Circulaires 89

Louis-Marie

1868-07-16

Vocations - Juvénat - Frères du Cap de Bonne Espérance - L’Esprit d’humilité pour  fruit des Retraites.

089

51.02.01.1868.2

 1868/07/16

 V. J. M. J.

N.-D. de Saint-Genis-Laval, le 16 juillet 1868.

Fête de N.-D. du Mont-Carmel.

           Très Chers Frères,

 Nos Retraites auront lieu, cette année, dans le même ordre que les années précédentes,

 1° La Retraite de Glasgow, du 16 an 23 juillet, pour les Frères d'Angleterre, d'Ecosse et d'Irlande ;

 2° La première Retraite de la Maison-Mère, du 30 août au 6 septembre, pour la province de Saint-Genis-Laval ;

 3° La deuxième Retraite de la Maison-Mère, du 13 an 20 septembre, pour la Province de Notre-Dame de l'Hermitage

 4°La Retraite de Beaucamps, du 6 au 13 septembre

 5° La Retraite de la Bégude, du 15 au 22 septembre

 6° La Retraite de Saint-Paul-trois-Châteaux, du 20 au 27 septembre.

 7° La Retraite d'Hautefort, du 27 septembre au 4 octobre.

 8° La Retraite du Régime est remise au mois de novembre prochain ; elle coïncidera avec la seconde Session du Chapitre Général.

 9°La Retraite des Frères du Cap de Bonne-Espérance a lieu dans le courant  du mois de janvier.

 Nous rappelons à tous les Frères qu'ils doivent arriver au plus tard la veille de la Retraite, et que tous ceux du même Poste doivent se rendre et se présenter ensemble aux Supérieurs.

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 Je vous réitère aussi l'avis concernant les parties du vestiaire des Frères laissées dans les Postes, tels que bas, souliers, chapeaux, manteaux soutanes, etc. Il faut que tous ces objets soient apportés dans les Maisons de Noviciat, où l'on en tire avantageusement parti, ou pour le service, ou pour les pauvres.

 Pour le linge, on suivra l'usage établi par la Circulaire du 16 juillet 1861.

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 Je rappelle encore à tous les Frères Directeurs que la Maison-Mère et les Maisons Provinciales sont abondamment pourvues de linge, de livres de prix et de fournitures classiques ; et qu'elles sont en mesure de servir tous les Etablissements, dans les meilleures conditions possibles, tant pour la qualité que pour le prix.

 Il faut donc qu'on s'en tienne partout à ce qui a été réglé par le Chapitre Général de 1860, c'est-à-dire, que chaque Frère Directeur se fournisse exclusivement à la Procure de sa Province.

 C'est tout à la fois une question d'ordre et de discipline, religieuse, une question de principes et de sûreté en fait de livres et de méthodes, et une question de dévouement, d'esprit de famille, d'économie bien entendue, pour l'ensemble de la Congrégation.

 Vous savez assez que nos Maisons de Noviciat n'ont aucuns revenus assurés, et que la plupart de nos Postulants, ou sont reçus gratuitement, ou ne paient que de très modiques pensions. De là vient, on peut le dire, que tout l'avenir temporel de ces Maisons est entre les mains des Frères Directeurs ; et qu'il y a nécessité pour chacun de leur apporter toute la part de secours et de légitime encouragement qui est en son pouvoir, de ne rien négliger pour leur venir en aide, et nous préparer de bons coopérateurs dans l’œuvre de l'éducation des enfants.

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 A cette recommandation se rattache naturellement celle que je vous fais dans presque toutes nos Circulaires, concernant les vocations, le besoin que nous avons de sujets.

 Ce besoin, en effet, le temps ne le diminue pas, il ne fait que l'accroître. C'est même ce qui nous a porté à faire l'essai d'un Juvénat, ou Petit Noviciat, à Notre-Dame de l'Hermitage.

 Nous avons réuni dans cette Maison tous les jeunes Frères et Postulants qui n'avaient pas complété leur quinzième année, et ceux auxquels, par raison de santé, un règlement un peu adouci devenait nécessaire. Ils sont actuellement au nombre de soixante

 Cette disposition nous permettra d'y recevoir, de toutes les Provinces, même avant l'âge prescrit, les Postulants ou Aspirants que vous pourrez nous présenter, pourvu qu'ils soient en état de payer une petite pension de 250 à 300 francs, pour l'année, et d'apporter un trousseau convenable.

