Circulaires 360

Charles-Raphaël

1964-12-08

CHOIX DES SUPERIEURS :
1. Difficultés du choix. A. Les supérieurs dans notre vie mariste. B. Quelques qualités d'un supérieur mariste. C. Une préparation est-elle possible chez nous?
2. Préparation aux charges. A. Préparation intellectuelle. B. Préparation morale et religieuse. C. Expérience directe.
3. Acceptation d'une charge. A. Comme Frère Mariste. B. Acceptation courageuse
C. Faire son programme de travail.
Conclusion .
Vœux pour 1965 .
Réflexions sur un anniversaire
Directives du Pape Paul VI pour la vie religieuse. A. Vocation des fidèles à la sainteté et vocation religieuse. B. Structure et gouvernement des Instituts religieux.
Conclusion. Vie religieuse, école de liberté. Division de Province
Elections
Liste des défunts

360

V. J. M. J.

 Fête de l'Immaculée Conception de la B. V. Marie

Rome, le 8 décembre 1964 

Conservation et accroissement de l'Institut 

CHOIX DES SUPÉRIEURS 

                    MES BIEN CHERS FRÈRES,

 Dans le passé, nos Circulaires se sont toujours présentées comme des « lettres de famille », et non comme des monographies complètes sur un thème déterminé. C'est ce qui explique la très grande variété des sujets abordés, ainsi que la simplicité et la franchise fraternelle qui les caractérisent habituellement. Nous avons voulu maintenir cette tradition.

C'est elle qui nous donne aujourd'hui le courage de faire quelques considérations sur une question assurément fort délicate : le bon choix des supérieurs dans notre Institut. Nous resterons ainsi dans la ligne des trois dernières Circulaires. Les deux Circulaires de 1963 (357. 358) renferment une analyse de l'article 206 de nos Constitutions : Quels sont les dangers qui pourraient compromettre le développement ou même l'existence de notre Congrégation, et comment les éviter ? Celle du 24 mai dernier, sous le titre général : « Bonne formation des Frères », présente un commentaire des paragraphes 4, 5 et 9 de l'article 207 des Constitutions. Tout cet article est consacré aux moyens « positifs » de conserver et d'accroître l'Institut. Or, le paragraphe 6 signale, en termes très forts, l'importance capitale du bon choix des supérieurs pour arriver à cet heureux résultat :

« Qu'on demande sans cesse et qu'on pourvoie par tous les moyens possibles à ce que le Frère Supérieur Général, les Frères Assistants Généraux et tous ceux qui sont en charge, possèdent les vertus et les qualités qui leur conviennent ; car l'expérience de tous les siècles a prouvé que les désordres des Instituts religieux ont ordinairement leur source dans les défauts des Supérieurs» (Constitutions, 207, 6°).

Le rôle important des supérieurs dans la bonne marche de l'Eglise, d'un Institut religieux ou tout simplement d'une communauté, et, par conséquent, leur grave responsabilité, sont admis par tout le monde. Il semble superflu de revenir sur cette vérité d'expérience.

D'autre part, dans notre Institut, presque tous les Frères peuvent être appelés à « diriger » d'autres hommes. En ouvrant le chapitre XVII de la deuxième partie de la « Vie » de notre Bienheureux Fondateur (avec quel soin il formait les Frères Directeurs), le F. Jean-Baptiste le note explicitement : « La tâche du pieux Fondateur eût été plus facile s'il n'avait eu à former que de simples religieux ; mais, par la nature de leur Institut et du but de leur vocation, les Frères devant presque tous être supérieurs, parce qu'ils ont des confrères ou des enfants à surveiller, à diriger et à élever, il fallait leur inspirer et leur donner les vertus nécessaires pour bien remplir ce ministère aussi sublime que difficile » (page 502).

La recommandation instante de nos Constitutions ne s'adresse donc pas à une petite minorité de Frères. Elle concerne d'abord « tous ceux qui sont en charge » actuellement, ainsi que tous ceux qui, tôt ou tard, pourront l'être. Il faut ajouter qu'elle doit préoccuper tous les membres de l'Institut. D'une manière ou d'une autre, tous sont responsables du choix des supérieurs. C'est ce que nous nous proposons de mieux mettre en lumière.

Nous verrons brièvement :

1. Quelles sont les difficultés spéciales du choix des supérieurs dans notre Institut.

2. Comment il faut entendre la préparation possible aux charges.

3. Comment il convient d'accueillir les « postes de responsabilité » que l'obéissance nous confie.

 I.   DIFFICULTÉS DU CHOIX.

 Le choix de vrais hommes de gouvernement, c'est-à-dire d'hommes qui, disposant de l'autorité, exercent sur leur « groupe » une influence heureuse et féconde, a toujours été considéré comme difficile et délicat. On ne l'a jamais envisagé comme un simple problème de mathématiques à résoudre.

D'autre part, c'est plus que jamais une question essentielle dans toutes les grandes organisations humaines. On constate partout que la plus grande difficulté de notre époque est de « former des hommes ». Malgré les gros efforts déjà faits dans ce sens, en plusieurs pays surtout, on ne cesse d'affirmer qu'il est plus difficile de trouver des « chefs » que des capitaux.

Il ne peut en être autrement dans notre Institut, bien que les exigences de ce choix n'y soient pas tout à. fait les mêmes que dans le monde. Dans l'ensemble, ce choix y est plus facile : tous les Frères ont le même idéal ; tous se sont donnés loyalement et totalement au Christ, dans cette famille religieuse qui les a reçus. Les mots « autorité, obéissance, discipline » y ont un sens particulier qui ne rebute pas de prime abord, comme il arrive trop souvent dans la vie ordinaire.

Toutefois, notre intense vie de famille qui nous unit si fortement les uns aux autres, peut rendre le choix des supérieurs particulièrement délicat. D'autre part, ce même esprit de famille porte les Frères à vouloir des supérieurs qui possèdent pleinement cet esprit. Enfin, comme l'acquisition de toutes les qualités d'un bon supérieur demande normalement du temps et de l'entraînement, n'y aurait-il pas lieu de penser à une préparation aux divers « postes de responsabilité » dans notre Institut ?

Trois considérations nous retiendront donc pour commencer :

A) Quelles est la « situation » d'un supérieur mariste par rapport à ses Frères ?

B) Quelles sont les qualités qu'on s'attend à trouver dans un supérieur mariste ?

C) Est-il possible, dans notre Institut, d'envisager une préparation systématique et directe aux différentes charges ?

 A) Les supérieurs dans notre vie mariste.

 1. L'article 287 de nos Constitutions se rapporte à tous les supérieurs de l'Institut ; il concerne « tous ceux qui sont en charge ».

Dans la vie religieuse, personne ne doit aspirer à la « supériorité ». Le Frère qui est actuellement « supérieur » n'a pas voulu sa charge, ne l'a pas désirée. Il n'a pas fait « les démarches nécessaires » pour y accéder. Il l'a simplement acceptée. On la lui a imposée, parfois sans tenir compte de ses objections ou de sa très grande répugnance à l'accepter. Qui la lui a imposée ? La Congrégation, l'Eglise, Dieu même… C'est pour cette raison suprême que le religieux s'est finalement incliné.

Son mérite initial, comme supérieur, a donc. été un grand acte d'obéissance. Ce mérite est réel : il importe souvent de se le redire à soi-même, quand on doit commander et qu'on rencontre, de ce fait, de sérieuses difficultés. Il faut encore insister sur cette conception juste de la « supériorité », chaque fois qu'il s'agit de faire accepter à un religieux une charge qui lui inspire de réelles craintes.

Ce mérite est continu. Tout supérieur doit renouveler fréquemment, avec loyauté et courage, le don total de soi-même à Dieu, à l'Eglise et à sa famille religieuse. Il doit savoir « tenir jusqu'au bout », c'est-à-dire aussi longtemps que l'obéissance lui demandera de rester à son poste. « Ni plus longtemps, ni moins longtemps », telle doit être sa devise.

Toute nomination de supérieur donne de l'autorité, entraîne donc une responsabilité accrue, et, par là, introduit de nouveaux sacrifices dans une vie de religieux. C'est précisément devant la perspective de ces nouvelles « croix » que certains reculent instinctivement. Pourtant, c'est par cette voie que la volonté de Dieu peut leur demander de se sanctifier. Et c'est encore par ces mêmes croix que la volonté divine peut leur demander de travailler efficacement à la sanctification des autres.

 2. Ajoutons que le fait d'être actuellement « supérieur » ne doit jamais couper un Frère des autres membres de sa famille religieuse. Il n'est pas devenu « plus » que les autres. Sa nomination lui a conféré, momentanément, une certaine autorité sur d'autres, autorité d'ailleurs strictement limitée par les Constitutions et par les Règles. Lui-même doit pouvoir continuer de bénéficier des multiples avantages de la véritable vie de famille, tout comme les autres. On a parfois trop insisté sur la dignité du supérieur au détriment de la fraternité, qui doit rester totalement intacte chez nous. Un supérieur « isolé » serait bien à plaindre. Et quel bien réel pourrait-il faire autour de lui ?

Il faut reconnaître toutefois que cette conception « familiale » de l'autorité risque de rendre son exercice assez délicat, et parfois très pénible. Celui qui est investi de l'autorité est toujours avec les siens. Il mène intégralement leur vie ; il prend part à toutes leurs activités. Extérieurement, il n'y a absolument rien qui le distingue des autres. De ce fait, il peut être exposé à bien des critiques. On voit si facilement les faiblesses, les limites et les défauts d'un supérieur qui vit toujours sous nos regards. Et l'on est tellement tenté d'en parler ensuite avec d'autres, surtout quand on n'est pas entièrement satisfait d'une décision qui a été prise par l'autorité…

En règle générale, les intentions des critiqueurs ne sont pas mauvaises. On ne veut pas faire du tort à un supérieur, mais on discute trop librement sa conduite et ses actes. Qu'on le veuille ou non, on finit par compromettre, particulièrement chez les plus jeunes confrères, le sens même de l'obéissance due à tous les supérieurs.

 3. Si paradoxal que cela puisse paraître à quelques-uns, on peut affirmer que plus d'un Frère recule instinctivement devant toute charge dans sa communauté, tout simplement parce qu'il appréhende de commander à des Frères dont il connaît si bien les sentiments et dont il est à même de prévoir exactement les réactions occasionnelles. Tous. nous aimons nos confrères, sincèrement et virilement, mais nous n'aimons pas du tout d'être «jugés» sévèrement par eux, ou d'entrer en conflit avec « ceux de la famille »…

En tant qu'éducateurs professionnels, nous savons fort bien, et nous avons suffisamment expérimenté, qu'il est pratiquement impossible de faire du bien à nos élèves, s'ils ne nous aiment pas, dans le plus noble sens de ce mot « aimer ». II ne peut en être autrement dans une communauté, dans une Province, dans l'ensemble de la grande famille de l'Institut. L'autorité « sans amour » peut se concevoir dans le monde, où elle arrive à s'exercer par la force ou par la ruse. Elle est totalement incompatible avec notre idéal mariste et avec notre genre de vie.

Il importe donc essentiellement que l'on habitue nos jeunes aspirants à une conception juste de l'obéissance religieuse. Un religieux qui n'aime pas tous ses confrères, tels qu'ils sont, ne pourra jamais devenir un bon supérieur. Et un religieux qui n'est pas disposé à voir dans son supérieur immédiat, tout d'abord, un « Frère », et cela malgré toutes les divergences de vues ou les « permissions refusées », ne sera jamais un bon Frère Mariste.

 4. C'est surtout dans les débuts d'un nouveau supérieur qu'une grande délicatesse fraternelle doit se manifester à son égard, de la part de tous, spécialement de la part des Frères anciens. Un Frère Directeur d'une grande maison nous confiait récemment tout ce qu'il devait à l'ancien directeur, redevenu simple membre de la communauté. La disponibilité totale, ainsi que la soumission simple et cordiale de l'ancien supérieur avait grandement contribué à créer ce climat favorable à l'obéissance, climat que tous les nouveaux supérieurs devraient rencontrer dans leurs débuts.

