Circulaires 80

Louis-Marie

1864-07-16

Retraites. - Défunts. - Traits édifiants. - Rapports avec les Enfants. - Exer­cices des  Cinq  Plaies

080

51.02.01.1864

 1864/07/16

 V. J. M. J.

N.-D. de Saint-Genis-Laval, le 16 juillet 1864.

Fête de N.-D. du Mont-Carmel.

 Mes très chers Frères,

 Nos vacances et nos retraites auront lieu, cette année, dans le même ordre que les années précédentes. Le mois de septembre sera le mois ordinaire des vacances.

 Les Retraites sont fixées ainsi qu'il suit :

 Du 14 au 21 juillet, à Glasgow, pour les Maisons d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande.

 Du 28 août au 4 septembre, pour la Province de Notre-Dame de Saint-Genis-Laval.

 Du 4 au Il septembre, pour la Province du Nord.

 Du 11 au 18 septembre, pour la Province de Notre-Dame de l'Hermitage.

 Du 15 au 22 septembre, pour la Province de La Bégude.

 Du 20 au 27 septembre, pour la Province de Saint-Paul-Trois-Châteaux.

 Du 25 septembre au 2 octobre, pour la Province d'Hautefort.

 ———————————-

 Les Frères de chaque Etablissement se rendront ensemble à la Retraite. Il est nécessaire que tous soient arrivés à la Maison désignée, la veille du jour fixé pour l'ouverture de la Retraite. La bonne organisation des Maisons et l'esprit de régularité demandent qu'on soit très exact à ces deux points de Règle et d'usage.

 Pour empêcher le mélange du linge des différentes Maisons, on continuera à remettre à chaque Frère, au départ de la Retraite, un mouchoir de poche, une chemise et un rabat neufs. Les Frères auront soin de changer de linge en quittant leur Etablissement, et ils seront dispensés d'en apporter d'autre.

 ———————————-

 On ne doit pas oublier que les observations des Frères Profès sur les Aspirants aux vœux (vœu d'obéissance et vœux perpétuels) doivent s'étendre à tous les Récipiendaires dont ils ont connaissance. Elles seront envoyées avec la correspondance de juillet, ou bien on les remettra au Frère Directeur de la maison. La liste des vœux doit être mise à la disposition de tous les Frères Profès, et les Frères Directeurs tiendront à ce que chacun donne les renseignements demandés, conformément aux Constitutions.

 Dans le placement des Frères instituteurs, même des Adjoints, nous sommes obligés de donner très exactement :

 1° Les nom, prénoms, lieu et date de naissance de chaque Frère.

 2° Le lieu et la date de chaque brevet.

 3° Les noms de toutes les communes où un Frère a résidé, le temps qu'il y a passé et les emplois qu'il a remplis.

 En conséquence, tous les Frères, Profès et autres, même les Frères Directeurs, devront se présenter au Secrétariat de chaque Maison, pour donner et vérifier tous ces renseignements, et pour déposer leur acte de naissance dûment légalisé, avec leur brevet.

 Les aspirants au brevet (brevet élémentaire et brevet complet) s'entendront aussi avec le Frère Secrétaire, pour arrêter et préparer leur inscription, et fournir les pièces nécessaires.

 Tous les Frères qui sont nés en 1844, ne manqueront pas de voir le Frère Secrétaire, et de lui donner tous les renseignements dont il a besoin pour leur engagement décennal. L'oubli des moindres formalités pouvant le faire refuser, il faut que chaque Frère y apporte la plus sérieuse attention, et qu'il s'en occupe dès son arrivée à la Maison.

 ———————————-

 Je dois rassurer nos chers Frères du Midi sur la construction du Noviciat de Saint Paul-trois-Châteaux. Si, contrairement à leur attente et à la nôtre, nous ne l'avons pas commencée encore, c'est par des circonstances tout à fait indépendantes de notre volonté, et par le seul désir de mieux préparer l'entreprise et de l'exécuter dans de meilleures conditions. Nous continuerons à nous en occuper, et à disposer toutes choses pour mettre la main à l’œuvre, dès qu'on le pourra convenablement.

 Ce qui se fait en ce moment à la Maison-Mère, ne retardera en rien ce que nous avons à faire, soit à Saint-Paul-trois-Châteaux, soit dans la Province de Viviers. Nous ne travaillons ici que sur les fonds qui nous sont venus, en dehors de la Procure Générale, de la charité des fidèles et du concours personnel des Frères; et ce n'est que sur ces fonds que nous avons l'intention de poursuivre notre entreprise.

