation au Concile.

 Les journalistes ont écrit maintes fois qu'avec le Concile nous vivons une époque historique d'une importance exceptionnelle. Il est certain, en effet, que l'actuel Concile marquera fortement la marche de l'Eglise. Nous souhaitons vivement qu'il marque aussi notre vie chrétienne et religieuse.

En premier lieu, il doit être pour chacun d'entre-nous l'occasion d'un « renouvellement » sincère. Plus que jamais, nous devons nous « sentir d'Eglise ». Plus que jamais, nous devons :

* vibrer avec elle ;

* souffrir avec tous ses membres souffrants, les malades, les pauvres, les persécutés en particulier, n'oublions pas nos confrères de l'Eglise du silence, qui continuent de vivre dans un isolement total

* aspirer à son épanouissement avec les missionnaires de tous les pays et de toutes les races ;

* prendre de plus en plus conscience de nos propres responsabilités apostoliques comme membres du Corps Mystique, et y répondre dans toute la mesure de nos forces.

Nous avons notre effort à fournir pour assurer le succès du Concile. Il ne nous suffit pas de « suivre avec curiosité et intérêt » les comptes rendus de journaux et des revues sur les sessions du Concile. Dans l'Exhortation « CUM PROXIMUS » adressée à tous les Evêques, le 14 septembre dernier, S. S. Paul VI rappelle ce devoir de participation à tous les chrétiens du monde :

«Nous déclarons solennellement, vénérables frères , que c'est sur ce concours de prière et de pénitence chrétiennes que doit reposer surtout l'espérance de l'abondante moisson spirituelle attendue du Concile, celui-ci étant avant tout l'œuvre du Saint-Esprit.

« Assurément il faut mettre en œuvre pour cette grande assemblée toutes les ressources humaines possibles. Cependant, ce ne seront ni la célébration bien ordonnée des séances conciliaires, ni la richesse des discussions, ni même les études excellemment préparées par les Pères du Concile qui permettront de parvenir d'une façon complète et durable aux fins souhaitées, mais bien les prières attentives et prolongées, les mortifications corporelles et spirituelles offertes à Dieu, la sainteté des mœurs, les œuvres charitables, c'est-à-dire tous ces instruments et secours surnaturels auxquels l'Eglise a toujours eu recours et auxquels elle continue d'avoir recours chaque fois que sont en jeu la gloire de Dieu, le salut des âmes et le progrès spirituel de l'humanité.

« Il faut donc insister, avant tout, sur les prières continuelles et profondes, privées et publiques, implorant de Dieu sa lumière surnaturelle sur les âmes de ceux qui, par leurs conseils et leur science, prépareront les décrets du Concile. Cette forme d'aide, facile et efficace, est à la portée de tous les chrétiens ; c'est pourquoi Nous l'attendons de tous.

…« Les prêtres, les séminaristes, les Instituts religieux doivent donner l'exemple de la prière et les laïcs doivent rivaliser avec eux. Notre vif désir est que la grande multitude de ceux qui prient dans le monde entier augmente non seulement en nombre, mais encore en grâce et en vertu. Pour qu'il en soit ainsi, la pureté doit s'unir à la prière inspirée par une ardente charité » (Doc. Cath., 6 octobre 1963, col. 1255).

Ayons tous à cœur de répondre généreusement à cet appel pressant du Souverain Pontife, par une courageuse fidélité à toutes nos prières de Règle. par l'application à les faire le mieux possible, par l’acceptation joyeuse des travaux et des peines de chaque jour. Faisons-nous les apôtres de la prière et de la pénitence parmi nos élèves et même parmi nos anciens élèves.

 2° Amour de l'Institut.

 Nous devons souhaiter que notre Institut prospère toujours, qu'il s'étende, qu'il contribue le plus possible à l'expansion du Royaume de Dieu et à la sanctification des âmes. Les difficultés et les épreuves n'ont jamais manqué dans le passé ; elles ne manqueront pas non plus dans l'avenir. Demandons à Dieu que nous en tirions le meilleur parti possible, pour Sa gloire, pour notre avancement spirituel, pour le bien des âmes qui nous sont confiées. Il est normal que nous rencontrions la « croix » sur notre route. Ne perdons jamais de vue qu'elle est un « don de Dieu », soit qu'elle dérive de nos difficultés personnelles, soit qu'elle provienne des épreuves de toute notre famille religieuse.