Faut-il ajouter qu'il n'en est pas toujours ainsi ? Combien de magnifiques « vocations de supérieur » ont été des fleurs qui n'ont jamais donné leurs fruits, parce que le vent glacial de l'indifférence ou de l'incompréhension les avait accueillies dès leur premier essai de gouvernement !

Par notre comportement habituel en communauté, nous sommes tous responsables du bon choix des supérieurs. On peut l'oublier facilement…

 B) Quelques qualités d'un supérieur mariste.

 Il n'entre nullement dans nos intentions d'analyser toutes les qualités, naturelles et surnaturelles, qu'on doit souhaiter à ceux qui détiennent l'autorité dans notre Institut. Grâce à Dieu, les traités sur le gouvernement des communautés religieuses ne manquent pas, et ce point y est toujours longuement étudié. D'autre part, notre vieux manuel « Le bon supérieur » est loin d'être un livre démodé ou dépassé ; il demande seulement d'être bien lu, bien compris et sagement adapté. Or, il contient là-dessus des observations à la fois judicieuses et pratiques. Enfin, de la lecture attentive de nos Constitutions, des Règles Communes et des Règles du Gouvernement, on peut tirer un « portrait » du supérieur mariste idéal, qui est de nature à favoriser grandement les sentiments d'humilité de ceux qui détiennent quelque autorité chez nous…

Très simplement, laissant de côté l'aspect strictement surnaturel de la vie d'un supérieur, nous voudrions dire ce que les Frères attendent de celui qui doit être leur chef et leur guide.

1. En premier lieu, tout supérieur doit être un véritable enfant de la famille, fier de sa vocation de Frère Mariste, très attaché à l'idéal et à l'esprit de son Institut. C'est cet esprit qui orientera toutes ses activités, qui inspirera tous ses actes, qui lui permettra, le cas échéant. de juger de l'opportunité de certaines adaptations. De nos jours, on revient très souvent sur la nécessité de l'adaptation, de l'« aggiornamento », non seulement sur le terrain de l'apostolat en général, mais encore dans certains secteurs de la vie religieuse et de la vie de communauté. Comment le supérieur, qui ne posséderait qu'imparfaitement l'esprit de son Institut, pourrait-il faire des adaptations opportunes et fécondes ?

Il va de soi que la connaissance et l'amour de cet esprit ne suffisent pas pour faire un bon supérieur. C'est pourtant par là qu'il convient de commencer la série des qualités requises d'un supérieur mariste. Sans cet esprit, en effet, on pourra entreprendre de grandes choses qui attirent l'attention, on pourra faire de « grands pas », mais quelquefois au risque de s'engager hors de la bonne voie.

2. Il doit être disposé à se donner entièrement à sa tâche de supérieur, à se sacrifier pour ses Frères et pour tous ceux qui lui sont confiés. La fidélité au devoir d'état, dans son sens le plus noble et le plus riche, doit être l'une des résolutions fondamentales d'un supérieur. Celui qui entend se réserver, pour lui tout seul, de larges zones dans son programme et dans son horaire de travail, ne pourra jamais devenir un bon supérieur mariste.

Un supérieur qui se donne totalement à ses fonctions, qui appartient vraiment à ses Frères, peut avoir ses défauts d'homme, ses limites comme chef et comme guide. Il peut être parfois agaçant, et, par là, il ne sera pas toujours très aimé. Mais il sera respecté et suivi. Qu'on le veuille ou non, tous les religieux veulent avoir comme supérieur un homme disponible, dont le temps et l'activité leur appartiennent.

 3. Plus que jamais, le supérieur sera un grand travailleur, ne fût-ce que pour acquérir et maintenir une compétence suffisante dans les multiples questions qui sont de son ressort. Comme nous le verrons encore plus loin, chez nous, aucun supérieur ne peut débuter, possédant d'emblée toute la compétence requise par ses fonctions. Il devra l'acquérir progressivement. Et il pourra l'acquérir, assez vite même, s'il joint toujours l'étude à la pratique. Il ne devra jamais reculer devant l'effort requis ; il saura économiser son temps et supprimer toute dispersion de forces et toutes sortes de « bagatelles ».

Ii est significatif de constater que les problèmes de gouvernement, même les plus compliqués, se simplifient rapidement, et parfois étonnamment, une fois qu'on se décide à les étudier « à fond »… Ils sont rares de nos jours, affirment de bons observateurs, ceux qui sont encore capables d'étudier chaque question « à fond », et qui ne se réfugient pas derrière l'éternel manque de temps pour escamoter les problèmes et les difficultés, et pour échapper à leurs propres responsabilités.

La première conséquence de l'esprit de travail d'un supérieur, c'est que la plupart des siens, parfois même tous, finissent par agir comme lui. Dans ces conditions, la collaboration fraternelle devient à la fois facile et vraiment féconde. Les temps actuels sont tellement exigeants, répète-t-on. On n'arrive plus à les suivre. On est débordé de tous les côtés… Le supérieur travailleur trouve le moyen de simplifier beaucoup de choses, de suivre la marche du temps sans toutefois se laisser dominer par lui. Plus que jamais, nous avons besoin de Frères compétents, et donc de supérieurs travailleurs.

 4. Parmi les qualités sur lesquelles on n'insiste peut-être pas assez, il convient de citer le calme, la patience, l'équilibre, le sens de la mesure en toutes choses… On pourrait s'attarder à distinguer les nuances qui les séparent ; ce n'est pas notre intention. Une même idée générale apparaît dans toutes : il faut savoir attendre avant de prononcer un jugement définitif ; sans une raison grave, il ne faut pas brusquer une âme qui souffre ; il faut compter sur la formidable puissance de l'effort indéfiniment répété, de la parole toujours aimable et accueillante ; et surtout, il ne faut jamais oublier que la grâce, à notre insu, opère silencieusement et efficacement dans les âmes. Mais il faut attendre « activement », en faisant quelque chose, en faisant tout ce qui est actuellement en notre pouvoir.

Il n'est que trop facile de confondre la fermeté avec la rigidité, quand ce n'est pas avec l'incompréhension ou avec l'étroitesse d'esprit. Le supérieur calme et pondéré n'entend pas imposer, coûte que coûte, son propre point de vue. Il s'efforce de respecter la liberté, la volonté, l'initiative de tous les siens, même des plus jeunes, dès que son devoir de « responsable » ne lui impose pas d'agir autrement. Et, même en ce dernier cas, il saura encore le faire avec tact et discrétion. Il admet, sans discussion, que tous ne peuvent pas et ne doivent pas être exactement comme lui. Si un large esprit de compréhension est nécessaire à un vrai éducateur, il l'est encore davantage à un supérieur religieux.

 5. Enfin, ajoutons, qu'un supérieur, une fois qu'il a loyalement accepté sa charge, doit en assumer toutes les responsabilités et toutes les «misères » avec une âme résolue ; sans se plaindre, sans revenir constamment sur le passé pour regretter des temps meilleurs. Dieu doit aimer tout particulièrement le pauvre supérieur qui connaît ses propres insuffisances, mais qui donne avec joie tout ce qu'il possède…

Par là, le supérieur contribuera à maintenir autour de lui une atmosphère de calme et de sérénité, qui facilite la ferveur de la vie religieuse et le travail apostolique de chaque membre de sa communauté. Qu'on veuille relire quelques biographies de Frères qui ont connu de grandes responsabilités dans notre famille, qu'on se rappelle le rayonnement de tel ou tel directeur qu'on a particulièrement connu, et l'on saisira mieux la réalité de ce que nous venons de dire.

Dès l'instant où un Frère accepte résolument sa « croix » de supérieur, il peut être sûr de faire du bien à ceux que la Providence lui confie. A combien d'âmes, trop inquiètes devant les responsabilités d'une charge qui leur est offerte, on voudrait pouvoir redire, avec une fraternelle insistance : « Hommes de peu de foi », pourquoi tant douter de Dieu et de vos Frères ?

 C) Une préparation est-elle possible chez nous ?

 La perspective d'assumer de nouvelles responsabilités effraie souvent les Frères à qui l'on propose une charge. Trois objections reviennent souvent : « Je ne suis nullement préparé à cette charge. Je n'ai pas du tout les qualités voulues. Je ne suis pas fait pour commander aux autres ». La première objection domine ; les deux autres peuvent d'ailleurs s'y rattacher tout naturellement.

C'est ce qui a porté quelques-uns à proposer des écoles de chefs, des écoles de « cadres »… On devrait peut-être dire plus modestement, et sans doute aussi plus exactement, des centres de formation pour futurs supérieurs. On a même envisagé deux sortes de centres : des centres généraux, convenant à plusieurs Instituts religieux, et des centres particuliers, propres à une famille religieuse déterminée. Qu'en est-il au juste de la valeur de ces institutions pour le point spécial que nous examinons ?

Il existe déjà quelques centres « généraux », par exemple pour la formation de maîtres de novices. D'autre part, on multiplie, un peu dans tous les pays, les réunions pour supérieurs, dans lesquelles on aborde des thèmes d'étude, très utiles pour l'information de ceux qui y prennent part. Mais les limites de cette formation générale sont nettement tracées. On doit habituellement se cantonner dans les questions théoriques, même quand on se propose d'étudier quelques cas concrets.

Les centres particuliers, à l'intérieur d'une seule famille religieuse, permettent naturellement d'établir un programme de travail plus pratique, plus riche d'applications immédiates que les précédents. Chez nous, il n'existe aucun centre de formation. dont le but premier serait de former des « cadres ». On dit parfois, et c'est certainement exact, qu'une période de second noviciat bien faite, qu'une année de spiritualité, qu'un cours supérieur de sciences religieuses, peuvent mieux disposer un Frère à assumer la direction d'une communauté, d'un noviciat ou de toute autre maison de formation. Mais il importe de noter que, même dans ces cas, on ne peut jamais aller au-delà d'une certaine préparation d'ordre intellectuel.

Observons encore qu'on n'a jamais rien prévu pour la formation des supérieurs majeurs dans un Institut. Il y a bien des charges dans l'Eglise (comme dans la vie publique d'ailleurs, et dans toutes les grandes institutions humaines), où l'on n'arrive « plus ou moins préparé », que si l'on s'est astreint, pendant de longues années, à une forte discipline personnelle, qui va bien plus loin que l'acquisition de la compétence requise par les fonctions à exercer.

En dernière analyse, dans la préparation lointaine des cadres de toute grande institution, il y aura toujours une étape de la formation qu'on ne pourra pas intégrer dans une « école ». C'est là, avant tout, que se trouvera toujours la très grande difficulté du choix des supérieurs, plus encore dans la vie religieuse qu'ailleurs, parce qu'ici les exigences sont plus délicates et plus grandes. Comment pourrait-on alors envisager cette préparation progressive aux responsabilités ? C'est ce que nous nous proposons d'examiner rapidement.

 Il. PRÉPARATION AUX CHARGES.

 Puisqu'une préparation générale des supérieurs de « demain » est nécessaire, il faut qu'on s'en préoccupe dans tout l'Institut, et il convient qu'elle se fasse effectivement, de la meilleure manière possible. On peut la considérer sous trois aspects, qu'il importe de bien distinguer, pour ne pas s'illusionner sur la réalité même de cette préparation, car, trop souvent, on ne tient compte que du premier.

Ce sont :

A. La science requise, la compétence qu'on est en droit d'attendre d'un homme « en charge » ; plus clairement, une connaissance suffisante des multiples questions qui peuvent se présenter à un supérieur dans l'exercice de ses fonctions.

B. Une bonne formation morale et religieuse, en tenant compte de l'esprit propre de l'Institut et de son genre de vie et d'apostolat. Cette exigence est plus importante que la première, mais moins facile à préciser, et surtout moins facile à contrôler.