 Elevés dans cette Maison, loin de tout contact avec le monde et dans les pratiques de la piété chrétienne, ceux qui auront une réelle vocation, ne pourront que la fortifier et devenir de bons sujets ; et ceux mêmes qui ne persévéreraient pas dans leurs premières pensées de vie religieuse, n'auraient encore qu'à gagner aux exercices du Juvénat : car, à une solide et suffisante instruction pour tous, comme dans une pension bien tenue, on ajoutera toujours et avant tout, une éducation éminemment chrétienne; c'est-à-dire que tous les soins possibles seront prodigués à ces enfants pour les établir et les conserver dans la piété et la crainte de Dieu, pour leur inspirer l'amour et la pratique de la religion, pour les former aux vertus qui font le bon Chrétien et préparent le bon Religieux.

 J'espère que tous les Frères, surtout les Frères Directeurs, comprendront l'importance de cette Œuvre et qu'ils mettront tout le zèle possible à la faire réussir. Elle réalise une pensée qui occupait le Régime depuis longtemps ; elle répond à l'invitation, au conseil que l'excellent Père Cholleton, de si pieuse mémoire, alors qu'il venait présider nos Retraites et nos Vêtures de l'Hermitage, nous répétait chaque fois ; elle est appelée à sauvegarder une foule de bonnes vocations, qui, après la première Communion et au sortir des écoles, vont, se perdre dans les magasins, les chemins de fer et autres industries ; enfin, cette Œuvre nous est suggérée par l'exemple des autres Congrégations enseignantes, où, depuis de longues années, elle est en pleine activité.

 Aussi, je la recommande à tout votre zèle et à tout votre dévouement. Tous les Frères doivent s'étudier à procurer, ou des paroisses où ils exercent, ou de leur paroisse natale, quelques bons sujets à ce Juvénat ; ils ne manqueront pas d'y intéresser MM. les Ecclésiastiques et les pieuses familles avec lesquels ils sont en rapport. Les jeunes Aspirants qui auront suivi le cours du Juvénat, iront compléter leur Noviciat dans la Province à laquelle ils appartiennent.

 Ajoutons que deux choses sont indispensables au succès de l’Œuvre : lui trouver de bons Sujets en nombre suffisant, et obtenir qu'ils paient la petite pension demandée.

 La condition de la pension est de rigueur car l'Institut n'est pas en mesure de faire les frais d'éducation de tous ces enfants ; mais la condition du nombre a également une grande importance: car c'est par le nombre même que la Maison arrivera peu à peu à se suffire.

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 Les Postulants qui ont quinze ans accomplis, continueront à être reçus dans les conditions ordinaires et il suivre les exercices du Noviciat, conformément aux Constitutions. Ceux-là surtout doivent exciter le zèle des Frères, puisque c'est par eux, plus spécialement, que nos Ecoles pourront se soutenir et se multiplier. Aujourd'hui, comme dans tous les temps, nous devons dire que le nombre des demandes va toujours en augmentant, et qu'il n'y a réellement que les sujets qui fassent défaut.

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 Malgré tous les avis et toutes les recommandations, les renseignements dont nous avons besoin sur le personnel de l'Institut sont encore bien incomplets. C'est peut-être dans le Centre et dans le Nord qu'ils ont été fournis avec le plus d'exactitude, et cependant on a constaté au Secrétariat qu'ils étaient insuffisants pour un grand nombre de Frères.

 Aussi, nous sommes-nous déterminés à faire imprimer, pour chaque Maison Provinciale, autant de cartes ou bulletins qu'elle compte de Frères. Ces Bulletins devront être exactement remplis, ou la veille de la Retraite ou les jours qui suivront. L'exécution de cette mesure est confiée aux soins du Frère Secrétaire Général, à la Maison-Mère ; et des Frères Directeurs Provinciaux, dans les autres Maisons.

 On établira dans chaque Maison un ou plusieurs bureaux, et personne ne devra partir pour un poste qu'il n'ait fait remplir son bulletin avec une parfaite exactitude. Telle est la précision exigée dans certaines Académies, que nos pièces d'exemption et autres sont renvoyées pour un simple changement de place dans l'ordre des prénoms, pour la plus légère variante dans l'orthographe des noms.

 Les actes de naissance et les brevets doivent tous rester à la Maison-Mère, la seule qui soit autorisée à correspondre en franchise avec les Recteurs et les Préfets de l'Empire, et par eux avec les Inspecteurs d'Académie. Tous les dossiers doivent partir de Saint-Genis-Laval, soit pour les nominations, soit pour les inscriptions.