 Aussi, comptons-nous que tous les Frères, les Frères Directeurs et les autres, redoubleront de zèle et d'efforts pour nous aider à réaliser les fonds qui nous manquent. J'espère qu'avec les offrandes que nous attendons encore de la générosité personnelle des membres de l'Institut ; avec les économies que beaucoup de Frères offrent de faire sur leur vestiaire de Règle (soutanes, manteaux, chapeaux, souliers, etc.), ces économies seront fidèlement inscrites au nom de chaque Frère, comme offrande personnelle ; avec les dons et collectes qui nous parviendront encore, notre entreprise, laissée à moitié cette année, pourra se reprendre l'année prochaine.

 Les Frères Directeurs communiqueront à tous leurs Frères la note ci-jointe. Elle est pour vous intéresser tous à l’Œuvre, de plus en plus, et pour y intéresser les personnes charitables que vous connaissez.

 ———————————-

 Je vous recommande de nouveau de suivre très exactement les instructions qui vous ont été données pour les Obédiences de chemin de fer.

 Je dois ajouter qu'on exige aujourd'hui que la classe soit indiquée comme il suit, sur la partie souche de l'Obédience:

 Nom du Religieux, FRÈRE ETIENNE autorisé à voyager en 3° CLASSE.

 ou bien :

 Nom du Religieux, autorisé à voyager FRÈRE ETIENNE (3° classe).

 ———————————-

 Je vois avec plaisir que les Frères Directeurs sont exacts à prendre les livres de prix dans les Maisons de Procure. J'espère qu'ils se trouveront toujours mieux de cette mesure. On tient de plus en plus à ne faire choix que des meilleurs livres sous le rapport du fond, et à vous les fournir dans les meilleures conditions possibles, tant pour le bon goût des reliures que pour la modicité des prix. Parmi les bons ouvrages que nous pouvons vous conseiller, j'aime à vous recommander Beauvallon ou les Devoirs de famille, par l'abbé Delbeney. Je désire que vous contribuiez tous à répandre le plus possible cet excellent ouvrage, qui a l'approbation d'un grand nombre d'évêques, et qui a valu à son Auteur les félicitations mêmes du Souverain Pontife. C'est d'ailleurs un témoignage particulier d'estime, de reconnaissance et d'affection que je dois, et que je suis heureux de donner ici, à M. l'abbé Delbeney, pour les services si pieux et si dévoués qu'il rend, comme Aumônier, à notre Maison de Saint-­Didier-sur-Chalaronne.

 Voici la liste des Frères Novices et Postulant, décédés depuis notre dernière Circulaire:

 

F. Ptolémée, Profès, décédé en Océanie en septembre 1863.

F. Calais, Novice, décédé à Notre-Dame de Hermitage, le 23 décembre 1863.

F. Paulin, Profès, décédé à Notre-Dame de Saint-Genis-Laval, le 18 janvier 1864.

F. Licérius, Novice, décédé à Saint Laurent-de-Chamousset (Rhône), le 20 février 1864.

F. Cirispule, Profès, décédé à Craponne (Haute-Loire), le 23 février 1864.

F. Honoré, Profès, décédé à Notre-Dame de l'Hermitage, le 23 février 1864.

F. Domice, V. O., décédé à Montcenis (Saône-et-Loire), le 2 avril 1864.

F. Pinien, Novice, décédé à Notre-Dame de l'Hermitage, le 2 avril 1864.

Gallon Auguste, Postulant, décédé à Notre-Dame de Saint-Genis-Laval, le 9 avril 1864.

F. Nicetas, Profès, décédé à Saint-Paul-trois-Châteaux, le 12 avril 1864.

F. Jean-Joseph, Profès, décédé à Notre-Dame de Saint-Genis-Laval, le 19 avril 1864.

F. Ennode, Profès, décédé à Saint-Paul-trois-Châteaux, le 30 avril 1864.

F. Jean-Gualbert, Novice, décédé à Notre-Dame de Saint-Genis-Laval, le 17 mai 1864.

F. Auctus, V. O.,décédé à Saint-Tropez (Var), le 19 mai 1864.

F. Léopoldus, V. O., décédé à Saint-Tropez (Var), le 28 mai 1864.

F. Victrice, Novice, décédé à Verdun-sur-le-Doubs (Saône-et-Loire), le 13 juin 1864.

F. Chrysologue, Profès, décédé à la Bégude, le 23 juin 1864.

.F. Perpétue, Profès, décédé à Saint-Paul-trois-Châteaux, le 6 juillet 1864.

