Circulaires 361

Charles-Raphaël

1965-05-01

Introduction : Pour bien comprendre l'esprit de notre vocation, il faut le vivre

I. Vocation mariste : connue, estimée, aimée .
Les vues du Bienheureux Fondateur sur notre vocation de Frère Mariste
Trois attitudes en face de la vocation mariste :
a) l'enthousiasme
b) l'insatisfaction
c) le découragement

II. Fidélité jusqu'à la mort
A. Pendant les années de formation, il faut donner une éducation mariste méthodique et continue
B. La loi de la fidélité :
1. Vocation mariste et responsabilité
2. En face des départs .
3. Les persévérances résignées
4. La nécessité de l'esprit de sacrifice

III. Fidélité à notre esprit et loi de l'adaptation
A. Pas d'opposition entre les deux
B. Manière de procéder : considérations :
1. Responsabilité de tous
2. Dialogue fraternel et efficace
3. Réformes profondes : toujours difficiles
4. Adaptations en deux domaines différents : vie religieuse et apostolat
5. Collaboration entre les deux générations

Conclusion : Toujours sous la direction de l'Eglise
Note supplémentaire : quelques références
Elections
Statistique générale de l'Institut au 1ier janvier 1965
Liste des défunts

361

V.J.M.J.

Fête de Saint Joseph, Artisan,

 Epoux de la Bienheureuse Vierge Marie.

Rome, le 1iermai 1965 

Fidélité à l'esprit de notre vocation

et loi de l'adaptation

             MES BIEN CHERS FRÈRES,

 Faisant suite aux Circulaires des deux dernières années, celle d'aujourd'hui continuera le commentaire du chapitre IX de la deuxième partie de nos Constitutions.

Le paragraphe 2 de l'article 207 nous recommande instamment de rester fidèles à notre esprit mariste: « Qu'on travaille sans cesse à fortifier les Frères dans l'esprit d'humilité, de simplicité et de modestie, en leur inspirant le mépris du monde, l'amour de la vie cachée, la crainte des louanges des hommes ».

Disons tout de suite que nous n'avons pas l'intention d'entreprendre une étude complète de cet esprit. Pareille étude serait longue et délicate. Nous devrions alors rédiger une sorte de dissertation, qui ne répondrait guère à l'allure générale de nos lettres de famille. Qu'on veuille, par exemple, se reporter au travail de longue haleine fait par lé Père Coste, S.M., sur l'esprit de la Société des Pères Maristes. Après une série de travaux d'approche, le Père Coste termine son œuvre par une synthèse de quelque 230 pages à texte très serré.

La conclusion de cette synthèse (pages 670-677), demande d'être lue avec une très grande attention. Après voir noté que pour se faire une idée exacte de leur esprit, les Maristes doivent « accepter dans la foi et l'action de grâces la réalité de leur vocation» (p. 670), et que « l'esprit mariste est une réalité ineffable qu'on ne comprend bien qu'en la vivant » (p. 670), le Père Coste conclut: « On appelle esprit mariste la commune manière de sentir et de réagir qui unit et caractérise les Maristes, dès lors qu'ils acceptent d'orienter leur vie en référence à la personne de Marie, aux instructions du P. Colin et à la tradition vivante de la Société » (p. 677).

Avec les nuances qu'il faudrait introduire pour nous, Frères Maristes, tels que nous sommes actuellement, ces considérations peuvent nous convenir parfaitement. En nous référant aux deux citations de la page 670, nous dirons que pour comprendre l'esprit de sa famille religieuse, un Frère Mariste doit, tout d'abord, accepter loyalement de « vivre selon cet esprit ». Dès ses années de formation, il doit orienter et régler sa vie selon les exigences de cet esprit, et non selon des points de vue strictement personnels ou totalement étrangers à cet esprit. Nous rejoignons ici une parole évangélique d'une profondeur extraordinaire, parole que nous ne méditerons jamais trop: «Mais celui qui agit dans lu vérité vient à la lumière » (Jn. 3, 21), ou, selon le sens littéral, plus expressif encore: « Mais celui qui fait la vérité vient à la lumière ».

Aux âmes qu'Il appelle directement à son service, Dieu donne, dès leurs premiers pas dans leur le de consacrées, des lumières suffisantes pour aller de l'avant. A elles d'y correspondre généreusement, de marcher résolument dans le sens indiqué, malgré les incertitudes et les doutes qui peuvent encore les assaillir. La pleine lumière viendra plus tard, à l'heure marquée par la Providence. Nous lisons, dans la vie de plusieurs Saints, que la certitude,

Mine et reposante, d'être vraiment là où Dieu les voulait, leur a manqué pendant de longues années. Malgré tout, ils ont « fait la vérité », avec les lumières du moment. Trop souvent, nous serions tentés de renverser cet ordre providentiel, d'exiger, en quelque sorte, toute la lumière que nous jugeons nécessaire, « avant » de faire l’œuvre que Dieu nous a réservée. Il ne faut pas vouloir « enjamber sur la Providence », comme disait plaisamment saint Vincent de Paul.

La beauté cachée de notre vocation, ses richesses de vie intérieure, ses inépuisables possibilités apostoliques, nous ne pourrons les découvrir que progressivement, sauf une grâce tout exceptionnelle. Nous avons l'impression que l'on n'explique pas toujours bien ce «mystère » de la vocation au cours des années de formation. Aux Frères responsables de cette formation, chacun à son poste respectif, de faire connaître graduellement ce que signifie

exactement la vocation de Frère Mariste, ce qu'elle exige de nous, par quel chemin chacun arrive normalement à une estime profonde et à un amour passionné de « sa » vocation spéciale. Bien guidés, nos jeunes comprendront de mieux en mieux que la vérité ne se donne pleinement qu'à ceux qui la cherchent de toute leur âme.

Partant donc de ce paragraphe de nos Constitutions, nous voudrions répondre aujourd'hui à trois questions:

1. En général, estimons-nous et aimons-nous notre vocation de Frère Mariste, telle qu'elle est?

2. Comment arrive-t-on à un attachement inébranlable à sa vocation de Frère Mariste?

3. Comment concilier cette estime et cet amour de notre vocation avec les exigences de l'adaptation, dont il est si souvent question de nos jours?

 1. VOCATION CONNUE, ESTIMÉE, AIMÉE.

 Peut-on dire que nous, Frères Maristes du XXe siècle, nous estimons notre vocation comme nos Frères du passé? Nous essayerons d'aborder ce thème avec un réalisme lucide et ferme, mais en excluant toute forme de pessimisme.

Apprécions-nous les richesses spirituelles de notre vocation comme les appréciait notre Bienheureux Fondateur? « Un Frère, c'est un homme pour qui le monde n'est pas assez vaste, et que la possession du Ciel peut seule contenter. – Un Frère, c'est une âme prédestinée à une haute vertu et sur laquelle Dieu a des desseins de miséricorde. – Savez-vous ce que c'est que se faire Frère? Se faire Frère, c'est s'engager à se faire saint ».

Voyons-nous les possibilités apostoliques de notre vocation à la manière de notre Bienheureux Père? « Les Frères occupés à instruire et à former les enfants à la vertu, recueillent les fruits de la croix et du sang de Jésus-Christ. – L'éducation de la jeunesse n'est point un métier, c'est un ministre religieux et un véritable apostolat. – Faire connaître Jésus-Christ, faire aimer Jésus-Christ, voilà la fin de votre vocation et le but de l'Institut ». Sommes-nous vraiment conscients de la grandeur et de la noblesse que cette mission d'éducateurs religieux nous confère?

Aimons-nous notre vocation de Frère Mariste, sincèrement, profondément, passionnément même, comme le désirait le Bienheureux Fondateur? « Les Frères s'estimeront infiniment heureux de porter le nom de Marie et d'être agrégés à sa famille. Aimez votre vocation, conservez-la: c'est par elle que Dieu veut vous sauver » (Testament spirituel).

Est-ce que cette estime et cet amour pour notre vocation croissent et se purifient, à mesure que l'expérience personnelle nous révèle toujours mieux ce que Dieu, l'Eglise et les âmes attendent de nous?

En réponse à ces graves questions, il semble qu'on puisse distinguer trois groupes de Frères, sans qu'il y ait rien d'absolu dans cette division, et sans qu'il y ait un caractère définitif dans ce classement.

 a) Premier groupe: les enthousiastes de leur vocation.

 Aujourd'hui comme hier, il y a parmi nous des Frères qui, après des années plus ou moins longues de travail et d'épreuves de tout genre, ont réussi à garder intacte la flamme religieuse et apostolique de leur jeunesse. Ils refusent catégoriquement de ne voir dans leur vie de tous les jours que le seul aspect professionnel, le «métier » d'enseignant, ou tout autre emploi que l'obéissance leur a confié. En pleine maturité ou au seuil de la vieillesse, ils manifestent la même ardeur et le même enthousiasme qu'aux plus belles années de leur jeunesse.

C'est une constatation qu'un supérieur attentif peut faire assez souvent, et, chaque fois, il en est ému jusqu'au fond de l'âme. On les voudrait toujours plus nombreuses dans notre famille, ces âmes d'élite dont la générosité résiste à toutes les difficultés et à toutes les incompréhensions. On voudrait que l'Institut ne compte que des âmes aussi courageuses et aussi nobles.

Cette fidélité inébranlable ne se manifeste pas toujours à l'extérieur. Les apparences, dans une vie comme la nôtre, peuvent induire en erreur les observateurs superficiels. C'est surtout à l'occasion d'une obédience inattendue, ou dans une pénible épreuve collective, que certaines âmes révèlent leurs plus belles qualités. Combien de supérieurs ont été ainsi réconfortés par l'admirable comportement de l'un ou de l'autre Frère, dont ils n'avaient pas soupçonné jusqu'à ce jour la ferveur intense et l'esprit de sacrifice!