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 C'est avec un vif sentiment de joie que nous vous communiquons à tous les bonnes nouvelles que nous recevons de nos Frères du Cap de Bonne-Espérance; elles sont à la date du 19 mai dernier.

 Grâce à Dieu, ils jouissent tous d'une bonne santé et paraissent se faire parfaitement à leur nouveau climat. Sauf une légère indisposition de quelques jours, dont l'un d'eux a un peu souffert, aucun n'a été malade.

 Par la bénédiction de Dieu et la protection de Marie, la piété, la régularité, la parfaite union et unesainte gaieté se conservent parmi eux ; ils aiment à reconnaître, dans leurs lettres, qu'ils doivent cette faveur aux prières de leurs Confrères d'Europe, et ils les assurent tous du plus sincère et du plus affectueux retour en Notre-Seigneur et en Marie.

 Dieu continue aussi à bénir leurs travaux et leurs efforts. L'Académie ou Ecole Supérieure, qui avait commencé avec huit élèves, en comptait trente-deux, au dernier trimestre, tous des familles les plus respectables de la ville.

 L'Ecole communale a 56 enfants dans la première classe, et 86 dans la seconde : là où 40 enfants au plus auraient été trop gênés.

 Mais, grâce au zèle et au dévouement de Monseigneur le Vicaire Apostolique, un magnifique local s'achève en ce moment. Sa Grandeur n'y dépensera pas moins de 64.000 francs, non compris l'ameublement. Il va sans dire, nous écrivent les Frères, que nos trois classes seront les plus belles de la ville et peut-être de tout l'Institut. Elles auront, chacune, plus de 11 mètres de longueur sur 10 mètres de largeur, avec une hauteur proportionnée. Au-dessus, se trouve une vaste salle pour les exercices publics.

 Les Frères ne peuvent assez se louer des bontés de Monseigneur l'Evêque, de tous les soins spirituels et corporels que Sa Grandeur leur prodigue. C'est Elle qui leur a donné la Retraite, au mois de janvier dernier, et qui, habituellement, veut bien les recevoir à confesse.

 Dans son Mandement, à l'occasion du Carême, Monseigneur annonce ainsi l'arrivée des Frères et leur début dans la Colonie. « Pendant l'année qui vient de s'écouler, cinq Frères Maristes sont arrivés à la ville du Cap, pour y créer des écoles. J’éprouve une joie inexprimable de les voir à l’œuvre, et je suis heureux de  vous apprendre que les quatre écoles qui sont sous  la direction de ces admirables Instituteurs, font  face aux besoins de toutes les classes de la population.

 « Pendant qu'ils communiquent aux enfants une instruction élevée, la moralité est gardée avec les soins les plus intelligents et les plus assidus. A en juger par les progrès extraordinaires déjà obtenus, j'ai toute raison d'espérer que ces écoles ne seront pas seulement la plus grande bénédiction pour les enfants, mais pour la Colonie entière. »

 Voilà comment ce bon Evêque apprécie l'Etablissement que le Saint-Siège nous a appelés à former dans son Diocèse ; voilà comment il encourage les Frères qui y travaillent déjà et tous ceux que la Providence peut y conduire un jour ; mais, qu'il me soit permis de rappeler ici à Nos Chers Frères du Cap et, avec eux, à tous les Membres de la Congrégation, en Europe, comme en Afrique, comme en Océanie, quelle condition le saint Prélat met au bien que l'Eglise attend de nous, quel moyen Sa Grandeur nous donne à tous de le réaliser et de l'étendre.

 Je ne vous parlerai pas, nous écrit un des Frères, de tout ce que Monseigneur nous a dit à la Retraite. Ce serait impossible, bien que j'aie pris des notes sur toutes ses instructions ; mais je ne puis passer sous silence celle qu'il nous fit sur l'Obéissance et la Régularité. La conclusion surtout me fit une telle impression que je l'ai aussi présente à la mémoire que si je venais de l'entendre. C'est tout à la fois une réflexion, un souhait, une menace et une promesse.