 

Voilà, donc, M. T. C. F., trente-quatre nouveaux décès, depuis le 23 juillet 1863 jusqu'au 6 juillet 1864.

 Voilà trente-quatre Frères qui ont fait avec nous la dernière Retraite, et qui ne la feront plus ; elle a été véritablement pour eux la dernière. En voyant s'accroître ainsi le tribut annuel que nous payons à la mort, ne serons-nous pas excités nous-mêmes à nous y préparer plus sérieusement, plus efficacement que jamais ! Qui nous  dit que la prochaine Retraite ne sera pas aussi pour nous la dernière? Avons-nous plus de santé, avons-nous plus de forces, avons-nous moins d'âge que la plupart des Frères dont on nous annonce la mort ? Non, M. T. C. F., rien ne nous dit que notre nom n'ira pas, en 1865, grossir la liste mortuaire des membres de l'Institut. Et si, dans le cours de cette année, comme il est possible pour tous, comme il est très probable pour vingt à trente d'entre nous, nous avons à rendre nos comptes au Seigneur, n'est-il pas temps de nous y préparer ? n'est-il pas temps de mettre ordre aux affaires de notre conscience, et de nous prémunir contre la terreur des jugements de Dieu ? Oh ! quel motif de bien nous disposer à la Retraite qui approche ! quel motif, quelle raison de la faire avec toute l'attention, tout le soin, toute la bonne volonté dont nous sommes capables, avec la grâce de Dieu !

 C'est l'exemple que nous ont laissé les chers défunts dont vous venez de lire les noms. Ils ont bien fait la dernière Retraite, et la mort les a trouvés dans d'excellentes dispositions. L'un d'eux, tout jeune encore, le cher Frère Auctus, a été comme rappelé des portes du tombeau et de l'extrême agonie, pour nous dire la paix ineffable, la parfaite tranquillité dont jouit le bon Religieux, alors même que tout a disparu pour lui, et qu'il a la conscience de toucher au moment suprême.

 Après vingt-quatre heures d'agonie, pendant lesquelles il ne donnait aucun signe de connaissance, privé de la parole, privé de la vue, dans l'impossibilité de témoigner par aucun geste ce qui se passait en lui, il a repris ses sens, il a repris la parole, et il a pu me rendre compte à moi-même de ses sentiments et de ses dispositions. Et que nous a-t-il appris à tous, au retour de cette longue agonie ? Il nous a appris qu'il entendait et comprenait parfaitement tout ce qui se passait autour du lui ; qu'il s'était recueilli de son mieux, dans l'intime de son âme, pour recevoir l'absolution que M. l'Aumônier était venu lui donner le soir, et qu'il lui avait réitérée, le lendemain, avant lamesse de Communauté ; qu'il s'était uni, de tout son pouvoir, aux prières de la recommandation de l'âme qu'on lui avait faite, vers neuf heures du soir. Mais, lui dis-je alors, que pensiez-vous, pendant que M. l'Aumônier et moi nous récitions ces prières, quand vous nous entendiez dire : Il baisse à vue d’œil, il n'a plus qu'un souffle de vie, c'est fait, le voilà qui expire ! n'étiez-vous pas effrayé? n'étiez-vous pas inquiet ? – J'étais fort tranquille, me répondit-il ; je sentais la confiance en Dieu s'augmenter de plus en plus. Je fus surtout heureux, lorsque M. l'Aumônier m'exhorta à recevoir une fois de plus, deux fois de plus, le bienfait de l'absolution, je la reçus de mon mieux ; je n'avais rien qui m'inquiétât, rien qui me fît la moindre peine.

 N'est-ce pas là, véritablement, M. T. C. F., le centuple promis par le divin Maître, même ici-bas, à ceux qui quittent tout pour le suivre ? Y a-t-il sur la terre quelques biens, quelques plaisirs qui puissent balancer, un instant, ce bien ineffable, ce plaisir suprême de la bonne mort ? Non, non. Cette consolation finale est la plus grande de toutes les consolations, parce qu'elle est le commencement et le gage du plus grand de tous les bonheurs.

