Circulaires 72

Louis-Marie

1860-12-27

Circulaire du 27 décembre 1860. - Sur la Régularité.- Frères Economes. - Instruction aux Frères Visiteurs.­ Divers avis

072

51.02.01.1860

 1860/12/27

V. J. M. J.

 N.-D. de Saint-Genis-Laval, le 27 décembre 1860.

Fête de saint Jean l'Evangéliste.

    Mes Très Chers Frères?

 En recevant du Chapitre Général le pouvoir et la charge de gouverner l'Institut, je me suis proposé trois choses : conserver et fortifier parmi nous l'esprit de Piété, y entretenir une parfaite Charité, et procurer partout la fidèle observance de la Règle. C'est, en effet, à ces vertus fondamentales que je vous ai particulièrement exhortés pendant la dernière Retraite ; c'est ce que j'ai enjoint aux Frères Assistants, aux Frères Visiteurs et à tous ceux qui sont en charge, de recommander en toute occasion. Aujourd'hui encore, je viens vous rappeler ces obligations essentielles de tout bon Religieux ; et, en le faisant, ce n'est pas seulement un devoir et une promesse que je remplis, mais c'est un besoin de mon cœur que je suis pressé de satisfaire.

 Je sens, en effet, M.T.C.F., comme vous l'a si bien dit le T. R. F. Supérieur Général, dans sa Circulaire du 21 juillet dernier, qu'en le déchargeant du fardeau de la Supériorité, je n'ai fait que succéder à sa Paternité. Comme lui, je n'ai qu'un désir, je ne connais qu'une jouissance, celle de vous être utile, de procurer votre bien, de vous rendre heureux et contents dans votre état, et d'assurer votre salut éternel, en assurant votre persévérance dans la vie religieuse par les consolations qu'elle procure.

 Or, le bonheur pour les Religieux n'est que dans la solide Piété, qui les unit à Dieu comme des enfants à leur Père, dans la Charité qui les unit entre eux comme des Frères, dans la Régularité qui sanctifie tous leurs instants, et les conduit à la perfection par la voie la plus douce, la plus prompte et la plus sûre. C'est donc dans ai, sentiment très vif d'amour, de tendresse et de dévouement pour chacun de vous, dans la seule vue du plus grand bien de tous et de l'Institut, que je reviens sur ces trois vertus et que je vous y exhorte tout de nouveau. Oh ! que la Congrégation sera belle devant Dieu, qu'elle sera consolante pour l'Eglise, utile au prochain et heureuse pour nous, le jour où elle ne comptera que DES FRÈRES BIEN PIEUX, BIEN RÉGULIERS ET BIEN UNIS !Ne cessons de demander cette grâce au bon Dieu par le cœur immaculé de notre bonne Mère ; et, tous à l'envi, travaillons de toutes nos forces à la mériter.

 Déjà, dans une précédente Circulaire, on vous a entretenus de l'esprit de Piété, de sa nécessité, de ses principaux caractères et des moyens de l'acquérir. Je vous engage à relire cette Lettre. Elle est du 15 avril 1859. Plus tard, je vous dirai quelque chose de l'esprit de Charité qui doit nous animer les uns pour les autres et pour nos enfants. Mon intention, aujourd'hui, est de vous parler de la Régularité, et de vous montrer que, seule, elle peut et doit faire notre sûreté, notre mérite et notre consolation.

 I

Que la sûreté du Religieux soit uniquement dans la Règle, c'est ce que tous les Maîtres de la vie spirituelle, l'expérience de tous les jours et la raison même s'accordent à nous démontrer.

 « Mes Frères bien-aimés dans le Seigneur, écrivait saint Bernard aux Religieux du monastère de Saint Anastase, je vous prie et vous supplie de persévérer dans l'étroite observance de vos Règles, de garder avec le plus grand soin l'ordre établi, afin que l'ordre et vos Règles vous gardent vous-mêmes. » Comparant les Règles à la colonne de feu qui marchait à la tête du peuple de Dieu et le guidait dans le désert, saint Liguori nous assure que les Religieux ne peuvent être conduits sûrement et infailliblement à la terre promise du Paradis que par le secours et le flambeau de leurs Règles. C'est la seule voie qui fut montrée par les Anges aux disciples de saint Benoît, pour suivre leur saint Patriarche au Ciel où ces bienheureux Esprits venaient de l'introduire. « Les Religieux sans Règle, dit un jour Notre-Seigneur à sainte Brigitte, sont semblables à des navigateurs montés sur un vaisseau sans mâts, sans gouvernail, sans voiles ni agrès : ils errent çà et là, à la merci des flots et au gré des vents; ils ne peuvent manquer d'être coulés à fond ou jetés contre quelques rochers : c'est-à-dire que les Religieux qui secouent le joug des Règles, perdent toute crainte de Dieu, touchent à l'abîme du péché mortel et ne peuvent manquer d'y tomber. » Aussi, saint François de Sales ne craint-il pas d'affirmer que la prédestination des Religieux dépend de la fidélité qu'ils mettent à observer leurs Règles. On ne peut, en effet, parvenir à une fin que par les moyens propres pour y arriver, on ne peut aborder au terme que par les chemins qui y conduisent. Or, les Règles sont précisément les moyens que Dieu a donnés à chaque Religieux pour arriver à la fin de son Institut, qui est la perfection et le salut. Ces moyens sont appelés Règles, parce qu'ils dirigent les actions du Religieux vers ce but, comme la règle de l'architecte dirige la disposition des pierres et des matériaux d'un édifice. Toute parole, toute visite, toute étude, tout acte quelconque qui n'est pas conforme à la Règle, n'est pas droit, et par conséquent est incapable de conduire au terme. On peut dire de ces actes ce que saint Augustin disait des actions héroïques des païens : ce sont de grands pas, mais ils sont faits hors du chemin ; et, quand on est hors du chemin, tous les mouvements d'un géant n'approchent pas si près du but que six pas d'un enfant qui est dans la bonne voie.

 « Vous me demandez, écrivait le Père Champagnat à un Frère, quel moyen vous devez prendre pour avancer dans la vertu ; je n'en connais pas de meilleur ni de plus sûr que la fidélité à la Règle. Gardez votre Règle, observez-la fidèlement, et je vous assure le Paradis ; soyez fidèle à votre Règle, et je réponds de votre salut. » C'est dans le sentiment de cette conviction profonde et dans l'ardeur de son zèle pour le salut de tous ses Frères, que le pieux Fondateur a tant travaillé, et par ses enseignements et par ses exemples, à établir une parfaite Régularité dans toutes les Maisons de son Institut. Il revenait sans cesse, dans ses instructions et dans ses lettres, sur l'importance, la nécessité et les avantages des Règles, sur les maux qu'entraîne leur transgression pour les particuliers comme pour le corps. « Oh !  disait-il, qu'un Frère qui rie tient pas compte de la  Règle, est près de laisser ses devoirs les plus essentiels : les vœux, les commandements de Dieu, la vertu, sa vocation ! » Il voulait qu'en Régularité on fît cas des moindres choses, il regardait comme un des pièges les plus dangereux du démon la négligence des petites Règles, et il appelait les Religieux tièdes et relâchés, qui manquent facilement à la Règle, les grands ennemis de l'Institut. «En un sens, disait-il, je les redoute plus que les Religieux scandaleux, dont la conduite porte avec elle sa condamnation et provoque le blâme et la répulsion. Rien ne peut dire le mal que causent, par leurs paroles et par leurs exemples, les Religieux qui ne se font pas scrupule de leur négligence habituelle,  les petites choses ; qui savent colorer de mille prétextes leur conduite relâchée et, irrégulière ; qui, gardant « les apparences sur certains points essentiels, se donnent mille licences sur tous les autres, et font plier la Règle à leurs moindres caprices. Ce sont eux qui font passer les Supérieurs pour trop exigeants et trop sévères, les bons Frères pour trop rigides et trop scrupuleux, les Règles elles-mêmes, pour un joug pesant et insupportable, dont il faut s'affranchir, autant qu'on peut. Oui, concluait le bon Père, on peut dire que ces Religieux sont la ruine de la Régularité, les promoteurs du mauvais esprit et de tous les abus, et qu'ils vont, eux-mêmes à leur perte, presque sans s'en apercevoir ».