C'est par une parfaite fidélité à tous nos devoirs d'état que nous affirmerons notre amour de l'Institut. Celui-ci a sa fonction propre dans l'Eglise. Il durera et prospérera tant qu'il sera fidèle à la bien remplir. Pratiquement, cela revient à dire que l'avenir de l'Institut dépend de chacun de nous, de notre manière personnelle de vivre la vie religieuse, de la qualité de notre zèle apostolique. Comme nous le disions dans la dernière Circulaire : « Chacun d'entre nous doit savoir qu'il est forcément pour toute sa famille religieuse, ou un principe de vie, de santé, de force, de fécondité toujours plus grande, ou une cause d'affaiblissement, de décadence progressive, de ruine et de mort ». Il est bon de méditer parfois sur ce devoir essentiel d'un « enfant de la famille », calmement mais sérieusement, et de passer résolument aux applications pratiques. L'amour se prouve par des actes.

 3° Esprit de famille.

 Veillons à garder intact notre esprit de famille, qui est fait de renoncement à nous-mêmes, à nos petites idées trop personnelles, à la recherche de nos aises, en vue de travailler plus efficacement au bien commun.

Les petits sacrifices que nous nous imposerons pour rendre la vie de famille plus agréable seront largement compensés par la joie profonde que nous goûterons dans une communauté vraiment unie. Ce «climat de famille » est nécessaire pour affermir les vocations des jeunes, pour soutenir leur générosité et pour les préserver de toute forme de découragement. Il l'est également pour rendre possible le recrutement de bonnes vocations, car le rayonnement de notre joie commune sera un appel éloquent adressé aux jeunes gens qui nous voient tous les jours, nous observent et nous jugent. Sans cette prédication muette d'un esprit de famille intensément vécu dans une communauté, la « propagande » en faveur des vocations n'aura guère d'influence sur nos élèves.

L'esprit de famille dispose à l'entraide et à la franche collaboration avec tous ses Frères, à l'intérieur de la communauté comme dans l'école. Il facilite la collaboration entre les communautés d'une même Province, comme entre toutes les Provinces de l'Institut. Il ne connaît pas de barrières… Cette entraide fraternelle peut aujourd'hui prendre bien des formes, selon les pays et les circonstances : accueil des juvénistes ou des postulants d'une autre Province, de Frères scolastiques ou de Frères universitaires ; échange de professeurs… Il porte à la coopération de toutes les bonnes volontés et de toutes les générosités pour le maintien et le développement de nos œuvres en pays de mission ou dans les régions où notre apostolat est particulièrement urgent.

 A tous les Frères de l'Institut, les membres de l'Administration Générale souhaitent une heureuse et féconde année 1964 ! Que Notre-Dame bénisse tout particulièrement chacune de nos communautés ! Que notre Bienheureux Père nous protège et nous guide comme par le passé !

 ————————————–

TEXTES ET REFERENCES 

  I – PRIÈRE POUR LE CONCILE.

 L'Osservatore Romano du 29 septembre 1963 a publié la prière suivante, correspondant à celle qui avait été composée à la même intention par JEAN XXIII :

 Majestati tuae, Domine Deus, hoc sacrificium !audis offerimus : et, cum famulo tua Pontifice Nostro Paulo devoto mentis obsequio conjuncti, immensam tuam oramus pietatem, ut Oecumenicum Concilium Vaticanum secundum benigno respicias vultu et ejus exitum tuae ubertate gratiae fecundes. Per Christum Dominum nostrum. Amen. 

Nous offrons, Seigneur, ce sacrifice de louange à Votre divine Majesté ; et, en union avec votre serviteur notre Pape Paul, nous implorons de votre bonté infinie de jeter un regard favorable sur le Il° Concile Oecuménique du Vatican et de féconder son succès par l'abondance de vos grâces. Par le Christ Notre-Seigneur. Ainsi soit-il. 

Indulgences.

 Un décret de la S. Pénitencerie en date du 3 octobre 1963 accorde aux clercs, religieux et religieuses qui récitent cette prière avant l'office divin, le petit Office de la S.V. ou tout autre Office prévu par leurs Constitutions, une indulgences partielle de 500 jours, et une indulgence plénière pouvant être gagnée aux conditions ordinaires une fois par mois, si on la récite chaque jour pendant un mois.

(Doc. cath. N. 1410, col. 1364)

    Il – PAUVRETÉ.

 Comme l'écrivait S. Exc. Mgr. Huyghe, évêque d'Arras, « cela peut paraître étonnant en raison des thèmes qui étaient à l'ordre du jour : liturgie, sources de la Révélation, moyens de communication sociale, Eglise… ; cela peut paraître étonnant. Mais c'est un fait : on a beaucoup parlé de pauvreté au Concile ».