C. Enfin, l'expérience progressive du « Métier » de supérieur et de l'art de gouverner. Chez nous, c'est probablement l'aspect le plus important, parce que le plus pratique, et c'est trop souvent le plus négligé.

 A. Préparation intellectuelle.

 1. Toutes les tâches humaines requièrent des connaissances et des aptitudes spéciales ; toutes ont leur côté professionnel, qui suppose une compétence au moins suffisante. Cette science professionnelle est toujours utile à un supérieur, et parfois strictement indispensable. Elle est diverse, selon la nature de la charge. Un Frère Maître des novices, par exemple, doit avoir un autre genre de compétence qu'un Frère Directeur d'école.

Dès le point de départ, un minimum de connaissances est indispensable. C'est une règle générale dans la vie. Trop peu de savoir, même quand il s'y joint de l'esprit pratique et du bon sens, n'a jamais suffi pour assurer un bon début à un supérieur, et, aujourd'hui, suffit moins que jamais. Toutefois, il ne faut pas devenir utopique en plaçant trop haut ces exigences initiales.

Tout supérieur sérieux sait fort bien qu'il doit continuer obstinément de travailler pour se rendre plus capable d'exercer ses fonctions. Or, cela est toujours possible, dès qu'on a de la volonté, de l'ordre, de la méthode et surtout de la constance. Quand un Frère a conscience de sa responsabilité spéciale, il commence par se dresser un bon plan de travail, bien adapté à sa situation ; il lui reste ensuite à y tenir fermement. Avec un temps « libre » très limité chaque jour, il peut acquérir rapidement une compétence largement suffisante dans le domaine de ses activités normales. Ce temps libre personnel, on doit pouvoir se l'assurer, ne fût-ce qu'en retranchant impitoyablement de son programme tous les entretiens inutiles.

Mais on ne peut demander d'un supérieur qu'il soit compétent dans trop de domaines. Sa charge même lui impose des limites très nettes, soit pour le temps disponible, soit pour le genre de ses études personnelles. Parfois même, d'excellents travailleurs intellectuels, devenus supérieurs dans notre Institut, ont dû contrôler énergiquement leur grand désir de continuer leurs études. Ils se rendaient compte que le fait de consacrer trop de temps à la « théorie » les détournait de leur devoir essentiel. Qu'on nous entende bien. Un supérieur n'en sait jamais trop, si son savoir « colle » aux réalités de la vie, si ce savoir peut effectivement l'orienter dans son gouvernement, dans les solutions pratiques que les Frères attendent de lui. Encore une fois, personne ne peut rêver de tout savoir. Au Concile, de très grands Evêques savent consulter régulièrement leurs experts. De même, chez nous, un « responsable » sérieux n'hésite pas à consulter, dans les cas difficiles ou embarrassants, soit ses propres supérieurs, soit même un confrère mieux informé.

Car tout supérieur doit être un homme d'action. Un théoricien pur court le risque de compliquer bien des questions. Il les étudie et les analyse, parfois indéfiniment, retardant toujours la solution pratique que tout le monde attend. Dans la vie de tous les jours, il s'agit très souvent de passer résolument à l'action, et non de discuter et de tergiverser. Car les jours passent vite, et le temps qui fuit peut être décisif pour l'avenir d'une œuvre.

Un supérieur s'efforce donc d'être bien au courant des problèmes qui se rapportent à toutes ses fonctions. Mais il n'oubliera jamais qu'il est aussi un homme d'action qui sait, par expérience personnelle, que « le mieux est parfois l'ennemi du bien ». C'est dans l'harmonieuse fusion de ces deux tendances, théorique et pratique, qu'il faut placer l'idéal du supérieur compétent.

 2. Osons donner quelques exemples de déviations possibles, une fois qu'on se perd dans des points de vue trop théoriques.

Dans l'organisation des maisons de formation d'une Province, certains posent tellement de conditions « préalables », soit matérielles, soit intellectuelles, que les responsables, qui voudraient en tenir compte, n'arriveraient jamais à équiper leur secteur en maisons adéquates. La jeunesse moderne est exigeante, dit-on pour justifier certaines revendications. C'est très vrai, mais pas toujours dans la direction qu'envisagent les adultes. Heureusement d'ailleurs ! C'est ainsi que nos candidats sérieux, nos jeunes Frères, trouvent absolument normal qu'un minimum d'austérité existe dans la construction et dans l'aménagement de leurs maisons, comme dans les exigences du règlement pour la discipline et le travail…

De même, dans l'organisation des études d'une Province déterminée, on ne peut négliger de tenir compte de la situation générale des écoles et des oeuvres dans le secteur ; on doit connaître le niveau moyen de formation des candidats qui se présentent habituellement pour l'admission, ainsi que leurs possibilités réelles pour les études… Une erreur de base dans cette organisation pratique pourrait entraîner, comme conséquences, de pénibles désillusions.

Il faut créer de bonnes bibliothèques dans nos communautés et équiper des laboratoires vraiment pratiques. L'équipement technique a pris, en effet, une importance spéciale dans toute école qui veut progresser. On parle souvent de la nécessité d'une bonne information de nos Frères sur les problèmes que pose l'emploi du cinéma et de la télévision, sur les différentes oeuvres parascolaires et postscolaires, surtout en certains pays. Un supérieur doit être suffisamment averti de ces problèmes du jour pour pouvoir intervenir en connaissance de cause, mais il doit aussi rester « pratique » et savoir écarter résolument tout ce qui ne convient pas dans « son » secteur.

L'esprit pratique du supérieur ne lui fera pas accepter de perpétuels changements de système, ni dans le domaine de la vie religieuse, ni dans celui de l'enseignement et de l'éducation. Il sait que toute transformation n'est pas nécessairement une amélioration, que l'évolution n'est pas toujours synonyme de progression. Certains esprits veulent toujours innover ou transformer, introduire de nouvelles méthodes en tout et partout. Mais quand l'expérience n'a pas donné les résultats merveilleux qu'on en attendait, la contre-épreuve vient habituellement trop tard. Elle ne pourra servir que pour une autre génération… Un minimum de stabilité reste indispensable dans l'organisation de notre vie mariste, comme dans notre apostolat auprès de la jeunesse.

En tout domaine, il importe de garder le juste milieu, de maintenir un sage équilibre entre théorie et pratique. Une expérience constante a montré les heureux résultats de cette attitude, aussi bien pour la bonne marche de nos communautés que pour le succès de notre action apostolique.

Suivons donc avec attention et avec un vif intérêt tout ce qui se tente ailleurs, dans des milieux où l'expérience peut se faire sans trop de risques. Sachons introduire, à bon escient, des réformes qui paraissent vraiment utiles et pratiques. N'oublions jamais nos responsabilités de supérieurs et d'éducateurs. Un élève ne peut jamais être envisagé comme un « cobaye » ou une matière à tests ; un membre de notre famille religieuse beaucoup moins encore, fût-ce le benjamin de nos juvénistes. Comme éducateurs d'abord, comme supérieurs ensuite, ayons toujours un respect infini pour les âmes qui nous sont confiées.

 3. La compétence ou le savoir professionnel qu'on souhaite à tout supérieur n'est donc pas une exigence « impossible ». Elle suppose, pendant la jeunesse, une sérieuse et solide formation, qui initie nos jeunes à tous les aspects essentiels de notre vie de Frère Mariste. Elle suppose ensuite le travail méthodique des premières années de vie active. Elle demande finalement, quand une charge nous est confiée, que nous n'hésitions pas devant l'effort d'information que celle-ci entraîne avec soi. Cette étude constante des « choses de notre métier » sera résolument orientée vers la pratique.

 B. Préparation morale et religieuse.

 Pour éviter tout malentendu, nous dirons que nous n'étudierons pas ici les vertus proprement religieuses et maristes qui sont à la base de la vie d'un Frère, mais plutôt ces qualités et vertus, naturelles et surnaturelles, qu'on s'attend à voir dans un supérieur. Celui-ci, en effet, doit avoir à cœur de développer en soi des qualités humaines assez peu communes.

 1. Il doit avoir l'habitude, ou, du moins, s'efforcer de contracter l'habitude de réfléchir sérieusement avant d'agir, de méditer son plan d'action et de gouvernement. Car ce plan ne peut guère s'improviser. « Ce n'est pas une improvisation qui me dicte mes plans, mais une profonde méditation », aurait dit Napoléon. Les impulsifs trop accentués ne conviennent pas pour certaines fonctions. Il ne faut toutefois pas les confondre avec ces natures fortes et énergiques qui savent aborder les difficultés sans trop d'hésitations, sans délibération apparente, mais qui n'agissent pourtant jamais à la légère. Leurs décisions sont rapides, mais elles ne sont pas improvisées ; elles répondent à une ligne de conduite qui a été, au préalable, mûrement étudiée. « Ma manière de faire tient en trois mots, nous disait jadis un excellent directeur : simplicité, rapidité, efficacité ». Nous pouvons ajouter que cette manière de faire était toujours imprégnée d'un authentique esprit surnaturel.

 2. Un supérieur ne doit jamais s'étonner de rencontrer des oppositions, des résistances, des incompréhensions, des difficultés qui peuvent paraître parfois insurmontables. Les âmes fermes et courageuses estiment que les difficultés sont choses normales dans une vie d'homme. Et les âmes vraiment chrétiennes pensent que ces mêmes difficultés, toujours renaissantes, sont des croix qu'il convient d'accueillir en esprit de foi et avec fermeté, et même avec respect et amour, parce que ces croix les rapprochent davantage de leur divin Maître.

 3. Un supérieur sait accepter calmement des événements contraires, des échecs plus ou moins douloureusement ressentis. Il ne s'alarme pas inutilement. En s'énervant trop facilement lui-même, il risquerait de troubler les siens. Dans un climat d'inquiétude permanente, on n'obtient que manque de coordination, instabilité, mauvaise humeur, irritation constante des esprits et danger permanent de découragement.

 4. Ce calme intérieur suppose une forte vie intérieure et l'entraînement de tous les jours. Culture et science n'y suffiront jamais. Un grand soldat l'a bien noté pour ce qui concerne la direction d'une armée : « La science militaire ne suffit pas à faire un chef. Pour n'avoir pas endurci leur volonté. ni formé leur caractère avec autant de soin qu'ils formaient leur cerveau, plusieurs qui, sur les champs de manœuvre, avaient donné de grandes espérances, s'effondrèrent aux réalités du combat ». Dans la vie religieuse, volonté ferme et virilité de caractère ne suffiraient pas encore. Sans une vie intérieure constamment alimentée par la prière et par la pratique sacramentelle, un supérieur religieux ne pourra jamais être fidèle à toutes ses obligations, et il sera souvent exposé à de subtiles tentations de découragement. Les saints sont pouf nous de grands professeurs d'énergie, et ils nous ont fait connaître la source où ils puisaient leur courage et leur dévouement sans limites.

 5. Un supérieur doit certes se fier à ses collaborateurs, surtout aux plus proches. Mais il doit aussi, le cas échéant, aller voir lui-même, s'informer lui-même, intervenir personnellement, avec discrétion et avec tact sans doute, mais aussi avec la fermeté requise, quand il le jugera nécessaire. On peut ne pas douter de la bonne foi des autres. Mais il convient de ne pas ajouter une foi aveugle à la qualité de leurs informations, à la valeur de chacun de leurs jugements sur les hommes et sur les choses.

 6. Un supérieur doit savoir écouter avec attention et sympathie tous ceux qui viennent lui exposer leurs désirs ou leurs problèmes. Mais il veillera à ce que ces entretiens ne déforment pas en lui la vision exacte des choses. Certaines natures surtout doivent se défier d'une sorte d'envoûtement par ceux qui savent bien manier la parole, comme aussi des flatteries, conscientes ou inconscientes de quelques-uns. Il importe encore de se tenir en garde contre la tendance quasi instinctive de donner plus facilement raison au dernier qui vient de nous parler.