Quand cette fidélité existe chez la plupart des Frères d'une communauté ou d'une Province, les relations entre supérieurs et inférieurs sont simples, cordiales et harmonieuses. Quelle profonde action apostolique peut exercer un groupe de Frères, aussi intimement unis entre eux par cet attachement à la vocation qui leur est commune!

 b) Deuxième groupe: les insatisfaits de leur vocation.

 En toute famille religieuse, on peut rencontrer des insatisfaits, des désillusionnés, parfois même des plus ou moins « blasés », aussi bien parmi les jeunes que parmi les moins jeunes.

Chez quelques Frères, c'est l'aspect purement professionnel de leur vie qui semble avoir dominé. Progressivement, le « métier » a tout envahi, ne laissant plus de place, ou si peu, aux pensées d'en-haut. Par une conséquence inéluctable, ce métier, à la longue, va leur paraître dur, terriblement monotone et ingrat. D'autre part, c'est un « métier » qui prend tout leur temps, qui réclame toutes leurs énergies, qui ne les laisse pas respirer. A certaines heures de Fatigue et d'ennui, ils ont l'impression de gaspiller leur vie.

On sait qu'une vie d'enseignant ne plaît guère à la plupart des hommes et qu'elle n'attire que relativement peu de jeunes candidats. Il y a certes des exceptions, magnifiques mais plutôt rares, de professeurs civils ou de simples « maîtres d'école », qui ont aimé passionnément leur tâche. Chez nous, et en plus grand nombre, des Frères aiment réellement leur classe, leurs élèves, toute leur vie d'enseignant… Quelques-uns, peut-être, pourraient être tentés de souscrire à la réponse pessimiste, faite par un professeur civil, à une question portant sur le sens profond qu'il attachait à sa vie professionnelle: « Moi, je laboure la mer à raison de tant de milliers de francs par mois! ».

Un Frère Mariste ne devrait jamais envisager sa tâche professionnelle avec une sorte de pessimisme. Même s'il connaît des difficultés pour maintenir une bonne discipline dans sa classe, même si les succès apparents de ses efforts apostoliques ne sont pas aussi brillants qu'il le voudrait, il peut exercer une influence bienfaisante sur ceux qui lui sont confiés, dès lors qu'il ne cède pas au découragement. Nous pourrions citer ici des exemples admirables de cette influence réelle, bien que discrète.

L'insatisfaction dont nous avons parlé plus haut peut provenir de causes diverses qu'il serait trop long d'analyser dans une simple Circulaire. Signalons toutefois trois causes qui nous paraissent intervenir plus souvent.

 1. Une première cause d'insatisfaction, dont l'action se fera sentir à distance, c'est une préparation insuffisante pendant les années de formation, spécialement pendant le scolasticat. Il ne faut pas songer uniquement, ni même principalement, à la préparation intellectuelle et professionnelle, mais à ce « training » moral que devraient recevoir des Frères qui, plus tard, auront à exercer une influence réelle sur leurs élèves. La culture intellectuelle et les aptitudes professionnelles renforcent l'autorité d'un maître, mais ne la créent pas. Elle dépend principalement de certaines qualités de caractère, qu'on peut développer chez nos jeunes, surtout au scolasticat. Sans une autorité suffisante, un professeur se sentira rapidement impuissant en face de ses élèves.

Rappelons encore une fois que le stage préparatoire à notre vie active ne doit pas être écourté, sauf raisons très graves. Les responsables doivent tenir fermement à cette règle de conduite. Car, par suite du manque de personnel qui se manifeste si souvent, de nos jours, au commencement d'une nouvelle année scolaire, la tentation peut être très forte de supprimer une année de formation à quelques jeunes Frères. On s'en repentira trop souvent.

 2. Une autre cause peut expliquer l'insatisfaction de leur vocation chez quelques Frères. Ils ont « mal commencé » leur vie active. Au départ, ils étaient bien disposés, mais le premier milieu de communauté et d'apostolat ne leur a pas été favorable. Plus l'idéal d'un jeune Frère est haut placé. pur et noble, plus il importe de lui ménager une transition heureuse entre la période de préparation et celle de l'action proprement dite. Des efforts trop grands, dès les premiers jours, peuvent fatiguer outre mesure, surmener et déprimer celui qui manque encore d'expérience. Des échecs trop sentis peuvent décourager définitivement un débutant, pourtant bien disposé. Des critiques trop fréquentes ou maladroites, un certain isolement par les autres, le manque de direction et d'encouragement peuvent aigrir ou paralyser, selon le type de réaction de chacun. Plus les intentions étaient droites chez le jeune Frère, plus le choc psychologique provoqué par ces expériences pénibles peut être redoutable en lui, surtout s'il a une nature sensible.

 3. Dans notre famille religieuse, nous croyons qu'une autre cause est plus fréquente et bien plus dangereuse. A n'importe quel âge, on peut se relâcher dans sa ferveur, négliger peu à peu le devoir de la prière, et, par voie de conséquence, négliger également les autres moyens de sauvegarder sa vie intérieure. Nous savons avec quelle insistance et avec quelle vigueur d'expression notre Bienheureux Père est revenu sur la nécessité de la prière dans notre vie. Nos exercices de piété peuvent parfois être viciés par une certaine routine, ou plus ou moins stérilisés par nos multiples distractions. Malgré tout, nous devons y rester fidèles, coûte que coûte. Toute négligence habituelle dans notre vie de prière risque de nous faire glisser rapidement vers la médiocrité spirituelle, et celle-ci conduit à une sorte d'insatisfaction systématique.

Quelle qu'en soit la cause, cette insatisfaction fait un très grand mal à un religieux. Il ne goûte plus la paix et la joie intime de son état. Il n'éprouve aucune fierté devant sa tâche de religieux-éducateur. Dans ces conditions, il ne peut être, pour les élèves qui lui sont confiés, le maître, le conseiller et le guide dont ils ont besoin. Non seulement il n'est plus de ceux dont l'exemple attire de nouvelles vocations, mais, par sa seule présence, il peut compromettre la persévérance de ses jeunes confrères.

 c) Troisième groupe: les découragés.

 En toute famille religieuse, on peut rencontrer des découragés. Il ne s'agit pas, chez eux, d'une crise passagère, due à quelque échec ou à quelque épreuve, mais d'une disposition d'esprit contre laquelle ils ne semblent pas réagir.

Certains ont toujours quelque plainte sur les lèvres. « Je ne suis pas bien ici; je crois que je devrai me retirer »… Ils ne le feront pas toujours, mais ils se comporteront habituellement comme des religieux abattus, sans courage et sans vigueur d'âme. Doucement, affectueusement, il faudrait leur répéter: « Mais à quel prix avez-vous estimé votre vocation? Tôt ou tard, une vocation supérieure se paie, nous disent les saints… A qui vous êtes-vous donné au jour de votre profession? Vous passez peut-être, en ce moment, par l'école de la souffrance! N'est-ce pas chose normale dans la vie d'un chrétien, d'un religieux? ».

D'autres s'insurgent contre les exigences de l'obéissance, contre les difficultés de la vie commune… « Je ne m'entends pas avec mes confrères, avec mes supérieurs. Personne ne veut me comprendre. Je n'y tiendrai pas ». Combien de fois a-t-on entendu des lamentations de ce genre, provenant parfois de religieux qui avaient bien débuté! Nous ignorons le drame qui se joue dans leur âme, ou nous n'en devinons que peu de chose. Il importe de ne pas l'oublier et de ne pas recourir à des explications simplistes, quand il s'agit de juger un cas particulier de découragement. Toute âme qui souffre mérite d'ailleurs un très grand respect, de la part des confrères en religion, plus encore des supérieurs responsables.

Rappelons ici une observation déjà faite ailleurs. A l'égard de la vocation de nos Frères, nous sommes tous plus ou moins responsables. Chacun d'entre nous est pour ceux qui l'entourent une cause de vie, de force et de courage, – ou une occasion de découragement, de déchéance et de ruine morale. Notre idéal personnel, notre exemple de tous les jours, notre vie tout entière sont des éléments nécessaires pour la bonne marche de notre Congrégation, pour le succès de la tâche commune, et aussi pour le bonheur et pour la persévérance de chaque membre du corps. Parfois, nous sommes portés à « juger» sévèrement celui qui est tombé dans le découragement, ou, si nous cherchons quelque coupable, nous pensons instinctivement à d'autres que nous.

Mais il faut aussi que chaque religieux admette que le premier responsable de sa vocation est et restera toujours lui-même. Nous ne devons jamais perdre de vue l'importance capitale des convictions pour tout ce qui touche à la persévérance. « Il n'y a de puissance que dans la conviction », a-t-on dit. Or, la conviction d'être là où « Dieu nous veut » suppose une formation méthodique à laquelle on a donné généreusement toute sa contribution personnelle, une maturation souvent lente, un entraînement constant à l'effort, au sacrifice, au renoncement. A vouloir toujours rejeter la faute de ses « crises » sur les autres, on se trompe soi-même et l'on ne résoudra pas le problème essentiel de sa destinée. Le découragement n'est jamais une bonne solution, nous le savons. Nous savons aussi qu'il est dangereux de le laisser pénétrer dans notre âme, ne fût-ce qu'en passant. Avec la grâce de Dieu, nous pouvons résister à tous les assauts. Cette grâce nécessaire, nous devons la demander, sans jamais nous lasser. A la racine de tout véritable découragement, il y a l'abandon ou du moins l'insuffisance de la prière. Car certaines luttes intérieures dépassent nos forces: « Pour les hommes c'est impossible, tuais pour Dieu tout est possible » (Mt. 19, 26). 

Il. COMMENT S'ACQUIERT ET SE DÉVELOPPE L'ESTIME DE NOTRE VOCATION.

 En premier lieu, dans toutes nos maisons de formation, on veillera à bien faire connaître la Congrégation, afin de la faire estimer et aimer par  les candidats qui sont bien disposés. Dans la suite, il appartiendra à chaque Frère, à travers les étapes d'une vie plus ou moins longue, de veiller jalousement sur le trésor de sa vocation. Personne ne pourra jamais le remplacer dans ce soin.