 « Elle est petite cette Communauté, s'écria Monseigneur en finissant, très petite encore; cependant, dans les desseins de Dieu, elle est destinée à contribuer au salut, peut-être, d'un million de milliers d'âmes. Mais ce ne sera que par la fidèle observance de votre Règle, mes plus chers et bien-aimés Frères, que vous accomplirez les desseins du Seigneur. Il suffirait d'un seul Frère irrégulier, pour les arrêter ces desseins du bon Dieu sur ce peuple infidèle; oui, un seul Frère qui, persuadant aux autres que cette Règle qui a été rédigée avec tant de soins, après tant de prières et de jeûnes, est trop dure, la ferait mettre de côté, ce Frère suffirait pour empêcher le salut de ces milliers d'âmes. »

 « Oh! malheur ! malheur à un tel Religieux! il serait accusé par cette même Règle qui le suivra jusqu'au tribunal du Souverain Juge ; il s'exposerait à être maudit éternellement par ce nombre incalculable d'âmes au salut desquelles il se serait opposé par son relâchement. »

 « Oh ! oui, c'est du plus profond de mon cœur que j'adresse au Seigneur les vœux les plus ardents pour qu'un tel Frère ne paraisse jamais dans cette Communauté. Ô Mes Bien Aimés Frères, accomplissez fidèlement, inviolablement, votre Règle, et je vous promets non seulement le salut de milliers d'âmes, mais encore de nombreux ouvriers qui, sortant des ténèbres de l'infidélité, se joindront à vous pour vous aider et perpétuer votre Œuvre. »

 Ainsi parla notre digne Evêque, ajoute le Frère, et puissent ses vœux se réaliser ; ce sont ceux d'un saint.

 C'est aussi, M. T. C. F., le plus ardent de mes désirs que de tels vœux se réalisent le plus parfaitement possible dans toute la Congrégation.

 Recevons avec amour et reconnaissance, recevons avec respect et docilité un enseignement si précieux et qui nous arrive de si loin. A elle seule, la parfaite Régularité sera plus efficace pour soutenir notre Œuvre, pour multiplier les vocations, pour étendre nos Etablissements que tous les autres moyens, quelque bons qu'ils puissent être, et quoique le bon Dieu veuille que nous nous en servions. Oui, il est certain, très certain que, si nous sommes tous et partout d'exacts observateurs de nos Règles, le bon Dieu se chargera lui-même de nous envoyer des sujets, de nous préparer des Fondations, et, par sa grâce d'opérer en nous et par nous un bien toujours plus solide, un bien toujours croissant.

 Ce qui me porte encore à réveiller votre zèle pour l'Obéissance et la Régularité, par cette grande considération que la perpétuité et le développement de l'Institut y sont essentiellement attachés, c'est qu'en ce moment la question des Missions étrangères semble prendre pour nous une importance toute nouvelle. Outre nos Maisons des Iles Britanniques et toutes les nouvelles Fondations qui s'y présenteraient, si nous avions des sujets, nous sommes instamment demandés en Nouvelle-Hollande par Mgr Polding, archevêque de Sydney, et en Océanie par les Révérends Pères Maristes. Il y aurait à faire immédiatement dans ces Missions des Etablissements très importants et dans d'excellentes conditions. Aussi, en présence de ces demandes et de ces besoins, nous rappelons à tous que nous pouvons et que nous devons nous faire Missionnaires, comme l'entendent nos saints Evêques, comme l'entendait et l'expliquait le P. Champagnat, en 1836, au premier départ des Pères et des Frères pour la Nouvelle-Zélande.

 Ceux qui, pour une raison ou pour l'autre, ne peuvent entreprendre de marcher à la suite des Prédicateurs de l'Evangile en pays étrangers, ou qui ne sauraient s'y résoudre, doivent redoubler de prières, d'exactitude, de fidélité en tout, afin d'attirer sur les Missions et sur tout l'Institut les bénédictions de Dieu, des bénédictions toujours croissantes qui procurent à nos Œuvres tout le développement que Dieu leur a préparé et qu'il fait dépendre de notre sainteté et de notre perfection.

 Ceux à qui l'âge, la santé, les dispositions d'esprit et de cœur (pour les Missions, avec la santé et la volonté, deux choses sont indispensables : UNE SOLIDE VERTU ET UN BON CARACTÈRE), ceux, dis-je, à qui de telles dispositions permettent d'aspirer aux Missions étrangères, feront bien de nous exprimer leur désir de vive voix ou par écrit.

 Notre intention serait, à la suite des Retraites, de réunir à Beaucamps un certain nombre de Frères, pris dans toutes les Provinces, pour les former à  l'anglais et les préparer plus prochainement aux Missions.