  Au reste, M. T. C. F., ces pensées et ces enseignements de notre pieux Fondateur ne sont pas autres que ceux des Saints. Que signifie, demande saint Thomas, le soin des Nazaréens pour leurs cheveux ? Pourquoi les nourrissaient-ils avec tant de précautions? Pourquoi ne souffraient-ils pas que le rasoir passât jamais sur leur tête? (Nomb., VI, 35). Ah! répond le saint Docteur, c'est que ces cheveux, si faibles, si déliés, faisaient leur gloire, leur force et toute leur sûreté. Samson fit des actes de force prodigieux, il fut invincible, tant qu'on ne toucha point à ses cheveux. Dès qu'ils furent coupés, il fut pris, lié, garrotté, il devint aveugle, et le jouet de ses ennemis. Ainsi en est-il des Religieux. Leurs Règles, quoique faibles en apparence comme des cheveux, font leur gloire et leur force. Tant qu'ils les observent, même les plus petits, ils sont considérés et estimés, ils sont forts et vigoureux, ils s'élèvent à de grandes actions de vertu. Dès qu'ils se relâchent, ils tombent dans la honte et le mépris, dans la faiblesse, la lâcheté et l'aveuglement ; ils deviennent captifs de la nature, esclaves de leurs passions, la proie et le jouet des ennemis du salut.

 Les Maîtres de la vie spirituelle expliquent encore la même pensée d'une autre manière. Ce qui fait la force et la sûreté des Religieux, disent-ils, c'est qu'ils sont défendus par la double enceinte des Commandements de Dieu et des Conseils évangéliques. Les Règles sont comme les dehors, les avant-murs de la forteresse de leur âme, et elles servent de défense à la Loi de Dieu qui en est le mur principal. Tant qu'ils sont fidèles à les garder, toute la rage des démons ne va qu'à attaquer cette première enceinte ; et y fissent-ils quelques brèches, qu'ils seraient encore arrêtés par la seconde, qui est celle de la Loi de Dieu. Quelle sûreté, quelle garantie de salut, d'être ainsi comme à l'abri de toute atteinte mortelle de la part des démons ! Quelle grâce, quelle miséricorde pour le Religieux, qu'il craigne plus de manquer à des Règles dont la transgression n'est pas même un péché véniel, qu'il n'aurait craint, dans le monde, de commettre le péché même ! Béni soit donc le Seigneur qui nous a appelés dans le port de la Religion, pendant que tant d'autres sont battus des flots et de la tempête sur la mer orageuse du monde. Bénie soit sa Providence paternelle qui nous conserve dans l'enceinte de nos Règles, à l'abri des scandales et des dangers qui perdent la multitude des mondains. Sainte Madeleine de Pazzi, dans le sentiment de sa reconnaissance pour cet incomparable bienfait, embrassait les murs de son monastère, en répétant avec transport « O murs, ô murs sacrés, qui me protégez contre les tentations de l'enfer, je vous aime et vous bénis mille fois ! »

 Mais gardons-nous de détruire cette enceinte, de renverser cette haie de nos Règles : car, la clôture une fois rompue, le vieux serpent, qui est le démon, ne manquerait pas de trouver entrée dans notre âme et de nous perdre. O Dieu, demande le Prophète, pourquoi avez-vous détruit la muraille qui enfermait votre vigne, voilà que tous les passants y vendangent en liberté? (PS. LXXIX, 13). Pourquoi, ô Religieux imprudent et téméraire, renversez-vous les défenses extérieures de votre âme, par l'abandon que vous faites de vos Règles, par votre négligence et votre dissipation ? Vous voilà à découvert devant vos ennemis invisibles : attendez-vous a les voir bientôt saper le mur principal des Commandements de Dieu, vous solliciter à d'énormes péchés, et redoubler leurs attaques jusqu'à ce qu'ils se soient rendus maîtres de la place, c'est-à-dire, de votre âme.

 Vous vous étonnez de la chute de ce Religieux ; son infidélité, son apostasie vous surprend et vous effraie. Ah ! ne croyez pas que sa porte ne date que du jour où elle se consomme, elle vient de plus loin. Il y a longtemps que son cœur n'était plus à la Religion, qu'il ne se souciait pas de contrevenir à ses Règles, qu'il négligeait son oraison, son examen, son office, ses lectures, ses communions, qu'il entretenait des rapports avec le monde, qu'il en suçait, pour ainsi dire, l'esprit, et qu'il se faisait à ses goûts dépravés.

 Oh ! M. T. C. F., craignons souverainement ce mépris et ce violemment habituel de nos Règles, qui affaiblissent notre âme et la préparent à une ruine entière, à la première occasion ; craignons ces nonchalances et ce relâchement, qui nous ôtent le goût des choses spirituelles, et nous rendent les exercices de piété pénibles d'abord, insupportables ensuite ; craignons ces fautes, ces imperfections, en apparence légères, et pourtant si graves et si funestes qu'elles font perdre la crainte de Dieu, et conduisent comme insensiblement jusqu'à l'abîme du péché mortel et à la perte de la vocation.        

 Approchons-nous de Dieu, au contraire, par une constante fidélité à tout ce que nos Règles et l'Obéissance nous prescrivent, et il s'approchera de nous (Jacq., IV, 8), en nous comblant de ses grâces. C'est des Religieux fervents et réguliers qu'il fait ses favoris ; c'est sur eux qu'il verse ses dons avec une libéralité infinie, en récompense de leur libéralité à le servir ; c'est à eux que la persévérance est assurée : Celui qui sera fidèle dans les petites choses, le sera aussi dans les grandes (Luc, XVI, 10).

 Oui, le Religieux trouvera dans la fidélité à sa Règle une assurance entière, une sûreté parfaite.

 Sûreté pour le cœur,dont, hélas ! les affections sont si difficiles à garder ! Que de vertus ébranlées, que de vocations perdues, parce que le cœur a été pris, parce que, ses affections se sont perverties et corrompues ! Nos Règles le défendront et le garderont : point de sortie seul, point d'entretiens inutiles avec les séculiers, point d'amitié particulière, point de familiarité. Modestie, gravité, retenue partout. Obligation pour tous de se garder en Jésus-Christ, de s'avertir, d'appeler, au besoin, l'aide des Supérieurs.