 7. On pourrait continuer cette énumération des attitudes dignes d'un supérieur. Est-il possible d'apprendre cela dans une « école » ?

Ces qualités et vertus s'acquièrent et se fortifient essentiellement par la prière et par la méditation, par la lecture sérieuse des vies de bons supérieurs, mais, par-dessus tout, dans le contact intime et suffisamment prolongé avec de bons supérieurs.

a) Sans cesse, l'Eglise rappelle à tous, spécialement à tous les supérieurs, la nécessité absolue de la prière pour bien diriger et gouverner. Le « Veni, sancte Spiritus », ou le « Veni, Creator Spiritus », ouvrent traditionnellement toutes les grandes réunions ecclésiastiques et religieuses. Sans cesse, dans les grandes circonstances surtout, l'Eglise réclame les prières spéciales de tous ses enfants. Les appels ardents des deux derniers Papes pour que tout le monde chrétien prie pour l'heureux succès du Concile nous sont bien connus. Un supérieur doit être rigoureusement fidèle à la grande loi de la prière, telle que ses Règles la lui prescrivent. Il doit la respecter souverainement, lui-même, et il doit la faire respecter. Dans les moments de lassitude ou de désarroi, il saura y joindre ces oraisons jaculatoires qui réconfortent et éclairent sur la voie à suivre.

b) Un supérieur doit savoir méditer souvent sur ses devoirs et sur ses responsabilités personnelles. Il doit le faire tout particulièrement avant toute décision importante. Une méditation, courte mais humble et fervente, est plus efficace que de longues conversations où les plaintes stériles dominent trop souvent. De même, il faut savoir joindre à cette méditation une grande fidélité à un examen de conscience sérieux et très pratique.

c) Un supérieur doit lire volontiers les biographies des Frères qui peuvent le guider et l'orienter dans l'accomplissement de sa charge. En particulier, la Vie de notre Bienheureux Fondateur devrait être un livre de chevet pour tout Frère qui occupe un poste de responsabilité dans une Province ou dans le gouvernement de l'Institut.

d) Mais l'exemple vivant est irremplaçable ; il est d'un « autre pouvoir », a-t-on dit. Il a une influence directe sur nous ; il nous entraîne… Les qualités et les vertus d'un bon supérieur sont comme un héritage, un flambeau qu'on se passe de main en main. Si l'on pouvait parler d'une école de formation pour futurs supérieurs maristes, il faudrait entendre par là, très simplement mais très exactement, le fait de vivre et de travailler avec un Frère qui réalise pleinement tout son programme de supérieur mariste.

En particulier, les premières années de vie active d'un jeune Frère peuvent être décisives pour la lente maturation de ses qualités morales. Quand ces années ne sont pas heureuses, il tend à perdre progressivement son enthousiasme, son dynamisme, sa fraîcheur d'âme, son esprit de conquête, et finalement une grande partie de son idéal. Dès lors, il ne pourra plus être question de lui offrir une charge qui requiert de l'esprit de sacrifice et de la vigueur d'âme.

Par contre, un Frère bien disposé, qui débute dans une communauté régulière, où le Directeur est un supérieur dans le plus noble sens du mot, s'entraîne efficacement, à son insu, à prendre plus tard la relève dans le gouvernement. Faisant allusion à notre système scolaire, en général, Daniel-Rops notait un jour : « Un savant est un individu dont la curiosité native a survécu au cataclysme scolaire ». Oserait-on écrire : « Un bon candidat pour la direction est, chez nous, un jeune Frère dont l'enthousiasme, l'audace juvénile, la fierté de sa vocation de religieux et d'apôtre, ont résisté à l'érosion des exemples moins bons, pour s'affermir et s'épanouir sous l'influence d'un bon guide et maître » ?

 C. L'expérience directe.

 Quelle que soit la préparation lointaine d'un Frère pour une charge possible, il vient un moment où il devra effectivement commencer à « gouverner », où il devra assumer des responsabilités précises. C'est le moment délicat « où le jeune directeur doit quitter les livres pour l'homme. Car l'homme est le livre où tout s'apprend » (cf. revue Christus, cahier 25).

Au début, il y aura presque sûrement des difficultés inattendues, des désillusions, des échecs parfois cuisants pour l'amour-propre. C'est alors qu'il faudra faire appel à tout son esprit de foi. C'est alors que se révélera la vraie trempe d'une âme.

 1. Le jeune supérieur doit être disposé à recommencer vaillamment un effort qui a été improductif. Il ne ruminera pas ses échecs, ses petites misères de supérieur débutant. Il sait que Dieu excelle à tirer le bien du mal, d'une manière bien mystérieuse pour nous, mais très certaine. Il fait donc totalement crédit à Dieu. Il sait aussi profiter des leçons contenues dans tout échec ; ce sont des leçons très amères, mais elles sont précieuses ; elles sont irremplaçables pour une formation en profondeur. Et il ose recommencer, toujours, indéfiniment, sans jamais se lasser, sans laisser le découragement pénétrer subrepticement dans son âme. Tomber et se relever, a-t-on dit, c'est le seul moyen pour l'homme d'avancer sur la route du ciel. Et c'est aussi le seul moyen d'apprendre progressivement le dur « métier » de gouverner les autres…

C'est là une loi générale à laquelle nul d'entre nous ne peut prétendre échapper. Il n'y a pas d'autre moyen d'acquérir l'expérience du gouvernement. L'homme qui n'a pas vraiment souffert dans son âme, comment peut-il trouver, pour ceux qui recourent à lui, les mots qui consolent, encouragent, orientent favorablement ? Il n'y a pas de voie royale pour apprendre les mathématiques », disait jadis grand mathématicien. Il n'y a pas non plus de voie royale ou commode pour se former au gouvernement. Ou, si l'on peut parler de voie royale ici, ce ne pourrait être que la voie royale de la croix (cf. Imitation de Jésus-Christ).

C'est le rôle spécial d'un supérieur majeur. ou, éventuellement, d'un autre confrère expérimenté, qui a « passé par là », de suivre de près ceux qui débutent dans le gouvernement. Comme Frère et ami, il pourra leur donner occasionnellement quelque bon conseil, les guider et les encourager avec tact et affection, les soutenir délicatement dans les moments vraiment difficiles.

 2. Qu'il nous soit permis de placer ici une remarque que nous jugeons importante. En règle générale, il convient de ne pas faire commencer trop tard la prise en charge d'une communauté, par un Frère qui n'a pas encore exercé l'autorité. Parfois, on objecte que tel Frère n'est pas encore assez expérimenté, qu'il est encore trop jeune pour les fonctions prévues. Mais l'expérience du gouvernement ne peut s'acquérir que par l'exercice ; elle ne vient pas en nous par la seule fuite des années.

On oublie parfois que presque tous les supérieurs qui ont rempli convenablement leurs fonctions, qui ont été de « bons » supérieurs, de l'avis de leurs confrères, avaient commencé fort jeunes à « diriger ». Il suffit de relire quelques pages de l'histoire de notre Institut… Mais parfois ceux qui ont acquis avec les années, une riche et solide expérience du gouvernement, sont portés, plus tard, à juger d'autres Frères trop jeunes pour assumer des responsabilités de supérieur. Ils ont oublié leurs propres débuts. L'homme oublie si facilement, même quand il est supérieur.

Il est intéressant de rappeler ici la manière de faire du Bienheureux Fondateur. Son biographe écrit : « Bien que le pieux Fondateur ne mît ordinairement à la tête des maisons que des hommes mûrs, l'âge n'était pas toujours à ses yeux une recommandation ni la jeunesse un motif d'exclusion » (Vie, p. 507). Et pour justifier la nomination d'un Frère assez jeune à la tête d'une maison importante, il n'hésite pas à dire : « II y a de jeunes vieillards et des vieillards qui ont été enfants toute leur vie. Ce Frère, quoique jeune, est plein de raison et de prudence, qualités essentielles à un directeur ; il est donc plus capable de commander qu'un grand nombre d'autres plus âgés que lui » (Vie, p. 507).

 3. Une première expérience du gouvernement s'acquiert, vite et bien, quand on a le très grand avantage de vivre, par exemple comme conseiller, dans une communauté bien gouvernée. Dans les communautés peu nombreuses, la manière de faire du Frère Directeur, ses relations avec les Frères comme avec les élèves et les gens du dehors, constituent l'élément essentiel de la formation des jeunes Frères pour les responsabilités futures. Dans les communautés nombreuses, c'est par une introduction progressive dans le gouvernement qu'un Frère acquiert cette expérience des hommes, qui lui est indispensable pour pouvoir diriger dans la suite.

C'est ainsi que le Bienheureux Père a formé ses collaborateurs. « Il admettait souvent les principaux Frères dans son conseil, et ne décidait presque rien sans prendre leur avis. Il croyait qu'initier les Frères aux affaires de l'Institut, et les consulter sur les règles qu'il élaborait, c'était un sûr moyen de former leur esprit, de rectifier leurs idées, de développer leur jugement, de leur donner de l'expérience » (Vie, p. 505).

 4. Il est très important qu'un jeune supérieur puisse compter sur la franche collaboration de tous ses confrères. Avoir confiance dans tous les siens, pouvoir s'appuyer, en tout temps, sur chacun d'entre eux, quelle source de courage et de paix pour un responsable ! Il peut y avoir, hélas ! quelque exception dans une famille, une exception dont les causes profondes sont parfois bien difficiles à déterminer, mais il ne peut s'agir que d'une exception à une loi générale.

Notre vie de famille, telle qu'elle a été pensée et voulue par notre Bienheureux Fondateur, doit faire naître, en tous les Frères, un authentique esprit de « coresponsabilité » pour tout ce qui concerne la bonne marche de la communauté et de la Province, et, par là même, de tout l'Institut. Dès lors qu'un supérieur, quelle que soit sa position, sait qu'il n'est pas un « isolé », il sera facilement disposé à assumer courageusement, et même allègrement, les difficultés de sa charge.

 5. Cette confiance doit être réciproque : confiance du supérieur dans ses confrères, confiance de ceux-ci dans leur supérieur. La confiance se mérite ; elle ne s'obtient jamais gratuitement, par le seul fait de la désignation de quelqu'un pour être à la tête des autres. Elle n'exclut pas la fermeté. Un supérieur peut se voir obligé de rappeler au devoir quelqu'un de ses Frères, sans que la confiance mutuelle en soit ébranlée le moins du monde. De même, un Frère sérieux ne perd pas confiance en son supérieur, parce qu'il estime que ce dernier s'est trompé à son égard, une fois ou l'autre. Nous sommes tous des hommes, imparfaits et fragiles. Nous savons que nous le resterons jusqu'à la fin de notre pèlerinage terrestre. Bon sens et confiance devront toujours cheminer la main dans la main.

En cas de malentendu, il est essentiel que cette confiance mutuelle ne soit pas mise en cause. Une explication franche et cordiale, où l'on n'hésite pas à dire tout ce que l'on a « sur le cœur », vaut beaucoup mieux qu'un silence obstiné, qui engendre trop facilement l'antipathie durable.

Ce climat de confiance nous apparaît comme l'une des plus belles manifestations extérieures de notre esprit de famille. C'est lui seul qui peut garantir la paix et la joie dans une communauté mariste. C'est encore lui qui facilite, à tous les nouveaux supérieurs, l'acceptation résolue de leur obédience. Par là, cette confiance mutuelle est l'une des conditions essentielles d'un bon choix…

 III. ACCEPTATION D'UNE CHARGE.

 A) Comme Frère Mariste, notre première réponse à une « nomination de supérieur » devrait consister dans les mots mêmes de notre Mère et Modèle : ECCE et FIAT ! Nous ne sommes pas téméraires en affirmant que les choses ne se passent pas aussi simplement, aussi « marialement ». On plaisante quelquefois, en communauté, sur le vif désir de l'un ou l'autre confrère par rapport aux charges dans l'Institut. Une expérience, relativement longue déjà, nous a mis en contact avec beaucoup de supérieurs. La plupart avaient accepté, avec une résignation plus ou moins grande, parfois après avoir dû faire appel à tout leur esprit de foi. Quelques-uns, mieux entraînés déjà ou mieux taillés pour la lutte, avaient eu moins d'hésitation. L'ambition proprement dite, en ce qui concerne du moins les « postes de responsabilité », est certainement très rare chez nous, si tant est qu'elle existe réellement.