 Mais Dieu qui avait rendu à ce bon Frère les forces et la parole, pour nous donner ces assurances et ces encouragements, permit bientôt à la mort de reprendre et d'achever son travail. Après quelques heures de ce mieux si extraordinaire, il retomba en agonie comme auparavant, continuant, dans le secret de son cœur, à s'unir librement à Dieu, jusqu'au moment où il alla, nous l'espérons, s’unir à lui pour toujours, dans les douceurs d'un éternel et nécessaireamour.

 Vers le milieu de juin, j'ai quitté la Maison de Saint-Paul-trois­-Châteaux, laissant aussi l'excellent Frère Perpétue dans les plus saintes et les plus admirables dispositions de patience, d'humilité, de résignation et de piété. Jamais, pendant sa maladie, on n'a pu surprendre, sur ses lèvres une plainte, pas même un désir. Il ne demandait rien, il acceptait simplement ce qui lui était présenté. Il trouvait qu'on faisait toujours trop pour lui, et il n'avait qu'une peine, celle, disait-il, de donner tant d'embarras. Le bon Frère se confondait des visites que je me plaisais à lui rendre, et il n'a pas voulu que je me séparasse de lui sans le bénir. Jusqu'à la fin, il s'est conservé dans une paix et une tranquillité parfaites, terminant ainsi, par la mort la plus sainte et la plus édifiante, une vie pleine de bonnes œuvres, modèle de piété, de zèle, de dévouement, de régularité et de bon esprit.

 En arrivant à la Bégude, à la même époque, j'ai trouvé le bon Frère Chrysologue aussi dans les bras de la mort. Lui, s'en est effrayé d'abord ; pendant les premiers jours de sa maladie, la vue du cimetière l'affectait péniblement; il a dû faire appel à toute sa foi et à toute sa piété pour faire à Dieu le sacrifice qu'il lui demandait. Son heure n'était pas encore venue, il n'avait pas encore reçu la grâce finale de la bonne mort ; mais, comme tous les bons et fervents Religieux, quand l'heure suprême est arrivée, il a reçu cette grâce en si grande abondance que la mort faisait son bonheur. Il répétait à tous que s'il avait à choisir, il choisirait de mourir plutôt que de vivre encore; c'est plein de joie et de consolation qu'il a rendu son âme à Dieu. Après son trépas, toute la Communauté se plaisait à le voir et croyait trouver dans la douceur et la bonté de ses traits un signe de prédestination. On ne parlait que de sa piété, de son dévouement à la Congrégation, de sa fidélité à la Règle, de son éloignement pour toutes les charges, des bons exemples qu'il avait donnés partout.

 Du reste, c'est ce que nous aurions à dire de tous ces chers défunts : du bon Frère Honoré, un des plus anciens Frères de l'Hermitage ; de l'excellent Frère Nicétas, un des Frères les plus exemplaires de la Province de, Saint-Paul-trois-Châteaux, et de tous les autres.

 Pourtant, j'ai la douleur de vous l'annoncer, parmi eux se trouve encore une victime, un Frère qui, en se mettant imprudemment à la mer, y a perdu la vie. C'est par besoin qu'il est allé prendre ce bain, croyant en avoir la permission ; mais n'importe, le remède est devenu pour lui une cause de mort. Aucun secours n'a pu lui être porté ; au bout de quelques instants, on n'a retiré de la mer qu'un cadavre… Hélas ! à ce nouveau malheur, il n'y a que deux consolations. La première, c'est que ce jeune Frère s'était confessé et avait communié l'avant-veille de l'accident, et qu'il était disposé à communier le jour même. La seconde, c'est que cette nouvelle et si terrible leçon venant s'ajouter aux avis que je vous ai donnés à la dernière Retraite, j'ai la confiance que personne ne s'en écartera à l'avenir.

 Prions tous, prions instamment et pour ce pauvre Frère et pour tous nos chers défunts. La dévotion aux saintes âmes doit nous être particulièrement chère. Je désire que, dans toutes les Maisons, on soit très exact à donner les Messes, à faire les Communions et à dire l'Office des Morts, comme il est prescrit par la Règle.