 Sûreté pour l'esprit,dans les Règles qui déterminent nos études, nos lectures, nos rapports et tout l'emploi de notre temps. Quel bonheur pour le Religieux d'être toujours dans le vrai et par l'enseignement qu'il reçoit,et par celui qu'il donne ; de n'entendre que la vérité sur Dieu, l'Eglise, ses ministres, le salut, le temps, l'éternité; de ne recevoir que des idées justes, les idées mêmes de Jésus-Christ sur les plaisirs, les richesses, les honneurs, sur la pauvreté, les humiliations, les souffrances : toutes choses sur lesquelles les séculiers sont si souvent et si cruellement trompés ! Quand la lumière, quand la foi reste à l'esprit, on guérit encore les faiblesses du cœur, les inconstances de la volonté; mais comment en revenir, quand toutes les idées sont faussées par l'éducation, par les lectures, par les entretiens, par les exemples de ceux qui nous entourent et de qui, souvent, nous dépendons  ? Heureux donc mille fois le Religieux que la Règle préserve des fausses maximes, des faux principes, des faux jugements qui égarent les mondains, les endorment dans les plus monstrueux désordres et les mènent en aveugles a leur perte éternelle !

 Sûreté pour la volonté, dans ces actes répétés, ces exercices journaliers de toutes les vertus qui en forment peu à peu l'habitude dans l'âme, et les rendent comme naturelles au Religieux ; dans ces victoires de tous les jours et de tous les instants qu'il lui faut remporter sur lui-même pour obéir à la Règle jusque dans les moindres points : victoires qui le préparent si bien à se surmonter dans les occasions dangereuses et délicates, où les âmes accoutumées à ne se contraindre sur rien, ne savent presque jamais résister.

 Sûreté pour la conscience, dans cette disposition habituelle de délicatesse et de crainte où la Règle entretient un Religieux pour les moindres fautes, les plus légers manquements, les défauts, les imperfections même.

 Sûreté pour la grâce de Dieu et la vertu, dans nos exercices de piété, nos confessions, nos communions, les exemples et les avis de nos Frères, la direction de nos Supérieurs, nos retraites, que la Règle ramène chaque semaine, chaque mois, chaque année.

 Sûreté pour le bien, sûreté contre le mal, sûreté même après les chutes. Le séculier, dit saint Liguori, trouve dans le monde mille obstacles au bien; le Religieux trouve dans la Religion mille obstacles au mal. L'un ne se sauve qu'en sortant, pour ainsi dire, de son état, et en luttant contre la pente et l'entraînement général ; l'autre se sauve en suivant son état, en faisant comme ses Frères, dont les paroles et les exemples sont pour lui une leçon, continuelle de piété et de vertu. Et malheur, dit l'Esprit Saint, à celui qui est seul, car s'il vient à tomber, il ne trouve personne qui l'aide à se relever ! (Eccl., IV, 10).Hélas ! c'est le sort ordinaire du séculier, que personne ne veut ou n'ose avertir de ses fautes, reprendre de ses égarements. Le Religieux, au contraire, a ses Supérieurs, ses Confrères, la Règle, qui ne lui permettent jamais de faire la paix avec le péché, qui le reprennent, l'avertissent et le pressent jusqu'à ce qu'il soit revenu à Dieu et à la vertu.

 Quelle sûreté encore pour la raison, le bon sens, le jugement dans nos Règles, fruit des réflexions, des méditations, de l'expérience et des prières de notre Fondateur et de tous nos Anciens ! Vous êtes jeune directeur, jeune professeur, jeune Religieux, ne craignez rien. Suivez votre Règle, tenez-vous dans votre Règle, et vous participerez à la sagesse, aux lumières, à l'expérience de ceux qui ont vieilli dans la direction, dans l'enseignement, dans la pratique des vertus religieuses. Les démarches, les paroles, et surtout les lettres et les écrits compromettants, les imprudences et les maladresses ne viennent que de ce qu'on sort de sa Règle, de ce qu'on veut être plus sage que sa Règle, de ce qu'on se fie à son sens propre, à ses petites vues, à ses petites lumières personnelles.

 Sûreté enfin, pour l'âme et pour le corps. La Règle veille à la santé de l'une et de l'autre ; elle ne permet d'excès ni dans la dévotion ni dans le travail. Nous dirons tout à l'heure avec quel soin elle pourvoit à tous nos besoins, même matériels.

 Sûreté dans la Règle, sûreté universelle, sûreté perpétuelle. « En religion, dit saint Bernard, l'homme vit plus purement, tombe plus rarement, se relève plus promptement, marche plus sûrement, est arrosé de la grâce plus fréquemment, meurt plus tranquillement, est purifié plus promptement, et récompensé plus abondamment. »

 Aimons donc nos Règles, puisqu'elles nous sont d'un si puissant secours, puisqu'elles nous protègent et nous défendent si efficacement. Quelle joie, quelle reconnaissance, dit saint François de Borgia, n'aurait pas un voyageur, obligé de traverser, seul, une forêt remplie d'assassins, s'il voyait venir à lui une troupe de gentilshommes, forts et bien armés, qui s'offrissent à l'accompagner dans sa route et à le défendre ! C'est précisément ce que font nos Règles dans le périlleux voyage de cette vie elles viennent à notre secours dans tous nos dangers elles veillent sur tous nos sens, l'une sur nos yeux, l'autre sur notre langue, l'autre sur nos oreilles, une autre sur nos actions, et d'autres sur toutes les facultés de notre âme ; et par là elles écartent nos ennemis invisibles, et leur ôtent les armes dont ils se servaient pour nous perdre.

 Que la Règle fasse donc toute notre force et toute notre sûreté ; qu'elle dirige toutes nos paroles, toutes nos démarches et toutes nos actions ; qu'elle imprime à toute notre conduite le triple cachet de la piété, de la modestie et de la prudence. C'est, dit un pieux auteur, le livre de vie du Religieux, la moelle de l'Evangile, l'espérance de son salut, la mesure de sa perfection, l'ouvrage de sa gloire, la clef du Paradis, La Règle l'y conduit sûrement et comme infailliblement ; mais de plus elle l'y conduit excellemment, par les mérites incomparables qu'elle lui fait acquérir. C'est ce que nous allons expliquer en peu de mots.

 II.

 La volonté de Dieu étant tout ce qu'il y a de meilleur, de plus saint et de plus parfait, il est évident qu'on avancera d'autant plus dans la perfection et la sainteté, qu'on s'unira davantage à cette divine volonté, qu'on l'accomplira plus parfaitement. « Plus il entre de la volonté de Dieu dans nos actions, dit saint Liguori, et moins de la nôtre, plus elles sont saintes et parfaites. » Sur ce principe, quel mérite et quelle perfection n'acquiert pas un Religieux qui obéit parfaitement à sa Règle, c'est-à-dire qui n'agit, ne travaille, ne prie et ne fait ses moindres actions que par obéissance et par la volonté expresse de Dieu ! Cette perfection est si grande que le même Saint va jusqu'à mettre au-dessus du martyre enduré pour la foi le mérite de l'état religieux. Le martyr, dit-il, souffre pour ne pas offenser Dieu et se perdre lui-même ; le Religieux souffre pour se rendre plus agréable à la divine Majesté ; l'un est martyr de la foi, l'autre est martyr de la perfection.

 Le mérite du Religieux, en observant sa Règle, est donc de faire toujours la volonté de Dieu, et non seulement sa volonté absolue et de commandement, mais sa volonté de bon plaisir, ce qu'il conseille, ce qu'il désire. Il peut dire comme Notre-Seigneur: Je fais toujours ce qui lui plaît, ce qui lui est le plus agréable. Quelque saintes que soient les œuvres d'un séculier, il y entre toujours plus de volonté propre que dans celles du Religieux. Il les fait quand bon lui semble, il prie, il jeûne, il entend la messe, il communie, et fait toutes choses comme il veut et quand il veut. Mais le Religieux, en se liant à sa Règle, et à son Supérieur, s'est mis dans l'heureuse impossibilité de faire sa propre volonté; il ne marche que sur le commandement de Dieu même, puisque c'est lui qui commande dans le Supérieur, et que la Règle est l'expression de sa volonté.