 C'est un appel qui est fait à toute la Congrégation par nos bons Pères et Frères de l’Océanie, par nos Frères d'Afrique et des Iles Britanniques, et par tous les enfants qui sont à instruire et à catéchiser dans ces pays infidèles ou hérétiques. C'est également un effort de zèle et de dévouement que la Providence nous demande à tous, et qui ne peut manquer de retomber en bénédictions sur tout l'Institut : sur nos Ecoles, pour les soutenir et les faire réussir ; sur nos Noviciats, pour y attirer des Sujets et les conserver ; sur tous les Membres de l'Institut, pour les conduire à la perfection et assurer leur persévérance.

 Voici la liste des Frères décédés depuis notre Circulaire du 8 décembre 1867 :

 

F. VÉNUTIEN, Novice, décédé à Saint-Paul-trois-Châteaux, le 1ierjanvier 1868.

F. ABDIÈSE, V. O., décédé à Saint-Paul-trois-Châteaux, le 12 janvier 1868.

F. MAXIMILIEN, Profès, décédé à Beaucamps, le 22 janvier 1868.

F. ENSEVIN, Profès, décédé à Saint-Paul-trois-Châteaux, le 30 janvier 1868.

F. DES ANGES, Profès, décédé à Saint-Agrève (Ardèche), le 29 février 1868.

F. PIERRE,Profès, décédé à Saint-Genis-Laval, le 15 mars 1868.

F. HIPPOLYTE, Profès, décédé à Saint-Genis-Laval, le 26 mars 1868.

F. GUILLAUME, Profès, décédé à Toulon-sur-Arroux (Saône-et-Loire), le 27 mars 1868.

F. MAXIME, Profès, décédé à Saint-Genis-Laval, le 5 avril 1868.

F. STEPHANUS, V. O., décédé à Saint-Genis-Laval, le 17 avril 1868.

F. JORDANUS, Novice, décédé à Saint-Genis-Laval, le 20 avril 1868.

F. MATHEA, Novice, décédé à Saint-Genis-Laval, le 20 avril 1868.

  Jules FRANDAZ, Postulant, décédé à Saint-Genis-Laval, le 20 avril 1868

  Claude DELORD, Postulant, décédé dans sa famille, à Panissières (Loire), le 8 juin 1868.

F. BERTINUS, Profès, décédé à Ganges (Hérault), le 21 juin 1868.

F. SERVILIANUS, Novice, décédé à la Bégude, le 4 juillet 1868.

F. CLÉMENCE, Profès, décédé à Notre-Dame de l'Hermitage, le 7 juillet 1868.

 

En vous donnant cette nouvelle liste de décès, je ne puis que vous engager de nouveau à prier beaucoup pour les âmes du Purgatoire, particulièrement pour les âmes de tous nos Chers Frères défunts. Qu'on n'oublie pas les prescriptions de la Règle sur ce point.

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 Le fruit particulier que je vous propose de retirer, cette année, de nos Retraites, la grâce, la vertu qui me semble intéresser plus vivement le bien de la Congrégation et répondre davantage à ses besoins, c'est un renouvellement général dans l'esprit de l'Institut, dans l'amour et la pratique de l'humilité, vertu fondamentale qui doit faire le caractère propre de notre petite Société.

 Cette pensée m'est venue, le mois dernier, auprès du tombeau de notre vénéré Père et Fondateur, en célébrant le vingt-huitième anniversaire de son décès. Nous ne doutons pas de son bonheur dans le Ciel ; nous sommes tous persuadés qu'il est, auprès de Jésus et de Marie, le Représentant dévoué de tous nos intérêts et de tous nos besoins; un bon nombre ont déjà éprouvé, en maintes circonstances, des effets sensibles de son crédit, de sa protection ; mais, si nous voulons nous l'assurer de plus en plus, il faut qu'il voie en nous ses véritables enfants, c'est-à-dire des Frères humbles, simples, modestes, fuyant l'éclat, aimant la vie cachée, faisant le bien sans bruit, sans ostentation, se défiant d'eux-mêmes et ne comptant que sur la grâce et le secours de Dieu.

 Mon intention n'est pas de vous parler aujourd'hui de cet esprit propre de l'Institut, de la vertu d'humilité : c'est un point qui viendra en son lieu, dans la suite des instructions que nous avons à donner sur la formation des Frères ; mais j'ai voulu vous remettre cette vertu en mémoire, à l'occasion de nos prochaines Retraites, afin que vous l'employiez comme le meilleur moyen de bien faire ces exercices, et que vous la demandiez, que vous vous la proposiez tous, comme le fruit principal que vous devez en remporter.