On est bien plus disposé, de nos jours surtout, à fuir les charges. Nous devons même ajouter que cette tendance est devenue un peu inquiétante en Certains secteurs de l'Institut, où elle se manifeste particulièrement chez des Frères qui ont bénéficié d'une bonne formation intellectuelle. Plus d'un reprendrait volontiers, pour son propre compte, le passage connu de l'Imitation de Jésus-Christ : « C'est quelque chose de grand de pouvoir vivre toujours dans l'obéissance d'un supérieur, et de n'être pas le maître de soi-même. Il est bien plus sûr d'obéir que de commander » (Livre I, ch. 9, 1). Mais il faut des supérieurs, et, chez nous, presque tous les Frères, tôt ou tard, peuvent s'attendre à quelque charge spéciale dans la grande famille mariste.

Nous souhaitons, de toute notre âme, que chacun ait le noble courage d'accepter, franchement et loyalement, la croix de supérieur, quand l'heure sera venue. Rien ne nous défend, éventuellement, de présenter nos objections personnelles ; elles peuvent être sérieuses, vraiment fondées ; elles peuvent déterminer le retrait de l'obédience. Dans ce cas, on ne pourra pas parler de « refus » de la charge offerte… Mais le refus non motivé, surtout quand il est donné comme catégorique et définitif, laisse une impression pénible à ceux qui en sont témoins. Ne serait-ce pas parfois une véritable lâcheté ?

B) Grâce à Dieu, l'acceptation courageuse est de règle chez nous, malgré toutes les luttes intimes que plusieurs ont connues avant le « oui » final. Nous voudrions dire, sans la moindre prétention, ce qu'il convient de faire dès qu'on est supérieur pour la première fois.

Il s'agit d'organiser pratiquement notre nouvelle vie en dressant immédiatement notre programme d'action. C'est par là qu'il importe de commencer résolument. Sans programme, le temps se perd, les forces se gaspillent, et le désordre peut s'introduire définitivement dans notre activité de tous les jours. Ce programme une fois dressé, il faudra y rester fidèle. Où se trouvent les grandes lignes de ce programme ?

 1. Dans l'Evangile et dans l'enseignement de l'Eglise… Il faut prendre connaissance, régulièrement, des documents de l'Eglise qui se rapportent à nos fonctions, à notre vie religieuse et à notre forme d'apostolat. Il faut avoir, sous la main, les documents de base qui doivent nous orienter, nous guider. Il faut les relire souvent ; il convient de méditer l'un ou l'autre, plus important pour nous. C'est là le « code de notre route de supérieur ». Sans ce contact régulier avec la pensée de l'Eglise, il pourra y avoir, dans notre action, des ignorances très regrettables, dont nous serons en grande partie responsables. Gouverner, c'est prévoir, a-t-on dit.

 2. Dans nos Constitutions, dans nos Règles… Leur substance, comme nous l'avons rappelé plusieurs fois, n'a pas varié. Dans nos écoles, les « figures » changent, mais notre mission d'éducateurs reste la même. Soyons à la fois prudents et fermes pour tout ce qui concerne la fidélité à nos Constitutions et à nos Règles. Faute d'en avoir saisi le sens profond et la richesse cachée, plusieurs pourraient être enclins à ne leur accorder qu'une valeur relative. De là à s'engager sur la pente glissante des concessions de faiblesse et des adaptations inadmissibles, il n'y aurait qu'un pas à faire, un pas trop vite fait hélas !

 3. Dans la vie de notre Bienheureux Fondateur, ce qui revient à dire dans l'esprit même de notre famille religieuse, dans toutes les traditions qu'on doit appeler fondamentales pour nous.

Comme nous l'avons déjà dit ailleurs, est fondamental pour nous tout ce qui se rattache à la pensée profonde de notre Fondateur, tout ce qui louche à l'esprit même qu'il a voulu léguer aux siens, tout ce qui tend à faire de notre Institut ce qu'il « doit » être, selon le plan providentiel.

Au point de vue « spirituel », il s'agit de notre manière à nous, Frères Maristes, héritiers de la pensée du Bienheureux Champagnat, de tendre vers la perfection : à l'école de Notre-Dame, en imitant d'aussi près que possible son humilité, sa simplicité et sa modestie, en aimant l'effacement et l'oubli du monde…

Au point de vue apostolique, toujours sous l'égide de Notre-Dame, nous aurons une préférence pour les pauvres, pour les humbles ; partout nous rejetterons le trop brillant, la réclame tapageuse, et nous insisterons délibérément sur le solide et le durable.

C'est cela qu'il convient toujours de se rappeler dès qu'on est plus ou moins responsable de l'orientation d'une oeuvre, d'une communauté, d'une Province.

 4. Dans les décisions des Chapitres, plus exactement dans les décisions et vœux du dernier Chapitre. Un supérieur doit s'y conformer lui-même, loyalement. Il doit inviter les autres à s'y conformer. S'il estime que des modifications seraient peut-être à conseiller, qu'il prépare à temps ses observations pour le Chapitre suivant. Mais, dans l'intervalle, qu'il ait à cœur de gouverner selon les décisions déjà prises.

L'union féconde est à ce prix. Mais l'union exige toujours des sacrifices personnels, en plus de toutes les autres conditions.

 5. Enfin, il faut que chaque supérieur obéisse aux directives de ceux qui ont quelque autorité sur lui, ou le Conseil Général, ou le Frère Provincial et son Conseil selon le cas.

 6. Tout supérieur doit méditer parfois les sages et fortes directives données par S. S. Pie XII, le 1I février 1958 (l'année même de sa mort), aux Supérieurs Généraux des Ordres et autres Instituts religieux. Qu'on veuille noter, avec quelle netteté, d affirme que l'opinion de la masse et l'attrait des nouveautés ne sont pas des critères de gouvernement. (Toute cette exhortation se trouve dans le volume XXII de nos Circulaires, pp. 177-1.78).

C) Comme nous le disions plus haut, une fois que notre programme de travail aura été dressé, il nous restera à y tenir, avec humilité, avec prudence et avec courage.

Avec humilité, en nous souvenant toujours de la parole du divin Maître : « Sans Moi, vous ne pouvez rien faire », et en comptant toujours sur la grâce de Dieu ; sans nous laisser rebuter par les incompréhensions, ou par le sentiment, parfois très aigu, de nos insuffisances. Nous sommes au poste oit Dieu nous veut. Cela peut nous paraître étrange… Acceptons résolument le « fait » et allons de l'avant. C'est quand je me sens vraiment faible que je puis compter le plus sûrement sur l'aide divine.

Avec prudence, sachant bien que nos actes peuvent engager l'avenir pour des années, que nos paroles ou nos écrits peuvent avoir des retentissements profonds et durables dans les âmes de ceux qui nous sont confiés. Un supérieur prudent ne commence pas par tout « changer », lorsqu'il assure la direction d'une communauté ou d'une oeuvre. Il observera tout d'abord ; il consultera ceux qui sont sur place depuis quelque temps déjà ; il saura patienter jusqu'à ce qu'il ait une certitude raisonnable de l'opportunité du changement qu'il croit nécessaire d'introduire… Prudence et discrétion vont de pair : un supérieur prudent ne critique jamais l’œuvre de ceux qui l'ont précédé. Il agit, de toutes ses forces, pour que toutes choses progressent. L'un des supérieurs les plus efficients que nous ayons jamais connus n'a jamais critiqué qui que ce soit parmi ses prédécesseurs ; il n'a même jamais « innové », dans le sens fort du terme ; il a toujours cherché à améliorer, à perfectionner.

Avec courage aussi ! Il nous faut, en effet, beaucoup de courage pour accepter notre charge, puis pour défendre notre temps, enfin pour porter généreusement notre croix de supérieur, pour refouler les inquiétudes et les préoccupations obsédantes et inutiles, pour agir avec calme et avec esprit de suite, pour résister aux petits échecs de chaque jour, pour donner toujours le bon exemple à ceux qui comptent sur nous, pour tenir jusqu'au bout.

Un supérieur religieux ne doit compter que sur un point d'appui dans sa vie : Jésus-Christ seul !

 Un mot de conclusion.

 Qui est donc vraiment responsable de la bonne marche de l'Institut ? Le Bienheureux Fondateur assurait que « l'avenir de l'Institut était tout entier entre les mains des Frères Directeurs » (Vie, p. 508). Nous serions portés à dire, en tenant compte de l'extension et de l'organisation plus complexe de notre grande famille, que son avenir dépend de l'ensemble des supérieurs qu'elle compte.

Mais les supérieurs eux-mêmes sortent des « rangs » de la famille. Hier, ils étaient de simples membres de leur communauté. Aujourd'hui, ils sont chargés de gouverner. Demain, ils rentreront dans les rangs. Et. ils commencent leur tâche provisoire de « supérieurs », tels qu'ils sont, avec leurs qualités et leurs défauts, avec les limites de leur formation antérieure.

On dirait donc plus exactement : L'avenir de l'institut dépend des hommes qui le composent actuellement, et, par conséquent, de chacun d'entre nous. Chacun a l'obligation de faire, toute sa vie, des efforts généreux et constants pour mettre en valeur les talents reçus, pour ne pas décevoir ceux qui, demain ou après-demain, compteront sur lui.

En pleine fidélité à notre esprit mariste, personne ne doit désirer les « postes de responsabilité ». Mais en tant que membre de la famille, il doit se tenir prêt pour toutes les tâches que la Providence pourra lui confier un jour.

Au-delà de cet effort de préparation, qui ne pourra jamais être négligé, au-delà encore de ce continuel effort d'adaptation dont nous avons parlé, il y a la prière d'intercession pour les supérieurs : pour que l'Esprit-Saint oriente le choix de ceux qui devront dire le mot décisif, pour qu'Il féconde les humbles efforts humains de ceux qui auront été désignés, pour qu'Il soutienne leur courage et maintienne intacte la pureté de leur zèle…

C'est ce que l'article 207 de nos Constitutions signalait déjà, au premier paragraphe, en invitant tous les Frères à prier souvent pour les supérieurs « dont la vertu et la sainteté importent si fort au bien de tout le corps ».

Le bon choix des supérieurs, à tous les degrés de la hiérarchie, est, avant tout, l’œuvre du Saint-Esprit.

Le croyons-nous fortement ?

Est-ce que cette conviction nous engage à orienter souvent notre prière dans ce sens ?

La fidélité à cette intention de prière nous maintiendra nous-mêmes totalement « disponibles » pour tout ce que Dieu voudra nous demander. 

VŒUX POUR 1965

 Aujourd'hui même, nous entrons dans un cycle de fêtes qui ont toujours été chères à nos cœurs de Maristes : l'Immaculée Conception, Noël, la Fête du Très Saint Nom de Jésus, l'Epiphanie, la F& te de la Sainte Famille. S'y intercalent le 1ierjanvier, début de l'année civile, et le 2 janvier, début de l'année « mariste ».