 Le séculier peut être inquiet s'il prie assez, s'il se mortifie assez, s'il fait assez d'aumônes, assez d’exercices de piété et de vertu ; s'il ne donne pas trop à la nature, au sommeil, aux repas, aux récréations. Le Religieux n'a pas cette inquiétude ; en accomplissant sa Règle il accomplit tout ce que Dieu demande de lui, et il est assuré de n'être en défaut sur rien, de n'excéder en rien. C'est ce qui a fait dire à sainte Thérèse que celui qui observe fidèlement sa Règle dans les moindres points, vole plutôt qu'il ne marche, à la sainteté et à la perfection. et Benoît XIV ne demande autre chose d'un Religieux, pour l'élever à l'honneur suprême de la canonisation, sinon qu'il ait constamment et parfaitement observé sa Règle. C'est donc, avec grande raison, que saint Augustin appelle la Règle le miroir de la Religion : car, à la manière dont le Religieux l'observe, il peut connaître s'il aime ou non la perfection, s'il avance ou s'il recule, s'il plaît à Dieu ou s'il lui déplaît.

 Que c'est une grâce insigne et abondante, dit saint Jérôme, que celle de l'obéissance, de la soumission parfaite à la Règle et aux Supérieurs ; toutes les vertus y sont comprises en abrégé, et elle conduit droit à Jésus-Christ 1 C'est là le chemin, marchez-y, sans vous détourner nt à droite nt à gauche (Eccl., XXVI, 21),et, en peu de temps, vous serez parfaits. Vous serez humbles, vous serez patients, vous aurez acquis la mortification, la douceur, la charité, toutes les vertus : car infaillible men t, la Règle et l'Obéissance vous appliqueront tantôt à l'une tantôt à l'autre, et vous en feront faire des actes répétés tous les jours. C'est ainsi que tant de Religieux se sont sanctifiés en peu de temps, et sans rien faire d'extraordinaire en apparence. Saint Dosithée, après cinq ans d'obéissance, en observant la Règle d'un simple Frère infirmier, obtint la récompense des Paul et des Antoine, qui avaient vieilli dans les jeûnes et les macérations du désert. Saint Louis de Gonzague, mort à vingt-trois ans, après six ans passés dans la Compagnie de Jésus, avait acquis une si haute sainteté, et mérité une place, si élevée dans le ciel, que sainte Madeleine de Pazzi ravi e en extase et témoin de sa. gloire s'écriait avec admiration. Je n'aurais jamais cru que Louis, fils d'Ignace, fût un si grand Saint !

 Puis donc, M. T. C. F., que l'observation de la Règle est une source de mérites si grands et si abondants, attachons-nous à la garder toute notre vie, à l'observer jusque dans Ses moindres points. Mais, ne l'oublions pas, c’est moins encore l'observation matérielle de la Règle qui sanctifie, que la pureté et la sainteté des motifs avec, lesquels on l'observe. Toute la beauté de la fille du roi dit le Psalmiste, de l'âme fervente, vient de l'intérieur (Ps. XLIV.)

 La Règle est l'expression de la volonté de Dieu : c'est donc la volonté de Dieu, sa gloire, son amour, son bon plaisir, qu'il faut avoir en vue en l'accomplissant. Soyons ponctuels au lever, exact,, à l'oraison, à l'office, à la lecture, à tous nos exercices de piété, appliqués et silencieux dans nos études, zélés et dévoués en classe, régulier, en tout ; mais que ce soit pour plaire à Dieu, parce qu'il le veut, pour lui témoigner notre amour. Tenons-nous unis à Notre-Seigneur, et faisons toutes nos actions pour lui, avec lui, et comme sous ses yeux. Ce fut une, grande louange que celle que la foule lui adressa en proclamant qu'il avait bien fait toutes choses. (Marc, VII, 37.) C'est ce que nous devons nous efforcez d'imiter dans le divin Maître. Bien faire toutes nos actions ordinaires, même les plus petites ; les faire avec diligence, avec attention et exactitude, dans le temps, le lieu et la manière qui nous sont marqués par la Règle. Alors, nos jours seront pleins, nos mérites et nos bonnes œuvres se multiplieront comme à l'infini.

    « Je ne compte pas mes années, disait Alexandre, mais mes victoires. » Saint Eucher veut que le Religieux fasse de même. « Ne vous y trompez pas, dit-il, qui que vous soyez, ne comptez  parmi les jours que vous avez vécu en Religion, que ceux où vous avez renoncé à votre volonté propre résisté à vos désirs, et évité toute transgression de vos Règles. » Et, en vérité ne devons­ nous pas avoir au moins autant de courage et d'ardeur pour la conquête du Ciel, qu'un prince de la terre pour la conquête dit monde? Ne comptons donc pas les se­maines, les mois, les années que nous avons passés en Religion, mais les victoires que nous avons remportées sur nos ennemis, sur l'orgueil, sur la colère et sur tous les vices ; ne comptons que les trophées de nos bonnes œuvres et de nos Règles saintement accomplies.

 Oh ! que de victoires spirituelles, que de trophées de vertus un Frère peut accumuler chaque année et même chaque jour ! Que de riches perles, que de diamants précieux il peut ajouter à sa couronne éternelle, en se dévouant à l'instruction de la jeunesse et à la pratique journalière de sa Règle ! Si le verre d'eau froide donné au nom de Jésus-Christ, si le morceau de pain dont on aura apaisé la faim du pauvre, le vieil habit dont on aura couvert sa nudité, une visite rendue à l'affligé, au prisonnier (Matth., XXV, 34) ; si toutes ces actions, si petites et qui exigent si peu d'efforts, ont cependant un si grand mérite devant Notre-Seigneur, qu'il doive, au grand jour de son jugement, les montrer aux Anges et aux hommes, les louer de sa propre bouche, les reconnaître comme faites à lui-même, et les récompenser de son royaume éternel, quel mérite n'auront pas devant lu, tous les sacrifices et toutes les actions saintes qui partagent la vie du Religieux, l'abandon pour Dieu seul de tous les biens de la terre, d'un père, d'une, mère et de tout ce qu'on a de plus cher au monde ; une liberté, des forces, une santé, une vie tout entière usée et sacrifiée dans l'enseignement de la jeunesse et dans l'exercice non interrompu du zèle et de la. charité ; les vœux exactement gardés, les exercices de la Règle fidèlement observés ; tant d'oraisons, de confessions, de communions ; tant d'actes surnaturels de foi, d'espérance, de charité, et les autres que la vertu de Religion inspire et qui remplissent la vie d'un Frère !

 Non, il n'y a pas de doute que tous ces actes si héroïques et si saints ne soient d'un prix infini devant Dieu, et qu'ils n'expliquent pourquoi Notre-Seigneur désigne, sous le nom de trésor, la récompense promise à ceux qui quittent tout pour le suivre, c'est-à-dire, aux Religieux; et, sous le nom de denier, celle des ouvriers ordinaires qu'il envoie travailler à sa vigne. C'est dans ces pensées et dans ces vues que saint Cyprien appelle les Religieux les fleurs du jardin de l'Eglise et la plus noble partie du troupeau de Jésus-Christ ; que saint Grégoire de Nazianze les nomme les colonnes et la couronne de la foi ; et que saint Liguori ne craint pas de dire qu'il tient pour certain que les trônes des Séraphins, laissés vides par la défection des compagnons de Lucifer, ne seront occupés que par des Religieux. Ce Saint affirme que sur soixante personnes inscrites au dernier siècle dans le catalogue des Saints, il n'y en a que cinq ou six qui n'aient pas été des Religieux.