 A. Vocation mariste et formation.

 Chez nous, la formation « mariste » commence dès le juvénat. Elle doit se continuer au noviciat et au scolasticat. Normalement, il faut du temps pour faire connaître le vrai visage de notre Congrégation, pour la faire estimer et aimer. Bien entendu, il faut que les candidats manifestent des signes d'appel à cette vocation.

Cette éducation « mariste », méthodique et continue, est devenue particulièrement nécessaire par suite de la longue durée des études préparatoires à notre vie active. Quels que soient les programmes, elle est toujours possible, car elle ne réclame pas un temps « à part ». Il faut plutôt s'efforcer d'établir et de maintenir, dans chaque communauté de jeunes, un climat vraiment mariste, un idéal, un esprit et un genre de vie en harmonie avec les exigences de notre vocation spéciale. Le bon choix des lectures, des méditations et des sujets de conférences aide beaucoup à créer ce climat favorable. Par-dessus tous les moyens, l'exemple des maîtres constitue le facteur essentiel de cette formation typiquement mariste. Lorsqu'un Frère aime sincèrement et profondément sa vocation, il n'a pas besoin de le proclamer; cet amour rayonne, cette fierté de son état et de ses fonctions transparaît dans tous les actes du religieux et de l'éducateur. Ce serait un contresens impardonnable de placer, dans une maison de formation, un Frère à qui sa vocation « ne dirait rien »…

Cette formation exige la collaboration loyale de tous, des non-enseignants comme des professeurs. Une faille dans cette œuvre commune, un exemple malheureux, une seule parole maladroite ou trop dure, peuvent, d'un seul coup, compromettre les meilleurs efforts des autres membres de la communauté.

Dans la Circulaire de mai 1964, nous avons déjà fait allusion à ce rôle particulier de nos maisons de formation. Quelques remarques supplémentaires seront peut-être ici à leur place.

 1. En ce qui concerne la connaissance et l'estime de la vocation de Frère Mariste, il ne faut pas trop demander à nos débutants. Un formateur expérimenté le sait; il ne s'étonne nullement de devoir commencer parfois à zéro avec l'un ou l'autre de ses disciples, surtout quand ceux-ci sont très jeunes. Malgré la vigilance, le savoir-faire et le flair psychologique de nos recruteurs, quelques candidats, sans manifester de contre-indications précises, semblent vraiment peu attirés par notre idéal religieux et apostolique.

Il convient donc d'attendre quelque temps, de ne pas juger précipitamment les cas particuliers. Il faut observer et examiner chacun sans parti pris, sans pessimisme, en éducateur habitué à deviner les richesses cachées des jeunes. Dans une conférence de retraite, un excellent prédicateur nous disait que, chez eux, il fallait en moyenne une vingtaine d'années pour former le vrai religieux. Le germe de la vocation, pour se développer harmonieusement dans l'âme d'un jeune aspirant, a besoin de temps et de soins. L'éducateur impatient risque d'éloigner définitivement du service spécial de Dieu des jeunes, dont les défauts, peut-être trop apparents, voilent en réalité de très belles dispositions pour. l'idéal religieux.

 2. Toutefois, il ne faut pas attendre trop longtemps pour faire la sélection qui s'impose dans un juvénat, éventuellement dans un postulat ou un noviciat. Il faut la faire dans la perspective spéciale de notre vocation de Frère Mariste. Nous sommes des « religieux laïcs », de simples Frères comme certains insinuent plus ou moins malicieusement. Notre caractère de religieux est indiscutable. Notre mission d'éducateurs chrétiens, quelles qu'en soient les modalités extérieures, présente une noblesse qu'on a souvent mise en relief. Mais notre vie de tous les jours est humble, modeste, effacée. Nous n'attirons guère l'attention du monde qui nous entoure. Le dévouement le plus pur reste habituellement obscur et caché. Nous-mêmes, nous ne voyons pas toujours les résultats de nos efforts, de notre labeur et de nos sacrifices.

Discrètement, un directeur de maison de formation contrôlera si ses disciples comprennent peu à peu le vrai sens de la vocation de Frère Mariste, s'ils entrevoient de plus en plus clairement ce que cette vocation exigera d'eux plus tard. Il verra si ce programme mariste ne reste pas inaccessible à l'un ou à l'autre. Il s'en trouve, en effet, qui ont l'air de se donner, alors qu'en réalité ils n'ont pas saisi ce qu'on attend d'eux, ou qu'ils réservent, dans le secret de leur cœur, leur adhésion éventuelle à un plus tard », qui n'arrivera jamais. En tout cas, dès qu'on a une certitude suffisante qu'un candidat n'est pas fait pour notre Congrégation, ou qu'il n'est pas disposé à se donner, il ne faut absolument pas insister pour le retenir. La vie religieuse doit être une élite dans l'Eglise; elle fait appel à des volontaires, à des « convaincus ».

 3. Ce serait une erreur grave de présenter à nos jeunes la vie d'un Frère comme une existence tranquille, assez confortable, exempte de préoccupations, bien à l'abri des risques du monde. Si nous ne faisons pas résolument appel à la générosité des candidats, à leur courage, à leur esprit de sacrifice et même à leur audace juvénile, nous ne pourrons jamais constituer une élite de religieux-éducateurs. La vie d'un Frère, qui entend répondre pleinement à son idéal, est exigeante, parfois dure; mais elle devient splendide quand elle est vécue dans la ferveur. Or, les jeunes, vraiment appelés et bien disposés, comprennent admirablement cet idéal, souvent même mieux que des adultes.

Dans une conférence aux prêtres de son diocèse, le cardinal Saliège insistait sur cette idée avec une vigueur exceptionnelle: « La jeunesse d'aujourd'hui n'a pas. peur des exigences chrétiennes. Ce sont souvent les confesseurs qui en ont peur. Plus vous serez exigeants, plus les jeunes vous seront fidèles. Seulement alors, ils comprendront que vous les aimez… Sous prétexte d'être de leur temps, beaucoup de jeunes prêtres ne sont plus de leur époque. Ils retardent. Les jeunes gens ne craignent pas l'effort, ne craignent pas le risque, ne craignent pas le danger. Tout au contraire, plus on leur demande, plus on obtient. Ils n'ont pas peur des excursions dangereuses en montagne, des ascensions pénibles, des sports fatigants. Pas de bonheur, pas de vie chrétienne sans effort ». Et nous pouvons ajouter: Pas de vie mariste authentique sans effort et sans esprit de sacrifice! Il est totalement inutile de retenir, pour le service spécial du Christ et de l'Eglise, des jeunes gens qui n'entendraient rien à ce « don de soi ».

Toutefois, il importe de ne pas forcer cette note et de ne pas juger trop vite. Certains espiègles, qu'on doit souvent reprendre et corriger, ne manquent pas nécessairement de loyauté, de bonne volonté ou d'esprit de sacrifice. Une certaine dose d'espièglerie, fréquente chez des garçons riches de santé et pleins de vitalité, est une chose presque normale, oserait-on dire. Elle n'a rien à voir avec cette légèreté inquiétante, enracinée dans la nature de quelques-uns, légèreté de laquelle il convient toujours de se défier grandement. L'espièglerie normale d'un jeune disparaît avec les années; ses qualités de fond survivent et s'améliorent. Par contre, le manque de générosité, l'égoïsme, le refus du sacrifice, la peur de l'effort sont des signes négatifs, dont il faut soigneusement tenir compte quand il s'agit du choix définitif des appelés.

 4. Malgré tout ce que l'on dit ou écrit sur la jeunesse contemporaine, nous devons être résolument optimistes dans la formation mariste de nos jeunes.

Etre optimiste, c'est croire fermement à la puissance infinie de la grâce du Christ, qui opère silencieusement dans les âmes qu'Il daigne appeler à son service spécial. C'est croire à l'efficacité naturelle et surnaturelle de nos humbles efforts, dès lors que nous y joignons la prière et l'exemple de notre vie. C'est croire enfin aux bonnes dispositions de la grande majorité des candidats qui viennent se présenter dans nos maisons de formation.

 5. Nous ne reviendrons pas sur le rôle particulièrement important du scolasticat dans la formation «mariste» de notre jeunesse. On ne redira jamais trop fortement qu'il faut y maintenir une atmosphère de calme et de sérénité dans les études, éviter coûte que coûte la simple course aux diplômes, y maintenir un climat de charité sincère et de véritable entraide fraternelle, et, enfin, qu'il ne faut pas laisser s'étioler l'esprit de sacrifice et la générosité foncière de nos jeunes.

 6. Pendant les longues années de formation, les vacances sont des étapes dont on sous-estime parfois l'influence profonde sur l'évolution d'une vocation. Elles comportent évidemment un repos physique et intellectuel, une véritable détente bienfaisante pour tout l'organisme, une « relaxation » comme on dit volontiers de nos jours, mais elles ne devraient jamais favoriser, si peu que ce soit, la paresse ou la dissipation. « Sin is the child of idleness » (Le péché est l'enfant de l'oisiveté), dit énergiquement un proverbe anglais.

« On écrit beaucoup sur la spiritualité du travail. Ne néglige-t-on pas celle des loisirs? » (Louis Chevallier). D'emblée, il faut dire que cette spiritualité des loisirs suppose le repos nécessaire entre deux périodes de travail, mais exclut formellement l'inactivité ou l'oisiveté. Dans l'histoire des communautés religieuses à travers les âges, des auteurs ont signalé les conséquences néfastes du « taedium vitae », de ce dégoût de la vie qui peut s'insinuer dans la vie d'un moine. Ce taedium vitae, qui étouffe rapidement les plus belles qualités d'une âme consacrée, surtout pendant la période de la jeunesse, est très souvent la conséquence d'une vie inactive, sans objet, sans idéal.