D'autre part, nous approchons de la saison des souhaits traditionnels, qui se font le jour même de Noël, en beaucoup de pays chrétiens ; le jour du Nouvel An, ailleurs. Dans toutes nos communautés, nous ferons de même, simplement, très cordialement, avec une sincérité totale, et toujours dans cet esprit chrétien qui envisage, avant tout et par-dessus tout, l'aspect essentiel des choses…

Les membres de l'administration générale sont heureux de profiter de cette occasion pour vous présenter leurs vœux fraternels de santé, de succès dans vos efforts, de paix et de joie. Ils tiennent aussi à vous remercier de votre généreux dévouement dans vos diverses communautés, et à vous redire, eux-mêmes, leur entière « volonté de service ». A tous, ils souhaitent de commencer la nouvelle année avec énergie et avec confiance.

Avec énergie, sans ruminer les petites misères et les échecs plus ou moins douloureux du passé. avec la ferme volonté de travailler de toutes nos forces dans le champ du Père de famille, à la place qu'Il nous aura assignée, en nous rappelant que la formule « infaillible » de l'apostolat ne change pas : Ora et labora !

Avec confiance, nous souvenant que nous ne sommes jamais seuls en face de nos peines intimes, de notre dur labeur, des difficultés toujours renaissantes, mais que nous avons à notre disposition la prière qui réconforte et qui éclaire notre route. l'affection et l'aide fraternelle de tous les membres de notre grande famille…

La période conciliaire continuera encore pendant la nouvelle année. Nous venons de relire les vieux formulés l'année dernière, vœux que nous avions groupés sous ces trois titres : a) Participation au Concile ; b) Amour de l'Institut ; c) Esprit de famille (cf. Circulaire du 8 décembre 1963, pp. 102-107). Il serait opportun de les relire en communauté, car le petit programme qu'ils renferment n'a pas changé. Encore une fois, plus que jamais nous devons nous « sentir d'Eglise », nous rendre compte de l'importance exceptionnelle de ce Concile, auquel nous devons tous « prendre part », avec une générosité totale.

Qu'il nous soit permis de formuler encore un vœu qui, en ce moment surtout, nous tient particulièrement à cœur : N'oublions jamais nos Frères éprouvés, nos Provinces ou Districts menacés dans leur existence même. Continuons, inlassablement, de prier pour nos Frères éloignés, par la force, de leur famille mariste (Province de Chine) ; pour ceux qui luttent obstinément en vue de maintenir leurs possibilités d'apostolat ; pour ceux dont le dévouement est parfois totalement incompris, alors que leur cœur brûle d'amour… Prions pour eux tous, pour leurs élèves, pour toutes les âmes qui comptent sur la présence de nos Frères. Prions aussi pour que la « relève » ne manque jamais, pour que les vocations missionnaires soient nombreuses. courageuses et fidèles dans tout l'Institut, pour qu'il y ait un excellent recrutement dans les secteurs missionnaires eux-mêmes…

En cette année qui va finir, deux de nos Frères, jeunes encore, sont « tombés » au champ d'honneur des missions, sans bruit, tout simplement. comme d'authentiques fils du Bienheureux Marcellin Champagnat. Prions pour eux. Prions pour les « leurs ». Ne gémissons pas : inclinons-nous respectueusement devant l'adorable volonté divine.

Dans la nuit de l'épreuve, surtout quand celle-ci se prolonge, qu'il fait bon de penser que nous avons un Père dans les cieux, qui nous attend, les bras ouverts, pour nous recevoir « dans son bonheur » !

Seigneur, « augmentez en nous la foi » (Luc, 17, 2). 

REFLEXIONS SUR UN ANNIVERSAIRE

 Le 29 mai 1965 nous rappellera le dixième anniversaire de la béatification de notre bien-aimé Fondateur. Cette grande grâce, que nous avions si longtemps et si ardemment désirée, suscita dans tout l'Institut un enthousiasme extraordinaire et une immense gratitude. Qu'on veuille relire, par exemple, la Circulaire du 7 mai 1955 340, qui annonçait l'événement (pp. 441 à 446), et celle du 8 décembre suivant 341 (pp. 493 à 503, du même volume XXI).

Tous ceux qui ont eu le bonheur d'assister aux grandioses cérémonies de la béatification, en la Basilique St. Pierre, sont repartis de Rome avec le secret espoir que le beau tableau du nouveau Bienheureux réapparaîtrait très vite, dans la gloire du Bernin, pour les honneurs de la canonisation. Il est intéressant de noter que la Circulaire qui relate ces cérémonies donne déjà des directives « pour obtenir la canonisation » (cf. vol. XXI, 342 p. 504 et sv.).

Le temps marche vite. Ces dix ans nous ont apporté bien des faveurs attribuées à l'intercession de notre Bienheureux Fondateur, mais nous n'avons pas obtenu les « miracles » qu'il faudrait pour la canonisation. Pourtant, nous avons prié pour les obtenir ; nous avons fait régulièrement les neuvaines prescrites. N'y aurait-il pas lieu d'examiner, bien loyalement, la ferveur de nos prières, la qualité de notre régularité, la réalité de notre esprit de sacrifice ?

Ce dixième anniversaire doit stimuler notre générosité mariste. La canonisation du Bienheureux M. Champagnat est une grâce que nous devons implorer avec humilité et confiance, et une grâce que nous devons aussi, dans un certain sens, « mériter » : par la ferveur dans notre vie religieuse, par une application totale à tous nos devoirs apostoliques, par une charité fraternelle sans exception, par une fidélité inébranlable à nous maintenir dans l'esprit même de notre Fondateur. A cette condition seulement, nous pourrons redire, avec une filiale et audacieuse confiance : « Vierge Sainte, notre bonne Mère, daignez nous obtenir au plus tôt la canonisation de votre fidèle serviteur »…

Qu'il nous soit permis de faire quelques remarques d'ordre pratique. A l'occasion de ce dixième anniversaire, des cérémonies particulières d'actions de grâce pourraient être envisagées dans tout l'Institut, suivant les possibilités locales.

Comme le 6 juin 1965 coïncide avec la Pentecôte, la fête du Bienheureux Fondateur pourrait être avancée au dimanche 30 mai, en faisant connaître aux Frères et aux amis de l'Institut les raisons de ce transfert. Dans cette hypothèse, la neuvaine préparatoire devrait commencer le 21 mai. Conformément à l'Indult du 20 février 1958 (cf. Circulaire du 24 mai 1958, pp. 203-204 347), il pourrait y avoir, ce jour-là, une messe propre solennelle ou chantée du Bienheureux Champagnat.

Nous ajoutons encore une remarque occasionnelle. On nous a demandé parfois si, en cours d'année, des messes votives pouvaient être dites en l'honneur de notre Bienheureux Fondateur. Conformément aux Rubriques, on ne le peut, en dehors de leur fête, que pour les Fondateurs « canonisés ». Daigne notre Bienheureux Père nous bénir tous ! 

DIRECTIVES DU PAPE PAUL VI POUR LA VIE RELIGIEUSE

 Le 23 mai 1964, le Saint-Père a reçu les Chapitres de différents Ordres et Congrégations et leur a adressé l'allocution suivante :[1]

               Très chers fils,

 C'est avec beaucoup de joie et d'espoir que Nous vous voyons devant Nous, vous qui avez été élus et revêtus d'autorité par vos vénérables et illustres familles religieuses, et Nous aimons vous saluer en vous exprimant Notre reconnaissance et la haute estime que Nous avons pour vous.

Vous êtes réunis à Rome pour y tenir le Chapitre général de chacun de vos instituts. Ces Chapitres concernent, certes, en premier lieu vos ordres ou congrégations, mais ils ont aussi une incidence sur la vie de l'Eglise qui puise dans la situation florissante de la vie religieuse une grande partie de sa vigueur, de son zèle apostolique et de son ardeur pour rechercher la sainteté.

De plus, vous êtes venus auprès de Nous non seulement pour présenter au Vicaire du Christ vos hommages de fils très soumis et très aimants, mais aussi pour recevoir la Bénédiction apostolique sur vous-mêmes, vos instituts et sur les questions que vous traitez dans vos Chapitres, dont, comme Nous en avons confiance, découleront des fruits salutaires, de sorte que la vie religieuse en sera plus intense et joyeuse.

Nous aurions volontiers accordé une audience particulière à chacun de vos groupes et Nous leur aurions adressé des paroles correspondant à son caractère et à ses besoins particuliers. Nous avons cependant préféré vous recevoir tous ensemble pour donner plus d'importance à cet entretien commun. De plus, l'occasion Nous est ainsi donnée d'exposer certaines choses qui concernent tous les religieux du monde entier. 

VOCATION DES FIDÈLES À LA SAINTETÉ ET VOCATION RELIGIEUSE

 Nous voulons d'abord vous dire que les instituts religieux, avec la grande force qu'ils constituent et la fonction qu'ils accomplissent, sont pleinement nécessaires à l'Eglise d'aujourd'hui. Certes, on doit vivement recommander aujourd'hui, et à juste titre, la doctrine de la vocation universelle à la sainteté des fidèles de tout ordre et condition, dont la raison première est leur consécration à Dieu par le baptême. De plus, les besoins de notre époque demandent que l'ardeur de la vie chrétienne soit grande dans le monde et y enflamme les âmes. Ils demandent une consécration du monde qui est particulièrement la tâche des laïcs. Tout cela est voulu par la Providence de Dieu, et c'est pourquoi Nous Nous réjouissons de ces entreprises si salutaires.

Il faut cependant veiller à ce que l'authentique notion de vie religieuse, telle qu'elle a toujours été reçue dans l'Eglise, n'en soit obscurcie ; et que les jeunes, lorsqu'ils doivent opter pour un mode de vie, n'éprouvent quelque embarras du fait que la fonction et l'importance immuable de l'état religieux dans l'Eglise ne leur apparaissent plus distinctement et clairement.

Il Nous a donc semblé nécessaire de rappeler l'importance et le rôle inestimables de la vie religieuse. Cet état, en effet, dont le caractère propre naît de la profession des vœux évangéliques, est, selon l'exemple et la doctrine de Jésus-Christ, le mode de vie parfait, car il vise à accroître la charité et à la conduire à la perfection. Aux autres genres de vie sont proposés des fins, des services et des offices temporels, bien que légitimes en soi.

D'autre part, l'Eglise a extrêmement besoin aujourd'hui du témoignage public et social apporté par la vie religieuse. En effet, plus vivement on demande aux laïcs de vivre en chrétiens dans ce monde et d'y propager la vie chrétienne, plus sont nécessaires les exemples de ceux qui renoncent au inonde, montrant par là que le « royaume du Christ n'est pas de ce monde »[2].

C'est ainsi que la profession des vœux évangéliques s'ajoute à la consécration qui est propre aux baptisés et la complète, en tant que consécration particulière par laquelle le fidèle se donne et se consacre pleinement à Dieu, mettant toute sa vie au service de lui seul.

 Les vœux religieux.

 Cette question est liée à une autre dont Nous voulons vous entretenir paternellement et attentivement : vous devez avoir une grande estime pour les vœux religieux et attacher une grande importance à leur pratique. Il n'est, en effet, pas d'autres façons pour vous de mener une vie conforme à l'état que vous avez choisi, et que vous devez vivre de telle sorte qu'il aide efficacement votre progression vers la charité parfaite et que les fidèles y trouvent un témoignage entraînant de vie chrétienne.

Bien que ces derniers temps les conditions de vie de l'humanité aient considérablement changé et qu'il soit donc nécessaire d'y adapter le mode de vie des religieux, ce qui découle de la nature même des conseils évangéliques garde toute sa force, et celle-ci ne peut nullement être atténuée. 

L'obéissance

 Appliquez-vous donc de toutes vos forces à pratiquer l'obéissance religieuse.

Elle est et elle doit rester un holocauste à Dieu de sa volonté propre. Ce sacrifice de soi consiste à se soumettre humblement aux supérieurs légitimes, bien que l'autorité doive être exercée dans les limites de la charité et le respect de la personne humaine et qu'aujourd'hui les religieux soient appelés à de nombreuses et importantes fonctions, ainsi qu'à prendre plus facilement et rapidement des initiatives.

 La pauvreté.