 Qui donc ne s'encouragera pas dans sa vocation et dans la pratique de sa Règle par ces considérations si belles et si vraies? Qui ne voudra pas, tous les jours età tous les instants, grossir le trésor de ses mérites ici-bas, pour assurer et multiplier sa gloire et, son bonheur dans l'éternité? Nous faisons tous les frais du salut, de la prédestination, et même d'une très haute prédestination en embrassant la vie religieuse et en nous assujettissant à une Règle ; consommons-la, cette prédestination, en observant notre Règle, avec toutela perfection possible, pour Dieu seul et dans son seul amour. La Règleainsi gardée nous donnera non seulement, de très grands et de très nombreux mérites ; mais elle nous remplira encore des plus douces consolations. A quiconque suit la Règle, dit saint Paul, la paix et la joie avec l'abondance des miséricordes dit Seigneur. (Gal., VI, 16.) Nous allons en dire quelque chose dans la dernière partie de cette Lettre.

 III.

 La Règle est la perfection de la loi de Dieu, puisqu'elle n'est que la. pratique des Conseils évangéliques ajoutée aux commandements ; on peut donc lui appliquer excellemment tout ce que le Saint-Esprit nous dit des douceurs et des délices de cette divine loi. Heureux ceux, dit le Prophète, dont la conduite est pure, et qui règlent leurs démarches sur la loi du Seigneur. Je fais mes délices de l'accomplissement de cette loi, comme d'autres mettent leur bonheur dans la possession des richesses. Voire loi m'est un plus grand trésor que des millions d'or et d'argent. Que vos oracles sont pour moi pleins de douceur ! Ils sont plus doux à mon âme que le miel ne l'est à ma bouche. C'est ainsi que le Roi-Prophète exalte les douceurs et les délices de la loi de Dieu. Tout le Psaume 118, le plus long de tous, est consacré à dire les merveilles qu'elle renferme et le bonheur qu'elle apporte à l'âme fidèle. Le saint Roi se complaît à répéter, dans chacun des 176 versets qui le composent, et les noms divers de cette loi et la variété infinie des biens et des douceurs qu'elle donne.

 Nous sommes donc certains, au témoignage même de l'Esprit-Saint, que le bonheur et la joie, la paix et le contentement accompagneront toujours les Religieux fidèles qui se feront une loi de garder constamment leurs Règles. Guidés par ce divin Esprit, les Saints et les Maîtres de la vie spirituelle nous expliquent cette vérité d'une manière admirable. Selon une pensée de saint Augustin, les Règles sont aux Religieux ce que les ailes sont aux oiseaux, et les roues aux chars. « Les ailes, dit-il, ne sont point une charge, ni un embarras pour l'oiseau; elles servent, au contraire, à le rendre plus léger et à le faire voler. Les roues, bien loin d'ajouter au char une pesanteur incommode, le font rouler avec facilité et diminuent la charge de moitié. Ainsi en est-il des Règles. Ce sont des ailes qui nous font voler vers le Ciel ; ce sont des roues qui nous aident à porter plus facilement le joug de la loi de Dieu, pendant que les gens du monde, qui n'ont pas les mêmes secours, ne le traînent qu'avec peine, en gémissant sous le faix, et y succombant à toute heure. Et, en effet, combien de devoirs qui coûtent énormément aux séculiers, et dont les Religieux font leurs délices: la sainte messe, la confession, la communion, la prières ! Quelle facilité n'ont-ils pas pour garder certains que la sensualité et le respect humain rendent comme impossibles aux mondains, tels que le jeûne, l'abstinence ! Combien de pêchés énormes, très communs dans le monde, dont la Règle et notre état nous ôtent même, la tentation : le vol, le blasphème, l'ivrognerie, la licence des discours, des peintures, des réunions, et tous ces crimes, en général, dont saint Paul dit qu'ils excluent du Ciel ceux qui les commettent. Oui, le Religieux, par sa Règle, échappe à cet air infect et mortel qu'on respire dans le monde, et dont les âmes pures du siècle ne se défendent qu'avec des peines inouïes ; il échappe à ces occasions mauvaises, si fréquentes au­jourd'hui, qu'on ne peut prévenir ou écarter, dans la vie ordinaire, qu'à force de violences et de luttes contre soi­-même et contre les autres. Oui, il est vrai de dire que, par la détermination héroïque qui le donne à la Religion, par sa rupture absolue avec le monde, le Religieux se donne à des facilités incomparables pour la vertu, et qu'au lieu d'aggraver son fardeau, il l'allège et l'adoucit.

 Sans doute que la Règle lui impose une multitude de pratiques et de devoirs ; mais chaque chose vient en son temps, et tout est si bien distribué que, dans le détail, la Règle se réduit à des actes très simples et très faciles, que l'habitude rend ensuite comme naturels. Je vous conduirai, dit l'Esprit-Saint, dans les sentiers étroits de la perfection ; mais une fois entré dans cette voie, elle s'élargira et vous y courrez sans obstacle. (Prov. IV, Il. 12.) Saint Bernard explique ainsi ce passage dans une lettre au Pape Eugène : « Au premier abord, les choses vous paraîtront impossibles, avec l’habitude elles vous deviendront faciles, puis vous ne les sentirez pas même, et enfin elles feront vos délices. » Et, n'est-ce pas, en effet, ce que les bons Frères expérimentent tous les jours? Ils s'identifient tellement avec la Règle, avec leurs emplois, avec leurs exercices, qu'ils deviennent pour eux un besoin.Ils ne sont contents, ils ne sont heureux, que lorsqu'ils les ont remplis avec une parfaite exactitude. Jamais vous n'entendrez un Frère, régulier et ponctuel en tout, se plaindre que la Règle est pénible, qu'elle est difficile. Ceux-là seuls se plaignent des Règles qui ne les observent pas, ou qui ne les observent qu'avec négligence et à demi ; parce que, dit l'auteur de l'Imitation de quelque côté que se tourne le Religieux lâche et déréglé, il ne trouve qu'angoisse et il éprouve tribulation sur tribulation.

 Bossuet développe cette pensée, d'une manière très solide, d'après saint Augustin. « Autre chose, dit-il, est, d'être sous la loi, et autre chose est d'être avec, la loi : car la loi, par son équité, a deux grands effets : ou elle dirige et rend heureux ceux qui lui obéissent, ou elle rend punissables et malheureux ceux qui se révoltent. Quelques efforts que fassent les infracteurs pour se soustraire à son domaine, ils sentent qu'elle les accuse, qu'elle les condamne, qu'elle les tient comme pressés sous la rigueur de ses ordonnances ; et par conséquent ils sont sous la loi, et la loi les tue. Au contraire, ceux qui accomplissent la loi, sont ses amis et vont avec elle, parce qu'ils l'embrassent, qu'ils la suivent, qu'ils l'aiment. La loi ne les accuse plus comme Lin juge, mais elle les conduit comme leur Règle, et elle les vivifie par ses promesses et ses espérances. Il en est de même du bon Religieux à l'égard de sa Règle ; il y trouve sa justification, sa sûreté, et par là même la paix et le contentement. Il ne la porte pas comme un joug dur et pesant ; mais il l'aime et la suit comme une excellente conseillère, une sage directrice, une bonne mère, qui le mène comme par la main, afin de le préserver de tout égarement et de toute chute. »

 Du reste, vous savez comme moi, M. T. C. F., par une heureuse expérience, que la douceur, l'esprit de famille, la paternité est le caractère essentiel et universel de notre Règle. Rien de rigoureux ni de sévère dans les pratiques qu'elle nous impose. La. piété, la vertu, l'esprit religieux sauvegardés, elle fait la part la plus large à tous les besoins légitimes du corps et de l'esprit : nourriture, habillement, logement, études, sciences et connaissances propres à notre état.  La Règle, au fond, se réduit à cinq points . Les exercices de piété, l'étude, la classe, les repas et les récréations, le sommeil. Or, elle donne deux heures et demie aux exercices de piété, deux heures à l'étudesept heures il la classe, et douze heures et demie aux repas, aux récréations OU au sommeil. C'est donc plus de la moitié de la journée pour le repos, les besoins du corps et la. conservation de la santé. Ne serait-on pas tenté d'y voir trop de condescendance à la nature, si la rude tâche de l'enseignement ne venait la justifier et même la commander?