 Non, nous ne pouvons espérer le succès de nos Retraites qu'en y apportant des sentiments d'humilité et de componction, de douleur et de sainte crainte, accompagnés de confiance et d'amour.

 La raison en est que, pour bien faire notre Retraite, il nous faut la grâce, et une grâce abondante, une grâce toute spéciale : or, cette grâce n'est donnée qu'à la prière humble et soumise, au cœur contrit et humilié.

 Sur qui jetterai-je les yeux, demande le Seigneur dans Isaïe, si ce n'est sur le pauvre, sur le cœur brisé, sur celui qui reçoit mes paroles avec respect, avec un saint tremblement? (Isaïe, LVI, 2.)Dès le commencement, s'écrie Judith dans sa prière, les superbes vous ont irrité, vous ont déplu, Seigneur ; mais la prière des humbles et des miséricordieux vous a toujours été agréable. Dieu des cieux, exaucez une pauvre suppliante qui ne se repose qu'en votre miséricorde. (Judith, IX, 16, 17.)

 « Dieu protège et délivre l'humble, dit l'auteur de l'Imitation; il l'aime et le console; il s'abaisse vers lui; répand sur lui ses grâces avec une grande profusion ; et, après qu'il a été longtemps abaissé, il l'élève à une souveraine gloire ». (Imit., I. II.  ch. II)

 Dieu est haut, dit saint Augustin ; si vous vous humiliez, il descend à vous ; si vous vous élevez, il se retire de vous. Et pourquoi cela? Parce que, selon le Psalmiste, le Seigneur est élevé, et il regarde avec miséricorde les choses basses c'est-à-dire les humbles; mais il voit de loin les choses qui sont élevées,c'est-à-dire, les superbes. (Ps. CXXXVII, 6.) Or, comme ce qu'on voit de loin, on ne le connaît pas, ainsi, Dieu ne connaît pas les orgueilleux, pour leur faire des grâces : En vérité, je vous le dis, je ne vous connais pas. (Matth., XIV, 12.)

 Il faut donc que nous venions à la Retraite, non comme le Pharisien, avec un esprit suffisant et orgueilleux, qui ne connaît pas ses misères et ses besoins, qui croit ne manquer de rien, tandis qu'il est dans la dernière indigence spirituelle, qu'il est malheureux et misérable, pauvre, aveugle et nu (Ap., III,17) ; mais il faut y venir, comme l'humble Publicain, en nous frappant la poitrine, en nous plaçant au dernier rang dans nos pensées et nos désirs, en confessant nos faiblesses, nos besoins, notre indignité.

 Il faut y venir dans les pensées et les sentiments d'humilité et de contrition que l'auteur de l'Imitation exprime si bien au Chapitre II du Troisième Livre. « Seigneur, dit-il, je ne suis pas digne qu'il vous plaise consoler mon âme et la visiter… Quand je répandrais des larmes qui pussent égaler les eaux de la mer, je ne serais pas digne d'être visité de vous. Je ne mérite que d'être châtié et puni, parce que je vous ai offensé souvent, et que mes péchés sont grands et dans leur qualité et dans leur nombre. »

 « Qu'ai-je mérité, Seigneur, sinon l'enfer et le feu éternel ? Oui, mon Dieu, je le reconnais, je suis digne d'être le jouet et le mépris de toutes les créatures ; il n'est pas raisonnable que je sois compté au nombre de ceux qui sont voués à votre service. Bien loin de là, je ne puis ouvrir la bouche que pour dire cette seule parole : J'ai péché, Seigneur, j'ai péché, ayez pitié de moi et pardonnez-moi. »

 C'est en entrant dans ces sentiments et ces dispositions de l'humble publicain de l'Evangile, que nous mériterons d'être justifiés comme lui, de sortir de nos saints exercices tout changés, tout renouvelés. L'humilité de nos cœurs donnera tout accès à la grâce de Dieu, à ses lumières puissantes, à son onction divine, selon cette parole du prince des Apôtres : Tâchez de vous inspirer tous l'humilité les uns aux autres ; parce que Dieu résiste aux superbes et qu'il donne sa grâce aux humbles (I S. Pierre, V, 5). Et cette grâce, de pauvres nous fera riches, c'est-à-dire, de pécheurs, justes ; de faibles, forts ; de lâches, courageux ; de tièdes, fervents.