 Ne manquez pas non plus d'inculquer l'amour de la pauvreté, dont on parle beaucoup aujourd'hui dans l'Eglise. Les religieux doivent, en effet, apparaître à tous comme un exemple de vraie (pauvreté évangélique. C'est pourquoi ils doivent aimer cette pauvreté à laquelle ils se sont librement engagés. En ce qui concerne l'usage des biens, il ne suffit pas de se soumettre au jugement des supérieurs, mais les religieux doivent se contenter des choses nécessaires à leur mode de vie. Qu'ils évitent le confort et le luxe qui affaiblissent la vie religieuse. Mais, outre la pauvreté individuelle, il ne faut pas négliger la pauvreté collective que doit pratiquer la famille religieuse. C'est pourquoi dans leurs maisons et leurs oeuvres, les instituts religieux doivent éviter tous les ornements et parures trop recherchés et tout ce qui évoque le luxe. Qu'ils tiennent compte de la condition sociale des hommes au milieu desquels ils vivent. Qu'ils évitent également de trop rechercher l'argent, mais qu'avec les ressources temporelles drue la divine Providence leur n données, ils subviennent aux vraies nécessités des frères qui sont dans le besoin, ceux de leurs pays ou ceux d'autres parties du monde.

 La chasteté.

 Mais que les religieux observent avec une attention particulière cette pierre précieuse qu'est la chasteté.

On sait que le mode de vie actuel rend difficile la pratique de la chasteté parfaite, non seulement à cause du déferlement d'immoralité, mais aussi à cause de fausses doctrines qui exaltent trop la nature et qui distillent dans les âmes un funeste poison. Nous devons donc aviver toujours davantage notre foi dans les paroles du Christ qui nous disent la valeur surnaturelle de la chasteté recherchée à cause du royaume des cieux, cette foi qui nous assure qu'avec l'aide de la grâce divine, ce lis blanc peut rester immaculé. Pour cela, il faut pratiquer plus intensément la mortification chrétienne et veiller plus attentivement sur les sens. C'est pourquoi il faut rejeter absolument les livres, les publications et les spectacles indécents ou contraires à l'honnêteté, sans invoquer comme prétexte même celui du désir de connaître des choses qu'il est profitable de savoir, ou d'étendre sa culture humaine : sauf peut-être en cas de nécessité reconnue pour les études, nécessité que les supérieurs religieux devront examiner. Personne ne pourra douter de l'efficacité du ministère sacré dans un monde si impur, si celui qui l'exerce resplendit de la chasteté consacrée à Dieu et est affermi par sa force. 

LA STRUCTURE ET LE GOUVERNEMENT DES INSTITUTS RELIGIEUX

 Nous voulons maintenant dire quelques mots de la structure et du gouvernement des instituts religieux. C'est en effet sur ce point que portent avant tout les travaux des Chapitres généraux.

 La fidélité à la règle primitive.

 Il est manifeste qu'une bonne vie religieuse a absolument besoin d'une discipline, de certaines lois, de conditions permettant de l'observer. C'est pourquoi la première tâche des Chapitres généraux doit être de maintenir en état au cours des temps lis règles qui ont été établies par leur fondateur pour leur famille religieuse. Vous devrez donc veiller à opposer une ferme barrière à toutes les façons d'agir qui petit à petit atténuent la force de la discipline, c'est-à-dire aux mœurs contraires à la vie religieuse, aux exemptions non nécessaires, aux privilèges difficilement acceptables. Vous devrez également vous garder soigneusement de tout relâchement dans la discipline inspiré non pas par une vraie nécessité, mais par l'esprit d'arrogance, la lassitude de l'obéissance ou l'amour du siècle. Pour ce qui est des nouvelles initiatives et des nouvelles oeuvres, abstenez-vous de celles qui ne répondent pas pleinement à la tâche principale de votre institut ou à l'esprit de votre fondateur. Les instituts religieux, en effet, restent vigoureux et florissants tant que dans leur discipline et leurs oeuvres, ainsi que dans la vie et les mœurs de leurs membres, ils restent inspirés de l'esprit de leur fondateur dans toute sa pureté.

 Les nouvelles lois.

 Ensuite les instituts religieux, tels des corps vivants, doivent à juste titre aspirer à se développer. Ce développement des instituts doit viser à l'observance plus attentive de vos règles, plutôt qu'au nombre des membres et à l'établissement de nouvelles lois. D'ailleurs, la multiplicité des lois ne va pas toujours de pair avec le progrès de la vie religieuse ; il arrive en effet souvent que plus les lois sont nombreuses, moins on y prête attention. C'est pourquoi les Chapitres généraux doivent toujours faire un usage modéré et prudent de leur droit d'établir des lois.

 L'adaptation aux temps nouveaux.

 Enfin, une tâche très importante, à laquelle les Chapitres généraux doivent apporter leur principal soin, c'est l'adaptation attentive des lois de leurs instituts aux nouvelles conditions des temps. Cette adaptation doit cependant se faire en préservant la nature et la discipline die l'institut. Toute famille religieuse, en effet, a une tâche qui lui est propre, et il est absolument nécessaire qu'elle lui reste fidèle. C'est là pour un institut le gage (le sa fécondité et de la constante abondance des grâces célestes. Il ne faut introduire aucun renouvellement de la discipline qui ne correspond pas à la nature de l'ordre ou de la congrégation ou qui s'écarte en quelque façon de l'esprit du fondateur. Ce renouvellement de la discipline requiert également que ce soit l'autorité compétente, et elle seule, qui le fasse. C'est pourquoi, tant que cette adaptation de la discipline n'est pas entièrement achevée, les religieux ne devront pas introduire des nouveautés de leur propre chef, ni relâcher la discipline ou se laisser aller à la critique, mais ils devront faire en sorte que par leur fidélité et leur obéissance ils facilitent et aident ce travail de renouveau. S'il en est ainsi, vos règles seront changées dans leur lettres mais pas dans leur esprit, qui restera dans toute sa pureté.

 La primauté de la vie spirituelle.

 Dans ce travail de renouveau de vos instituts, vous devrez toujours veiller à donner la première place à la vie spirituelle de vos religieux. C'est pourquoi Nous ne voulons absolument pas que chez vous et chez tous les religieux qui ont pour tâche de se consacrer à l'apostolat, on admette cette erreur selon laquelle il faut se préoccuper en premier lieu des oeuvres extérieures, et ensuite de la perfection intérieure, comme si cela était exigé par l'esprit d'aujourd'hui et par les besoins de l'Eglise.

L'activité intense et la préoccupation de sa vie spirituelle, loin de nuire l'une à l'autre, exigent d'être très étroitement unies, de façon à aller toujours de pair. L'ardeur des oeuvres doit donc correspondre à l'amour de la prière, le rayonnement d'une conscience pure, la patience dans l'adversité, la charité active et vigilante qui se dépense pour le salut des âmes. Si l'on néglige ces vertus, non seulement les travaux apostoliques seront stériles et sans énergie, mais peu à peu l'âme s'attiédira et elle ne pourra pas longtemps éviter les dangers que comporte l'accomplissement du ministère sacré.

 L'exercice de l'apostolat.

 En ce qui concerne l'apostolat confié aux religieux, Nous voulons ajouter ceci : les instituts religieux doivent soigneusement adapter la tâche apostolique qui leur est propre aux circonstances et aux conditions actuelles. Les jeunes religieux en particulier doivent être bien formés à cela ; de telle sorte cependant que l'ardeur apostolique dont ils doivent être enflammés ne se limite pas à leur ordre, mais s'ouvre aux immenses besoins spirituels de notre époque. De plus, ils doivent être formés à une conscience délicate de leurs charges, de telle sorte que dans leurs paroles et dans leurs actes, ils apparaissent toujours comme de vrais ministres de Dieu, qui brillent par l'intégrité de leur doctrine et l'innocence de leur vie. En ce domaine, les religieux ne doivent pas être laissés à eux-mêmes, mais leurs oeuvres doivent toujours être placées sous la vigilance de leurs supérieurs, surtout s'il s'agit d'une activité qui a une grande importance pour la société civile.

 Les religieux et la hiérarchie.

 Nous avons aussi beaucoup à cœur que l'activité des religieux s'harmonise avec les règles de la hiérarchie. L'exemption des ordres religieux n'est nullement contraire à la constitution divine de l'Eglise, en vertu de laquelle tout prêtre, surtout dans l'exercice du ministère, doit obéissance à la hiérarchie. Les religieux, en effet, sont toujours et partout soumis à l'autorité du Pontife romain, leur supérieur suprême[3]. Les instituts religieux doivent donc être à la disposition du Pontife romain dans leurs oeuvres qui concernent le bien de l'Eglise universelle. Mais en ce qui concerne l'exercice de l'apostolat dans les différents diocèses, les religieux sont également soumis à la juridiction des évêques, auxquels ils doivent apporter leur concours, la nature propre de leur apostolat et les nécessités de la vie religieuse étant toujours sauvegardées. On voit ainsi quel apport peut constituer pour Ie bien de l'Eglise la coopération et l'aide apportées par les religieux au clergé diocésain, car les forces s'avèrent plus efficaces et plus puissantes si elles sont unies. 

C O N C L U S I O N

 Nous avons ainsi, chers fils, évoqué brièvement ce qui Nous semble être très utile pour le développement de la vie religieuse aujourd'hui. Vous voyez donc quelle attention Nous portons aux problèmes de la vie religieuse et quel espoir Nous mettons dans votre aide. Le chemin que Nous vous avons indiqué est certes ardu et laborieux, mais ayez bon espoir, car il s'agit non de notre cause, mais de celle de Jésus-Christ. Le Christ est notre courage, notre confiance et notre force ; il sera toujours avec nous. Continuez donc à répandre le plus largement possible la bonne odeur du Christ par l'intégrité de votre foi, la sainteté de votre vie, l'ardent amour de tous pour la vertu. Nous vous remercions de votre hommage et Nous faisons le vœu, en l'accompagnant de Nos prières, que vos instituts, avec le secours de la très douce Vierge Marie, Mère de Dieu, et source maternelle des vertus religieuses, connaissent chaque jour de plus grands développements et portent des fruits de salut toujours plus abondants.

En gage de ces fruits, Nous vous donnons de tout cœur, à chacun de vous, chers fils, et à tous vos religieux, Notre bénédiction apostolique. 

VIE RELIGIEUSE. ÉCOLE DE LIBERTÉ 

A l'occasion du Congrès national des aumôniers des religieuses (Angers, 15-17 juillet 1964), S. Em. le cardinal Antoniutti, préfet de la S. C. des Religieux, a adressé la lettre suivante à S. Exc. Mgr. Dubois, archevêque de Besançon[4]

SACRA CONGREGAZIONE

DEI RELIGIOSI

Prot. N. A. G. 2174/61

 Rome, 23 juin 1964

 Excellence Révérendissime,

Je suis reconnaissant à Votre Excellence pour les communications concernant le « Congrès national des aumôniers des religieuses » qui se tiendra à Angers les 15-17 juillet.

Je vous félicite pour le choix du thème « Vie religieuse, école de liberté ». En notre temps particulièrement, il est nécessaire de souligner que la vie religieuse, en tant qu'essentiellement « souci de perfection », vise au complet développement et à la maturité de la personne humaine, rendue participante de la vie divine, et pour ce motif, aussi bien dans le champ de l'apostolat que dans celui de la sainteté, elle est source et école de liberté chrétienne.

Volontiers je saisis l'occasion de ce Congrès pour attirer l'attention des participants sur le fait que la vie religieuse exige la liberté de l'embrasser comme le Seigneur et l'Eglise la proposent, et, par conséquence, la liberté de la vivre telle qu'elle a été embrassée.

L'Eglise a toujours défendu la liberté pour tout chrétien d'entrer dans la vie religieuse, dans le sens que personne ne peut être empêché ni détourné. Spécialement de nos jours, l'Eglise entend que soit respectée la liberté des instituts et de leurs membres de vivre la vie religieuse telle qu'elle a été en fait sciemment acceptée.