 ———————————-

 Chaque année, je vous recommande, avec les plus vives instances, le parfait accomplissement de la Règle dans vos rapports avec les enfants ; et telle est l'importance, telle est l'extrême gravité de cette recommandation, que je ne puis m'empêcher de vous la renouveler encore. C'est devant l'Eglise et la société, c'est devant notre honneur, notre liberté, notre salut, c'est devant l'honneur, le salut et tout l'avenir des enfants, c'est devant les familles et toute la Congrégation, c'est devant Dieu et devant l'éternité, que nous devons nous placer tous, pour comprendre l'importance des prescriptions de la Règle sur ce point capital, la gravité des conséquences que peuvent avoir les moindres manquements, les imprudences mêmes qui nous échapperaient. Veillons et prions sans cesse pour que Dieu nous garde de tout scandale et de tout malheur; veillons et prions pour nous-mêmes; veillons et prions pour tous nos Frères. N'oublions jamais que, si l'esprit est prompt, la chair est extrêmement faible ; et que nous n'avons de sûreté que dans la fuite des moindres occasions, des moindres dangers, dans la prière et la ferveur, dans une constante et généreuse fidélité à observer nos Règles.

 L'extrême réserve que vous devez avoir avec les enfants, pour sauvegarder leur innocence et votre vertu, je vous la recommande également, dans tous vos rapports avec le monde, pour sauvegarder votre vocation et vos vœux. Plus on avance dans le gouvernement de l'Institut et dans la direction intime des Frères, plus on reconnaît que la perte de la vocation et l'infidélité aux vœux ne viennent que des rapports irréguliers avec le monde ; de visites faites et reçues contrairement à la Règle, de communications, d'entretiens, de liaisons, où se glissent d'abord l'inutilité, la dissipation, la légèreté, et qui conduisent bientôt à des pensées toutes mondaines, à des affections toutes sensuelles, ruine infaillible de la piété, de la ferveur, de tout esprit religieux. C'est le désolant aveu que sont forcés de nous faire tous ceux qui trouvent le joug de la vie religieuse trop pesant, qui pensent et demandent à le secouer. Instruisons-nous par leur exemple et à leurs dépens : fuyons le inonde, fuyons les occasions. Nous redoutons l'abîme de l'infidélité et de l'apostasie, n'en prenons pas le chemin, l’irrégularité. Nous voulons avoir la consolation de mourir dans notre état, de mourir en prédestinés, comme tant de nos confrères. Comme eux, prenons-en les moyens : vivons en bons Religieux. Ne sortons pas de l'enceinte bénie de, nos Règles, ne brisons pas la clôture de sûreté qu'elles forment autour de nous. Pas de sorties seul, pas de visites sans nécessité, pas d'entretiens inutiles, point de liaisons dangereuses, rien qui s'écarte jamais de la modestie, de la gravité, de la chaste sévérité que le monde lui-même attend de nous, et que nous ne pouvons pas oublier sans nous faire mépriser.

 ———————————-

    Il est rapporté d'un Religieux de l'Ordre de Saint Dominique qu'ayant eu, dès sa jeunesse, une dévotion particulière à la Passion de Jésus-Christ, il l'avait conservée toute sa vie, et qu'il ne se passait point de jour qu'il n'en méditât les mystères et qu'il n'adorât ses sacrées Plaies, proférant sur chacune d'elles ces paroles de saint François d'Assise : Nous vous adorons, ô Jésus et nous vous bénissons, parce que vous avez racheté le monde par votre sainte Croix.

 Il mettait cinq fois les genoux en terre en faisant cet acte d'adoration, et il récitait chaque fois l'oraison dominicale, demandant à Dieu qu'il lui plût de lui donner sa crainte et son amour.

 Dieu fit bien voir combien cette dévotion lui était agréable: car, un jour, qu'il était en oraison, Jésus-Christ lui apparut et l'invita à jouir de la douceur de ses sacrées Plaies. Ce saint Religieux en ayant approché sa bouche, avec un profond respect, il eut aussitôt l'âme remplie d'une douceur et d'une satisfaction si grande que depuis ce moment, il ne trouva que du dégoût et de l'amertume dans tout ce qui n'était point Dieu.

 Ce trait est donné par Rodriguez dans son traité de la Passion, et je le rapporte ici, M. T. C. F., pour vous proposer quelques pratiques semblables à celles de ce bon Religieux, en l'honneur de la Passion et des Plaies sacrées de Notre-Seigneur. Je les ai adressées et conseillées aux Maisons de Noviciat, au commencement du Carême ; et, comme beaucoup de Frères m'en ont témoigné leur satisfaction, et m'ont dit qu'ils s'en trouvent très bien, il m'a semblé utile de les insinuer à tous dans cette Circulaire.