 Aussi, les Supérieurs ont-ils encore pour premier devoir, en exigeant l'obéissance des inférieurs, de tenir à ce qu'on ne les laisse jamais manquer du nécessaire, de proportionner toujours le devoir et la tâche aux forces de chacun, de modérer ceux qui s'excéderaient de travail, de veiller à la, santé de tous, et de les obliger à soigner leur ordinaire selon la Règle. Elle veut que, constamment, les Directeurs usent de bons procédés à l'égard de leurs Frères ; et elle va si loin sur ce point qu'elle eu, la. déposition de celui dont le caractère dur et difficile rendrait l'obéissance trop pénible aux inférieurs. En un mot, l'esprit général de l'Institut, qui est l'humilité,la simplicitéet la modestie, donne à l'autorité un caractère si paternel, a l'obéissance un esprit si filial, à tous nos rapports mutuels tant de franchise et de cordialité, que les Frères retrouvent dans toutes les Maisons de l'Institut où la Règle est bien comprise et bien observée, les charmes et les douceurs de la famille, la paix et l'union qui cri font le bonheur.

 Mais,  M. T. C. F., ce qui doit par dessus tout nous réjouir et nous consoler, c'est que Notre-Seigneur, en béatifiant et prédestinant ceux qui pratiquent les Conseils évangéliques, a béatifié et prédestiné par là même les fidèles observateurs des Règles,  puisqu'elles ne sont que l'application et le développement de ces  Conseils.

 Il faudrait ici vous faire voir comment la Règle nous les fait pratiquer et comment elle nous donne par là même un droit particulier aux Béatitudes dont ils sont le gage ; mais, ne pouvant, vu la longueur de cette Lettre le faire, cette fois, avec les développements nécessaires, je me réserve d'y revenir dans une prochaine Circulaire, et de vous montrer que notre vocation et nos Règles nous placent constamment dans la condition des Béatitudes évangéliques, et, qu'elles nous y placent par elles-mêmes et d'une manière toute spéciale. Rien de plus propre à nous faire estimer cette vocation et ces Règles, à nous y attacher inviolablement. Pas de motif plus pressant, pour les Frères Directeurs surtout, de tenir à la Règle et de la faire observer avec tout le soin possible, afin de conserver leurs Frères, de les rendre contents, et de procurer leur avancement sous tous les rapports. Etre huit lois béatifié, huit fois prédestiné par Jésus-Christ lui-même quel bonheur ! quelle ineffable consolation au point de vue de la foi ! Le bon Maître, dans son amour infini pour ses Apôtres, tressaillait de joie en pensant à tout le bien qu'ils allaient faire, et au bonheur qui les attendait dans le Ciel où il voyait leurs noms écrits. C'est aussi, je vous l'assure, un sentiment semblable que m'inspire la vue de nos jeunes Frères et Postulants, dans nos cérémonies, nos vêtures, nos neuvaines, nos communions générales et partout. Je ne puis assez me réjouir et bénir Dieu de les voir dans sa grâce, heureux et contents, pleins de bonnes dispositions, se formant à des habitudes de piété, de pureté, de respect, de charité, d'ordre et de travail, et donnant lesplus heureuses espérances pour le bien de la Religion et pour leur propre salut. Pourquoi faut-il que de douloureuses appréhensions viennent se mêler à cette joie si  douce, et hélas la changer trop souvent en d'amers regrets ! Oh je vous le répète, M. T. C. F., tenez à votre vocation, tenez-y de toute votre âme et de toutes vos forces, comme au gage le plus assuré de votre bonheur éternel. Et vous, Frères Directeurs, ne négligez rien, ne ménagez ni peines ni soins pour conserver vos Frères et leur garder ce trésor incomparable.

 Mais, comprenons-le bien, tous ; ces consolations, ces mérites, ces sûretés que nous venons d'expliquer, quoique le partage de tous ceux qui ont le bonheur de vivre en Religion, appartiennent surtout et dans toute leur étendue aux Religieux fervents et réguliers, qui, pleins d'amour et d'estime pour leur Règle, s'efforcent de la pratiquer avec plus de perfection. Dieu nous donne gratuitement la vocation à la vie religieuse, c'est un pur effet de son infinie bonté ; mais il veut que nous répondions à cette première grâce, et que la persévérance soit le fruit de nos efforts et de nos bonnes œuvres de chaque jour. Ce n'est pas tant de nous perdre dans notre vocation que nous devons avoir frayeur ; car, dit saint Bernard, il est difficile, il est comme impossible de mourir en Religion sans être sauvé, d'y persévérer jusqu'à la mort sans être prédestiné ; mais ce que nous devons craindre, c'est de perdre cette vocation et de ne pas y mourir. Or, dit le P. Champagnat, on ne meurt pas eu Religion quand on ne vit pas en Religieux ; c'est-à-dire,quand on ne vit pas selon la Règle : sentence terrible dont, hélas ! la vérité ne nous est que trop souvent démontrée, à nous qui pénétrons le secret de nos défections.Soyons donc fervents, soyons réguliers, soyons ponctuels en tout, afin d'assurer notre vocation et notre élection. Souvenons-nous toujours de ces avis de notre pieux Fondateur par lesquels je termine : « Observez  fidèlement votre Règle, fuyez les regards du public, évitez les entretiens inutiles avec les séculiers, tenez-vous renfermés dans vos maisons, tout occupés de vos devoirs, et vous aimerez votre vocation et vous y persévérerez, vous aurez la paix de l'âme, et vous recevrez le centuple de biens, de grâces, de consolations que Notre-Seigneur promet à ceux qui quittent tout pour le suivre. »

 Nous prions tous le divin Sauveur et la bonne Mère, M. T. C. F., à l'approche de la nouvelle année, de vous faire cette grâce, de vous affermir de plus en plus dans la Piété, la Régularité et la Charité. Que la paix de la bonne conscience, l'amour de Dieu et la crainte du péché soient toujours dans vos âmes. Que la fidèle observance de la Règle soit le salut et la consolation de chacun de -vous, la gloire et le soutien de toutes vos Maisons. Qu'une parfaite Charité vous unisse tous en Jésus et Marie. C'est là l'objet de toutes nos prières et de tous nos souhaits, parce que c'est le seul principe de votre vrai bonheur, c'est tout ce que Dieu veut de vous, c'est ce qui doit assurer votre sanctification et la prospérité de toute la Congrégation

 Je me recommande moi-même tout particulièrement à vos prières, et je suis, avec la plus tendre affection, en Jésus et Marie,

 Mes Très Chers Frères,

 Votre très humble et très dévoué Frère et serviteur,

       F. Louis-Marie.

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 Nous avons perdu deux Frères Profès, depuis la dernière Circulaire : le C. F. Bénen, directeur de Sury-le-Comtal, décédé à Sury, le 19 novembre; et le C. F. Vaast, sous-directeur à Unieux, décédé dans ce poste le 10 décembre. Tous les deux sont morts dans les plus saintes dispositions, ils ont été l'objet des soins les plus empressés de la part de leurs Confrères et de la part du Clergé des deux paroisses. Nous les recommandons à vos prières, d'une manière particulière, ainsi que tous nos défunts.