Il s'agissait de la première session ; mais on y est revenu à plusieurs occasions au cours de la seconde session. La remarque suivante de Mgr Huyghe devrait nous porter à un examen sérieux, examen personnel et aussi examen communautaire.

« Religieux et religieuses ont fait le vœu de pauvreté… mais, comme le disait le Cardinal Lercaro, pratiquent-ils toujours la pauvreté individuelle et collective ? » (Lettre pastorale du 19 janvier 1963).

 III – FIDÉLITÉ.

 Le 30 août 1963, S. S. Paul VI recevait en audience privée, les membres du Chapitre Général des Lazaristes. Il termina son allocution par cette exhortation qui s'applique à tous les religieux :

« Nous vous ouvrons Notre cœur pour vous exhorter à une triple fidélité.

 A la Règle – Tout d'abord, restez fidèles au règlement de vie tout imprégné de sagesse évangélique et d'imitation du Christ, qui vous a été Transmis par votre fondateur. Gardez intacts ces trésors surnaturels de prière, de grâce et de sainteté qui ont toujours été l'honneur de votre Congrégation et qui lui ont donné sa physionomie particulière. Conservez saintement et intégralement les lois canoniques précises et concrètes qui constituent la solide structure interne de votre famille religieuse, et auxquelles vos œuvres extérieures sont redevables de leur efficacité. Ne soyez pas avides de nouveautés, mais examinez avec une attentive prudence les changements à votre Règle, que les nouvelles circonstances et les nouveaux modes de vie sembleraient conseiller aujourd'hui et que l'autorité suprême de l'Eglise jugerait ensuite sages et légitimes.

Au soulagement des misères. Soyez pareillement fidèles à connaître et à soulager les misères corporelles et spirituelles dont souffrent les hommes d'aujourd'hui. Continuez à être attirés par le soin des pauvres, des malades, des délaissés, des égarés. Ouvrez votre cœur aux besoins de chacun et de la société tout entière. Et ne soyez pas étrangers aux efforts déployés par les hommes, avec beaucoup d'espoir et de peine – et parfois non sans erreurs – pour instaurer un ordre plus humain.

A l'Eglise – Et enfin, gardez une fidélité constante et exemplaire à l'Eglise catholique, que nous devons, ainsi qu'il convient, toujours estimer, aimer, soutenir comme des fils, des soldats, des apôtres et des saints. Proposez-vous, et cela sera votre plus grand honneur, de ne le céder à personne dans cette généreuse profession d'amour qu'exige l'heure présente, si grande, mais si critique ; et cette profession est d'autant plus souhaitable que plus féconde en mérites surnaturels ».

(Doc. Cat., 6 octobre 1963, col. 1285).

   V – ADAPTATION.

 S'adressant aux membres du Chapitre Général des Rédemptoristes (8 février 1963), S. S. Jean XXIII énonçait les principes à suivre dans la révision des Règles et des Constitutions :

« Actuellement vous tenez votre assemblée suprême, c'est-à-dire votre Chapitre général, qui est Ie XVI° depuis la fondation de votre congrégation, afin de réexaminer sa Règle et ses Constituions, en tenant compte des besoins et des circonstances de notre époque. C'est là une chose qui requiert une très grande prudence, car il faut conserver religieusement ce qui est fondamental dans la vie religieuse et ce qui vous est demandé à vous d'une façon spéciale ; tandis que ce qui est lié aux vicissitudes des choses doit être convenablement adapté aux exigences de notre époque. Il ne s'agit pas cependant de plier votre Règle et vos Constitutions aux modes et aux vanités du siècle, mais c'est le siècle, c'est-à-dire le « vieil homme » qui doit être mis en mesure de parvenir plus facilement à la sainteté. Si donc votre Règle et vos Constitutions sont modifiées, cela doit être dans le but de leur donner une plus grande efficacité.

« Vous devez leur obéir et les aimer comme une indication sûre de la voie que vous devez suivre et comme un signe incontestable de la volonté divine que vous devez accomplir. Et, dans le doute sur la décision à prendre dans un cas déterminé, on petit avancer en toute sécurité si l'on suit la Règle ».

(Doc. Cat., 3 mars 1963, col. 307-308).  