La Providence a enrichi l'Eglise d'une grande variété de familles religieuses ; chacune d'elles a une vocation spécifique et une mission déterminée à remplir avec des moyens particuliers ; à cette finalité correspondent et une structure et une physionomie propres : spirituelle, apostolique et juridique.

Certes, la Sainte Eglise se préoccupe paternellement que chaque institut se renouvelle constamment pour répondre fidèlement à la vocation et à hi mission propre, et cela autant pour un retour aux sources que pour une adaptation aux exigence, nouvelles. Cependant, l'Eglise n'a pas l'intention d'imposer des changements à des constitutions ou à des structures de vie librement choisies dans la profession et faisant partie de la physionomie caractéristique de l'institut lui-même avec l'approbation déclarée et définitive du Saint-Siège.

La stabilité de l'état religieux et le lien contracté à la profession doivent garantir à qui embrasse un genre déterminé de vie religieuse la liberté, le droit même et l'obligation d'y rester fidèle jusqu'à la mort.

Il se pourra que l'autorité compétente se voie dans la nécessité de décider des changements et des adaptations dans les éléments secondaires, mais ceci ne peut se réaliser pour les éléments substantiels et caractéristiques de chaque institut.

De nouvelles organisations pourront répondre à des nouvelles façons de concevoir la pratique des conseils évangéliques ; ce sera alors le rôle de l'Eglise de les approuver, à condition qu'elles remplissent les conditions requises. Mais personne ne peut exiger qu'un institut déjà existant soit modifié et transformé en opposition avec son esprit, tel que voulu par le fondateur et sanctionné par l'Eglise.

Avec mes sentiments de reconnaissance, veuillez agréer, Excellence, l'assurance de mon religieux dévouement en Notre-Seigneur et Notre-Dame.

 I. Card. ANTONIUTTI

préfet. 

 V.J.M.J. 

DIVISION DE PROVINCE

 Rome, le 16 juin 1964

Très Saint Père,

Le Supérieur Général de l'Institut des Frères Maristes des Ecoles, humblement prosterné aux pieds de Votre Sainteté, implore la faculté de properler à une nouvelle répartition des Œuvres de la Province de Santa Catarina (Brésil), en érigeant :

a) La Province de Santa Catarina qui comprendrait : l'Etat de Santa Catarina, le «Territorio de Rondonia » et le « Colegio Paranaense » à Curritiba.

b) La Province de Santa Maria qui comprendrait : la partie de l'Etat de Rio Grande do Sul qui appartenait à la Province de Santa Catarina orant la division, l'Etat de Acre, le « Colegio Sâo Pedro » à Porto Alegre et la propriété de «Alagado» à Brasilia.

Et que Dieu, etc. …

 SACRA CONGREGATIO

DE RELIGIOSIS

 Prot. N° 5230/64

 Vigore facultatum a SS.mo Domino Nostro concessarum, Sacra Congregatio Negotiis Religiosorum Sodalium praeposita, attentis expositis, benigne adnuit pro gratia iuxta preces, dummodo omnia habeantur quae de iure requiruntur ad normal ?, SS. Canonum et Apostolicarurn Constitutionum. Haec concessio decurrat a die a Supremo Moderatore de consensu Consilii generalis determinanda, servatisque ceteris servandis.

Contrariis quibuslibet non obstantibus.

Datum Romae, die 17 iunii 1964.

  PAULUS PHILIPPE, Secrét

En vertu des pouvoirs concédés par Notre Très Saint-Père le Pape, la Sacrée Congrégation préposée aux Affaires des Ordres religieux, vu les faits exposés, accorde bénignement la faveur suivant la demande, étant observées exactement toutes les prescriptions demandées par le Droit ; cette érection sera effective au jour déterminé par le Supérieur Général et son Conseil.

Nonobstant toutes choses contraires.

Donné à Rome, le 17 juin 1964.

PAULUS PHILIPPE, Secrét

ELECTIONS

 Le Conseil Général a élu :

a) Dans la séance du 11 mai 1964 :

Pour un premier triennat :

F. Henri-Noé (Marcel COLIN), Provincial de Saint-Genis-Laval.

F. Norman Cyril (Joseph N. Roy), Visiteur des Philippines

b) Dans la séance du 30 mai 1964 :

Pour un deuxième triennat :

F. Jean-Claudius (Jean ROCHE), Provincial de N.-D. de !'Hermitage.

F. Joseph-Gustave (Gustave ROTH), Provincial de Beaucamps

Pour un premier triennat :

F. Léon-Francis (Léon RA KOTOMANGA), Visiteur de Madagascar

c) Dans la séance du 18 juin 1964 :

Pour un premier triennat :

F. Nemesio José (José GARCIA LOPEZ), Provincial de León

d) Dans la séance du 19 juin 1964 :

Pour un premier triennat :

F. Adelmo (José F. RUWER), Provincial de Santa Catarina.

F. Arlindo Maria (Arlindo MOMBACH). Provincial de Santa Maria

e) Dans la séance du 22 juin 1964 :

Pour un premier triennat :

F. Placido Maximo (Alfonso FALCHETTO), Provincial de Rio.

F. Valdomiro Maria (M. LEAL SOARES), Provincial de Sâo Paulo

f) Dans la séance du 18 septembre 1964 :

Pour un troisième triennat :

F. José Benigno (B. IREAS MARQUINA), Provincial du Chili

Pour un deuxième triennat :

F. Gandolf (Hans L. HENGELER E.), Visiteur d'Uruguay

Pour un premier triennat :

F. Othmar William (William WELDON). Provincial de Sydney

g) Dans la séance du 22 septembre 1964 :

Pour un troisième triennat :

F. Henri-Martin (Henri VINCKIER), Provincial de Belgique

Pour un premier triennat :

F. Bertinus (Brendan FEEHAN), Provincial de Melbourne.

F. Leo Thomas (Leo ZAKRZEWSKI), Provincial d'Allemagne

h) Dans la séance du 3 octobre 1964 :

 Pour un premier triennat :

F. Victor (Ephrem-Arthur KING), Provincial d'Afrique du Sud

 

LISTE DES FRERES

dont nous avons appris le décès

depuis la Circulaire du 24 mai 1964

 

Nom et âge des Défunts                               Lieu de décès                          Date du Décès

 

F. Gil (C. Leal)                                   72 P     Las Avellanas (Espagne)        28 avril 19641

F. Jaime Basilio (J. Gregori)            53 S     Mataró (Espagne)                    2 mai         »

F. Cariton (R. Ceysson)                    91 S     St.-Paul-3-Châteaux (France) 13 »           »

F. Pierre Clément (J. Sylvain)          66 P     Beaumont (France)                  18 »            »

F. Gaudenzio (E. Olindo)                  69 S     Ventimiglia (Italia)                    20 »            »

F. Joseph Martin (J. Schippers)      80 S     Viamâo (Brésil)                        22 »            »

F. Joseph Galmier (P. Mie. Comte) 81 S    Varennes-s-Allier (France)     26 »            »

F. Isidore (B. Karam)                        74 S     Damas (Syrie)                          30 »            »

F. Rafael Paulino (R. Toral)              30 P     Querétaro (Mexique)               5 juin         »

F. Paul Norbert (E. Hostyn)              77 S     Porto Alegre (Brésil)                14 »            »

F. Victor Ernest (E. Beauregard)     67 S     Iberville (Canada)                     15 »            »

F. Eduardo Félix (E. Régis)             61 P     Aubenas (France)                    20 »            »

F. Mary Vales (J. Jones)                   79 P     Johannesburg (Afr. du Sud)    21 »           »

F. Joseph Arthur (L. Jacquet)           82 S     St. Jean (Canada )                  23 »           »

F. André Xavier (A. Monchaux)        41 P     Recife (Brésil)                         24 »            »

F. Christian (Ed. Ettinger)                 50 S     près Bukavu (Congo-Léo)     26 »            »

F. Marie Pétrus (F. Dumont)            78 S     Tyngsboro (Etats-Unis)           28 »            »

F. Théodore François (Th. Widera) 73 S    Sta. Maria (Brésil)                    4 juil.          »

F. Benoît Camille (C. Gervais)         64 5     St.-Vincent-de-Paul (Canada) 16 »          »

F. Lucien Cyrille (L. Vandamme)     32 P     Kindu (Congo-Léo)                  25 »            »

F. Telesforo (J. Ma. Roqueiro)         63 P     Tuy (Espagne)                          28 »            »

F. Arcadio Luis (R. Torres)               42 S     Guadalajara (Mexique)            29 »            »

F. Louis Valentin (V. Flicker)            68 P     St : Genis-Laval (France)        1ieraoût     »

F. Francis Xavier (P. Benoît)            70 S     New York (Etats-Unis)             6 »             »

F. Paul Etienne (L. Lorinez)              49 S     Trégunc (France)                     10 »            »

F. Miguel Antonio (P. Alvarez)         69 S     Tuy (Espagne)                          17 »            »

F. Marie Eustérius (P. Niez)             89 S     Durban (Afrique du Sud)         21 »            »

F. Costanzo (A. Pucci)                      57 P     Roma (Italie)                             24 »            »

F. Juan Pedro (D. Zabaleta)            72 S     Mendes (Brésil)                        27 »            »

F. Quintino Borsoi                             21 T     Viamâo (Brésil)                        23 »            »

F. Louis Stéphane (A. Henriche)     47 S     Wideumont (Belgique)            29 »            »

F. Celedonio José (J. Garcia)         65 S     Las Avellanas (Espagne)        3 sept.       »

F. Joseph Eloi (J. E. Tremblay)       66 P     Courville (Canada)                   28 »            »

F. Cecilio (P. Hors)                           77 S     Las Avellanas (Espagne)        1ieroct.      »

F. Louis Fraterne (Cl. Alloin)            90 S     Amchit (Liban)                          2 »             »

F. Lorenzo Gabriel (G. Sendino)     62 S     Roboré (Bolivie)                       2 »             »

F. Peter Augustine (Em. Morisette) 39 S    Wheeling (Etats-Unis)             5 »             »

F. Vital (J. Astier)                               84 S     Buenos Aires (Argentine)       9 »             »

F. Antonio Mâximo (Al. Ramirez)     68 S     Ibagué (Colombie)                   10 »            »

F. Henri Antoine (J, Bte. Vergnes) 76 S      Vassouras (Brésil)                   18 »            »

F. Léon Galien (L, Ziegler)               85 P     Beaucamps (France)              25 »            »

F. Bernard Joseph (Ant. Boyer)       65 S     Varennes/s/Allier (France)      6 nov.         »

F. Antonio Vicente (E. Eguinoa)      47 P     Castilleja de la Cuesta (Esp.)  9 »            »

F. Salathiel (R. Vanderhaegen)       55 P     Louvain (Belgique)                   19 »            »

 

Soit 6.927 depuis le commencement de l'Institut.

 

Le total des défunts indiqué par la Circ. du 24 mai 1964 doit être corrigé : il faut 6.883, et : F. Charles-Edouard décédé à Beyrouth ; F. Léon-Henri décédé à St-Genis-Laval.

 La présente Circulaire sera lue en communauté à l'heure de la lecture spirituelle.

Recevez, mes bien chers Frères, la nouvelle assurance du religieux attachement avec lequel je suis, en J. M. J.

Votre très humble et tout dévoué serviteur. 

                                                                         F. CHARLES RAPHAËL, Supérieur Général

————————————————


[1]: Traduction d'après le texte latin publié par l'Osservatore Romano du 24 mai 1964, et sous-titres de la Documentation Catholique du 7-6-1964.

[2]: Cf. Jean 18, 36.

[3]: Can. 499, § 1.

[4]: Cfr. Documentation Catholique (No 1430 du 16-8-1964).

 

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