Il importe donc d'organiser sagement le temps des vacances, si long dans certains pays. C'est un problème d'une actualité brûlante pour la jeunesse en général. C'est également un problème important pour notre jeunesse mariste. Cette organisation se fera avec intelligence, avec doigté et avec une grande souplesse, en respectant cette raisonnable liberté, sans laquelle on ne pourrait plus parler de détente proprement dite, ni même de formation continuée. Notons que cette organisation, si elle est bien faite, peut magnifiquement contribuer à mieux faire connaître à nos jeunes les richesses de leur vocation, soit au point de vue religieux, soit au point de vue apostolique.

 7. Qu'il nous soit encore une fois permis d'insister sur une observation capitale pour l'éducation mariste de nos jeunes. Elle exige impérieusement la « direction ». Nous entendons, par là, en premier lieu celle qui est réservée au directeur spirituel proprement dit; ensuite, cet entretien fraternel que nous qualifions imparfaitement de « compte de conduite ». C'est de ce dernier que nous voulons surtout parler en ce moment.

Sans cet entretien « régulier », vraiment cordial, affectueux, surnaturel, d'une grande largeur de compréhension, qui constitue un véritable réconfort pour un jeune, la formation mariste est à peu près impossible, et les vocations elles-mêmes sont en péril. Chacun de ces entretiens est un soutien efficace dans le trouble des difficultés, des luttes et des petits échecs de la vie de tous les jours. Il apporte la lumière, le courage, la joie, l'optimisme. Toute crise surmontée est un enrichissement, a-t-on dit. Or, un conseiller sérieux et totalement dévoué aux jeunes, peut facilement aider les « siens » à surmonter leurs crises successives. Par là, il contribue puissamment à éclairer et à fortifier les vocations.

 8. Résumons-nous. Que tous les « responsables » sachent unir fraternellement leurs efforts pour que nos jeunes bénéficient d'une formation vraiment mariste pendant leurs études! Grâce à Dieu, cette volonté d'union se manifeste de plus en plus dans l'Institut. Là où elle est forte et constante, on peut en admirer très vite les magnifiques résultats.

 B. Fidélité de toute une vie.

 1. Vocation et responsabilité.

Toute vocation supérieure est essentiellement un « don de Dieu ». L'homme n'y a aucun droit. Ce don lui est offert à un moment déterminé de sa vie, parfois seulement à la « onzième heure ». Il peut l'accepter ou le refuser, car Dieu respecte toujours la liberté de l'homme: « Si vis perfectus esse… »!

Au cours des années de formation, tout particulièrement pendant le noviciat, la doctrine de la vocation a dû être bien expliquée à nos aspirants. 11 est essentiel pour leur avenir qu'ils entendent parfaitement que la vocation est une « offre » qui leur a été faite, et non un pur choix personnel de leur part. Dans le sens fort du terme, le choix vient de Dieu: « Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, c'est moi qui vous ai choisis… » (Jn. 15, 16). Les interventions des hommes qui entourent l'élu sont secondaires. Elles n'ont pas pour but d'imposer le choix à quelqu'un, mais seulement de le rendre possible. Il faut admirer la formule employée par S. S. Jean XXIII pour définir la vocation: « La vocation religieuse est la réponse joyeuse de l'âme au choix de Dieu » (Homélie à la cérémonie de canonisation de S. Maria. Bertilla Boscardin, 11 mai 1961).

L'acceptation elle-même, si loyale et si totale qu'elle puisse être, laisse intacte notre liberté. Le talent reçu peut être ensuite mal employé ou même dédaigné. En fait, le « oui » du religieux à l'offre divine devra être redit tout le long de la vie. Ici-bas, on ne sera jamais confirmé en grâce.

Le religieux doit se sentir responsable du don reçu. C'est d'après cette conviction fondamentale qu'il devra régler toute sa conduite à partir de l'acceptation définitive. Il ne lui suffira pas de persévérer « matériellement » dans sa vocation, d'être toujours « présent » dans le groupe de ses frères en religion, mais il lui faudra répondre pleinement aux exigences de l'appel entendu. Dans sa nouvelle famille, il aura à cœur d'être un membre actif et utile. Il s'y sentira à l'aise, bien chez lui. Il rayonnera sa joie intime et son humble fierté d'être un Frère Mariste.

C'est parce que cette conviction essentielle manque que les difficultés extérieures peuvent être dangereuses pour la vocation d'un Frère: elles pénètrent dans la place forte de l'âme, qu'elles affaiblissent et désorientent, Le religieux est alors tenté de chercher ailleurs la paix et la joie qu'il n'a pas, ou il se résigne à mener une vie médiocre, qui ne pourra jamais le contenter.

C'est là un fait brutal et douloureux, que tous les Instituts religieux connaissent, à des degrés divers, depuis leurs origines les plus lointaines. Quelques membres de la « famille » s'en vont, alors qu'ils semblaient à leur place, qu'ils s'étaient donnés librement à cette famille, qu'ils avaient aimé leur nouveau « foyer » et qu'on regrette leur départ. D'autres restent, mais, visiblement, ils ne sont pas heureux et ils ne contribuent pas à rendre heureux ceux qui les entourent.

Arrêtons-nous un moment sur cette double constatation. C'est celle qui constitue l'épreuve la plus pénible pour les supérieurs et pour tous ceux qui aiment sincèrement et profondément leur Institut. C'est celle qui étonne, désoriente et scandalise facilement nos jeunes religieux, qui comprennent moins que leurs Frères aînés jusqu'où peut aller la faiblesse de la nature humaine. Enfin, c'est celle qui provoque, de la part du inonde qui nous entoure, des jugements peu favorables à notre idéal religieux, ce qui peut compromettre gravement le recrutement de bonnes vocations.

 2. En face des départs.

 Les causes des départs sont nombreuses et peuvent être très diverses. Elles ont été longuement étudiées, soit dans les traités consacrés spécialement à la vie sacerdotale ou religieuse, soit, à l'intérieur d'un Institut, par les supérieurs ou par des groupes d'études. La Sacrée Congrégation des Religieux s'est elle-même occupée très sérieusement de ce grave problème. Elle a donné, à ce sujet, des conclusions pratiques que les responsables auront à cœur de relire et de méditer régulièrement. Avec une lucidité calme, avec un sincère amour et un profond respect pour les âmes, les supérieurs se doivent d'étudier, selon leurs possibilités, les départs qui se produisent dans leur secteur.

Les explications générales sont connues. Il n'entre pas dans notre propos de les reprendre, moins encore de les commenter. Comme les statistiques, les « causes générales » n'ont qu'une valeur relative; elles ne valent jamais, telles quelles, pour les divers cas particuliers.

En effet, à l'origine de tout départ regrettable, c'est-à-dire d'un départ qui n'aurait pas dû se produire, l'expérience nous permet de conjecturer presque toujours une cause strictement personnelle, qui échappe à l'observateur le mieux placé, même aux meilleurs amis. Elle est, et elle reste parfois pour toujours, le secret de celui qui s'en va. Pourquoi tel religieux n'est-il pas resté fidèle à l'appel entendu? En dernier lieu, après avoir parcouru la série des causes apparentes ou possibles, on se trouve incapable de déterminer celle qui a vraiment provoqué la décision de partir. Devant les mêmes difficultés, les mêmes échecs, les mêmes tentations, l'un résiste obstinément, l'autre faiblit et perd courage. Encore une fois, personne ne peut vouloir à notre place.

Dans l'Evangile, Notre-Seigneur a multiplié les avertissements sur la faiblesse de l'homme, sur la nécessité de la prière et de la vigilance, et, en même temps, il a placé chacun de ses disciples devant sa propre responsabilité. « Veillez et priez, de peur que vous ne tombiez en tentation. L'esprit est prompt, mais la chair est faible » (Mc. 14, 38). « …Mais celui qui persévérera jusqu'à la fin, celui-là sera sauvé » (Mt. 10, 22 et 24, 13). Bien entendu, dans ces passages, il est question directement du salut de l'âme, mais l'avertissement vaut également pour la vocation reçue. Ces mises en garde se retrouvent dans tout le Nouveau Testament, comme dans toute la tradition de l'Eglise. « Sois fidèle jusqu'à la mort, et je te donnerai la couronne de la vie » (Apoc. 2, 10). « Ainsi que celui qui croit être debout, prenne garde de tomber » (1 Cor., 10, 2). « Nous pouvons perdre en un moment par notre négligence, ce que nous avons acquis avec beaucoup de peine par le secours de la grâce » (Imit. J. C., premier livre, ch. 21, 6).

Ces vérités de base ne doivent pas nous faire glisser dans une sorte de pessimisme, ni provoquer une angoisse morbide devant les incertitudes de l'avenir, mais nous devons les méditer sérieusement pour ne pas oublier ce que nous sommes et ce que nous devons faire. Nous sommes des hommes et non des « anges ». Nous pouvons et nous devons tremper notre caractère et nous habituer à résister à toutes sortes de difficultés et de tentations, mais nous ne pourrons jamais franchir les limites de notre nature. La sagesse populaire a bien noté cet aspect éternel de notre faiblesse: «Pour une vertu qui nous fait marcher, que de vices qui nous font courir », dit énergiquement un proverbe. Des convictions qui ne seraient pas humbles, qui ne nous feraient pas recourir à la prière et qui excluraient la défiance raisonnable de soi-même, ne garantiraient absolument pas notre avenir. « Les âmes trop sûres d'elles-mêmes font trembler », disait saint Alphonse de Liguori.

Le religieux vraiment convaincu connaît et apprécie les richesses de sa vocation. A mesure que les années passent, il l'estime et l'aime davantage. Et parce qu'il s'est donné tout entier, en homme réaliste, il sait défendre sa vocation, aussi bien contre les périls du dedans, ceux qui trouvent leur origine dans sa propre nature, que contre ceux du dehors: incompréhensions, oppositions, difficultés dans son emploi… Pour persévérer, il faudra toujours accepter résolument de lutter. C'est ce que saint Paul nous fait entendre très clairement par son propre exemple : « C'est par la grâce de Dieu que je suis ce que je suis, et sa grâce à mon égard n'a pas été stérile. Loin de là, j'ai travaillé plus qu'eux tous: oh! non pas moi, mais la grâce de Dieu qui est avec moi » (1 Cor. 15, 10).