V. J. M. J.

 DIVISION DE PROVINCE 

Rome, le 10 avril 1963

Très Saint Père,

Le Supérieur Général de l'Institut des Frères Maristes des Ecoles, humblement prosterné aux pieds de Votre Sainteté, expose ce qui suit :

La Province du Brésil Méridional prenant un développement de plus en plus grand (actuellement 380 Profès, 27 maisons, 36 postulants et novices, 348 juvénistes), la division en deux Provinces est très souhaitée.

Sur proposition du Fr. Assistant Général qui vient de faire la Visite canonique de cette Province et du Conseil Provincial, le Conseil Général, après étude de cette question, a émis un vote favorable pour la division de cette Province en Province de Porto Alegre et Province de Caxias Do Sul.

La Province de Porto Alegre comprendrait l'Archidiocèse de Porto Alegre, les diocèses de Pelotas et Santa Cruz, plus les municipes de Guaporé, Serafina Corrêa et de Casca, situés dans le diocèse de Passo Fundo, ainsi que les municipes de Bagé, Lavras do Sul et de Pinheiro Machado dans le diocèse de Bagé.

La Province de Caxias Do Sul comprendrait les diocèses de Caxias do Sul et de Vacaria, ainsi que tout l'Etat de Mato Grosso.

A Brasilia, chacune des deux Provinces posséderait une propriété.

A Porto Alegre, la Province de Caxias Do Su ! posséderait une propriété dans le quartier de Teresópolis.

L'Indult requis est respectueusement sollicité pour l'érection canonique des deux Provinces de Porto Alegre et de Caxias Do Sul, comme exposé ci-dessus.

Et que Dieu, etc. …

 * * *

 SACRA CONGREGATIO

 DE RELIGIOSIS

 Prot. N. 15 159-63

 Vigore facultatuln a Ss.mo Domino Nostro roncessarum, S. Congregatio Negotii Religiosormn Sodalium praeposita, attentis expositis a Rev.mo Oratore, benigne adnuit pro gratia iuxta preces, dummodo omnia habeantur quae de iure requiruntur. Haec concessio decurrat a die statuta a tinpremo Moderatore cum suo Consilio. Ceteris servatis servandis.

Contrariis quibuslibet non obstantibus.

 Datum Romae, die 23 AprilisA.D. 1963.

(Scout)

J. B. VERDELLIS, Sub

En vertu des pouvoirs concédés par Notre Très Saint-Père le Pape, la Sacrée Congrégation préposée aux Affaires des Ordres religieux, vu les faits exposés, accorde bénignement la faveur selon la demande, étant observées exactement toutes les prescriptions demandées par le Droit. Cet Indult prendra effet au jour fixé par le Supérieur Général et son Conseil, toutes prescriptions y relatives étant observées.

Nonobstant toutes choses contraires,

Donné à Rome, le 23 avril 1963.

J. B. VERDELLI, Sub

ELECTIONS

 Le Conseil Général a élu :

 

a) Dans la séance du 25 juin 1963 :

Pour un premier triennat :

C. F. THEOPHANE-LEON, Provincial du Sud-Est

b) Dans la séance du 1ierjuillet 1963 :

Pour un deuxième triennat :

C. F. AIME-LOUIS, Provincial de Desbiens.

C. F. HENRI-LOUIS, Provincial de Lévis

Pour un premier triennat :

C. F. HERBERTO LINO, Provincial de Porto Alegre.

C. F. J'AIME MARIA, Provincial de Caxias do Sul

c) Dans la séance du 18 septembre 1963 :

Pour un premier triennat :

C. F. MIGUEL ANTONIO, Provincial de León

LISTE DES FRERES

dont nous avons appris le décès
depuis la Circulaire du 24 mai 1963 

 

    Nom et âge des Défunts                         Lieu de Décès                      Date du Décès

 