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 Vous savez que le De Profundis de la prière du soir, avec le Pater et l'Ave qui se disent à la fin, sont aussi pour nos Parents et Bienfaiteurs : vous y ajouterez donc cette intention. Avant le Pater, on dira: Prions pour les besoins de la Société, pour nos Supérieurs, nos Frères, nos Enfants, nos Parents et Bienfaiteurs.

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 Je vous rappelle la distribution qui a été faite des Provinces entre les Frères Assistants :

 Pour la Province du Centre, Section de Notre-Dame de Saint-Genis-Laval, le C. F. Jean-Baptiste, premier Assistant.

 Pour la même Province, Section de Notre-Dame de l'Hermitage, le C. F. Philogone, quatrième Assistant[1].

 Pour la Province du Midi (Saint-Paul-trois-Châteaux et La Bégude), le C. F. Pascal, deuxième Assistant.

 Pour la Province du Nord, y compris les Maisons de l'Ouest, le C. F. Théophane, troisième Assistant.

 Le C. F. Chrysogone, cinquième Assistant, est chargé de la direction de la Maison-Mère.

 Bien que les lettres soient pour l'Assistant de la Province, elles me seront adressées à moi-même avec l'adresse convenue : Au Révérend Frère Supérieur des Petits Frères de Marie à Notre-Dame de Saint-Genis-Laval (Rhône). Il faut qu'on soit très exact à envoyer la correspondance de Règle, tous les deux mois, et à prendre toutes les précautions nécessaires pour affranchir complètement chaque lettre.

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    Pour nous conformer aux dispositions du Chapitre XI des Constitutions, première partie, concernant l'Administration du  Temporel, et pour que les Frères Directeurs soient moins dérangés dans la Direction générale des Frères, des Elèves et des Classes, après avoir pris l'avis du Régime, nous avons arrêté qu'il y aurait un Frère Econome dans nos principaux Pensionnats, tels que Neuville, Valbenoîte, Saint-Didier-sur-Chalaronne, la Côte-Saint-André , Charlieu, Beaujeu, Digoin, Breteuil, Saint-Pol-sur-Ternoise, les Vans, etc.

 Le Frère Econome, sous la dépendance du Frère Directeur avec lequel il doit s'entendre pour tout, tient les comptes de l'Etablissement, fait les achats, soigne le temporel, reçoit les mois d'école des externes, et, à moins que le Frère Directeur ne préfère s'en charger, les pensions des internes, et fait les autres petites recettes de l'Etablissement, est chargé de la vente des classiques aux Enfants, est au courant de toutes les recettes et de toutes les dépenses de la Maison, tient la seconde clef de la caisse et a à sa disposition l'argent convenu avec le Frère Directeur, le 1ieret le 3ièmelundi de chaque mois, pour les dépenses courantes de la quinzaine.

 Le Frère Econome doit être Profès, il exerce les fonctions de sous-directeur.

 Chaque semaine, au jour indiqué par le Frère Directeur, il lui rendra compte de tout ce qu'il a acheté, vendu reçu, et fait dans son Economat ; il arrêtera avec lui la balance de la caisse courante du mois ; et tous les premiers et les troisièmes lundis de chaque mois, ils feront aussi la balance de la caisse générale de la Maison.

 Ces principes du Règlement des Frères Economes suffiront pour fixer leurs attributions et prévenir tout conflit. On s'y tiendra exactement, en attendant que le Chapitre Général l'arrête définitivement.

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 Vu l'état de gêne extrême où se trouve l'Institut, nous avons arrêté ce qui suit :

 1°Il ne sera fait dans toutes les Provinces et dans toutes les Maisons de l'Institut, Maisons-Mères, Pensionnats et autres, aucune autre dépense que celles de nourriture, de vestiaire et de mobilier, selon la Règle.

 La nourriture à part, on doit s'en tenir, partout et pour tout, au plus strict nécessaire.

 2°,Les Postulants ne seront pas reçus au-dessous de la demi-pension, sans une autorisation spéciale de notre part.Il faut qu'on fasse payer la pension entière, autant que possible.

 3° Chaque Etablissement versera à la Maison-Mère ou dans les Maisons Provinciales, dans le courant du mois de janvier 1861, une somme de 50 francs par Frère, pour aider à payer les dettes les plus pressées. Nous avons un besoin urgent de recevoir cette somme. Les Frères Directeurs qui pourront y ajouter, ne manqueront pas de le faire.

 Ils s'entendront avec, les Directeurs de poste pour nous faire parvenir ces fonds ; ou, s'ils sont embarrassés, ils nous en parleront dans les lettres de janvier.

 4°Nous continuerons à préparer la construction de la Chapelle de Notre-Dame par les souscriptions dont nous sommes convenus ; mais sans y rien employer des deniers de l'Institut, tant que nos dettes ne seront pas couvertes, ce que je tiens à faire passer avant tout.

 Il faut que cette mesure que la prudence commande, ne fasse qu'exciter votre zèle pour avoir, par les dons de la piété, la Chapelle que nous désirons tous, et dont nous sentons si vivement le besoin.

 A cette fin, les Frères nous donneront, très exactement les renseignements qui leur sont demandés, par la note ci-incluse soit pour la Carte de Jérusalem et le Portrait de notre Fondateur, soit pour leurs souscriptions personnelles et celles des Elèves.

 Il faut, poursuivre, par tous les moyens convenables, le placement de la Carte, dont il nous reste encore plus de deux mille exemplaires, à du Portrait, que nous avons fait tirer à cinquante mille exemplaires.

 On accepte ce qui est offert pour le Portrait : un franc, cinquante, vingt-cinq, et même dix centimes. Tous ceux qui donnent, vingt francs au moins, sont inscrits comme Bienfaiteurs sur le Registre de fondation de la Chapelle de Notre-Dame.

 J'espère aussi que chaque Frère fera un nouvel effort, pour faire son offrande, soit sur les biens dont il peut disposer, soit en s'entendant avec sa famille.

 Nous mettrons à part les offrandes qui nous seront, faites, et nous les réserverons exclusivement pour la bonne œuvre.

 C’est  le Frère Directeur qui doitremplir ou faire remplir la note qui vous est envoyée. Chaque Frère de l'Etablissement devra lui fournir les renseignements qui le concernent. Nous tenons à les avoir tous très exactement.

 Il en est de même pour l'état du personnel, dont nous avons besoin, pour compléter tous nos registres et nous assurer de leur parfaite exactitude.

 Cette note doit nous être retournée avec, les lettres de janvier, on, seule, si ces lettres sont déjà parties.

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 Je recommande aux Frères Directeurs de prévenir tout changement dans le personnel de leur Maison. Il faut qu'un Frère fasse son année au moins, partout où il est envoyé. On doit user de tous les moyens possibles avant de recourir à celui d'un changement, à cause du dérangement qu'il apporte toujours et des frais qu'il entraîne. Dans tous les cas, il n'est pas permis à un Frère Directeur de renvoyer un Frère en second, ni au Frère en second de venir à la Maison-Mère, sans qu'il soit appelé par nous. C'est avec une peineextrême que nous voyons manquer à ce point de Règle, toutes les fois qu'on le fait, quoique ce soit très rarement.