 Mais, comment disposerons-nous nos cœurs à ces sentiments de contrition et d'humilité? En les demandant à Dieu par de ferventes prières, en disant souvent avec le Publicain de l'Evangile : Ô Dieu, soyez propice à moi pécheur ; mon Dieu, ayez pitié de moi qui suis un pécheur (Luc, XVIII, 13), avec le Roi-Prophète, coupable et pénitent Pardonnez-moi, Seigneur, pour la gloire de voire nom et remettez-moi mes iniquités, car elles sont très grandes (Ps. XXIV,11) ; et encore : Mon Dieu, créez en moi un cœur contrit et humilié, afin que vous ne me méprisiez jamais.

 Surtout, rendons-nous très familière cette invocation si chère à tous les dévoués au sacré Cœur de Jésus : Jesu mitis et humilis corde, lac cor menin secundum cor tuum. Jésus doux et humble de cœur, rendez mon cour semblable au vôtre. Notre saint Père le Pape Pie IX vient d'enrichir cette courte invocation de 300 jours d'indulgence, chaque fois qu'on la prononce avec piété et dévotion (Rescrit du 25 janvier 1868).

 Oui, M. T. C. F. je le répète en toute assurance, humilions-nous, rendons-nous très humbles, très petits devant Dieu, et nous ferons bien nos Retraites ; nous les ferons mieux que jamais ; nous réparerons même tous les défauts des Retraites précédentes ; et notre humilité, si elle est vraie, si elle est sincère, si elle est effective, suppléera à toutes les dispositions qui nous manquent. Soyez humble, dit saint Bernard, et Dieu sera satisfait de vous.

 Puis, si nous remportons de ces saints exercices un bon commencement d'humilité : c'est-à-dire, pour le passé, une bonne connaissance de nos misères et une vraie douleur de nos fautes ; pour le présent et l'avenir, un sincère désir d'acquérir la vertu d'humilité, une forte résolution d'y travailler, nous aurons certainement retiré de nos Retraites un des fruits les plus solides et les plus précieux. Jamais peut-être nous n'avons eu, soit individuellement, soit comme congrégation, un plus pressant besoin de nous réfugier, de nous abriter sous la garde de l'humilité, de la modestie, de la simplicité; d'être et de paraître en tout et partout ce que nous dit le beau nom que nous portons: de bons, de vrais Petits Frères de Marie.

 Petits devant Dieu, à l'exemple de Notre-Seigneur qui a été exaucé, dit saint Paul, à cause de son humilité, à cause du profond respect qu'il portait à la Divinité : Durant les jours de sa chair, ayant offert à celui qui pouvait le sauver de la mort ses prières et ses supplications, accompagnées de grands cris et de larmes, il a été exaucé à cause de son humble respect. (Hébr., V, 7.)

 Petits devant nos Supérieurs, à l'exemple de tous les vrais Religieux qui ne voient en eux que les Représentants de Dieu, les Dépositaires de son autorité, Jésus-Christ même qui se personnifie tellement dans les Supérieurs, que les toucher, dit le prophète Zacharie, c'est le toucher lui-même à la prunelle de l’œil. (Zach., II, 8.)

 Petits devant les Autorités, le Clergé et les Magistrats les aimant, les respectant, les honorant comme le veut la Règle, et ne nous permettant jamais rien, ni en paroles, ni en actions, ni par écrit, qui s'écarte du respect, de la soumission et de l'attachement que nous leur devons.

 Petits devant nos Confrère,, les traitant toujours avec respect, les supportant en toute patience et douceur, nous estimant heureux de leur rendre service en toute occasion, à l'exemple du divin Maître qui nous dit lui-même qu'il n'est pas venu pour être servi, mais pour servir.

   Petits, même devant les enfants, voyant en eux les membres de Jésus-Christ, les temples du Saint-Esprit, les enfants de Dieu et  les héritiers du Ciel ; et, dans ces vues de foi, les honorant, les ménageant, nous dévouant à leur instruction et à leur éducation, ne plaignant ni peines ni soins pour les conserver et les former.

 Petits devant nous-mêmes, dans nos pensées, dans nos désirs, dans nos paroles, dans nos actions, dans toute notre conduite ; fuyant la vanité, la vaine gloire, les honneurs, les applaudissements ; aimant à être ignorés, comptés pour rien, nous humiliant beaucoup, afin que le bon Dieu ne nous humilie pas, car quiconque s'élève sera abaissé, dit Jésus-Christ lui-même. (Luc, XVIII, 14.)