 3. Persévérance « résignée ».

 Chez un religieux, il y a toujours quelque chose de grand et de noblement humain dans la simple fidélité extérieure à l'engagement qu'il a contracté de tenir jusqu'à la mort. L'Imitation de Jésus-Christ signalait déjà le mérite de cet effort constant: « Ce n'est pas peu que de vivre dans un monastère ou dans une communauté, de n'y donner aucun sujet de plainte, et d'y persévérer sans se relâcher de ses devoirs » (Livre I, XVII, 1).

Toutefois, on peut rencontrer des persévérances « résignées », sans vigueur et sans joie. Celui qui vit ainsi ne semble pas heureux dans cette famille religieuse qui est devenue la sienne. Il reste parce qu'il l'a promis à Dieu, à l'Eglise et à son Institut, parfois aussi pour ne pas décevoir les personnes qui lui ont fait confiance et qui ont misé sur lui, ses parents ou ses amis. Une attitude pareille a certainement du mérite devant Dieu, d'autant plus que nous ignorons s'il n'y a pas quelque épreuve providentielle dans ce manque de joie intérieure. Mais ce genre de fidélité n'édifie guère ceux qui en sont témoins; elle ne plaît à personne et n'attire pas les âmes. Souvent, les jeunes membres de la communauté sont déconcertés par la tristesse habituelle que manifeste l'un ou l'autre confrère plus âgé, car ils ne se l'expliquent pas.

Cette insatisfaction peut avoir des causes physiologiques: malaises habituels, repos insuffisant, inquiétudes fréquentes sans raisons valables… D'autre part, des échecs  douloureusement ressentis, non manifestés aux confrères ou aux supérieurs, cachés soigneusement au fond de l'âme, peuvent être à l'origine de ce manque visible de joie et de dynamisme. Et, comme nous l'avons déjà insinué plus haut, il n'est pas exclu que, pour certains Frères, cette épreuve puisse avoir une cause providentielle… Dans les cas que nous venons d'indiquer, il importe grandement que supérieurs et confrères se montrent d'une extrême délicatesse dans leurs rapports avec ceux qui souffrent. L'amour fraternel seul peut les aider à retrouver leur équilibre intérieur, leur sérénité et leur joie intime. Ajoutons toutefois que, dans un Institut comme le nôtre, des causes de tristesse de ce genre sont plutôt rares.

Le plus souvent, cette tristesse habituelle trouve son origine dans les réserves qu'on a faites dans le don de soi-même. On ne s'est pas donné entièrement à Dieu, ou l'on s'est repris partiellement. On n'aime pas la part que Dieu nous a réservée. A la rénovation solennelle des vœux, on (hante bien, avec les autres: « Le cordeau me marque un enclos de délices et l'héritage est pour moi magnifique » (Psaume Conserva me), mais les sentiments intérieurs ne sont pas en harmonie avec les mots. On est loin de l'enthousiasme que manifestent généralement les nouveaux profès, et que l'on a peut-être goûté soi-même, jadis.

La ferveur et la générosité du jeune religieux sont sincères et souvent émouvantes. 11 leur manque d'avoir passé par le creuset de l'épreuve, afin (le se purifier et de s'affermir. Ce n'est qu'au terme d'une série plus ou moins longue d'actes de renoncement et d'abnégation, de luttes et d'épreuves parfois douloureuses, qu'un Frère sera capable d'approuver la plaisante définition que le Père Charles, S.J., donne de la sainteté: « La sainteté, mon Dieu, si je la mettais là où Vous-même la mettez pour moi, à vivre dans cette chambre hiver comme été sans murmurer, à faire ma besogne, à sourire aux fâcheux, à garder mon cœur sans amertume et mon âme sans colère, à me dévouer au service de tous, à ne pas me préoccuper de me juger, de me peser dans les balances de précision et comme si le moindre de mes petits malaises troublait l'équilibre des constellations ».

Combattons en nous toutes les formes de tristesse, car celle-ci est en flagrante contradiction avec le sens même de notre oui à Dieu. Elle défigure le visage de notre Institut, à nos propres yeux comme aux yeux de ceux qui nous regardent vivre. Elle nous rend peu à peu incapables de comprendre la grandeur de notre vocation et ses immenses possibilités apostoliques. Par là, notre action risque de devenir stérile, surtout sur ces jeunes que le Seigneur nous a confiés. Ils ont le droit de pouvoir compter sur le courage, la générosité et la joie rayonnante de leurs maîtres… Le Bienheureux Fondateur avait fort bien saisi cette exigence de notre vocation de Frère: « Les hommes enclins à la tristesse et à la mélancolie ne conviennent pas à la vie religieuse ni à l'enseignement ».

 4. Vocation fidèle et esprit de sacrifice.

 L'esprit de sacrifice est inséparable de la vie religieuse. Ce mot de « sacrifice » ne plaît pas fort à nos contemporains, dit-on. La réalité qu'il couvre s'impose aujourd'hui comme hier. Comment un religieux pourrait-il oublier l'invitation si claire du divin Maître: « Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il se renie lui-même, se charge de sa croix chaque jour, et qu'il me suive » (Luc. 9, 23).

Il serait dangereux d'oublier cette loi essentielle de la sanctification personnelle et de l'apostolat efficace. Il est bien question de sacrifices réels, donc d'accepter courageusement ce qui coûte à notre nature, de ne pas reculer devant les multiples croix providentielles qui s'offrent à nous, au fil des jours, des mois, des années. Sachons même remercier Notre-Seigneur de nous juger parfois dignes de souffrir un peu plus que d'habitude.

Dans les maisons de formation, il faut l'espérer du moins, on n'oublie pas de bien présenter cette loi du sacrifice dans notre vie mariste. Les jeunes qui sont appelés à notre Congrégation et qui sont bien disposés l'acceptent facilement, et même avec une grande générosité. Par contre, il se peut qu'un Frère la perde de vue dans la vie active, en grande partie parce qu'il ne la médite pas assez souvent, et qu'il écarte même trop facilement ce thème de méditation, malgré les invitations formelles de tout le Nouveau Testament, spécialement des Evangiles et de saint Paul, malgré les appels fréquents de l'Eglise, surtout dans les temps actuels (Il n'est que de lire attentivement les textes!), malgré la tradition ininterrompue de la vie religieuse sur ce point…

A tout prix, il faut éviter d'identifier une vie de sacrifice avec une vie triste, solitaire, de repliement sur soi. Bien au contraire, l'expérience des siècles a confirmé ce que la foi nous laissait entrevoir: que l'acceptation courageuse des «croix» reste la source pure et intarissable des joies chrétiennes les plus profondes. « La croix suinte le baume », disait le saint Curé d'Ars.

Le religieux qui ne recule pas devant les sacrifices ne discute pas la forme spéciale que l'appel du Seigneur a prise pour lui. Il sait fort bien qu'il importe peu d'être de telle ou telle religion, et que l'essentiel est de répondre pleinement à toutes les exigences de sa vocation. C'est celle-ci qu'il estime et qu'il aime. C'est dans celle-ci qu'il est toujours prêt à donner le meilleur de lui-même. C'est dans sa vocation qu'il désire mourir. « Le Seigneur, qui sait que l'habit ne fait pas le moine, ne regarde pas à la couleur de la robe, mais à l'humble générosité d'un cœur qui cherche à se donner à Lui de manière de plus en plus complète. Mais cela ne peut se réaliser que dans la soumission aux dispositions providentielles qu'on ne doit pas vouloir autres qu'elles ne sont » (Marcel Denis, cf. Revue des Communautés Religieuses, 15-2-1961).

 III. FIDÉLITÉ ET ADAPTATION.

 A) Pas d'opposition entre les deux.

 1. C'est l'Institut, tel qu'il a été pensé et voulu par le Bienheureux M. Champagnat, tel qu'il est par son esprit propre, que nous devons aimer, servir, maintenir nous-mêmes, et que nous devons transmettre à nos successeurs. C'est là ce que nous devons entendre par la véritable fidélité.

D'autre part, cet Institut vit dans le temps. Comme toute institution humaine, comme l'Eglise elle-même, il passe nécessairement par une évolution continue, plus ou moins rapide selon les époques. Pour pouvoir continuer la mission que son Fondateur lui a confiée, il doit s'adapter à un milieu qui ne fait que changer. Cette adaptation, qui respectera toujours l'esprit primitif, portera principalement sur l'organisation générale de l'Institut et sur les moyens pratiques de réaliser notre apostolat. D'autre part, des adaptations secondaires ont été et seront toujours imposées par la diversité des pays où l'Institut s'est établi.

 2. Il importe donc grandement de déterminer ce qui se rapporte directement à l'esprit de notre Institut, car cet élément essentiel, base et raison d'être de notre famille religieuse, ne peut être modifié sans compromettre notre avenir. Par contre, tout ce qui est « secondaire » peut et doit même changer. Si l'esprit caractéristique d'une Congrégation était transformé, il faudrait dire qu'elle a renié ses origines pour s'engager dans de nouvelles voies. En fait, l'ancien Institut aurait disparu; un autre l'aurait remplacé. La Lettre Apostolique « Unigenitus Dei Filius », de Pie XI (19 mars 1924), insiste avec vigueur sur ce point (cf. dans nos Circulaires, vol. XV, pages 332-333).

Dans la Circulaire du 8 décembre 1960, nous avons brièvement esquissé ce qui est essentiel, dans notre Institut, pour que nous ne trahissions pas nos origines, ni dans notre vie religieuse proprement dite, ni dans la pratique de notre forme d'apostolat. Nous nous permettons de renvoyer simplement à cette Circulaire (vol. XXII, pp. 501-504).