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 Qu'on évite, avec le plus grand soin, tout voyage qui ne serait pas nécessaire, et surtout qu'on n'en fasse point sans permission. La dépense nous fait de la peine sans doute ; mais ce qui nous en fait par-dessus tout, c'est l'offense de Dieu, quand le vœu de Pauvreté et l'Obéissance sont blessés.

 Qu'il n'y ait point non plus de correspondance inutile, de maison à maison, point de visites irrégulières, pas de journal apporté dans l'Etablissement. Les Frères Visiteurs doivent nous signaler ces abus où ils existeraient.

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 Plusieurs accidents graves ont failli arriver, et des plaintes nous sont venues de la part des Autorités, pour des essais de feux d'artifice, de pétards, de ballon, qu'on s'est permis dans certaines Maisons. Il faut qu'on s'abstienne de toutes ces sortes d'amusements, quand même les élèves ou d'autres personnes en feraient tous les frais.

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 Je crois utile de vous faire connaître les avis et instructions que nous avons donnés aux Frères Visiteurs pour leurs visites de cette année. Je vous les transcris en entier, persuadé que vous en ferez votre profit en ce qui vous concerne, et que vous vous efforcerez de préparer, de faciliter et d'adoucir autant que possible, la tâche des visites,

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 Avis et Instructions aux Frères Visiteurs.

 1°Les Frères Visiteurs doivent donner partout le bon exemple, et insister particulièrement sur la Piété, la Régularité et la bonne Union parmi les Frères.

 2°Ils s'appliqueront à la pratique des Règles qui les concernent spécialement, et ils n'oublieront pas le cérémonial prescrit pour l'ouverture et la clôture de la Visite.

 3° Ils ne quitteront jamais une Classe sans avoir adressé quelques mots d'édification aux Enfants.

 4° Ils tiendront beaucoup à l'Ecriture, et, pour stimuler le zèle des Frères, ils leur feront faire une composition sur cette partie.

 5°Ils vérifieront, autant que possible, toutes les factures, au moins celles des fournitures prises en dehors de la Procure.

 6°Ils tiendront à ce que l'argent des classiques ne soit pas mêlé avec l'autre. Dans les livres de comptes, le blanchissage et le raccommodage seront inscrits à Divers.

 7°L'état sommaire du mobilier de chaque Maison doit être marqué sur le -verso du relevé de comptes. On donne par les chiffres 1, 2, 3, 4, signifiant très bien, bien, médiocre, mal, une note appréciative de chaque objet. Ces chiffres se placent à la suite de chaque article.

 8°Ils veilleront à ce que les comptes soient réglés tous les quatre mois, sans être clos, le 2e relevé devant être celui de huit mois, et le 3e, celui de l'année.

 9°Ils prendront note des habits, bas, souliers et autres parties du trousseau des Frères, qui seraient délaissés dans chaque Maison. Ils ordonneront d'envoyer à la Maison-Mère, à la première occasion, tout ce qui peut être utilisé, et en joindront la note à leur procès-verbal.

 10° Ils viseront d'une manière particulière, à procurer aux Frères le bien-être matériel dont, ils ont besoin, selon la Règle : des classes saines, bien aérées et d'une étendue suffisante, un logement convenable, une cour et un jardin clos et indépendants, et le mobilier nécessaire.

 11° Ils prendront note des Maisons qui laisseraient à désirer sous ce rapport, des moyens qui seraient à prendre pour les améliorer ; et ils feront connaître au Frère Supérieur les démarches qu'ils auront faites, dans ce but, auprès des Autorités ou des Fondateurs.

 12° Dans l'inventaire du mobilier, ils se contenteront. de donner le nombre des ouvrages de la bibliothèque des Frères, en y joignant une note générale en bien ou en mal, eu égard au catalogue adopté.

 13° Ils obligeront les Frères à soigner leur ordinaire selon la Règle, surtout pour la cuisson des aliments.

 14°Les Frères Visiteurs sont, chargés de préparer le livre des Annales. A cette fin, ils apporteront toutes les notes possibles à la Maison-Mère, où ces livres doivent être commencés par un Frère désigné; et ils tiendront, dans chaque Maison, un livre préparatoire où ils coucheront leurs observations.

 15° Il est recommandé aux Frères Visiteurs de favoriser les vocations partout où ils passent, et d'engager les Frères à envoyer des Elèves dans les Pensionnais de l'Institut, el il répandre le Portrait, du Fondateur et la Carte de Jérusalem, en faveur de la Chapelle.

 16° Les Frères Visiteurs devront signaler : 1° Les Etablissements ou il y a des appartements tapissés, des glaces exposées, ou autres objets contraires à la Pauvreté, comme parapluie en soie, chemises froncées au poignet, tableaux à cadre doré, tableaux profanes, etc. 2° ceux ou il n'y a pas de réveil, où les lieux réguliers n'ont pas de crucifix, d'image ou statue de la sainte Vierge.

 17° Ils doivent voir si tout le costume des Frères est selon les Constitutions, les souliers, le chapeau, le manteau ; si chacun soigne bien son trousseau, quelle partie il néglige ; si les cheveux sont coupés au temps et selon la forme que prescrit la Règle. Ce dernier point mérite une attention particulière.

 .18° L'usage du tabac étant interdit aux Frères, ils veilleront à le réprimer partout, et ils signaleront au Frère Supérieur ceux qui manqueraient encore sous ce rapport.

 Pour aider à préparer le livre des Annales, chaque Frère Profès (Directeur ou non), devra mettre par écrit, et remettre au Frère Visiteur tous les renseignements qu'il peut donner sur chacun des Etablissements où il a résidé. Cette note pourra porter sur les questions suivantes ou autres semblables :

 1°Par qui, en quelle année et à quelles conditions a été fondé l'Etablissement de…

 2°Comment étaient, à la fondation, l'habitation, les classes, la cour et le jardin. Les avantages, les inconvénients.

 3°Quelle somme fat payée pour la prime et le mobilier, et par qui.

 4°Quel était le traitement des Frères, et de quelle manière se faisait-il.

 5° Les améliorations faites depuis, et en quelle année.

 6°La spécialité de l'Ecole gratuite ou payante, communale ou libre.

 7°Les oppositions et contradictions suscitées aux Frères ; qui les a surmontées et comment.

 8°Le bien qu'a fait l’Ecole, ce qu'il y a eu de remarquable depuis sa fondation, comment les Frères ont été vus et le sont encore.

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Je ne doute pas, M. T. C. F., que votre bon esprit ne vous fasse recevoir avec plaisir ces différents avis et observations, et que vous ne vous empressiez de les mettre à profit. Ils sont tous, comme vous le voyez, pour le plus grand bien de la Congrégation, et le parfait accomplissement de la Règle.

 L'instruction sur les Règles pourra être lue en trois fois, une partie chaque fois. Le lendemain on en fera le sujet de la Méditation. Si vous la méditez et la comprenez bien, si vous pesez mûrement devant Dieu toutes les raisons qui vous sont données, d'aimer, d'estimer et de pratiquer la Règle, vous ne manquerez pas d'être puissamment, excités à marcher dans cette voie de salut et de perfection.

 Je vous renouvelle tous mes souhaits de bonne et sainte année.

 F. Louis-Marie.

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[1]: Les deux sections ont été déterminées par les Visites de l'année dernière; elles restent de même, sauf trois maisons qui ont été prévenues.

 

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