 PRATIQUES GÉNÉRALES

 1° Se transporter fréquemment, en esprit, sur le Calvaire, pour y voir Jésus-Christ en Croix, pour contempler ses Plaies sacrées, et conjurer Marie de les graver profondément dans notre cœur, en répétant cette strophe du Stabat Mater :

 Sainte Mère de Dieu, faites-moi cette grâce, gravez profondément dans mon cœur les Plaies de Jésus crucifié. Sancta Mater, istud agas, etc. …

 2° Remercier souvent Notre-Seigneur de nous avoir racheté par son Sang et par sa Croix et redire avec amour l'invocation ci-dessus : Nous vous adorons, ô Jésus ! et nous vous bénissons, parce que vous avez racheté le monde par votre sainte Croix.

 3° Faire le chemin de la Croix, ou y assister le plus souvent qu'on peut ; réciter fréquemment, en les méditant, les Litanies de la Passion, pendant le Carême et tous les vendredis de l'année. Prendre les souffrances de Jésus-Christ pour sujet de méditation.

 4° Tous les jours, assister pieusement à la sainte Messe, comme à la reproduction réelle et véritable du Sacrifice de la Croix.

 5° Pour nous associer en action aux souffrances de Jésus-Christ, pratiquer, chaque jour, à cette intention, quelque acte de mortification : comme garder exactement le silence, pour honorer son silence devant ses juges et ses bourreaux; se rendre très ponctuel à tous les exercices, pour honorer la perfection et la grandeur de son obéissance sur la Croix, etc.

 ———————————-

 PRATIQUES PARTICULIÈRES

En l'honneur des Cinq Plaies.

————-

PREMIER EXERCICE
A la plaie de la Main droite.

 

RECONNAISSANCE.– Nous vous adorons, ô Jésus ! etc., comme ci-dessus.

 CONTEMPLATION.- Ô Jésus mon Sauveur, Permettez-moi d'adorer et de baiser, avec tout le respect dont je suis capable, la Plaie sacrée de votre Main droite.

 S'arrêter un instant à chaque Plaie, pour la contempler, pour en mesurer l'étendue et la profondeur, et comme pour en ressentir l'excessive douleur.

 INVOCATION – Ô Jésus mon Sauveur ! je vous conjure par cette Plaie divine, par le Sang adorable qui en découle, par la douleur incompréhensible qu'elle vous a causée, de m'accorder une grande pureté d'intention dans toutes mes pensées, dans toutes mes paroles et dans toutes mes actions. Pater, Ave.

 A la plaie de la Main gauche.

 Mêmes actes. Grâce à demander : une parfaite pureté de corps, de cœur et d'esprit. Pater, Ave.

 A la plaie du Pied droit,

 Mêmes actes. Grâce à demander : une parfaite obéissance. Pater, Ave.

 A la Plaie du Pied gauche.

 Mêmes actes. Grâce à demander : un entier détachement de moi-même et de toutes les créatures. Pater, Ave.

 

A la Plaie du Sacré Coeur.

 RECONNAISSANCE. Nous vous adorons, ô Jésus, etc.

 CONTEMPLATION. Ô Jésus, mon Sauveur, permettez-moi d'adorer et de baiser, avec tout le respect et tout l'amour dont je suis capable, la Plaie adorable de votre Sacré Côté.

 

INVOCATION. Ô Jésus, mon Sauveur ! Je vous conjure par cette Plaie divine, par l'eau et le sang adorables qui eu découlent si abondamment, par l'amour infini qui vous a porté à m'ouvrir votre Sacré Cœur, de m'accorder, à moi et à tous mes Confrères, la haine du péché, votre saint amour, le don de prière, la persévérance dans la Vie Religieuse et une bonne mort.

 Invocations aux cinq Plaies

 Ô Jésus, mon Sauveur ! cachez-moi, cachez-nous tous dans vos Plaies sacrées, et dérobez-nous à la fureur de nos passions, à la malice des démons, à toutes les illusions de la chair et du monde.

 Ô Jésus, mon Sauveur! par vos Plaies sacrées, apaisez la justice de voire Père que nos péchés ont irrité, et délivrez-nous de tous les maux passés, présents et à venir. Pater, Ave.