Que de fois nous avons eu l'occasion d'admirer l'exemple des Pères du Concile Vatican II. Ils se trouvent en face de problèmes multiples et graves. Les points de vue peuvent différer sur les solutions que les temps actuels requièrent. Mais, chez tous, il est aisé de noter le souci dominant de rester totalement fidèles au divin Maître et à l'Eglise qu'Il a fondée.

 3. En dehors de nos traditions fondamentales, qu'il faut absolument maintenir intactes, il y a l'immense champ des adaptations utiles, parfois nécessaires à la bonne marche de l'Institut. C'est la loi même de la vie. « On n'arrête pas la vie; on s'y insère. On l'oriente. Cela suppose alors un constant effort d'adaptation » (Cardinal Léger).

Il n'est donc pas paradoxal de dire que la fidélité -même à son Fondateur oblige toute famille religieuse à entreprendre les adaptations que les temps et les circonstances exigent. « L'adaptation est une forme de fidélité; l'immobilisme est une forme d'infidélité », affirme Mgr Marty. Mais il ajoute immédiatement: « L'adaptation ne peut être accomplie que dans la ferveur ». Ce ne sont pas les caprices ou les points de vue personnels de quelques-uns qui doivent déterminer les changements à introduire, mais les exigences mêmes de la bonne marche de l'Œuvre du Fondateur.

 4. Faut-il observer ici que l'immobilisme absolu n'a jamais été possible dans la vie religieuse? Sans être du monde, les religieux sortent du inonde et vivent en contact avec le monde, même les plus contemplatifs. L'introduction permanente de nouvelles recrues rajeunit régulièrement toute communauté. De plus, les Instituts à vie active doivent exercer une influence sur les hommes de leur temps, et clans un milieu bien déterminé. Comment concevoir une sorte de cloison étanche entre les uns et les autres?

Cette remarque vaut spécialement pour nous, Frères éducateurs. Nous sommes constamment en contact avec des élèves de tout âge, et, aujourd'hui plus qu'autrefois, avec leurs parents, avec nos anciens élèves, avec bien d'autres personnes. Nos études nous obligent à suivre de près les « idées du jour ». Dans bien des rencontres ou réunions d'éducateurs, sur le plan national et même international, nous pouvons bénéficier d'une documentation de bonne qualité sur l'esprit de notre temps. La sclérose est peut-être moins à craindre chez nous que clans d'autres institutions d'Eglise. Toutefois, un décalage regrettable reste possible, si l'on n'est pas attentif aux signes des temps.

 5. Les responsables devront veiller à ne pas franchir les limites de l'adaptation dans notre vie religieuse et apostolique. A plusieurs reprises, le cardinal Valerio Valeri, ancien Préfet de la Sacrée Congrégation des Religieux, était revenu sur ce point. De même, le Saint-Père actuel y a fait allusion de manière claire et ferme. Le Concile lui-même, occasionnellement, a parlé des règles à suivre en ce domaine délicat.

Car, s'il est vrai que des adaptations s'imposent, il serait gravement imprudent de les prendre à la légère, sans en avoir examiné sérieusement la portée exacte et sans en avoir pesé les conséquences possibles. Dans un Institut religieux, les modifications introduites engagent l'avenir pour un temps assez long. On ne réunit pas souvent un Chapitre Général pour s'occuper de ce grave problème de l'adaptation… On comprend donc que l'Eglise veille attentivement sur la qualité de cet « aggiornamento » qu'elle-même a conseillé.

 6. La tâche d'un Chapitre Général; toujours importante dans un Institut, est fort délicate à notre époque de changements rapides, en un climat de brassage d'idées exceptionnel. Dans la société actuelle, on constate une sorte de rupture des traditions, surtout en des pays où l'évolution, pour des causes diverses, est plus rapide qu'ailleurs. Il faut donc s'attendre à la rencontrer aussi chez nous. Il est indispensable, de nous rappeler, et de rappeler éventuellement à d'autres, qu'un minimum d'expérience est nécessaire à ceux qui ont mission d'adapter. Cette expérience ne doit pas être « fossilisée », c'est entendu; niais sans elle, trop souvent, on recule au lieu d'avancer. On ne progresse pas à force de multiplier les changements. Innover tout simplement pour faire du « neuf » est un jeu d'enfant, inadmissible dès qu'il s'agit de l'avenir d'une Congrégation et du salut des âmes…

 B. Sur la manière de procéder.

 1.. Confrontés avec les problèmes actuels de notre Institut, les supérieurs et tous les Frères en charge doivent se préoccuper d'aboutir à des solutions qui soient efficaces et bienfaisantes pour l'Institut. Ils sauront observer, écouter, interroger, consulter et contrôler. Ils n'oublieront jamais de prier et de méditer. L'heure venue, ils pourront dérider, humblement mais fermement, ce qu'ils jugeront de leur devoir de « responsables ».

On comprend facilement qu'un Chapitre Général exige aujourd'hui une préparation très sérieuse. Tous ceux qui seront députés par leurs confrères pour y participer devront, selon leurs possibilités. étudier les questions qui y seront certainement traitées. Plus que jamais, on peut dire qu'un Chapitre vaut ce que vaut sa préparation.

Il faut aller plus loin. Directement ou indirectement, tous les Frères doivent assumer cordialement leur part de responsabilité dans cette préparation lointaine du Chapitre. Leurs idées et leurs suggestions peuvent être très utiles. C'est surtout par l'union fraternelle des efforts de tous qu'on peut arriver aux meilleures solutions. « Il faut être plusieurs pour être intelligent », disait spirituellement le cardinal Saliège. Cela vaut tout particulièrement dans les conjonctures présentes. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que des efforts réunis ne s'additionnent que s'ils « convergent ».

La Circulaire du 24 mai 1962 a été consacrée à la volonté d'union dans notre Congrégation. Il peut être opportun de la relire. Puisque l'harmonie est nécessaire au succès, il faut l'établir coûte que coûte; chacun d'entre nous en est responsable. L'individualisme serait une dangereuse forme d'égoïsme de la part d'un Frère. Il faut savoir causer, ensemble, de nos problèmes « communs », non pour critiquer tout d'abord, mais pour comprendre. C'est après avoir loyalement cherché à comprendre la question qui nous est soumise que nous pourrons passer, éventuellement, à la critique. On renverse si facilement cet ordre que le seul bon sens réclame. Méditons cette phrase de Jean Guitton (dans son Journal de captivité): « Si tu es dans un lieu où l'on travaille, tu veilleras à ce que tes efforts ne soient pas seulement additionnés comme des points, mais multipliés comme des germes, clans une joie et une peine communes ».

 2. Nous sommes à une époque où l'on prône le dialogue, un peu dans tous les milieux et dans toutes les réunions. Dès qu'il s'agit d'aborder des questions vitales pour une famille religieuse, comme c'est le cas dans un Chapitre Général, nous devons avoir constamment présentes les conditions d'un dialogue réel et efficace. Au point de départ, il faut, chez tous ceux qui interviennent, une adhésion loyale et ferme à l'idéal même de leur vocation, l'acceptation délibérée du « programme » commun de vie et d'apostolat qui est à la base même de leur Institut. Ensuite, il faut toujours garder le respect de l'autre, de celui qui ne pense pas comme moi. Quand il y a opposition d'idées ou de sentiments, personne ne doit partir du principe: « La vérité, c'est ce que je pense, en ce moment »… Sachons écouter, attentivement, respectueusement, Enfin, en toute réunion, n'oublions pas de nous conformer aux règles traditionnelles de tout échange de vues, de toute discussion. Respectons les « formes » établies. Nous nous excusons de faire des remarques de ce genre, mais nous sommes tous exposés à les oublier en certaines occasions…

Il faut beaucoup de tact, de finesse psychologique et d'authentique charité chez tous les participants pour qu'un « dialogue » soit excellent. Dans bien des situations, la simple raison ne suffit pas pour y arriver. Il faut y ajouter des qualités humaines qui ne sont pas très communes. Et il faut encore de la vertu: humilité, abnégation, douceur.

Dans nos réunions fraternelles, nos sessions d'études, nos « carrefours », ou encore dans les multiples articles qui paraissent actuellement dans nos revues de famille, on aborde assez souvent des sujets qui se rapportent à l'organisation et à l'avenir de nos œuvres, ou encore des problèmes d'adaptation concernant notre famille religieuse. Cet intérêt pour notre Institut est à louer et à favoriser. Toutefois, ne perdons pas de vue que nous devons prévoir les conséquences possibles de nos affirmations ou de nos propositions. Si nous ne nous sentons pas suffisamment documentés, ne soyons pas catégoriques dans notre exposé. Si possible, sachons-nous informer sérieusement avant d'intervenir personnellement dans les discussions importantes. La volonté de s'informer ne suffit pas toujours pour être bien documenté: il faut encore disposer des possibilités requises, et, ce que l'on oublie presque toujours, « l'aptitude » à s'informer efficacement. Chacun d'entre nous doit admettre humblement que bien des problèmes du jour le « dépassent », en ce sens qu'il n'a ni les données nécessaires pour les étudier personnellement, ni même la formation technique indispensable.

 3. Aujourd'hui, on parle volontiers de réformes profondes, de réformes de structure… Un homme averti sait que celles-ci sont toujours très difficiles. Elles le sont dans notre vie personnelle (Il n'est que de relire la liste de nos résolutions de retraite et les variations de notre plan de vie!), dans l'organisation de toute société humaine, et donc aussi dans celle de notre Institut.

Il n'a jamais suffi de proposer un nouveau programme d'action pour faire avancer les choses. Dans presque tous les groupements humains, les programmes de réforme se succèdent, parfois à une cadence rapide… Pourquoi croulent-ils si facilement? Trop souvent, ils ne sont pas assez pratiques, pas assez « humains »; ils ne sont pas réalisables. La critique négative a toujours été plus aisée que la critique constructive. Tâchons d'être « réalistes » quand il est question de faire des adaptations. Nous sommes très flattés d'être qualifiés de ce nom, mais nous ne le méritons pas toujours.