 C'est sur ces divers points que devront porter nos examens, nos réflexions et nos résolutions. Je ne fais que les indiquer aujourd'hui, me réservant de les développer plus tard ; mais vous les comprendrez assez pour voir en quoi vous avez manqué par le passé, sur quoi vous avez à vous réformer pour l'avenir ; de quelle manière vous devez diriger vos méditations, vos oraisons, vos retours sur vous-mêmes et tous les exercices de la Retraite, afin d'en retirer le fruit précieux de la sainte humilité.

 Ce qui nous reste à faire maintenant, c'est de nous adresser à Marie, notre bonne Mère, à Marie, le modèle accompli de la plus parfaite humilité, à Marie, le canal des grâces de Dieu et de tous les dons excellents qui descendent d'en haut du Père des lumières, à Marie, notre première Supérieure, notre Avocate, notre grande Patronne et Protectrice, à Marie, la ressource ordinaire de l'Institut et de tous ses Membres, afin qu'elle nous obtienne la grâce insigne, le don précieux d'une vraie humilité ; afin qu'elle nous aide à faire les efforts nécessaires pour acquérir cette vertu, nous y former, nous y perfectionner. Nous ferons, d'une manière particulière, à cette intention, tous les exercices et toutes les pratiques de notre troisième mois de Marie, le mois d'août. La fin première de ces exercices et de ces pratiques est la bonne mort ; mais le moyen indispensable d'arriver à la bonne mort, de mourir en prédestinés comme Marie, c'est de nous abaisser, de nous humilier comme elle. Marie n'est la plus élevée de toutes les pures créatures dans le Ciel que parce qu'elle a été la plus humble, la plus petite de toutes à ses yeux sur la terre. En vérité, je vous le dis, si vous ne devenez semblables à de petits enfants, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux.

 A ces fins, pour obtenir une bonne mort, pour obtenir la vraie humilité qui en est le gage certain, pour recommander à Dieu toutes nos Retraites et tous les besoins spirituels et temporels de la Congrégation, et nous disposer plus prochainement à notre Fête patronale, la grande Fête de l’Assomption, nous dirons, pendant les neuf jours qui précèdent, à la suite de l’Angélus, le ma­tin, à midi, et le soir, un Ave Maria et les deux invocations : Jésus doux et humble de cœur, rendez mon cœur semblable au vôtre !… Doux cœur de Marie, soyez mon salut  !

 Pendant l'Octave, on récitera le Veni Creator et un Ave Maria, à la prière du soir, à la place du Veni Sancte.

 La présente Circulaire sera lue en Communauté, à l'heure ordinaire de la lecture spirituelle.

 Je vous renouvelle, dans les Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie, l'assurance des sentiments pleins de respect et de dévouement avec lesquels je suis,

Mes Très Chers Frères,

Votre très humble et très affectionné Frère et serviteur,

         F. Louis-Marie.

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    P. S. – Je viens d'apprendre qu'un escroc, se donnant comme le neveu d'un Frère Assistant, parcourt nos mai­sons du Midi, dans le but de se faire héberger d'abord, puis de se faire prêter de l'argent par les Frères Directeurs. Déjà, il a réussi à se faire recevoir dans plusieurs Maisons, et à voler dans deux, une somme de cent trente francs.

Il y a une douzaine d'années qu'une Maison du Dau­phiné fut dévalisée de la même manière, par un misérable qui disait se rendre comme Postulant, à l'Hermitage, et qui prétendait être suivi par le Frère Visiteur, qui devait le prendre dans ce Poste pour le conduire aux Supérieurs.                

La tactique de ces escrocs est de se faire donner les noms des premiers Supérieurs et des principaux Directeurs, d'en parler comme en étant parfaitement connus ; de se faire raconter tout ce qui se passe dans la Congrégation, et de le répéter ensuite dans les Postes, pour tromper les Frères par ce moyen.        

Déjà, plus tôt, un autre individu du même genre avait réussi à enlever 400 francs dans un autre Etablissement.

Je présume que vous trouverez tous, comme moi, que la leçon est payée assez cher pour que dorénavant, on s'en tienne à la Règle de ne recevoir qu'avec Obédience ; et de ne pas admettre des étrangers, à moins que ce ne soient les proches parents d'un des Frères de l'Etablissement.

Tenez-vous également en garde contre les marchands ambulants, quelque bonnes conditions apparentes qu'ils vous fassent. Ceux qui s'écartent de la Règle sur ce point,sont presque toujours trompés ou sur le prix ou sur la qualité, et souvent sur les deux.

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