 DEUXIÈME EXERCICE

Aux Plaies des Mains.

 RECONNAISSANCE.Nous vous adorons, ô Jésus ! etc.

 CONTEMPLATION. Ô Jésus, mon Sauveur ! permettez-moi d'adorer et de baiser, avec tout le respect et tout l'amour dont je suis capable, les Plaies sacrées de vos Mains adorables.

 INVOCATION.O Jésus, mon Sauveur ! je vous conjure par ces Plaies divines, par le Sang adorable qui en découle, par les douleurs incompréhensibles qu'elles vous ont causées, pendant les trois heures qu'elles vous ont tenu suspendu sur la Croix, de m'accorder une grande pureté d’intention et une parfaite chasteté. Gloire au Père.

 Aux Plaies des Pieds.

 RECONNAISSANCE.  Nous vous adorons, ô Jésus ! etc.

 

CONTEMPLATION.O Jésus, mon Sauveur ! permettez-moi d'adorer et de baiser, avec tout le respect…, les Plaies sacrées de vos Pieds adorables.

 INVOCATION. O Jésus, mon Sauveur ! je vous conjure par ces Plaies divines, par le Sang adorable qui en découle, par les douleurs incompréhensibles qu'elles vous ont causées, pendant les trois heures qu'elles vous ont porté sur la Croix, de m'accorder une parfaite obéissance et un entier détachement de moi-même et de toutes les créatures. Gloire au Père.

 A la Plaie du Sacré Coeur.

 Exactement comme dans le premier Exercice, avec les deux invocations aux cinq Plaies. A la fin, Gloire au Père.

 TROISIÈME EXERCICE

 Aux cinq Plaies.

 RECONNAISSANCE. Nous vous adorons, ô Jésus! etc.

 CONTEMPLATION. O Jésus, mon Sauveur ! permettez-moi d'adorer et de baiser, avec tout le respect et tout l'amour dont je suis capable, les Plaies sacrées de votre Corps adorable.

 (Les contempler, un instant, l'une après l'autre, comme il a été dit au commencement).

 

INVOCATION.O Jésus, mon Sauveur ! je vous conjure par ces Plaies divines, par le Sang adorable qui en découle, par les douleurs incompréhensibles qu'elles vous ont causées, par l'amour infini qui vous a porté à m'ouvrir votre Sacré Cœur, de m'accorder, à moi et à tous mes Confrères (on peut demander ici une ou plusieurs grâces, pour soi et pour les autres, ou réunir les grâces demandées au-dessus à chaque Plaie).

 0 Jésus, mon Sauveur ! cachez-moi, etc.

 0 Jésus, mon Sauveur ! par vos Plaies sacrées, etc.

 Gloire au Père.

 OBSERVATIONS.

 1° Cet exercice (l'un des trois) en l'honneur des cinq Plaies, peut se faire, en forme de Neuvaine, lorsqu'on se sent attiédi, ou plus exposé, ou plus tenté, ou dans quelque besoin particulier.

 2° On peut étendre et varier les grâces demandées à chaque Plaie, mais c'est surtout à la Plaie du Sacré Cœur qu'il faut les réunir, et tout demander pour soi et pour les autres.

 3° Il est très bon de faire le premier exercice, une fois tous les jours, pendant le Carême et les vendredis ; et l'un des deux autres, une fois chaque jour, pendant le reste de l'année. Cet exercice peut se faire dans les temps libres, dans les visites au Saint Sacrement, dans les passages, en se mettant au lit, à la Messe, et même à la Méditation, surtout quand on ne trouve pas à s'y occuper convenablement.

 4° Dans les tentations, principalement dans les tentations impures, l'exercice des cinq Plaies est d'un tout puissant secours ; mais alors, on l'abrège, et l'on se contente d'un regard amoureux, d'une invocation vive et ardente à chaque Plaie, et même à une seule.

 5° Quand on a le temps, on fait bien de terminer l'exercice par la prière 0 bon Jésus, Directoire, page 284, et par les invocations de saint Ignace : Âme de Jésus, Directoire, page 141. Les apprendre par cœur.

 Si vous vous pénétrez bien, M. T. C. F., de l'esprit des Méditations et des Instructions du Directoire, surtout de la Méditation sur les Plaies de Jésus-Christ, page 59, et de l'Instruction sur la Passion, page 393, vous ne manquerez pas de redoubler de dévotion envers ces saintes Plaies et cette divine Passion, et vous serez heureux d'embrasser les pieuses pratiques qui vous sont proposées.