Ayons l’œil ouvert sur les problèmes nouveaux. Efforçons-nous d'être lucides, sans préjugés. Restons calmes en face des difficultés. Ne nous mettons pas trop vite en route vers de nouveaux horizons. Comme le disait S. S. Pie XII: « Essayons d'être calmes, chers fils, nous ne devons pas exagérer les ombres ni sous-évaluer les lumières. Si nous voyons la réalité telle qu'elle s'offre à nous, nous aurons déjà fait le premier pas pour apporter remède aux inconvénients qui apparaîtront dans leur plus ou moins sérieuse gravité » (Allocution du 18 février 1958).

 4. Les adaptations proposées peuvent se rapporter directement à notre vie religieuse, à notre spiritualité mariste, ou à l'ensemble de notre activité apostolique. Les deux terrains diffèrent sensiblement. S'il s'agit de toucher, plus ou moins, à des aspects de notre spiritualité, nous devons être vigilants et prudents, car notre esprit caractéristique pourrait être menacé… Il y a des possibilités de modifications beaucoup plus grandes dans notre vie apostolique, mais ici encore, il y aura toujours des limites à ne pas dépasser.

En ce qui concerne notre présence dans le monde scolaire, spécialement en des pays à évolution ultra-rapide, les Frères responsables sauront examiner très sérieusement les mesures à prendre pour éviter toute déviation dangereuse. Bien des problèmes, qui nous concernent directement, doivent être réétudiés en commun. Citons-en quelques-uns seulement: la qualité et l'efficacité de notre enseignement religieux; – une formation chrétienne de nos élèves qui réponde pleinement à ce l'on attend de nous; – l'importance actuelle des divers types d'écoles et celles qui doivent nous intéresser en premier lieu, selon les pays; le personnel religieux qui est indispensable pour que nos écoles soient effectivement « chrétiennes » et suffisamment « maristes »; – notre évangélisation des « pauvres », plus exactement, les services que nous rendons à la classe populaire, surtout là où les « collèges payants » dominent par suite du manque de subsides officiels; notre coopération à l'œuvre des missions: son étendue, sa valeur, son recrutement pour l'avenir; les relations, beaucoup plus fréquentes aujourd'hui que jadis, que nos Frères doivent avoir avec les parents des élèves, les anciens élèves, les autorités scolaires, les autres enseignants, même quand ceux-ci ne sont pas de notre orientation religieuse… Comme on peut s'en rendre compte par cette énumération très incomplète, le domaine des recherches est immense et très varié.

C'est sans pessimisme et sans défaitisme qu'il faut savoir aborder tous ces problèmes. Quelques Frères donnent parfois l'impression d'être comme écrasés par les difficultés des temps présents et par les insuccès qu'ils constatent… Ne perdons pas de vue que « la fragilité de nos succès doit nous rendre modestes, mais non pas blasés » (P. Ravier). D'autre part, les difficultés, les luttes, les incompréhensions, les échecs partiels font partie intégrante de notre programme d'apostolat. Dans une récente Déclaration de l'Épiscopat Français, on aura peut-être noté cette très belle réflexion: « Lorsque, pour obéir à l'ordre du Maître, la barque de Pierre avance au large, elle ne peut s'attendre à une navigation paisible » (cf. La Croix, 17-2-1965). La navigation d'un Institut comme le nôtre ne sera pas toujours paisible. Plus d'une fois, il y aura des tempêtes en l'un ou l'autre secteur.

 5. Dans une véritable famille, les problèmes sont communs, les difficultés et les souffrances sont communes, les joies sont partagées. Les plus jeunes membres, dès qu'ils sont à même de comprendre ce qui se passe autour d'eux, participent pleinement à cette « vie de famille »… L'un des plus grands dangers qui menace notre société actuelle provient précisément de la disparition, ou du moins d'une notable diminution, de ce climat familial. Le Père Henri Holstein constate: « Les adultes n'ont plus de contact avec les jeunes; ils leur servent tout au plus d'instructeurs ou de moniteurs » (Brochure: Est-il vrai que la Jeunesse a perdu son âme?).

Dans la Circulaire du 24 mai 1%2, nous avons mis en garde contre les périls d'une sorte d'opposition entre les générations… Nous disions: « Il importe de veiller à ce que cette opposition, qui est de tous les temps, ne se transforme pas en une sorte de fossé infranchissable entre les deux groupes, les « vieux » et les « jeunes ». Cette remarque vaut particulièrement pour ce temps de transformations rapides. Jeunes, vieux, Frères « entre les deux âges », nous devons collaborer fraternellement pour aboutir aux meilleures solutions « maristes ». Si cela n'était pas partout le cas, il y aurait, de part et d'autre, un sérieux examen de conscience à faire. « On s'enferme dans les limites de son seul groupe; on ne veut pas comprendre l'autre; on n'aime pas assez… » (Circulaire citée ci-dessus, p. 627).

Soyons-en persuadés: cette cordiale et constante entente entre les générations est absolument indispensable pour que notre Institut évolue harmonieusement, pour qu'il soit toujours « à la page », sans jamais renier ses origines.

 CONCLUSION.

 Nous nous trouvons en face de deux « devoirs », celui de la fidélité et celui de l'adaptation. Les deux ne sont pas contradictoires: c'est la fidélité même au Fondateur qui doit nous pousser à entreprendre les adaptations nécessaires. Il s'agit précisément de pouvoir continuer, dans les temps actuels, l’œuvre fondée jadis à Lavalla. Nous venons de voir qu'il s'agit d'un travail extrêmement délicat. Pour préparer le prochain Chapitre, dont l'importance ne peut échapper à personne, nous unirons donc toutes nos forces.

Par-dessus tous les autres moyens de préparations, nous tâcherons de prier avec plus de ferveur que jamais. Le Concile Vatican II a été préparé par la prière des chrétiens du monde entier. Cette prière doit continuer jusqu'à la fin du Concile. Elle a une importance telle, aux yeux de l'Eglise, que le Père Jean Daniélou n'hésite pas à dire: « Le Concile repose sur la prière des carmélites autant que sur l'autorité des évêques » (cf. Etudes, février 1964, p. 154). Nous rejoignons ainsi la pensée profonde de notre Bienheureux Père. Lui-même avouait: « Jamais, je n'oserais entreprendre une chose sans l'avoir longtemps recommandée à Dieu; d'abord, parce qu'il est facile à l'homme de se tromper, et de prendre ses vues personnelles et ses illusions pour des projets inspirés de Dieu; ensuite, parce que nous ne pouvons rien sans le secours et la protection du ciel » (cf. Vie, par le Fr. Jean-Baptiste, p. 347). Et à ses Frères, il disait: « Prions, prions, je le répète, car ce sont des prières qu'il nous faut, afin que nous ne cherchions et que nous ne fassions en tout que la volonté de Dieu ».

Que notre prière pour le Chapitre soit donc régulière et fervente. En vrais Petits-Frères de Marie, nous nous adresserons à notre RESSOURCE ORDINAIRE « comme un enfant va è sa mère » (Règles Communes, 131).

Bienheureux Marcellin Champagnat, faites que nous, vos fils, nous vous soyons toujours fidèles! 

Note supplémentaire:

Quelques références utiles.

1. Conditions fondamentales de la vocation fervente : l'esprit sérieux, la pensée de l'éternité.

R. F. Louis-Marie, Circ. IV, 242-306 et 349-411.

2. Humilité, cachet de notre Institut. R. F. Théophane, Cire. VII, 159-162.

3. La persévérance. R. F. Stratonique, Cire. XIV, 104-133.

4. Vocation, persévérance… R. F. Diogène, Cire. XIV, 515-536.

5. L'esprit du Bx. Père Champagnat: simples considérations. R. F. Diogène, Circ. XV, 432-466.

6. Conservation des vocations. C. F. Michaëlis, V.G., XIX, 310-330.

7. Un plus grand amour de notre sainte vocation. R. F. Léonida, XIX, 574-594.

8. Efforts soutenus pour aimer la Congrégation

d'un plus grand amour et la servir avec un dévouement total. R. F. Léonida, XX, 481-511.

9. Esprit religieux, esprit mariste. R. F. Léonida, XXI, 84-121.

10. Estime de nos Constitutions. Problèmes d'adaptation. R. F. Léonida, Circ. XXI, 393-401.

11. Un plus grand amour pour notre sainte vocation et la ferme résolution de lui être fidèles

jusqu'à la mort. R. F. Léonida, Circ. XXII, 5-39. 

Des Circulaires récentes:

 12. Circulaire du Chapitre, 8-12-1958, cf. Persévérance des Frères, Circ. XXII, 264-269.

13. Circulaire du 8-12-1960: Traditions fondamentales à conserver, Circ. XXII, 501-504.

Fidélité aux Règles, Circ. XXII, 508-511.

14. Circulaire du 1-5-1961, cf. Rester toujours fidèles à notre idéal mariste, Circ. XXII 531-538.

15. Circulaire du 24-5-1962, sur la volonté d'union; cf. Fidélité aux Constitutions et à l'esprit de la Congrégation, Cire. XXII, 635-639.

 Voix de l'Eglise:

16. Lettre Apostolique « Unigenitus Dei Filius », de S. S. Pie XII (19-3-1924), Circ. XV, 329-345; cf. 332-333.

17. Allocution de S. S. Pie XII aux membres du Premier Congrès International des Religieux à Rome (du 8-12-1950), Circ. XX, 518-531, surtout 527-530 (Adaptation aux temps nouveaux).

18. Directives de S. S. Paul VI pour la vie religieuse (23-5-1964), Cire. du 2-12-1964, 229-240, surtout 235-240.

19. Rappelons également les directives importantes contenues dans l'« Exhortation de S. S. Pie XII aux Supérieurs Généraux » (11-2-1958). Cf. Documentation Catholique, 1958, col. 257-265. 