F. Julius  Victor (P. Keegan)           67 P  Glasgow (Ecosse)                     28 avril 1963

F. Marceliano  (M. Olàiz)                 80 S  Glasgow (Ecosse)                     2 mai                          »

F. Teodulfo (G. Tortorici)                 58 P  Mar del Plata (Argentine)          4         »          »

F. Joseph Léonide (FI.. Verloove)   43 P Douala (Cameroun)                   4         »          »

F. Léon Noël. (N Fortin)                   75 S Ste. Anne de Beaupré (Cam)   16        »         »

F. Jules Régis (E. Chambouvet)     87 S  Varennes/s/Allier (France)        18        »          »

F. Le6n Emilio  (L Garcia)               54 P Pasto (Colombie)                       26        »          »

F. Joseph Eubert (F. Lespinasse) 65 S  Rio (Brésil)                                 2 juin               »

F. Louis Henri (L Plan)                     89 P St. Paul.-3-Châteaux (France)  8         »          »

F. Diéron Marius (Joh. Ahn)            78 S Viamão (Brésil)                          10        »          »

F. Marie Paul (P. Murard)                23 T Jbeil, (Liban)                                10        »          »

F. Joseph Rodriguez (L. Chalon)    81 S  Varennes/s/Allier (France)        12        »          »

F. Christopher Mary (L. Martin)       65 P  Mount Gambier (Australiej        26        »          »

F. Pierre Martial (Bancharel)           83 S  Antsirabé  (Madagascar)          11 juil.                          »

F. Alberto Atanasio (N. Tessadri)   41 P  Pergamino (Argentine)             14        »          »

F. Aloysius (S. Michel)                     81 S St.. Paul/3/Châteaux (France)   20        »          »

F. Claudius Maria (M. Hsu Je Chao) 62 S Hongkong (Hongkong)           21        »          »         

F. Emile Bernard (PhiL Fecteau)   74 S Tyngsboro (Etats-Unis)              27        »          »         

F. Constantin, Ernest (J. Labbé)     81 S Tyngsboro (Etats-Unis               3         »          »

F. Florianus (A. Grand)                    83 P St. Genis-Laval (France)           9         »          »

F. Ignacio Gabriel (F. Gonzàlez)         63 S  Santiago (Chili)                          9         »          »

F. Philip Gihnary (A. Lacroix)          24 T Tyngsboro (Etats-Unis)              12        »          »

F. Joseph Gervais (F. X. Prince)      84 S      Iberville (Canada)                      14        »          »

F. Zotique François (F. Amblard)   85 S St. Genis/Laval (France)            17        »          »

F. Manuel Edwin (J. Hall)                 76 S Auckland (N. Zélande)               21        »          »

F. Sebastiani (G. Dialey)                 67 S  Cordoba Argentine)                  26        »          »

F. Heraclius (A. Maurin)                   80 S N.D. de Lacabane (France)      29        »          »

F. Cypriano (L. Rech)                       55 P Santa Maria (Brésil)                   29        »          »

F. Adrien (J. Dély)                            79 P Mont St. Guibert (Belgique)       6 sept.            »

F. Marie Nizier (L. Morel)                 84 S St. Genis-Laval. (France)          12        »          »

F. Bernard Viricel                             18 T  Genis-Laval (France)                22        »          »

F. Camarin (B. Valette)                    87 S  St. Paul-3-Chateaux. (France)22        »          »

F. Louis Léon (Langevin)                 89 S Château-Richer (Canada)         23        »          »

F. Siméon (T. Marti)                         55 S Cajamarca (Pérou)                    24        »          »

F. Fernand joseph (A. Chalendar) 74 P N.D. de l'Hermitage (France)    26        »          »

F. Louis Noël (L Bernard)                84 S Beaucamps (France)                 27        »          »

F. Antonio Benigno (G. Manuello) 69 P Lujan (Argentine))                       27        »          »

F. Léopold Joseph (L. Bourdais)    76 S Port Elizabeth (Afr. du Sud)       28        »          »

F. Hugolinus (L. Hugon)                   77 S Bourg de Péage (France) (tif    2 oct.              »

F. Aloys (A. Behr)                             77 S  Viamao (Brésil)                           2         »          »

F. Ernest Béatrix (E. Bergeron)      78 S Iberville (Canada)                       7         »          »

F. Colmanus (Eug. Spurway)          46 P Gisborne (N. Zélande)               8         »          »

F. Joseph Zéphirin (J. Jacquin)      77 S St. Martin la Plaine (France)     13        »          »

F. Hérac1e (P, Bataille)                   77 S  Mende (France)                         28        »          »

F. Marie Noël (N. Morin)                  65 S  St. Hyacinthe (Canada)             1 nov.             »

F. Arcadio (B. Ant6n)                       68 S  Barcelona (Espagne)                3         »          »

F. Louis Prosper (P. Blanc)             66 S  Varennes/s/Allier (France)       9         »          »

 

Soit 6.816 depuis le commencement de l'Institut.

 

La présente Circulaire sera lue en communauté à l'heure ordinaire de la lecture spirituelle. Recevez, mes bien chers Frères, la nouvelle  assurance du religieux attachement avec lequel je suis, en J. M. J.

 Votre très humble et tout dévoué serviteur.

CHARLES-RAPHAËL, Supérieur Général.

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