 Une autre considération qui doit nous affectionner tout particulièrement à l'exercice des cinq Plaies de Notre-Seigneur, et, en général, à toute sa sacrée Passion, c'est que rien n'est plus propre à nous donner les trois sentiments qui conviennent le mieux à tout Religieux, qui doivent être l'âme de toute sa vie : LA RECONNAISSANCE, LA CONFIANCE ET L'AMOUR. Il n'est pas possible de contempler tous les jours les Plaies de Jésus, de les adorer et de les baiser, de les invoquer et de s'y cacher, sans que le cœur se remplisse de ces pieux sentiments.

 Puis, M. T. C. F., quelle consolation cette dévotion ne nous donnera-t-elle pas à la mort ! Quel refuge plus assuré contre la malice des démons, contre les faiblesses de la nature, et même contre la justice de Dieu, que les Plaies de Jésus-Christ, la Plaie surtout de son divin Cœur ! Avec quel bonheur nous irons nous y cacher, à ce moment suprême, si nous avons soin, pendant la vie, d'y entrer chaque jour, d'y entrer avec amour, et d'y rester sans en sortir jamais ! Que Dieu nous en fasse la grâce à tous.

 ———————————-

    Les membres du Régime et les Frères chargés avec eux de l'Administration des diverses Provinces de l'Institut, ne pouvant suivre convenablement les exercices des Retraites générales, nous avons arrêté qu'ils se réuniraient pour une Retraite spéciale, du 4 au 11 août. Ceux qui auraient à nous écrire ou à nous voir, tâcheront de le faire avant ou après cette huitaine, afin que cette petite Retraite, comme la Retraite générale, puisse se faire avec un parfait recueillement. Je la recommande même à vos prières, d'une manière particulière. Vous avez tout intérêt à demander à Dieu que ceux qui sont chargés du gouvernement de l'Institut, se renouvellent eux-mêmes dans un parfait esprit de piété et de ferveur, afin qu'ils ne soient conduits en tout que par le seul esprit de Dieu.

 ———————————-

 Nous confierons toutes nos Retraites au Cœur immaculé de Marie ; et, pour qu'on soit excité à le faire avec plus de ferveur, avec plus d'amour et de confiance, on relira en Communauté la Circulaire du 16 juillet 1861, sur la dévotion à Marie. J'en rappelle ici les conclusions pour les Maisons qui l'auraient égarée.

 Recommander plus que jamais à Marie, notre bonne Mère, nos besoins personnels et tous les besoins de la Congrégation, principalement nos Retraites. A cette fin :

 1° Nous efforcer de nous acquitter, avec une toute nouvelle, de nos Communions de Règle et de dévotion, de tous nos exercices de piété, particulièrement, de ceux qui se font plus directement en l'honneur de Marie.

 2° Nous préparer de notre mieux à notre Fête patronale la grande fête de l'Assomption de Marie; et ajouter, pendant les neuf jours qui précèdent, trois Ave Maria, après le Sub tuum de la prière du soir.

 Pendant l'Octave, à la prière du soir, réciter le Veni Creator et un Ave Maria, à la place du Veni Sancte.

 3° Eviter, avec tout le soin possible, les moindres. fautes commises de propos délibéré. Nous proposer, chaque jour, quelque acte de vertu en l'honneur de Marie. Mettre toute notre attention à bien remplir notre emploi et à nous conserver, jusqu'à la fin, dans l'esprit de piété, de régularité et de charité. Redoubler de zèle et d'efforts, pour honorer, aimer et servir, pour faire honorer, aimer et servir, partout, notre bonne Mère, la Bienheureuse et Immaculée Vierge Marie.

 La présente Circulaire sera lue en Communauté, à l'heure ordinaire de la lecture spirituelle. La Circulaire du 16 juillet 1861 sera lue àla suite, à la même heure, ou, au réfectoire, pendant le repas.

 Recevez la nouvelle assurance du tendre et respectueux attachement avec lequel je suis, en Jésus et Marie, Mes très chers Frères,

Votre très humble et très dévoué Frère et serviteur,

    F. Louis-Marie.

——————————————–

RETOUR

Circulaires 79...

SUIVANT

Circulaires 81...