ELECTIONS

 Le Conseil Général a élu

a) Dans la séance du 21 décembre 1964:

Pour un premier triennat:

F. León Cornelio (Isidoro GALARRAGA B.), Visiteur du Venezuela.

F. Maximien (André VANHALST), Visiteur du Congo-Rwanda

b) Dans la séance du 16 mars 1965:

Pour un deuxième triennat ;

F. Armando Teófilo (Teófilo MARTINEZ LOPEZ), Provincial de Levante.

Pour un premier triennat:

F. Justo Miguel (Jésus RODRIGUEZ GOMEZ), Provincial de Bético.

F. Luis José (José Luis MORALES SABORIDO), Provincial de Madrid

c) Dans la séance du 17 mars 1965:

Pour un troisième triennat:

F. Jochem Philippe (Philippe Wu), Provincial de Chine.

Pour un deuxième triennat:

F. Gil Mariano (Saxatile F. D’AMARAL), Provincial du Brésil Septentrional.

F. Flamien (Gaston LAYRAL), Provincial de Sud-ouest.

F. Leo Sylvius (Joseph COTE), Provincial d'Esopus.

Pour un premier triennat:

F. Miguel Alipio (Miguel P. DA SILVA), Visiteur du Portugal.

F. Aribert (Karl KARLBERMATTEN), Visiteur de Suisse-Missions.

F. André-Frédéric (J.-B. DELALANDE), Visiteur de Liban-Syrie.

F. Privat (Jean PORTAL), Provincial de Varennes.

F. Kieran Thomas (Thomas BRENNAN), Provincial de Poughkeepsie

d) Dans la séance du 28 mars 1965:

Pour un premier triennat: (qui ?) 

e) Dans la séance du 2 avril 1965:

Pour un premier triennat:

F. Paul NIZIER, Visiteur de Ceylan.

F. Jaime Francisco (Luis ALVAREZ ROBLES), Provincial de Castilla

STATISTIQUE GENERALE DE L'INSTITUT

au 1 janvier 1965

 

                            1           2           3           4           5           6           7           8           9           10          11          12

Adm générale                      –           –           –          –           –           14        14        14        –           –           –              –

Af.  du Sud               17        0          1          29        58        26        113      131      3757                2          12

Allemagne Sud                    90        12        12        40        58        60        158      272      1632                0             7

Beaucamps             113      6          6          432      88        54        174      299      4835                2          19

Belg. Holl.                 83        8          4          33        141      88        262      357      9458                5          29

Bética                                    271      23        12        50        174      68        292      598      8078                3             19

Brésil Sept.              101      12        9          49        77        71        197      319      130649          15

Castilla                                  170      22        15        66        142      37        245      452      4992                3              14

Cataluna                               194      23        11        46        155      51        252      480      7841                5              17

Caxias do Sul                       148      0          0          22        63        26        111      259      2339                1              9

Chili                           168      13        11        55        87        47        189      381      5879                0          14

Chine                                     45        0          1          13        72        41        126      172      103671           15

Colombie                              223      9          4          34        100      113      247      483      124323          24

Congo Rwanda       30        0          0          12        55        31        98        128      131523          17

Córdoba                               41        0          4          29        98        42        169      214      4674                0               11

Cuba-Am. Cent.      220      15        20        57        154      91        302      557      6693                1          19

Desbiens                              155      8          3          17        86        37        140      306      3069                0              10

Esopus                                  31        41        31        115      139      60        314      417      8300                1              15

Gde. Br. Ir. Nig. .      162      21        26        71        134      61        266      475      127460          32

Iberville.                                 347      22        21        77        223      113      413      803      167943          34

Italie                                       122      8          0          25        65        70        160      290      2952                2              8

Leén                                      196      0          16        41        151      46        238      450      5737                3              8

Levante                                 123      13        15        48        89        42        179 ,    330      5330                0              8

Lévis                                      215      18        14        29        130      69        228      475      6832                1              25

Lujân                                      42        0          5          27        84        55        166      213      4006                1              10

Madrid                                   245      12        10        53        71        42        166      433      1235                1              13

Melbourne                23        21        9          51        93        50        194      247      9689                1          27

Mex. Central .                       130      16        20        75        106      57        238      404      127200          20

Mex. Occid               129      25        31        95        116      67        278      463      136153          26

Norte                                     154      23        16        64        156      59        279      472      7572                0              18

N.-D. Hermitage      128      7          1          38        94        57        189      325      5023                4          22

N. Zélande                76        21        16        71        115      68        254      367      9813                0          31

Pérou           .                        153      9          9          56        43        49        148      319      6408                0              13

Porto Alegre .                       205      0          2          54        161      52        267      474      137003          18

Poughkeepsie                      19        20        23        78        138      87        303      365      105332          17

Rio                            244      11        23        54        82        84        220      498      6170                2          14

St-Genis-Laval                     199      2          6          80        176      101      357      564      6833                6              42

Sta. Catarina                        154      14        18        40        64        16        120      306      3295                0              11

Sta. Maria                136      13        9          59 ! 106           35        200      358      8582                1          16

Silo Paulo                 222      25        1          32        95        68        195      443      104850          15

Sud-Est        . .                      63        1          1          16        73        52        141      206      2950                3              12

Sud-Ouest                37        1          0          6          52        20        78        116      1977                1          8

Sydney                                  80        40        22        101      212      77        390      532      139741          35

Varennes . .              101      6          6          13        63        62        138      251      3551                7          13

                                          DISTRICTS

Ceylan                                   15        0          2          5          17        11        33        50        3927                0              5

Liban-Syrie              57        2          2          4          22        27        53        114      6345                3          8

Malagasy .                73        9          4          13        25        20        58        134      3927                0          9

Philippines . . .                      17        3          5          16        26        12        54        79        5236                0              10

Portugal . . .              123      11        3          30        48        29        107      244      2287                0          12

Suisse-Missions . .  22        3          11        16        18        22        56        92        325                  0          4

Uruguay . . . .                         59        0          7          19        21        28        68        134      2120                0              7

Venezuela    . . .        77        12        9          32        36        16        84        182      2150                0          6

        

TOTAUX . . .                         6248      581       507       2188   4852        2681      9721   17057  352401      87         826

 

(1 : juvénistes ; 2 : postulants ; 3 : novices ; 4 : profès temp. ; 5 : perp. ; 6 : stables ; 7 :Total Prof : 8 : Total gén. ; 9 : élèves ; 10 : décès en 1964 ; 11 : maisons.)

  

LISTE DES FRERES

dont nous avons appris le décès

depuis la Circulaire du 8 décembre 1964

 

Nom et âge des Défunts                           Lieu de Décès                       Date du Décès

 

Lecadio Miguel (J. Martiny)           39 P     Porto Alegre (Brésil)                         18 juil. 1964

Ernest Alexis (J. Chang Shun)      64 P     Pékin (Chine)                                     23 nov.    »

Alfridus (M. Chambade)                89 S     Varennes-s-Allier (France)               3 déc.    »

Paulino Leôn (E. Gallo)                 51 P     Castillejia de la Cuesta (Esp.)         3 »                      »

Roqer Bede (J. Reidy)                   64 S     Camberwell (Australie)                     4 »                      »

Jules Victorin (J. Mathieu)             65 S     Marseille (France)                             5 »                      »

Arcadius Joseph (J. Sullivan)       72 S     Hunter's Hill (Australie)                      6 »                      »

Adolphe Elie (P. Decock)             82 S     Mont St-Guibert (Belgique)               8 »                      »

Euphrasius (J. P. Maurin)              84 P     N.-D. de l'Hermitage (France)          16 »        »

Joseph Sabin (M. Naessens)       84 S     Louvain (Belgique)                            16 »        »

Adriano Ramón (A. Rodriguez)    63 S     Orense (Espagne)                             20 »        »

Fidel Emilio (E. Pella)                    54 P     Palencia (Espagne)                          24 »        »

Marie Germain (C. Farquet)         59 S     N.-D. de l'Hermitage (France)          25 »        »

Felix Etienne (F. Maréchal)           49 S     Valbonne (France)                             10 janv. 1965

Raimundo (M. Fuentes)                 82 S     Castilleja de la Cuesta (Esp.)          18 »        »

Frédéric Charles (J. Dumaresq) 83 S     Tyngsboro (Etats Unis)                     18 »        »

Adrian Mary (.A. Nichons)             75 S     Auburn (Australie)                              1 fév.      »

Roman (M. McDermott)                 86 P     Kinharvie (Ecosse)                            2 »                      »

Marie Michaël (D. Coudeville)      82 S     Mont St-Guibert (Belgique)               5 »                      »

Paul Césaire (P. Mesny)               83 S     Varennes-s-Allier (France)               9 »                      »

Lucio (R. Banuelos)                       80 S     Avellanas (Espagne)                         10 »        »

Victor (P. Aimé)                              82 P     Varennes-s-Allier (France)               14 »        »

Polyène (P. Chalbos)                     78 P     Cali (Colombie)                                 17 »        »

Raimundo José (J. Poersch)        73 S     St-Genis-Laval (France)                   20 »        »

Tomâs Antonio (A. Garcia)           57 S     Viamâo (Brésil)                                  27 »        »

Dankward (V. Jenzer)                    54 P     Furth (Allemagne)                              12 mars »

Servus Dei (B. Mivière)                 83 S     N.-D. de l'Hermitage (France)          15 »        »

Ermann (P. Santolamazza)           58 S     Roma (Italie)                                       16 »        »

Jean Cyprien (J. Fey)                    90 S     N.-D. de l'Hermitage (France)          20 »        »

Adolphe (F. Coulembier)               65 P     Mouscron (Belgique)                         22 »        »

Jacques François (J. Locht)         51 S     St. Hubert (Belgique)                         27 »        »

 

            Soit 6.958 depuis le commencement de l'Institut.

 

La présente Circulaire sera lue en communauté à l'heure de la lecture spirituelle.

Recevez, mes bien chers Frères, la nouvelle assurance du religieux attachement avec lequel je suis, en J. M. J.

Votre très humble et tout dévoué serviteur. 

F. CHARLES RAPHAËL, Supérieur Général

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